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Traité de Nymphaeon (1261)

Le TraitĂ© de Nymphaeon de 1261 (en grec : ÎŁÏ…ÎœÎžÎźÎșη Ï„ÎżÏ… ÎÏ…ÎŒÏ†Î±ÎŻÎżÏ…; Nymphaeon, aussi appelĂ©e NymphĂ©e en français, est aujourd’hui KemalpaƟa en Turquie) est un traitĂ© d’alliance offensive et dĂ©fensive signĂ© le entre le capitaine du peuple de la RĂ©publique de GĂȘnes Guglielmo Boccanegra et Michel VIII PalĂ©ologue, alors empereur Ă  NicĂ©e. Bien que rendu pratiquement inutile par la reconquĂȘte de Constantinople, il eut des rĂ©percussions considĂ©rables sur les relations entre l’Empire byzantin restaurĂ© et la RĂ©publique de GĂȘnes.

Traité de Nymphaeon
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
L’Empire byzantin restaurĂ© en 1265, peu aprĂšs le traitĂ© de Nymphaeon et l’effondrement de l’Empire latin de Constantinople[1]
Signé
Nymphaeon

Contexte historique

Les États successeurs de l’Empire byzantin en 1204.

AprĂšs le sac de Constantinople par les croisĂ©s de la QuatriĂšme Croisade en 1204, l’Empire de NicĂ©e devint l’un des États successeurs de l’Empire byzantin. AprĂšs des dĂ©buts laborieux, le nouvel empire rĂ©ussit non seulement Ă  conserver, mais Ă©galement Ă  agrandir son territoire le long de la cĂŽte ouest de l’Asie mineure contre l’Empire latin au nord et contre les Turcs seldjoukides et l’Empire de TrĂ©bizonde Ă  l’est. Le traitĂ© de Nymphaeon de 1214 avait permis Ă  l’Empire latin et Ă  l’Empire de NicĂ©e de reconnaitre leur existence mutuelle et de fixer les frontiĂšres entre les deux États : les Latins gardaient l’angle nord-ouest de l’Asie Mineure jusqu’à Adramyttion au sud, alors que l’Empire de NicĂ©e conservait le reste du pays jusqu’à la frontiĂšre seldjoukide. Progressivement, l’Empire de NicĂ©e devait Ă©tendre son territoire aux dĂ©pens de l’Empire latin, tant en Asie mineure qu’en Europe.

Également harcelĂ© par le Despotat d’Épire et par l’Empire bulgare, l’Empire latin se limitait en 1230 Ă  la ville de Constantinople et Ă  ses alentours immĂ©diats. Tout au cours des siĂšcles les puissantes murailles de Constantinople avait empĂȘchĂ© la conquĂȘte de la ville par voie de terre. Seule une imposante flotte, parvenant Ă  franchir la chaine qui barrait la Corne d’Or, permettrait d’y parvenir par la mer. Vers la fin des annĂ©es 1250 et au dĂ©but de 1260, Venise maintenait une patrouille d’une trentaine de navires dans le Bosphore afin de protĂ©ger l’accĂšs aux dĂ©troits et prĂ©venir toute attaque de l’Empire de NicĂ©e[2].

Aussi, dĂšs les premiĂšres annĂ©es de son rĂšgne, Jean VatatzĂšs (r. 1221 – 1254) attacha-t-il une importance primordiale Ă  doter son empire d’une flotte digne de ce nom. GrĂące Ă  celle-ci, il put annexer les Ăźles de la mer ÉgĂ©e, dont la plus importante Ă©tait Rhodes[3]. Celle-ci devait se rĂ©vĂ©ler Ă©galement fort utile dans les campagnes terrestres, notamment en MacĂ©doine, lorsque Michel II ComnĂšne Doukas, despote d’Épire, chercha Ă  s’emparer de Thessalonique[4]. Toutefois, mĂȘme si elle pouvait constituer une menace sĂ©rieuse pour Constantinople [5], elle ne pouvait avoir le dessus sur la flotte vĂ©nitienne et sur les Latins comme le dĂ©montra le siĂšge de Constantinople de 1235. À cette occasion, les forces navales nicĂ©ennes fortes d’environ 100 navires furent dĂ©faites par celles de Venise qui ne comptaient que le quart de ce nombre [6] Devant l’imminence de l’hiver, les troupes conjuguĂ©es de NicĂ©e et de la Bulgarie durent se replier et le siĂšge fut un Ă©chec[7]. Un deuxiĂšme siĂšge de Constantinople en 1260 par les forces nicĂ©ennes dĂ©montra Ă  nouveau la nĂ©cessitĂ© d’une flotte puissante pour toute reconquĂȘte de la ville.

Le traité

Les routes commerciales de GĂȘnes et de Venise en MĂ©diterranĂ©e et dans la mer Noire.

