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Solomon Mamaloni

Solomon Suna'one Mamaloni, né en janvier 1943 dans le village de Rumahui sur l'île de Makira et mort le à Honiara[1] - [2], est un homme d'État salomonais, trois fois Premier ministre. L'une des principales figures politiques des îles Salomon au moment de l'indépendance en 1978, il devient par la suite une figure très controversée. Fortement soupçonné de corruption, il laisse à sa mort un bilan globalement négatif.

Solomon Mamaloni
Illustration.
Fonctions
Premier ministre des îles Salomon
–
(2 ans, 9 mois et 20 jours)
Monarque Élisabeth II
Gouverneur Moses Pitakaka
Prédécesseur Francis Billy Hilly
Successeur Bartholomew Ulufa'alu
–
(4 ans et 3 mois)
Monarque Élisabeth II
Gouverneur George Lepping
Prédécesseur Ezekiel Alebua
Successeur Francis Billy Hilly
–
(3 ans, 2 mois et 19 jours)
Monarque Élisabeth II
Gouverneur Baddeley Devesi
Prédécesseur Peter Kenilorea
Successeur Peter Kenilorea
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Rumahui
Date de décès
Lieu de décès Honiara
Nationalité salomonaise
Parti politique Alliance populaire puis
Groupe pour l'unité nationale et la réconciliation

Solomon Mamaloni
Premiers ministres des îles Salomon

Débuts (ère coloniale)

Durant l'ère de la colonisation britannique, son père Jaash Stephanus Suna'one est engagé dans la vie politique coloniale, député pour Makira au Conseil législatif de 1960 à 1962 et un temps président du Conseil de Makira. Solomon est éduqué dans les écoles de la colonie, puis de 1964 à 1966 complète son éducation au Te Aute College en Nouvelle-Zélande - l'école qui forme traditionnellement l'élite maori dans ce pays. En Nouvelle-Zélande, il s'intéresse aux idées du crédit social, qui continuent à l'inspirer par la suite. À partir de 1966 il travaille dans l'administration coloniale aux Salomon, et notamment dans l'administration du Conseil législatif[1] - [3].

En 1970 il est Ă©lu au Conseil gouvernemental de la colonie. Le Royaume-Uni prĂ©pare alors petit Ă  petit la colonie Ă  l'indĂ©pendance, et Mamaloni visite le Royaume-Uni, l'Ă®le Maurice et les Seychelles « pour y Ă©tudier les dĂ©veloppements constitutionnels Â». En 1973, il fonde le Parti progressiste populaire. Devenu dĂ©putĂ© Ă  l'AssemblĂ©e lĂ©gislative en 1974, il est Ă©lu Chief Minister (ministre-en-chef) par ses pairs le . Il est le premier titulaire de ce poste, et forme un gouvernement. En , ses ministres et lui dĂ©missionnent, accusĂ©s de corruption, mais conservent la confiance des dĂ©putĂ©s et sont immĂ©diatement reconduits Ă  la tĂŞte de la colonie. Il mène les nĂ©gociations avec les Britanniques pour la transition Ă  l'indĂ©pendance, acquĂ©rant pour son pays un statut officiel d'autonomie en 1976. « Brillant orateur Â», il aime Ă  s'exprimer en pijin, la langue vĂ©hiculaire du pays[1] - [4].

Premier mandat (1981-1984)

En , Peter Kenilorea lui succède à la tête du gouvernement. Mamaloni démissionne de son siège de député en . C'est donc Kenilorea qui, le , est le premier Premier ministre des îles Salomon indépendantes. Retrouvant un siège au Parlement aux élections législatives d', Mamaloni devient chef de l'opposition officielle, à la tête d'un parti élargi, devenu l'Alliance populaire. Il parvient à rassembler une majorité de députés pour former un gouvernement de coalation et devenir Premier ministre en . Il engage une politique de décentralisation des pouvoirs, établissant les gouvernements provinciaux autonomes, l'un de ses principaux succès. Il crée également la Banque centrale, et dote son pays d'une compagnie aérienne. Sur le plan international, il met l'accent sur la coopération entre pays mélanésiens, et participe aux premiers fondements du Groupe mélanésien Fer de lance. Son style inconstant et imprévisible trouble néanmoins les électeurs, qui aux élections législatives de 1984 confient à nouveau le pouvoir à Peter Kenilorea[1] - [4].

Deuxième mandat (1989-1993)

Les élections de 1989 sont au contraire un franc succès pour Mamaloni. Son Parti de l'alliance populaire remporte vingt-et-un sièges sur trente-sept, lui permettant de gouverner seul, sans coalition - un fait rare. Il promet d'accentuer sa politique de décentralisation en instaurant un réel État fédéral, mais cette promesse est vite oubliée, générant de forts mécontentements. Il préconise l'instauration d'une république, mais ne parvient pas à imposer cette idée ; les Salomon restent donc un royaume du Commonwealth, reconnaissant symboliquement la reine Élisabeth II comme chef de l'État[1] - [4]. C'est par ailleurs durant ce second mandat que Mamaloni devient une figure particulièrement controversée. Ses relations se brouillent avec la Papouasie-Nouvelle-Guinée voisine : il exprime sa sympathie pour le mouvement séparatiste sur l'île de Bougainville, sous souveraineté papou-néo-guinéenne mais culturellement et géographiquement proche des Salomon. Le gouvernement Mamaloni permet aux rebelles de se réapprovisionner en terres salomonaises. Sous les gouvernements de Rabbie Namaliu puis de Paias Wingti, les forces armées papou-néo-guinéennes effectuent plusieurs incursions en terres salomonaises en 1992 et en 1993, tuant deux civils salomonais lors d'une incursion en . En 1993, les forces de sécurité des deux pays échangent des coups de feu. Mamaloni exige des excuses, qu'il obtient lorsque Julius Chan devient Premier ministre de Papouasie-Nouvelle-Guinée en 1994[4] - [5].

