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Tamamo-no-Mae

Tamamo-no-Mae (çŽ‰è—»ć‰/çŽ‰è—»ăźć‰/çŽ‰è—»ćŸĄć‰, la « demoiselle Joyau lumineux »[1] - [2]) est une figure lĂ©gendaire de la mythologie japonaise. Dans l’Otogi-zƍshi, une collection de prose japonaise Ă©crite durant la pĂ©riode Muromachi, Tamamo-no-Mae Ă©tait la favorite du pĂšre de l'empereur japonais Konoe (qui rĂ©gna de 1142 Ă  1155). Belle et savante, la jeune fille charmait la cour de sa prĂ©sence, lorsque « l'empereur retirĂ© Â» et son fils Konoe, l'empereur rĂ©gnant, tombĂšrent tous deux mystĂ©rieusement malades. Mais l'astrologue et exorciste de la cour, l'habile Abe no Yasunari, compris que le mal venait de Tamamo-no-Mae, qui n'Ă©tait autre qu'un renard Ă  neuf queues malĂ©fique. AprĂšs avoir Ă©tĂ© tuĂ©e par l'un des deux vaillants hommes envoyĂ©s Ă  sa poursuite, Tamamo-no-Mae hanta longtemps une pierre magique, mortelle pour tous ceux qui l'approchaient.

Tamamo-no-Mae par l'artiste Yoshitoshi.

La belle Tamamo-no-Mae et « l'empereur retirĂ© Â»

L'estampe montre la jeune fille transperçant l'obscurité au palais impérial par la lumineuse présence qui lui vaudra son nom ; la partie supérieure la montre sous sa forme de renard à neuf queues, poursuivie par les hommes de l'empereur.
Tamamo-no-Mae, estampe de Kuniyoshi.

On disait qu’elle Ă©tait la femme la plus belle et la plus intelligente du Japon. MystĂ©rieusement, son corps sentait toujours bon et ses vĂȘtements ne se fripaient ou ne se salissaient jamais. Tamamo-no-Mae Ă©tait non seulement belle, mais aussi infiniment savante en toutes choses. Bien qu'elle semblĂąt n’avoir que vingt ans, il n'Ă©tait rien Ă  quoi elle ne puisse rĂ©pondre, qu'il s'agisse de musique, de religion ou d'astronomie. À cause de sa beautĂ© et de son intelligence, tous, Ă  la cour impĂ©riale, l'adoraient. D'ailleurs, « l'empereur retirĂ© Â»[3] Toba no In, malgrĂ© l'obscuritĂ© des origines visiblement modestes de la jeune fille, Ă©tait profondĂ©ment Ă©pris d'elle et en avait fait sa favorite[4].

La fascination qu'elle exerçait sur « l'empereur retirĂ© Â» s'Ă©tait encore accrue, lorsque, par une nuit d'automne oĂč un orage avait Ă©clatĂ© – orage que la cour s'efforçait d'oublier par une soirĂ©e de poĂ©sie –, une soudaine rafale de vent avait Ă©teint toutes les lumiĂšres. LĂ , dans l'obscuritĂ© totale, on vit luire dans la nuit, comme le radieux soleil de l'aurore, le corps de la belle Tamamo-no-Mae[4]. Si le mystĂ©rieux phĂ©nomĂšne sema la terreur parmi les ministres et les gardes prĂ©sents, Toba no In, lui, n'y vit qu'un signe de plus de la lumineuse personnalitĂ© de la jeune fille, qu'il surnomma aussitĂŽt Tamamo-no-Mae, « la demoiselle Joyau lumineux Â»[2].

