Vente multiniveau
La vente multiniveau ou, selon qui l'emploie, marketing relationnel, marketing Ă paliers multiples, vente en rĂ©seau par cooptation, vente par rĂ©seau cooptĂ© (VRC), marketing de rĂ©seau, etc., en anglais multi-level marketing ou MLM, est une structure du rĂ©seau de vente dans laquelle les revendeurs (ou distributeurs) peuvent parrainer de nouveaux vendeurs, et ĂȘtre alors en partie rĂ©munĂ©rĂ©s par une commission Ă©valuĂ©e en pourcentage sur les ventes des recrues. La vente multiniveau Ă©limine les coĂ»ts liĂ©s au recrutement et Ă la formation mais aussi les dĂ©penses de publicitĂ© en lui substituant le bouche Ă oreille.
Historique
Entre le milieu et la fin du XIXe siÚcle, David H. McConnell serait le tout premier leader MLM au monde, initiateur de cette nouvelle forme de distribution dans le marketing, du bouche à oreille. La recommandation par les femmes au foyer aurait joué un rÎle clé dans la croissance de California Perfume Company, renommée et encore présent aujourd'hui : Avon Products[1].
La vente multiniveau a Ă©tĂ© inventĂ©e aux Ătats-Unis en 1940 et popularisĂ©e dans les annĂ©es 1950 par la sociĂ©tĂ© Tupperware, qui continue Ă la pratiquer. En 2018, lâentreprise rĂ©vĂšle des statistiques montrant que 94 % des reprĂ©sentants actifs au Canada restent au niveau le plus bas de la pyramide, avec des revenus bruts moyens de 653 $ en 2017[2].
Le multiniveau s'est dĂ©veloppĂ© dans les annĂ©es 1960 aux Ătats-Unis au sein du mouvement pentecĂŽtiste, et il s'est rĂ©pandu Ă©galement par l'entremise de rĂ©seaux de santĂ© et de bien-ĂȘtre, et la mouvance New Age[3].
En 2019, la vente multiniveau est populaire sur les réseaux sociaux, principalement Facebook[4].
LĂ©gislation par pays
Chine
En Chine, la vente multiniveau est illĂ©gale depuis 2005[5]. En 2017, cependant, plusieurs sociĂ©tĂ©s continuaient Ă opĂ©rer en vente multiniveau sur le marchĂ© chinois[5]. Cependant, l'activitĂ© reste lĂ©gal Ă Hong-Kong et Ă TaĂŻwan selon le mĂȘme article. Enfin la vente directe Ă domicile reste lĂ©gale en Chine.
Ătats-Unis
Le MLM est lĂ©gal aux Ătats-Unis.
Dans ce pays, le MLM fait cependant l'objet de mise en gardes d'associations de consommateur, notamment de la Commission fĂ©dĂ©rale du commerce aux Ătats-Unis. Cette derniĂšre pointe le fait que de nombreuses entreprises qui se font passer pour du MLM sont en rĂ©alitĂ© des arnaques pyramidales. La commission indique que la plupart des personnes travaillant comme VDI en MLM, mĂȘme lĂ©gales, gagnent peu ou pas d'argent, voir perdent leur investissement[6].
France
En France, les réseaux de vente constitués par recrutement en chaßne d'adhérents ou d'affiliés sont encadrés par le code de la consommation, afin notamment d'interdire les techniques employées dans la vente pyramidale, dite « boule de neige »[7]. La rémunération doit venir de la vente des produits et non de l'inscription de nouveaux distributeurs. Ainsi, sont interdits[7] :
- La vente pratiquée par tout procédé consistant à donner gratuitement ou à faire des réductions sur des biens ou des services à la condition de collecter des adhésions ou des inscriptions
- Le fait de rĂ©munĂ©rer les adhĂ©rents en fonction du nombre de personnes qu'ils ont recrutĂ©es ou inscrites, dans le cas oĂč l'adhĂ©sion ou l'inscription nĂ©cessite le versement d'une contrepartie quelconque.
- Le fait d'obtenir d'un adhĂ©rent le versement d'une somme, et ce pour quelque raison que ce soit, lorsque ce versement donne des avantages ou contribue Ă la rĂ©munĂ©ration d'un ou de plusieurs adhĂ©rents du rĂ©seau (en pratique, il s'agit du « parrain » (ou « sponsor »), ainsi que le parrain Ă©ventuel de celui-ci, et le parrain Ă©ventuel de ce dernier, etc., le nombre de ces « niveaux » oĂč les parrains sont rĂ©munĂ©rĂ©s pouvant ĂȘtre limitĂ©)
- « Le fait d'obtenir d'un adhĂ©rent l'acquisition d'un stock de marchandises destinĂ©es Ă la revente sans garantie de reprise du stock aux conditions de l'achat, dĂ©duction Ă©ventuellement faite d'une somme n'excĂ©dant pas 10 % du prix correspondant ». Cette garantie de reprise pouvant « ĂȘtre limitĂ©e Ă une pĂ©riode d'un an aprĂšs l'achat ».
