Thé au jasmin
Le thĂ© au jasmin (chinois : èèè±è¶ ; pinyin : ) est un thĂ© parfumĂ© Ă base de thĂ© vert ou blanc auquel ont Ă©tĂ© ajoutĂ©es des fleurs de jasmin. Il sâagit du thĂ© parfumĂ© le plus populaire en Chine, qui s'exporte Ă©galement en grande quantitĂ© dans plusieurs autres pays du monde.
Histoire
Les thĂ©s parfumĂ©s avec des fleurs de jasmin sont mentionnĂ©s dans un ouvrage de la dynastie Yuan (1271-1368), parmi d'autres thĂ©s parfumĂ©s aux fleurs ou aux Ă©pices, cette pratique gagnant en popularitĂ© Ă cette pĂ©riode (mĂȘme si elle trouverait son origine sous les Song). Le procĂ©dĂ© de fabrication de thĂ©s aux fleurs apparaĂźt ensuite dans un ouvrage datĂ© d'environ 1370. Le thĂ© au jasmin devient progressivement le thĂ© parfumĂ© le plus populaire de Chine[1].
Production et fabrication
Le thĂ© au jasmin est produit dans des zones oĂč pousse le jasmin. 75 % de la production chinoise de jasmin provient du district de Hengxian dans le Guangxi, oĂč la production de jasmin (et de magnolia) ainsi que celle des thĂ©s parfumĂ©s Ă ces fleurs occupe une place importante dans l'Ă©conomie locale. Le marchĂ© au fleurs et aux thĂ©s y sont trĂšs importants, et s'y trouvent des thĂ©s importĂ©es depuis les autres principales rĂ©gions productrices, qui vont ĂȘtre employĂ©s pour la composition des thĂ©s au jasmin aux cĂŽtĂ©s de la production locale[2]. Les autres principales rĂ©gions productrices de thĂ© au jasmin en Chine sont Qianwei au Sichuan, Fuzhou au Fujian et Yuanjiang au Yunnan[3].
Le thé employé pour fabriquer du thé au jasmin est principalement du thé vert, mais des thés wulong, noirs (« rouge » en Chine) voire sombres (« noir » en Chine) sont aussi employés[4].
Plusieurs méthodes de fabrication de thés aux fleurs ou au jasmin sont rapportées par des observateurs :
- K. Rougeventre : « Les fleurs en bouton sont cueillies le mĂȘme jour que le thĂ© pour une utilisation immĂ©diate. On dĂ©pose sur une grande bĂąche tendue au sol une couche de 1,5 cm d'Ă©paisseur de thĂ© sec. On Ă©tale par-dessus une fine couche de boutons floraux, puis une nouvelle strate de thĂ©, de nouveau des fleurs et ainsi de suite jusqu'Ă atteindre une hauteur totale d'environ 30 Ă 45 cm : plus l'empilement est haut, plus on baisse en qualitĂ©.
La chaleur biologique dégagée par les fleurs entassées entre les couches de thé, accélÚre l'éclosion des boutons qui libÚrent alors tous leurs parfums. Les fleurs sont ensuite retirées du tas une à une, le thé est séché. L'ensemble du processus est reproduit avec une nouvelle fournée de boutons frais. Pour les thés au jasmin les plus fins, on peut répéter les opérations 5 à 6 fois. » Elle précise que les fleurs sont en général retirées des thés, seuls ceux de qualité inférieure en contenant dans le produit final[5]. - C. Barbaste, F.-X. Delmas et M. Minet : « Les feuilles destinées à la fabrication du thé vert qui servira de base au thé au jasmin sont récoltées en avril et manufacturées (...). Ce thé est ensuite stocké jusqu'au mois d'août, époque de l'année à laquelle a lieu la récolte du jasmin.
(...) La cueillette est ensuite laissée pendant 3 à 4 heures en repos, le temps que les fleurs s'ouvrent presque entiÚrement et que leur température s'abaisse.
