AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Varlam Tcherkezichvili

Le prince Varlam Tcherkezichvili (en gĂ©orgien : ვარლამ ჩერჄეზილვილი) est un activiste anarchiste et journaliste gĂ©orgien de nationalitĂ© russe, nĂ© Ă  Tbilissi le , et mort Ă  Londres, .

Varlam Cherkezishvili
Biographie
Naissance

Tokhliauri (d) ou Tbilissi
DĂ©cĂšs
(Ă  78 ans)
Londres
Nom dans la langue maternelle
ვარლამ ჩერჄეზილვილი
Nationalité
Activités
Conjoint
Frida Rupertus (d) (Ă  partir de )
Autres informations
Parti politique
Idéologie

Il est Ă©galement connu sous le nom de Warlaam Tcherkesoff, Varlaam Čerkezov ou Varlam Cherkezov selon l'acception russe.

Il est d'abord impliqué dans le mouvement communiste libertaire international, puis le mouvement de libération nationale de la Géorgie.

Biographie

Il naßt dans la famille du prince géorgien Aslan Tcherkezichvili à Tbilissi, dans l'Empire russe.

Il entre Ă  dix ans Ă  l’École des Cadets de Moscou. Il abandonne Ă  seize ans la carriĂšre d’officier et suit les cours de l’AcadĂ©mie agraire de PĂ©trovsk, Ă  quelques kilomĂštres de Moscou[1].

C'est Ă  cette Ă©poque, qu'il frĂ©quente un groupe d'Ă©tudiants rĂ©volutionnaires et socialistes dont Dimitri Karakosov. Le , quand ce dernier tente d'assassiner le tsar Alexandre II de Russie[2], Tcherkezichvili est arrĂȘtĂ©, condamnĂ© et emprisonnĂ© Ă  la forteresse Pierre-et-Paul pendant huit mois de 1866 Ă  1867[3].

En 1867, il est à Petrograd. En 1868, il fonde un restaurant coopératif qui attire les étudiants et permet de réorganiser un petit groupe de militants. Il croise pour la premiÚre fois Serge Netchaïev[4].

En , il rejoint Moscou et continue de frĂ©quenter les milieux rĂ©volutionnaires oĂč il retrouve Serge NetchaĂŻev qu'il prĂ©sente Ă  Pierre Ouspenski[5] - [6], Ivan Pryzhov (ru), Kouznelsev, Ripman, le noyau des activistes Ă©prouvĂ©s de Moscou et de l’AcadĂ©mie agraire de Petrovsk oĂč Tcherkesov a gardĂ© beaucoup de relations et qui devient l’asile et le foyer de la nouvelle organisation[4].

Il est séduit par les idées de Michel Bakounine développées dans le journal Narodnoie delo (La cause du peuple), publié en [7] - [1].

L'affaire NetchaĂŻev

Selon l'historien Max Nettlau, « NetchaĂŻev pouvait compter sur le dĂ©vouement de toute cette jeunesse, mais au lieu de s’acheminer peu Ă  peu de la fiction Ă  une rĂ©alitĂ© d’abord modeste, puis grandissante, son autoritarisme extrĂȘme, effrĂ©nĂ©, lui fit employer des moyens dĂ©testables, exigeant continuellement des devoirs imposĂ©s au nom d’une dictature invisible, sur l’existence de laquelle, en dehors de sa propre personne, des doutes commençaient Ă  s’élever. Alors, pour affermir son autoritĂ©, il assassina simplement le seul homme, l’étudiant Ivanov, qui lui avait jetĂ© un dĂ©fi ; et cela avec prĂ©mĂ©ditation et de façon Ă  impliquer ses principaux camarades dans la prĂ©paration et les dĂ©tails de l’assassinat. Puis il partit, et bientĂŽt, Ă  la suite de la dĂ©couverte du cadavre, les autres furent arrĂȘtĂ©s. »[4]

Tcherkesov se démÚne pour trouver des caches pour ses camarades et avertit les compagnons de Petrograd.