Mystérieuse maladie à la cour impériale

AprĂšs quelque temps, l'empereur rĂ©gnant Konoe ainsi que son pĂšre « l'empereur retirĂ© Â» tombĂšrent soudainement et inexplicablement malades tous les deux. Ils consultĂšrent plusieurs prĂȘtres et devins afin de trouver l'explication du mal, mais personne n’avait de rĂ©ponse Ă  leur fournir. Finalement, l'astrologue de la cour, Abe no Yasunari[5], qui en Ă©tait Ă©galement l'exorciste, rĂ©vĂ©la que Tamamo-no-Mae Ă©tait la cause de la maladie : en effet, il expliqua que la belle jeune femme Ă©tait en fait un mauvais renard Ă  neuf queues (kyĆ«bi no kitsune) qui avait placĂ© Toba no In sous son influence, dans un complot sournois pour prendre le trĂŽne. Devant le refus de « l'empereur retirĂ© Â» de chasser sa belle favorite, l'astrologue, rĂ©solu Ă  sauver son maĂźtre, organisa une grande cĂ©rĂ©monie en l'honneur d'une des divinitĂ©s de l'au-delĂ , le Seigneur du mont Tai, Taisan fukun[2]. Au cours de cette cĂ©rĂ©monie, Tamamo-no-Mae laissa paraĂźtre un malaise grandissant Ă  l'Ă©coute des incantations, pour se rĂ©vĂ©ler bientĂŽt pour ce qu'elle Ă©tait, un renard malĂ©fique Ă  neuf queues. DĂ©masquĂ©e, elle prit alors la fuite en direction du nord-est, oĂč vont toujours se rĂ©fugier les esprits dĂ©moniaques[6].

L'empereur ordonna Ă  Kazusa-no-Suke et Ă  Miura-no-Suke, les guerriers les plus puissants du moment, de chasser et de tuer le renard. AprĂšs avoir Ă©chappĂ© aux chasseurs, durant quelque temps, le renard apparut Ă  Miura-no-Suke en rĂȘve. Prenant de nouveau la forme de la belle Tamamo-no-Mae, le renard prophĂ©tisa que Miura-no-Suke le tuerait le jour suivant et supplia de lui laisser la vie sauve. Miura-no-Suke refusa.

TĂŽt le jour suivant, les chasseurs trouvĂšrent le renard sur la lande de Nasu, Nasuno (dans l'actuelle prĂ©fecture de Tochigi), et Miura-no-Suke tira et tua la crĂ©ature magique avec une flĂšche. Le corps du renard devint le Sessho-seki (æźș生石, « pierre tueuse ») qui tue quiconque entre contact avec elle. L’esprit qui s'Ă©tait emparĂ© de l'enveloppe corporelle de Tamamo-no-Mae hanta alors la pierre.

La pierre hantée

Sessho-seki, à Nasu, préfecture de Tochigi.

On dit que l'esprit hanta cette « pierre tueuse Â» (Sessho-seki), dans le district japonais de Nasu, jusqu'Ă  ce qu'un prĂȘtre bouddhiste, appelĂ© Genno, se soit arrĂȘtĂ© prĂšs d’elle pour se reposer et fut menacĂ© par la crĂ©ature. Genno exĂ©cuta certains rituels spirituels et pria l'esprit de considĂ©rer son salut spirituel, jusqu'Ă  ce que finalement il s'apaise et jure de ne plus jamais hanter la pierre de nouveau.

Dans le cĂ©lĂšbre livre de Matsuo Bashƍ, Oku no Hosomichi (La Route Ă©troite vers l'intĂ©rieur, parfois traduit aussi par La Route Ă©troite vers le Nord profond), l'auteur raconte avoir visitĂ© la pierre dans le district japonais de Nasu.

Classée « site historique local » depuis 1957, la pierre s'est fendue en deux en mars 2022 sous l'effet de l'érosion[7].

Autres méfaits perpétrés par Tamamo-no-Mae

Lors de sa rencontre avec la pierre meurtriĂšre, le moine Genno se rendit compte que Tamamo-no-Mae avait derriĂšre elle une longue carriĂšre malĂ©fique, qui s'Ă©tendait sur des millĂ©naires. Ainsi, c'est elle qui, dans le lointain passĂ© de l'Inde, avait convaincu l'empereur Hanzoku d'entreprendre une guerre meurtriĂšre[8] contre ses voisins, pour perpĂ©trer un abominable rituel qui nĂ©cessitait la tĂȘte coupĂ©e de mille rois[6].

C'est elle aussi qui, en Chine, avait, sous le nom de Hoji, été l'épouse du roi Yu (ou Yuwao)[9] - [10] ; là, son influence mauvaise avait aidé à amener la chute de la dynastie des Zhou occidentaux[6].

