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Tephillin

Les tephillin[1] (judĂ©o-aramĂ©en : ŚȘŚ€Ś™ŚœŚ™ŚŸ, tefillin, singulier hĂ©breu : tefilla), aussi appelĂ©s phylactĂšres (grec ancien : φυλαÎșÏ„ÎźÏÎčÎżÎœ phylacterion, « amulettes ») dans les sources chrĂ©tiennes, sont des objets de culte propres au judaĂŻsme. ConstituĂ©s de deux petits boĂźtiers cubiques contenant quatre passages bibliques et attachĂ©s au bras et Ă  la tĂȘte par des laniĂšres de cuir, ils sont portĂ©s lors de la lecture du shema et de la priĂšre matinale des jours profanes par les hommes ayant atteint leur majoritĂ© religieuse.

Tephillin
Image illustrative de l’article Tephillin
Tephillin du bras et de la tĂȘte
Sources halakhiques
Textes dans la Loi juive relatifs Ă  cet article
Bible Exode 13:9 & 13:16, Deutéronome 6:8 & 11:18
Mishna Menahot 3:7
Talmud de Babylone Erouvin 95b, Sanhédrin 4b, Menahot 34a-37b
Sefer Hamitzvot assin no 12 & no 13
Sefer HaHinoukh mitzvot no 421 & no 422
Mishné Torah Sefer Ahava, Hilkhot tefillin oumzouza vÚsefer Torah, chap. 5-6
Choulhan Aroukh Orah Hayim chap. 25 Ă  48

Les tephillin dans les sources juives

Dans la Bible hébraïque

La rĂ©fĂ©rence principale aux tephillin se trouve dans le DeutĂ©ronome (6:8), au sein de la section Shema IsraĂ«l ; il y est prescrit, peu avant la traversĂ©e du Jourdain, d’« attacher ces choses que Je te prescris] en signe sur ta main et qu’elles soient en totafot [en fronteau] entre tes yeux ». Ce commandement, rĂ©pĂ©tĂ© en DeutĂ©ronome 11:18 dans la section Vehaya im shamoa, est dĂ©jĂ  mentionnĂ©, en rĂ©fĂ©rence aux rites commĂ©morant la sortie d’Égypte, en Exode 13:16 dans la section Vehaya ki yaviĂškha et, sous une forme lĂ©gĂšrement diffĂ©rente, en Exode 13:9, dans la section Kadesh li kol bekhor.

Cependant, la Torah écrite ne donne aucune instruction sur la fixation ni la pose de ces signes (contrairement à la tiare sacerdotale). En effet, il est écrit « vous les attacherez ainsi que Je vous l'ai indiqué » (sous-entendu indiqué à Moïse). C'est donc la transmission de la Torah orale depuis Moïse qui explique comment ils sont et comment les mettre.

Dans la littérature rabbinique

Fleuron d'un ouvrage (A succinct account, of the rites, and ceremonies, of the Jews...) de David Levi, Londres, 1782

L’interprĂ©tation du mot totafot, qui n’apparaĂźt nulle part dans la Bible ailleurs qu’en ces versets, pour dĂ©signer ce que la littĂ©rature des Sages pharisiens appellera « tephillin », la forme cubique des boĂźtiers (batim) tant au sommet qu’à la base, la couleur noire de leurs laniĂšres (retzouot) et nombre d’autres lois qui s’y rapportent ont Ă©tĂ©, selon la tradition rabbinique, donnĂ©es Ă  MoĂŻse sur le SinaĂŻ (c'est-Ă -dire faisant partie de la Torah orale), sans source scripturaire ni exĂ©gĂšse ; aucune institution juive ne repose sur ce mode de transmission, fondĂ© sur le seul usage et crĂ©ditĂ© de la plus haute antiquitĂ©[2].

La premiĂšre source mentionnant explicitement les tephillin est la lettre du pseudo-AristĂ©e (aprĂšs 100 av. J.-C.), qui en parle comme d’un usage ancien[3].