Sur le plan de la politique intĂ©rieure, les principales ressources de l'État proviennent de l'industrie du bois. Mamaloni encourage une dĂ©forestation Ă  large Ă©chelle, ignorant les critiques. Il ignore Ă©galement la Banque centrale, qui recommande des rĂ©formes structurelles pour une Ă©conomie plus soutenable sur le long terme. Il « politise le service public Â» Ă  son avantage, et instaure des fonds discrĂ©tionnaires pour les Ă©lus, Ă©chappant Ă  tout contrĂ´le. Il est accusĂ© de corruption, de fraude et de mauvaise gestion, y compris par les dirigeants de son propre parti, et par ses propres ministres, qui se dĂ©solidarisent de lui. Il parvient Ă  conserver un temps le pouvoir en quittant son parti, en limogeant cinq ministres et en les remplaçant par des dĂ©putĂ©s issus de l'opposition. Pour les Ă©lections lĂ©gislatives de 1993 il fonde un mouvement politique appelĂ© « Groupe pour l'unitĂ© nationale et la rĂ©conciliation Â», mais les citoyens ne le soutiennent plus. Francis Billy Hilly lui succède Ă  la tĂŞte du gouvernement[1].

Troisième mandat (1994-1997)

Pour autant, Hilly ne parvient pas Ă  conserver la confiance d'une majoritĂ© stable au Parlement. En , une majoritĂ© de dĂ©putĂ©s se tournent Ă  nouveau vers Mamaloni, et il devient Premier ministre une nouvelle fois. Un rapport secret du gouvernement australien estime que Mamaloni a « achetĂ© les soutiens nĂ©cessaires, avec l'aide d'intĂ©rĂŞts malaysiens de l'industrie du bois Â», pour faire renverser le gouvernement rĂ©formateur et progressiste de Hilly[3]. Mamaloni relance une exploitation massive des ressources forestières, que Hilly avait suspendu. Il accorde de gĂ©nĂ©reuses exonĂ©rations fiscales, notamment après s'ĂŞtre accordĂ© le poste de ministre des Finances en 1996. La corruption de l'État prend, Ă  ce stade, des proportions endĂ©miques. LâchĂ© une nouvelle fois par une partie de son propre gouvernement, il conserve le pouvoir en distribuant des ministères et « autres postes de gouvernement lucratifs Â» aux dĂ©putĂ©s qui acceptent de le soutenir. Il suscite des moqueries en ordonnant Ă  la police de creuser les terres Ă  Tulagi pour y chercher de l'or prĂ©tendument enterrĂ© par les Japonais durant la Seconde Guerre mondiale[1].

Sur le plan de la politique étrangère, il suscite également des critiques. Peu enclin à voyager, il participe néanmoins à la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth à Auckland en 1995. Les États membres s'y accordent pour suspendre la participation du Nigeria au Commonwealth des Nations, les autorités militaires nigérianes ayant exécuté des dissidents politiques après une parodie de procès. Votant au nom de son pays, Mamaloni fait des Salomon l'un des deux seuls pays membres, avec la Gambie, à s'opposer à la suspension du Nigeria[1].

Décès et héritage

Il perd les Ă©lections lĂ©gislatives d', et perd ainsi le pouvoir pour la dernière fois. Pour autant, selon l’EncyclopĂ©die historique des Ă®les Salomon, il « continue Ă  ĂŞtre une force de dĂ©stabilisation politique Â» depuis les bancs de l'opposition. Il demeure chef de l'opposition officielle jusqu'Ă  sa mort. En , il est hospitalisĂ© pour des problèmes de rein, « exacerbĂ©s par le diabète et la goutte Â». S'Ă©tant toujours proclamĂ© un « homme du peuple Â», il insiste pour ĂŞtre soignĂ© dans une salle publique de l'hĂ´pital. Il y dĂ©cède le , Ă  l'âge de 57 ans. MalgrĂ© les accusations de corruption Ă  son encontre, il meurt dans une relative pauvretĂ©[1] - [2].

Il laisse en héritage durable une dépendance excessive des Salomon sur l'industrie du bois, des habitudes de corruption au sommet de l'État et dans le service public, et la possibilité légale pour les élus de dépenser sans contrôle une certaine somme de fonds publics. Pour autant, nombre de Salomonais le perçoivent aussi comme l'un des architectes de la nation, ayant contribué à mener le pays à l'indépendance durant l'ère coloniale[1] - [3].

Références

  1. (en) "Mamaloni, Solomon Suna'one", Solomon Islands Historical Encyclopaedia 1893-1978
  2. (en) "Milestones", CNN, 24 janvier 2000
  3. (en) "FORMER SOLOMON ISLANDS PRIME MINISTER MAMALONI DIES", Agence France-Presse, 11 janvier 2000
  4. (en) Brij Lal et Kate Fortune, The Pacific Islands: An Encyclopedia, Volume 1, University of Hawaii Press, 2000, (ISBN 0-8248-2265-X), p. 295
  5. (en) Tarcisius Kabutaulaka, "Cohesion and disorder in Melanesia: the Bougainville conflict and the Melanesian Way", in : New Politics in the South Pacific, Université du Pacifique Sud, 1994, (ISBN 982-02-0115-2), p. 76
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