Tamamo-no-Mae dans la culture japonaise

  • La lĂ©gende de Tamamo-no-Mae sert d’assise au drame nĂŽ Sessho-seki (« La pierre tueuse ») et la piĂšce de kabuki Tamamo-no-Mae (« La belle sorciĂšre renard »).
  • Le jeu vidĂ©o ƌkami fait aussi rĂ©fĂ©rence Ă  cette lĂ©gende. Ainsi, le joueur fait la rencontre de Rao, une belle et intelligente prĂȘtresse, chasseuse de dĂ©mon. Cependant, il est rĂ©vĂ©lĂ© par la suite que la vraie Rao fut tuĂ©e par l’esprit d’un renard Ă  neuf queues malĂ©fique et que son corps Ă©tait possĂ©dĂ© dĂšs le dĂ©but.
  • Les jeux vidĂ©o Fate/Extra, Fate/Extra CCC, Fate/Extella et Fate Grand Order font rĂ©fĂ©rence a Tamamo-no-mae en l'incluant comme Servant sĂ©lectionnable au dĂ©but du jeu. Son histoire y est plus ou moins racontĂ©e suivant les choix du joueur.

Dans le jeu vidéo Warriors Orochi 3 Ultimate, Tamamo est l'antagoniste du chapitre 7 à 8. Emprisonné dans une pierre scellée,elle est libérée et veut régner sur le monde créé par Orochi grùce à un étrange miroir. Plus tard,les héros essaient de sceller Tamamo grùce au miroir mais elle se métamorphose en renard maléfique à neuf queues. Les héros aidés des généraux célestes réussissent néanmoins à la vaincre.

Notes et références

  1. Traduction conforme Ă  ce qu'on rencontre dans les ouvrages anglo-saxons traitant de la question, mais malgrĂ© tout trĂšs libre : 玉 (yĂč en chinois) dĂ©signe le jade, pierre impĂ©riale Ă  la puissante symbolique, et 藻 (zǎo en chinois) dĂ©signe les algues ; voir Ă  ce sujet Michael Bathgate 2004, p. 5, note 1, montrant que le terme tamano est utilisĂ© ici de façon mĂ©taphorique, par rĂ©fĂ©rence Ă  tama, le joyau, le jade. C'est la lumiĂšre qui Ă©manait d'elle (voir par exemple la reprĂ©sentation qu'en a fait Kuniyoshi) qui lui valut ce surnom.
  2. Michael Bathgate 2004, p. 4
  3. Dans les traditions impĂ©riales japonaises, un « empereur retirĂ© Â» avait officiellement abandonnĂ© le pouvoir. En rĂ©alitĂ©, en retrait du tumulte des affaires courantes, son importance rĂ©elle demeurait, voire grandissait, et il Ă©tait au centre de toutes les grandes dĂ©cisions.
  4. Michael Bathgate 2004, p. 3
  5. Masanobu Kagawa, « « Kitsune » : comment le rusĂ© renard continue d’envoĂ»ter et fasciner les Ăąmes », sur Nippon.com, (consultĂ© le ).
  6. Michael Bathgate 2004, p. 5
  7. Lola Talik, « Une pierre japonaise censĂ©e renfermer un dĂ©mon depuis prĂšs de 1000 ans s’est brisĂ©e en deux », sur Geo.fr, (consultĂ© le )
  8. Basil Hall Chamberlain 2001, p. 154
  9. « The Death Stone » (consulté le )
  10. Selon Basil Hall Chamberlain, p. 154, le nom réel du roi était Yeo Wang, et son épouse maléfique était Pao Sze, au VIIIe siÚcle av. J.-C.. Le goût criminel du luxe et la folie de Pao Sze amenÚrent la ruine du roi son époux.

Annexes

Bibliographie

  • (en) Michael Bathgate, The fox's craft in Japanese religion and folklore : shapeshifters, transformations, and duplicities, Routledge, , 191 p. (ISBN 978-0-415-96821-8, lire en ligne)
  • (en) Basil Hall Chamberlain, The classical poetry of the Japanese, Routledge, , 227 p. (ISBN 978-0-415-24532-6, lire en ligne), « The Death Stone (La Pierre de mort) », p. 154
  • (de) Klaus Mailahn, Der Fuchs in Glaube und Mythos, MĂŒnster, 2006, p. 190-194, (ISBN 3-8258-9483-5)

Liens externes


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