Il est Ă  son tour arrĂȘtĂ©, le , et comparait dans le procĂšs (juillet-) contre 84 des 180 personnes impliquĂ©es dans cette affaire. Pendant le procĂšs, il dĂ©nonce la personnalitĂ© de Netchaiev et, pour la premiĂšre fois dans l’histoire de la Russie, il affirme que le pays est en ruine, que la paysannerie souffre de la pĂ©nurie, et que le gouvernement impĂ©rial est responsable de cet Ă©tat de fait[1].

Il est condamnĂ©, le , Ă  la dĂ©portation Ă  vie dans le gouvernement de Tomsk (SibĂ©rie occidentale) avec internement d’un an et demi dans la mĂȘme localitĂ© et dĂ©fense de sortir du Gouvernement pendant 5 ans. Il est effectivement dĂ©portĂ© en SibĂ©rie le , aprĂšs quatre ans de prison Ă  la forteresse Pierre-et-Paul[3].

Exil

En , il s’évade de SibĂ©rie et gagne Londres, puis la Suisse, en . Avec d’autres rĂ©volutionnaires Ă©migrĂ©s, il organise une bibliothĂšque, une caisse de secours mutuels et fonde le journal russe Obchtchina (Commune) qui paraĂźt en et oĂč il tient une chronique qui traite notamment de la guerre des Balkans[1]. Il collabore au Travailleur d’ÉlisĂ©e Reclus et participe Ă  la fondation du journal Le RĂ©voltĂ© de Pierre Kropotkine, le [7].

En 1879-1880, il vit Ă  Paris oĂč il frĂ©quente le « groupe du PanthĂ©on », cercle surtout constituĂ© par des Ă©crivains (dont le journaliste Émile Gautier), ainsi que des Ă©tudiants, oĂč se rencontrent blanquistes et guesdistes, mais aussi des anarchistes italiens qui deviendront des figures de premier plan, Errico Malatesta et Carlo Cafiero[1] - [8].

De cette Ă©poque, Jean Grave le dĂ©crit comme « DouĂ© d’une voix douce, presque chantante, il aidait beaucoup dans les discussions. De sa principautĂ©, il ne lui restait que ses deux bras pour gagner sa vie, mais il n’avait aucun mĂ©tier »[8].

Il est expulsĂ© de France le , quelques jours aprĂšs l'assassinat du tsar Alexandre II par le groupe des Pervomartovtsi, dont Sofia PerovskaĂŻa. Il revient Ă  GenĂšve oĂč, selon la police française, il a pour pseudonyme Brutus[3].

Le patriote géorgien

De 1883 Ă  1892, il vit en Asie Mineure, en Bulgarie, en Roumanie, quelque temps mĂȘme en GĂ©orgie.

Il reste prĂ©occupĂ© par le sort de la GĂ©orgie et, muni d’un passeport Ă©tranger, il visite clandestinement son pays en 1883, 1885, 1886 et 1896, parcourant tout le territoire sans jamais ĂȘtre arrĂȘtĂ© par la police, qui pourtant possĂšde sa photo[1].

Il gagne alors sa vie en Ă©crivant pour The Times, une sĂ©rie d’articles, en 1887, sur les traitĂ©s et les droits de la GĂ©orgie[1].

À l’étĂ© de 1892, il s’établit dĂ©finitivement Ă  Londres. Avec Ă©pouse Frida, une Hollandaise, qui est la belle-sƓur de Christiaan Cornelissen, il participe activement au groupe Freedom Press[7].

Selon Max Nettlau, c'est à cette époque que, dans le milieu libertaire, il est qualifié d' « ambassadeur des patriotes géorgiens », cause qu'il expose sans relùche dans différentes publications[7] - [3].