Conscient de cette nĂ©cessitĂ©, Michel VIII PalĂ©ologue (empereur Ă  NicĂ©e 1259-1261; empereur Ă  Constantinople 1261 – 1282) chercha Ă  s’allier aux ennemis traditionnels de Venise, les GĂ©nois. Ceux-ci Ă©taient dĂ©jĂ  en guerre avec Venise. ÉcartĂ©s du commerce avec Constantinople depuis la QuatriĂšme Croisade en 1204, ils ne reconnaissaient pas l'Empire latin et menaient des opĂ©rations de piraterie contre l'empire maritime de Venise. La guerre de Saint-Sabas Ă  Acre de 1256 Ă  1258 avait dĂ©jĂ  mis aux prises les ressortissants des deux villes. Vaincus sur mer le , les GĂ©nois avaient dĂ» s’enfuir Ă  Tyr. Ils approchĂšrent Michel VIII PalĂ©ologue, alors en guerre contre l'empereur latin Baudouin II de Courtenay, le prince d'AchaĂŻe Guillaume de Villehardouin et le despote d’Épire Michel II Doukas.

Par ce traitĂ©, signĂ© le entre Michel VIII PalĂ©ologue et le capitaine du peuple de la RĂ©publique de GĂȘnes, Guglielmo Boccanegra, les deux signataires s’engageaient Ă  former une alliance contre Baudouin II et Venise et Ă  se prĂȘter assistance en cas de guerre. GĂȘnes promettait Ă  l’empereur une cinquantaine de navires en vue du siĂšge de Constantinople dont seize furent immĂ©diatement mis Ă  sa disposition. En contrepartie, elle obtint une franchise douaniĂšre quasi-totale sur les terres de l’empire et le droit de s’installer dans les quartiers commerciaux oĂč habitaient jusqu'alors les VĂ©nitiens ainsi que dans d’autres ports de l’empire [8] - [9].

Les suites

L’Empire byzantin sous Michel VIII PalĂ©ologue en 1265.

Cet accord devait s’avĂ©rer lourd de consĂ©quences pour le commerce byzantin, le monopole Ă©conomique de Venise Ă©tant simplement remplacĂ© par celui de GĂȘnes. De plus, il s’avĂ©ra inutile : le suivant le gĂ©nĂ©ral Alexios Stratigopoulos, envoyĂ© sur la frontiĂšre bulgare avec 800 hommes, constata en passant devant Constantinople que les soldats latins Ă©taient absents, partis attaquer une ile de la mer ÉgĂ©e[10]; une patrouille convainquit rapidement les habitants d’ouvrir les portes. AprĂšs 57 ans d’occupation, Constantinople Ă©tait Ă  nouveau byzantine.

CouronnĂ© empereur Ă  Sainte-Sophie, Michel VIII entreprit immĂ©diatement la crĂ©ation d’une flotte proprement byzantine, rendant ainsi inutile le traitĂ© qui venait d’ĂȘtre signĂ©. Toutefois, comme Venise et d’autres puissances catholiques romaines continuaient Ă  menacer l’empire, le traitĂ© demeurera en vigueur avec de lĂ©gĂšres modifications et l’empereur rappela constamment aux GĂ©nois leurs obligations [11].

Pour GĂȘnes, ce traitĂ© fut d’une grande importance puisqu’il jeta les fondements de son empire commercial au Proche-Orient[12]. Galata, le faubourg situĂ© en Asie, de l’autre cĂŽtĂ© de la Corne d’Or, devint leur principale base d’activitĂ© dans la rĂ©gion, attirant du mĂȘme coup l’hostilitĂ© des VĂ©nitiens avec lesquels GĂȘnes venait en compĂ©tition directe. En fait les GĂ©nois s’installĂšrent en tel nombre qu’ils en vinrent Ă  constituer une sĂ©rieuse menace pour le commerce byzantin, ne cessant d’augmenter leurs taxes sur les produits grecs. De telle sorte qu’à l’automne 1263, Michel VIII renvoya leur flotte de quelque soixante navires Ă  GĂȘnes. Les GĂ©nois rĂ©pliquĂšrent en envoyant de nouveaux bateaux que Michel dut, Ă  contrecƓur, accepter. L’annĂ©e suivante toutefois on dĂ©couvrit que le podesta gĂ©nois, Guglielmo Guercio, complotait pour livrer Constantinople au roi Manfred de Sicile. ConfrontĂ© en personne par l’empereur, Guercio fut banni de la citĂ© avec tous ses compatriotes. Trois ans aprĂšs le traitĂ© de Nymphaeon, l’alliance avec GĂȘnes avait vĂ©cu[13].

Bibliographie

Sources primaires

L’Histoire de NicĂ©tas ChoniatĂšs dĂ©crit la pĂ©riode des derniers ComnĂšnes et des Anges. Elle s’étend jusqu’à 1206 et fut terminĂ©e Ă  NicĂ©e, aprĂšs la prise de Constantinople.

