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Vingt jeunes peintres de tradition française

L'exposition « Vingt jeunes peintres de tradition française Â», qui a lieu en 1941 Ă  Paris, est la première manifestation de la peinture d'avant-garde française qui rĂ©siste ouvertement Ă  l'idĂ©ologie nazie de l'« art dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© Â». Elle rassemble la plupart des artistes qui, moins d'une dizaine d'annĂ©es plus tard, dĂ©velopperont la peinture non figurative.

Vingt jeunes peintres de tradition française
Type Peinture
Pays Drapeau de la France France
Localisation Paris
Date de la première édition 1941
Date d'ouverture

Les circonstances

L'exposition, dont le vernissage a lieu onze mois après le début de l'Occupation allemande, le samedi à 15 heures à la galerie Braun (18 rue Louis-le-Grand) à Paris, réunit des peintures de Jean Bazaine, André Beaudin, Paul Berçot, Jean Bertholle, Francisco Bores, Lucien Coutaud, François Desnoyer, Léon Gischia, Charles Lapicque, Jean Lasne, Lucien Lautrec, Raymond Legueult, Jean Le Moal, Alfred Manessier, André Marchand, Édouard Pignon, Suzanne Roger, Gustave Singier, Pierre Tal Coat et Charles Walch. Le nom de Maurice Estève figure également au catalogue, mais aucune de ses toiles n'est présentée.

L'exposition a été préparée par Bazaine et par l'éditeur André Lejard (1899-1974). La plupart des peintres se connaissent depuis le début des années 1930 (notamment Bazaine, Bertholle, Le Moal et Manessier). Singier est un ami de Walch qui a dû contacter la galerie Braun et, faisant partie du comité du Salon d'automne, inviter Legueult et Marchand.

Bon nombre des « Vingt jeunes peintres » participeront, auprès de Gaston Diehl, à la création du Salon de Mai en 1943.

Citations

TĂ©moignages

  • « Je proposai le titre de "Vingt jeunes peintres de tradition française". C'Ă©tait Ă  la fois une vĂ©ritĂ© et une supercherie. Qu'on se souvienne : Ă  cette Ă©poque les nazis poursuivaient de leur fureur destructrice toutes les formes d'expression artistique se rattachant Ă  ce qu'ils dĂ©nommaient l'"art dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©" en quoi s'affirmaient prĂ©cisĂ©ment la libertĂ© et la joie de la crĂ©ation. Il importait donc de donner le change. »
André Lejart, Vingt jeunes peintres de tradition française, 1941-1967, galerie Georges Bongers, Paris, mars-
  • « "Peintres de tradition française", c'Ă©tait Ă  double tranchant. Il y avait le mot "française" d'une part, ce qui voulait dire que la tradition française existait et en mĂŞme temps le mot "tradition" servait Ă  ce que les Allemands ne se mĂ©fient pas trop. (…) Je me souviens assez bien du vernissage : sont arrivĂ©s deux officiers allemands qui se sont avancĂ©s jusqu'au milieu de la galerie. Ils ont jetĂ© un coup d'Ĺ“il, se sont regardĂ©s, ont tournĂ© les talons. C'est tout. C'Ă©tait l'Ă©poque oĂą les Allemands voulaient encore ĂŞtre gentils. »
Jean Bazaine, entretien, dans Histoire de l'art, 1940-1944 de Laurence Bertrand Dorléac, Publications de la Sorbonne, Paris, 1986, pp. 351-352
  • « Tous ces peintres, d'âge et de tendance très divers, se trouvèrent d'accord sur la rĂ©sistance nĂ©cessaire de la peinture. Ce qui leur fit accepter ce titre gĂ©nĂ©ral et lĂ©nifiant, destinĂ© Ă  rassurer l'occupant. (…) Il ne s'agissait de rien d'autre – de rien moins – que de permettre, par surprise, une exposition "judĂ©o-marxiste", sous toutes ses formes, Ă  une Ă©poque oĂą les galeries n'osaient montrer que de l'art d'obĂ©dience nazie. Après refus d'un certain nombre de galeries, la galerie Braun accepta le risque de l'exposition, qui fut accueillie par des torrents d'injures d'une presse bien dressĂ©e. »
Jean Bazaine [1998], cité dans Jean Le Moal de Michel-Georges Bernard, Ides et Calendes, Neuchâtel, 2001, pp. 66-67
  • « Cette expression avait Ă©tĂ© choisie par Bazaine. Elle ne m'a pas choquĂ©. Étant donnĂ© l'atmosphère durant l'Occupation, il s'agissait d'un titre un peu provocant et je l'ai pris ainsi. On pouvait le prendre autrement ; la tradition française, c'Ă©tait aussi les rameaux qui, se rattachant par CĂ©zanne Ă  toute l'Ă©cole française, passaient par le fauvisme et le cubisme. »
Alfred Manessier, entretien avec Jean-Paul Ameline et Nathalie Leleu, dans Une histoire parallèle, 1960-1990, Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, Paris, 1993, p. 53
  • « La richesse mĂŞme de l'École de Paris, c'Ă©tait l'accueil d'Ă©trangers, l'apport international qui avait existĂ© bien avant nous. La tradition française, pour nous, c'Ă©tait cet accueil. […] Ce titre voulait signifier que pour nous, la tradition française, c'Ă©tait cette esthĂ©tique rejetĂ©e par le nazisme. Nous Ă©tions très conscients que nous luttions contre ces interdits qui sĂ©vissaient en Allemagne. Nous avions conscience de faire partie d'une rĂ©sistance intellectuelle. »
Alfred Manessier, entretien, dans Histoire de l'art, Paris, 1940-1944 de Laurence Bertrand Dorléac, Publications de la Sorbonne, Paris, 1986, p. 397

Jugement

  • « Cette manifestation entrera dans l'histoire, attestant la persistance de l'art contemporain français, et prĂ©sentant les Ĺ“uvres (souvent d'avant-guerre) de ces "jeunes" peintres âgĂ©s de trente Ă  quarante-cinq ans, qui vont durant ces quatre annĂ©es jusqu'Ă  la LibĂ©ration, mais Ă©galement un peu après, composer cette "avant-garde" se rĂ©clamant tout Ă  la fois d'une "tradition française" et d'une certaine conception de la modernitĂ©. »
Laurence Bertrand Dorléac dans Histoire de l'art, Paris, 1940-1944, Publications de la Sorbonne, Paris, 1986, p. 167-168

Sources

  • Laurence Bertrand DorlĂ©ac, Histoire de l'art, Paris 1940-1944, Ordre national, Traditions et ModernitĂ©s, prĂ©face de Michel Winock, Publications de la Sorbonne, Paris, 1986 (ISBN 2859441220)
  • Jean Guichard-Meili, 25 ans après, 20 peintres de tradition française, dans La galerie des arts, n° 45, , p. 26-31

Articles connexes

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