AprĂšs la rĂ©volution russe de 1905, il retourne Ă  Tbilissi. Il y organise une UniversitĂ© populaire d’esprit fĂ©dĂ©raliste avec des confĂ©rences et des classes en russe, gĂ©orgien, armĂ©nien et tartare[1].

Selon Max Nettlau, l’administration de l'UniversitĂ© populaire de Tbilissi est entiĂšrement entre les mains des ouvriers et chaque nationalitĂ© organise sa section autonome, chaque mois les sections se rĂ©unissent pour discuter les questions gĂ©nĂ©rales. L’idĂ©e de Tcherkesov est de rĂ©tablir, en pratique, la solidaritĂ© parmi les nationalitĂ©s qui, quelques mois auparavant, grĂące aux instigations du gouvernement russe, Ă©tait rudement Ă©branlĂ©e par les massacres armĂ©niens-tartares[9].

En 1907, il présente une « Pétition du Peuple géorgien » à la Conférence internationale de la Paix de La Haye, ce qui lui vaut un nouvel exil[9]. Il vit à Londres et à Paris.

En 1907, avec Kropotkine, Rudolf Rocker et Alexandre Schapiro, il participe Ă  la fondation de l'Anarchist Red Cross, organisation de soutien aux prisonniers et ancĂȘtre de l'Anarchist Black Cross[10].

En 1914, lors de la PremiÚre Guerre mondiale, il rallie les positions de Kropotkine de « défense de la civilisation contre le militarisme allemand » et signe le Manifeste des Seize.

Il se rend à Petrograd en 1917, et, aprÚs l'indépendance de la Géorgie en , il obtient un siÚge à l'assemblée constituante du nouveau pays.

AprĂšs l'annexion soviĂ©tique, voyant qu’aucune opinion opposĂ©e Ă  la dictature bolchevique n'est possible en GĂ©orgie et que tout autre travail d’organisation sociale lui est interdit, il reprend le chemin de l'exil en [9].

Il est actif jusqu’à la fin de sa vie et prend la parole en public, pour la derniĂšre fois, Ă  Londres le , au cours d’un meeting, en faveur des rĂ©volutionnaires emprisonnĂ©s en Russie. Quelques semaines avant sa mort, il traduit une brochure publiĂ©e par des GĂ©orgiens en protestation contre le rĂ©gime bolchevique[9].

Pensée politique

Varlam Tcherkezichvili publie plusieurs ouvrages, notamment Pages d’histoire socialiste : doctrines et actes de la social-dĂ©mocratie (1896) et PrĂ©curseurs de l’Internationale (1899), dans lesquels il se propose de dĂ©montrer que la thĂ©orie socialiste n’est pas l’Ɠuvre de Marx et d’Engels seuls, mais une crĂ©ation collective « par des hommes qui puisaient aux sources vivantes de la pensĂ©e libre de tous les siĂšcles et qui furent fiers d’admettre cette solidaritĂ© avec la pensĂ©e commune de l’humanitĂ© et ne rĂȘvaient pas Ă  se crĂ©er un monopole d’idĂ©es »[9]. Il s'oppose Ă  certains points du marxisme, notamment Ă  la vision qu'a Marx de la concentration du capital en essayant de montrer qu'il n'est pas seulement le fait d'une Ă©lite rĂ©duite mais aussi de la petite bourgeoisie. Pour lui, le capitalisme ne profite pas seulement aux grands capitalistes, les petits bourgeois en profitent et en sont complices[11].