Les vendeurs peuvent obtenir un statut de vendeur à domicile indépendant salarié[8] ou un statut d'indépendant[8] et depuis 2009 peuvent opter pour le statut d'auto-entrepreneur[9] - [8] - [10].
Dans le cas oĂč l'activitĂ© est occasionnelle et dans la limite d'un certain plafond de revenus, ils peuvent ĂȘtre dĂ©clarĂ©s salariĂ©s[8], ou ils peuvent avoir le statut de vendeur Ă domicile indĂ©pendant (VDI), dont les cotisations sociales sont versĂ©es par la sociĂ©tĂ© mĂšre Ă hauteur de 67 % (les 33 % restant Ă©tant Ă la charge du VDI)[9] - [8]. Dans les deux cas, le vendeur dĂ©pend alors du rĂ©gime gĂ©nĂ©ral de la sĂ©curitĂ© sociale. L'activitĂ© du vendeur peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme relevant de la micro-entreprise quand il a le statut d'indĂ©pendant et que le chiffre d'affaires est infĂ©rieur au plafond fiscal. Cette activitĂ© doit cependant ĂȘtre dĂ©clarĂ©e au RCS[10]. Au-delĂ de ces plafonds, le VDI a l'obligation de basculer en entreprise[8] ou de devenir salariĂ© de la maison mĂšre.
L'un des statuts possibles de VDI est un statut d'assimilé salarié[8] ; ce statut ne convient pas aux vendeurs ayant un produit ou service avec un prix de vente élevé, comme dans l'immobilier, par exemple, du fait de la limite du chiffre d'affaires plus faible encore que pour le statut d'auto-entrepreneur. En effet, ce n'est pas la marge réalisée (l'argent gagné) qui est prise en compte dans les calculs, mais bien le chiffre d'affaires.
Le vendeur doit émettre un bon de commande avec ses coordonnées et celles de son fournisseur. De plus, il doit respecter les rÚgles déontologiques et légales associées à la vente à domicile, comme le délai de réflexion de quatorze jours de ses clients, l'absence de transaction financiÚre pendant 7 jours, etc.[11].
En 1966, les plus grandes entreprises françaises de vente directe ont crĂ©ent ensemble l'ANSVD, lâAssociation nationale pour la Vente et le Service Ă domicile, devenu plus tard la FĂ©dĂ©ration de la Vente directe (FVD), reprĂ©sentant officiellement le mĂ©tier et les VDI[12]. La FVD et le gouvernement ont signĂ© deux accords, le afin de valoriser la profession et dans le but de s'engager rĂ©ciproquement Ă la crĂ©ation de 100 000 emplois en 3 ans et le , la signature dâun accord-cadre de coopĂ©ration[13].
Italie
Le MLM est légal en Italie et de nombreuses entreprises y prospÚrent.
Cas de l'entreprise Vemma : L'agence italienne AGCM (it), pour le droit de la consommation, a imposĂ© une amende de 100 000 euros Ă Vemma Italia (filiale italienne de Vemma). L'AGCM a constatĂ© que Vemma agissait comme un systĂšme pyramidal, en encourageant le recrutement d'autres vendeurs comme principal moyen de profit, plutĂŽt que la vente de produits[14]. Vemma a affirmĂ© ne pas ĂȘtre en violation de la loi et qu'elle avait fait un certain nombre de changements en rĂ©ponse aux prĂ©occupations du gouvernement[15]. Une analyse par l'association indĂ©pendante de protection des consommateurs Truth in Advertising (en) a dĂ©terminĂ© que le nouveau plan de rĂ©munĂ©ration de Vemma ne prĂ©sentait pas de diffĂ©rence importante par rapport Ă celui que les rĂ©gulateurs italiens avaient qualifiĂ© de systĂšme pyramidal[16].
Revenus du marketing de réseau
En 2011, une Ă©tude publiĂ©e par lâexpert Jon M. Taylor rĂ©vĂšle quâ« approximativement 99,6 % de tous les participants [aux MLM] perdent de lâargent aprĂšs avoir soustrait toutes leurs dĂ©penses. En fait, avec une interprĂ©tation plus stricte des donnĂ©es, le taux de perte est plus proche de 99,9 %. Ces dĂ©penses incluent les achats minimaux ainsi que les âachats conseillĂ©sâ (nĂ©cessaires pour recevoir des commissions ou des bonus) dâarticles ou de services de lâentreprise »[17].