JudaĂŻsme rabbinique

Pour le judaĂŻsme rabbinique, c’est une mitsvah, un commandement positif temporel que de mettre les tephillin. Les hommes ont une obligation de s'y soumettre, les femmes sont dispensĂ©es des commandements positifs temporels et mettre les tephillin leur est interdit[4].

Le tephillin (priĂšre) du bras contient un seul parchemin sur lequel un scribe a Ă©crit les quatre morceaux de la Torah[5] qui Ă©voquent cette mitsvah. Le tephillin de la tĂȘte contient quatre parchemins (un pour chacune des citations), placĂ©s dans quatre compartiments sĂ©parĂ©s. Deux opinions existent quant Ă  l’ordre d’insertion de ces quatre parchemins : celle de Rachi et celle de son petit-fils Rabbenou Tam. Leur discussion se trouve dans les commentaires au traitĂ© de Mena’hot du Talmud. La halakha requiert de porter les tephillin de Rachi, et suggĂšre aux plus mĂ©ticuleux de porter aussi ceux de RabbĂ©nou Tam. Il existe d’autres opinions telles que les tephillin de Shimousha Rabba, mais les deux prĂ©cĂ©dentes sont les principales.

Pose

« Taled, Teffila », dessiné d'aprÚs nature (1725), musée juif de Suisse.

Voici la façon de les mettre (le silence est de mise durant la pose, qui se fait sans temps d’arrĂȘt) :

  1. On prend le tephillin du bras, que l’on pose sur le muscle interne du bras gauche, orientĂ© vers le cƓur. On rĂ©cite alors la bĂ©nĂ©diction se terminant par « poser les tephillin ». On l’entoure sept fois autour du bras, le premier passage n’étant qu’un demi-tour (en s’assurant que la laniĂšre soit du cĂŽtĂ© de la peinture noire).
  2. Ensuite, aprĂšs avoir serrĂ© la laniĂšre autour de la paume, on prend le tephillin de la tĂȘte et on la pose, en prenant soin que le bas du boĂźtier soit sur les cheveux et non sur le front, ainsi que directement au-dessus des yeux. La laniĂšre entoure la tĂȘte et s’attache par un nƓud qui doit se situer Ă  l’arriĂšre et au centre de la tĂȘte et non sur la nuque (le tephillin de tĂȘte ne repose que sur le crĂąne). En la mettant, les ashkĂ©nazes rĂ©citent une autre bĂ©nĂ©diction pour la pose des tephillin, les sĂ©farades s'en abstiennent.
  3. On desserre la laniĂšre de la paume, et l’entoure une seule fois sur la paume puis on l’enroule de cette façon autour du majeur : une fois sur la phalange infĂ©rieure et deux fois sur la phalange supĂ©rieure, et l’on continue Ă  l’enrouler autour de la paume.
  4. Aprùs l’office, on retire les tephillin dans l’ordre inverse de leur pose.

Sens

Le lieutenant Asael Lubotzky, membre des Forces armées israéliennes, prie avec des tephillin.

Les rabbins enseignent que l’homme ayant Ă©tĂ© crĂ©Ă© avec plusieurs dimensions doit s’efforcer en permanence de cultiver en lui la cohĂ©rence. Les Ă©lĂ©ments fondamentaux qui composent l’homme et qui articulent ses attitudes et agissements sont : sa pensĂ©e, ses sentiments (ou Ă©motions), et ses actes. Lorsque l’homme veut agir, il envisage un projet dans sa pensĂ©e, puis celui-ci prend forme par le dĂ©sir que l’homme ressent de le rĂ©aliser et, enfin, l’homme le met en pratique concrĂštement.