Le meilleur tĂ©moin de cette pĂ©riode sont les Chroniques de Georges Acropolite. Compagnon d’études, puis maitre de ThĂ©odore II Laskaris, il fut Ă  la fois un intellectuel et un fonctionnaire de haut rang, ayant exercĂ© la fonction de grand logothĂšte ou premier ministre. Il est l'auteur d'une Chronique (Î§ÏÎżÎœÎčÎșÎź ÏƒÏ…ÎłÎłÏÎ±Ï†Îź), qui est conçue comme la continuation de l'ouvrage de NicĂ©tas ChoniatĂšs et raconte l'histoire de l'empire depuis 1203, veille de la prise de Constantinople par les Latins, jusqu'Ă  la reprise de cette ville par Michel PalĂ©ologue en 1261.

Au dĂ©but du XIVe siĂšcle, NicĂ©phore GrĂ©goras consacra un grand ouvrage Ă  la pĂ©riode allant de 1204 Ă  1359. Il traitait en particulier de la pĂ©riode de l’Empire de NicĂ©e et des premiĂšres annĂ©es qui suivirent la restauration byzantine.

Théodore II Laskaris a également écrit de nombreuses lettres qui nous renseignent sur son époque.

On pourra consulter Ă  ce sujet :

  • NicetĂŠ ChoniatĂŠ Historia, ed. J.P. Migne (Patrologia Graeca vol. 140); reproduit le texte et la traduction antĂ©rieurs de Wolf. (PDF).
  • Georgii Acropolitae opera recensuit Augustus Heisenberg ; editionem anni MCMIII correctiorem curavit Peter Wirth (t. 1 : Historia, Breviarium historiae, Theodori Scutariotae additamenta ; t. 2 : Scripta minora), Teubner, Stuttgart, 1978.
  • George Akropolites. The History, intr. and comm. Ruth Macrides, coll. Oxford Studies on Byzantium. Oxford, Oxford University Press, 2007.

Sources secondaires

  • (en) Bartusis, Mark C. The Late Byzantine Army: Arms and Society 1204–1453. Philadelphia (Pennsylvania), University of Pennsylvania Press, 1997. (ISBN 0-8122-1620-2).
  • (fr) BrĂ©hier, Louis. Vie et mort de Byzance. Paris, Albin Michel, 1946.
  • (fr) Ducellier, Alain. Byzance et le monde orthodoxe, Paris, Armand Colin, 1986, (ISBN 2200371055).
  • (en) Fine, John Van Antwerp. The Late Medieval Balkans: A Critical Survey from the Late Twelfth Century to the Ottoman Conquest, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1994 (ISBN 0-472-08260-4).
  • (en) Gardner, Alice. The Lascarids of Nicaea: the story of an Empire in exile. 1ere Ă©dition Methuen and Co., vers 1912, reproduit par Adolf M. Hakkert, 1964.
  • (en) Gibfried, John. « The Mongol Invasion and the Aegean World (1241-1261)”. Mediterranean Historical Review. St. Louis (Missouri), St. Louis University, 28:2, pp. 129-139.
  • (en) Kazhdan Alexander (ed), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, 1991, , 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6).
  • (fr) Laiou, Angeliki et CĂ©cile Morrisson, Le Monde byzantin III, L’Empire grec et ses voisins, XIIIe-XVe siĂšcle, Paris, Presses universitaires de France, coll. « L’Histoire et ses problĂšmes », 2011, (ISBN 978-2-130-52008-5).
  • (fr) Ostrogorsky, Georges. Histoire de l’État byzantin. Paris, Payot, 1983. (ISBN 2-228-07061-0).
  • (en) Nicol, Donald M. Byzantium and Venice: A Study in Diplomatic and Cultural Relations. Cambridge, Cambridge University Press, 1992. (ISBN 978-0-521-42894-1).
  • (en) Norwich, John Julius. A Short History of Byzantium. New York, Alfred A. Knoff, 1997. (ISBN 978-0-679-41650-0).
  • (en) Norwich, John Julius. Byzantium, Decline and Fall. New York, Alfred A. Knoff, 1995. (ISBN 0-679-45088-2).
  • (en) Runciman, Steven. Histoire des Croisades. Paris, Tallandier, 1951. (ISBN 978-2-847-34272-7).
  • (en) Shepherd, William R. Historical Atlas. New York, Henry Holt & co, 1911.
  • (en) Treadgold, Warren. Byzantium, The Decline and Fall, Stanford (California), Stanford University Press, 1997, (ISBN 0804726302).

Notes et références

Note

Références

  1. Shepherd 1911, p89
  2. Norwich (1997) p. 315
  3. Nicol (1992), p. 166-171
  4. Fine (1994), p. 157-158
  5. Ostrogorsky (1989) p. 430
  6. Nicol (1992) p. 166.
  7. Fine (1994), p. 130
  8. Norwich (1997) p. 317
  9. Runciman (1951) p. 896-897
  10. Norwich (1995) p. 210
  11. Norwich (1995) p. 216
  12. Norwich (1997) p. 316
  13. Norwich (1995) p. 221

Articles connexes

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