Condamnations, mises en garde et critiques
La société Herbalife, qui présentait son activité comme de la vente multiniveau, a été condamnée à de multiples reprises pour vente pyramidale[18] - [19]. Les accusations portaient notamment sur le fait que les rémunérations étaient réalisées sur le recrutement de nouveaux distributeurs et non sur la vente de produits.
En 2007, le rapport au Premier ministre français de la Miviludes met en garde contre « les risques inhĂ©rents aux rĂ©seaux de vente multi-niveaux » et une potentielle « dĂ©rive sectaire » des pratiques de ces rĂ©seaux[20], et liste « les Ă©tapes que lâanimateur, Ă la fois recruteur et dĂ©lĂ©guĂ© local ou rĂ©gional du rĂ©seau va ĂȘtre conduit Ă dĂ©velopper devant ses consommateurs futurs distributeurs »[20] dans les sociĂ©tĂ©s ayant des pratiques Ă risque. En 2012, cette mĂȘme Miviludes a Ă©tabli un guide pour donner « aussi bien aux professionnels de la santĂ© qu'aux particuliers »[21] les dĂ©marches Ă suivre en cas de soupçon de « dĂ©rives sectaires » quand « la proposition de vente se fait dans le cadre dâun rĂ©seau de vente multi-niveaux »[22].
Dans un article publié dans le Western Journal of Communication en 2004, Walter J. Carl écrit que « la vente MLM a été décrite par certains comme étant une secte (Butterfield, 1985), de la vente pyramidale (Fitzpatrick & Reynolds, 1997), ou des organisations gangrénées par des comportements mensongers, trompeurs et contraires à toute forme d'éthique (Carter, 1999), tels que l'utilisation de discours religieux pour promouvoir l'entreprise (Höpfl & Maddrell, 1996), et l'exploitation du réseau d'amis à des fins lucratives (Fitzpatrick & Reynolds, 1997)[23] ». En Chine, des bénévoles qui travaillaient pour sauver des personnes enrÎlées dans des réseaux MLM ont été agressés physiquement[24].
Les MLM ont Ă©galement Ă©tĂ© critiquĂ©es pour leur incapacitĂ© Ă remplir leurs promesses. Pour une majoritĂ© des participants, la vente MLM ne fonctionnerait pas en raison de conflits avec les normes culturelles occidentales[25]. Des Ă©tudes avancent des taux de rĂ©ussite concernant le seuil de rentabilitĂ© trĂšs infĂ©rieurs aux autres types d'entreprises[26] - [27] : « la grande majoritĂ© des MLM recrute des MLM, dans lesquelles les participants doivent recruter agressivement afin de gagner de l'argent. Selon les informations disponibles donnĂ©es par les entreprises elles-mĂȘmes, le taux de perte pour le recrutement MLM est d'environ 99,9 % ; c'est-Ă -dire que 99,9 % des participants perdent de l'argent quand on soustrait toutes les dĂ©penses qu'ils ont faites pour travailler, y compris ce qui concerne les achats provenant de la sociĂ©tĂ©[26] ». Cela s'explique en partie parce qu'en encourageant les recrues à « recruter des gens qui finalement seront en concurrence avec [eux][28] » on produit une « saturation du marchĂ©[29] ».
En raison de l'encouragement des recrues à recruter davantage de concurrents, l'universitaire Robert Todd Carroll affirme que les MLM modernes ne sont, qu'au mieux, des systÚmes pyramidaux légalisés[28].
En , des enquĂȘtes sont ouvertes par des procureurs aux Ătats-Unis concernant des sociĂ©tĂ©s de MLM en raison du fait que les vendeurs sont principalement payĂ©s pour faire du recrutement et que les recrues les plus rĂ©centes ne peuvent rien gagner en comparaison des recrues plus anciennes[30].
Le critique industriel Robert L. FitzPatrick (en) a parlé en 2013 du marketing multi-niveaux comme étant « la bulle Main Street » (par opposition à Wall Street) qui finira par éclater[31].
En 2021, plusieurs affaires liées à des MLM dans le domaine de la cryptomonnaie arnaquent à hauteur de millions d'euros[32] - [33]. Dans son dossier sur la crypto-monnaie, le journal du Geek estime que « le mélange MLM-Crypto donne rarement des projets fiables dignes de confiance »[34].
En 2022, les rĂ©gulateurs des marchĂ©s ouvrent une enquĂȘte sur la crypto-monnaie fondĂ©e par l'homme d'affaires Do Kwon aprĂšs les pertes financiĂšres catastrophiques, mettant en cause l'influence des MLM dans cette affaire[35].
Notes et références
Notes
Références
- Gilles Simon, « Marketing de réseau : les origines » [web], sur gilles-simon.com, (consulté le )
- (en) « Tupperware Income Disclosure Summary » [PDF], sur Tupperware.com (consulté le )
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