Selon la conception du judaĂŻsme rabbinique, ces trois Ă©lĂ©ments sont indissociables, ou tout au moins visent Ă  le devenir. En d’autres termes, ce qui est rĂ©flĂ©chi doit ĂȘtre ressenti puis mis en pratique. S’il n’y a pas de rĂ©alisation concrĂšte de ses bonnes intentions, l’objectif n’est pas atteint. De mĂȘme, ce qui ne doit pas ĂȘtre mis en pratique (pour cause d’immoralitĂ© ou d’indĂ©licatesse, par exemple) ne doit pas non plus ĂȘtre envisagĂ© ou contenu en son cƓur.

C’est en ce sens que les tephillin posĂ©s Ă  la fois sur la tĂȘte (siĂšge de la pensĂ©e), orientĂ©s vers le cƓur (siĂšge des sentiments) et placĂ©s sur le bras (symbole de l’action concrĂšte) sont un appel Ă  la cohĂ©rence de l’ensemble des forces vives qui composent l’homme.

Judaïsme libéral

Floriane Chinsky portant les tephillin et le talit.

Dans le judaïsme libéral, les tephillin sont portés dans la communauté. Les femmes les portent, si elles le désirent, car, selon le verset du shema, on doit les prescrire à ses enfants, et pas seulement à son fils.

Il est à noter que pour le judaïsme orthodoxe, les femmes ont, dans l'absolu, le droit de mettre les tephillin, mais n'y sont pas obligées. Dans les faits, aucune femme de la communauté orthodoxe ne les met aujourd'hui.

KaraĂŻsme

Les KaraĂŻtes, tout comme les SadducĂ©ens avant eux, ne reconnaissent pas l’usage des tephillin, et n’en portent donc pas, car le commandement biblique que les rabbins interprĂštent comme une rĂ©fĂ©rence aux tephillin est pris comme une mĂ©taphore qui souligne l’importance de se souvenir de la Torah et de la chĂ©rir.

Pour les KaraĂŻtes, le mot hĂ©breu ŚœÖ°Ś˜Ö茘֞Ś€ÖčŚȘ, totafot, dans le shema, traduit par « phylactĂšre/bandeau », a une autre signification : ils le traduisent comme un synonyme du mot Ś–Ś›ŚšŚ•ŚŸ, zikarone, signifiant « souvenir/mĂ©moire », ce qui donne une autre dimension de la loi et de la pratique.

Samaritains

Les Samaritains, tout comme les Sadducéens et les Karaïtes, ne portent pas de tephillin.

Beta Israël

Les Beta Israel, juifs Ă©thiopiens, ne portaient pas non plus de tephillin avant leur arrivĂ©e en IsraĂ«l, car ils n’avaient aucune connaissance du Talmud et des instructions rabbiniques.

Le shin Ă  quatre branches

Sur le tephillin porté sur le front, on trouve un shin à quatre branches d'un cÎté et le shin standard à trois branches de l'autre.

  • Le shin Ă  quatre branches.
    Le shin à quatre branches, du cÎté gauche.
  • Le shin Ă  trois branches.
    Le shin à trois branches, du cÎté droit.

Notes et références

  1. Les dictionnaires retiennent plusieurs orthographes : « tephillin » (nom pluriel invariable) figure, avec « tefillin », dans le Larousse en ligne, et, avec « tĂ©phillin », dans le Robert en ligne ; le TLFI donne « tephilin Â», « tĂ©philin Â», « tefilin Â», « tefillin Â», « tĂ©filin Â» et « tĂ©fillin Â».
  2. (en) T. B. Menahot 35a, cf. Jewish Encyclopedia 1906
  3. (en) Benjamin G. Wright, Three jewish ritual practices in Aristeas §§158–160.., « Heavenly Tablets: Interpretation, Identity and Tradition in Ancient Judaism », L. R. Lidonnici et A. Lieber, Brill, 2007. Brill E-Books, 23 janvier 2013 DOI:101163/ej.9789004158566.i-339.10
  4. Choulhan Aroukh Ora’h Haim Chapitre 38 alinĂ©a 3.
  5. Ex. XIII. 1-10, 11-16 ; Deut. VI. 4-9, XI. 13-21

Annexes

Liens externes

Bibliographie

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