De lĂ , on procĂšde Ă un premier mĂ©lange des feuilles de thĂ© sĂšches et des fleurs en superposant les unes et les autres en alternance, sur quatre Ă cinq couches de 10 Ă 15 cm d'Ă©paisseur chacune. Feuilles de thĂ© et fleurs sont ainsi laissĂ©es en contact pendant une dizaine d'heures, et rĂ©guliĂšrement, l'ensemble est brassĂ© afin de faire baisser la tempĂ©rature Ă l'intĂ©rieur du tas (...). Les fleurs sont ensuite retirĂ©es une Ă une Ă la main, plus ou moins finement selon la qualitĂ© du thĂ© visĂ©, et les feuilles sont mises Ă sĂ©cher sur des clayettes. » L'opĂ©ration peut ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e jusqu'Ă 7 fois pour les meilleurs thĂ©s aux fleurs[6]. - M. L. et R. J. Heiss : « Aujourd'hui, l'art de parfumer le thĂ© se perpĂ©tue, notamment dans les environs de la ville de Changle, dans la province du Fujian. Des compĂ©tences pointues sont nĂ©cessaires pour crĂ©er ces jolis thĂ©s, ainsi que la patience nĂ©cessaire pour permettre au processus de parfumage naturel de se dĂ©rouler lentement et correctement. Le thĂ© parfumĂ© le plus populaire est le thĂ© au jasmin, et dans cette procĂ©dure, des fleurs de jasmin fraĂźches sont mĂ©langĂ©es avec des feuilles de thĂ© semi-traitĂ©es (appelĂ©es zao pei) plusieurs fois au cours de plusieurs jours ou semaines. Le rĂ©sultat est un thĂ© superbement parfumĂ© : chaque lot de thĂ© peut nĂ©cessiter jusqu'Ă dix livres de fleurs fraĂźches pour chaque livre de zao pei. En fait, les plus hautes qualitĂ©s de thĂ© au jasmin peuvent ĂȘtre parfumĂ©es jusqu'Ă neuf fois diffĂ©rentes et peuvent prendre prĂšs d'un mois pour ĂȘtre correctement parfumĂ©es[7]. »
Parmi les variétés les plus anciennes et réputées de thé au jasmin se trouvent les « Perles de Jasmin » produites au Fujian, qui doivent leur nom à leur forme arrondie, obtenue par un roulage à la main. Certaines fausses Perles de Jasmin sont produites au Viet-Nam, et de qualité médiocre[8] - [9].
Consommation
Le thé au jasmin est trÚs consommé en Chine, en particulier dans les provinces du Nord qui consomment 70 % du thé au jasmin chinois, en particulier au Liaoning et au Shandong. Dans la plupart des provinces cependant la consommation a tendance à régresser ces derniÚres années[3].
Environ un tiers de la production de thĂ©s au jasmin chinois s'exporte : principalement vers le Japon, la Russie, Singapour, Hong-Kong, les Ătats-Unis, l'Europe[3].
La plupart des thés vendus en brique ou en bouteille en Asie du Sud-Est sont des thés au jasmin.
Dans ces pays Ă minoritĂ©s chinoises oĂč la prĂ©paration du thĂ© est rĂ©servĂ©e aux cĂ©rĂ©monies particuliĂšres, ils reprĂ©sentent une part trĂšs importante de la consommation totale de thĂ©.
Références
- (en) H. T. Huang, Science and Civilisation in China : Volume 6, Biology and Biological Technology, Part V: Fermentations and Food Science, Cambridge, Cambridge University Press, , chap. (f) (« Tea processing and utilisation »), p. 553-554.
- Katrin Rougeventre, L'empire du thé : le guide des thés de Chine, Paris, Michel de Maule, , p. 362
- Rougeventre 2017, p. 363.
- Rougeventre 2017, p. 193 et 362.
- Rougeventre 2017, p. 362-363.
- Christine Barbaste, François-Xavier Delmas et Mathias Minet, Le guide de dĂ©gustation de l'amateur de thĂ©, Paris, Ăditions du ChĂȘne, , p. 83
- « Today, the art of scenting tea continues, especially in the vicinity of the town of Changle, in Fujian Province. Fine-tuned skills are necessary to create these lovely teas, as well as the patience necessary to allow the natural scenting process to occur slowly and correctly. The most popular scented tea is jasmine tea, and in this procedure, fresh jasmine flower blossoms are comingled with semiprocessed tea leaves (called zao pei) numerous times over the course of several days or weeks. The result is superbly scented tea: each batch of tea can require as much as ten pounds of fresh flowers for every one pound of zao pei. In fact, the highest grades of jasmine tea can be scented as many as nine different times and can take nearly one month to be properly scented. » : (en) Mary Lou Heiss et Robert Heiss, The Tea Enthusiast's Handbook : A Guide to the World's Best Teas, Ten Speed Press, , p. 170.
- Heiss et Heiss 2010, p. 171.
- Barbaste, Delmas et Minet 2018, p. 183.