En affirmant, comme il le fait dans La PaternitĂ© du Manifeste Communiste, que le Manifeste du Parti Communiste de Karl Marx et Friedrich Engels est un plagiat du livre de Victor ConsidĂ©rant Principes du socialisme, Manifeste de la dĂ©mocratie au 19eme siĂšcle[12], il s'attire les foudres de l'ancien secrĂ©taire de Engels, Karl Kautsky, qui publie en 1906 un article dans Les temps nouveaux[13], un journal de la social dĂ©mocratie allemande, oĂč celui-ci Ă©tudie la vĂ©racitĂ© du plagiat. Il conclut que les idĂ©es, notamment sur la tendances Ă  la paupĂ©risation dans le capitalisme, ou l'analyse historique se basant sur diffĂ©rents stades historiques (Esclavagisme, FĂ©odalitĂ© et Capitalisme), sont en fait largement rĂ©pandus dans le socialisme français, en retrouvant, par exemple, les mĂȘmes chez Louis Blanc. Elles ne sont donc pas originales, certes, mais les solutions politiques considĂ©rĂ©es, chez Marx et Engels l'intensification de la lutte des classes, chez ConsidĂ©rant la crĂ©ation d'une nouvelle sociĂ©tĂ© oĂč on pourrait "faire travailler les machines pour les capitalistes et pour le peuple et non plus pour les capitalistes et contre le peuple", sont radicalement opposĂ©es. Et l'analyse marxienne apporte alors une conception bien nouvelle.

Les positions de Tcherkesoff entraßnent un autre géorgien, le jeune Joseph Staline, a polémiquer avec lui et à écrire sa premiÚre brochure, Anarchisme ou socialisme ?, en 1907[1]. Dans celle-ci, Staline reprend la critique de Kautsky sur le caractÚre infondé de l'accusation de plagiat.

Emma Goldman le considÚre comme un grand théoricien de l'anarchisme[14].

ƒuvres

  • Pages d'histoire socialiste, Doctrines et actes de la social- dĂ©mocratie, Paris, Les Temps Nouveaux, 1896, [lire en ligne][15].
  • Les PrĂ©curseurs de l'Internationale, BibliothĂšque des Temps nouveaux, no 16, Bruxelles, 1899, 144 p., (BNF 31439054)[16].
  • La Concentration du Capital : une erreur marxienne, 1911.

Bibliographie et sources

Notes et références

  1. Ronald Creagh, L’autre prince anarchiste : Warlaam Tcherkesoff, RA.forum, 24 avril 2015, [lire en ligne].
  2. André Larané, Alexandre II Romanov (1818-1881), De l'espoir à la tragédie, Revue Hérodote, lire en ligne.
  3. Dictionnaire international des militants anarchistes : Warlaam Tcherkesov.
  4. Max Nettlau, Tcherkesov, Plus Loin, n°8, 15 octobre 1925, [lire en ligne].
  5. Jeanne-Marie Gaffiot, Netchaïeff, Éditions L'Âge d'Homme, 1989, lire en ligne.
  6. René Cannac, Aux sources de la Révolution russe : Netchaiev, du nihilisme au terrorisme, Payot, 1961, lire en ligne.
  7. Dictionnaire des anarchistes, « Le Maitron », 2014 : Warlaam Tcherkesoff.
  8. Jean Grave, Quarante ans de propagande anarchiste, Flammarion, 1973, [lire en ligne].
  9. Max Nettlau, Tcherkesov, Plus Loin, n°9, 15 novembre 1925, [lire en ligne].
  10. L'ÉphĂ©mĂ©ride anarchiste : notice biographique.
  11. « W. Tcherkesoff, Sur la concentration du capital (1896) », sur www.panarchy.org (consulté le )
  12. Victor Considerant, Principes du socialisme. Manifeste de la démocratie au XIXe siÚcle., Librairie phalanstérienne, (lire en ligne)
  13. « Karl Kautsky 19060815 Das Kommunistische Manifest ein Plagiat - Sozialistische Klassiker 2.0 », sur www.sites.google.com (consulté le )
  14. (en) Emma Goldman, Living My Life, Cosimo, 2011, page 262.
  15. Institut international d'histoire sociale (Amsterdam) : Pages d'histoire socialiste.
  16. Institut international d'histoire sociale (Amsterdam) : Les Précurseurs de l'Internationale.
(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Varlam Cherkezishvili » (voir la liste des auteurs).
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.