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Siège de Castelnuovo

Le siège de Castelnuovo (actuel Herceg Novi, au Monténégro) est commencé en et terminé le , par Khayr ad-Din Barberousse, grand amiral de la flotte ottomane de Soliman le Magnifique, contre des troupes espagnoles et impériales présentes dans cette place depuis 1538, dans le cadre de la guerre de la Sainte Ligue contre l'Empire ottoman[1]. Il s'achève par la victoire de Barberousse, la quasi-totalité des défenseurs, refusant de se rendre malgré une lourde infériorité numérique, ayant péri au cours du siège.

Siège de Castelnuovo
Description de cette image, également commentée ci-après
Vue de Castelnuovo au XVIe siècle. Gravure d'un artiste inconnu du XVIe siècle
Informations générales
Date juillet - 7 août 1539
Lieu Castlelnuovo (Monténégro)
Issue Victoire ottomane
Commandants
Francisco de Sarmiento
Hugues Cousin
Khayr ad-Din Barberousse
Forces en présence
3 000 hommes50 000 hommes
130 galères
70 galiotes
Pertes
2 800 morts
200 prisonniers
5 000 Ă  20 000 hommes

Guerre vénéto-ottomane (1537-1540)

CoordonnĂ©es 42° 27′ 10″ nord, 18° 31′ 52″ est
Géolocalisation sur la carte : Monténégro
(Voir situation sur carte : Monténégro)
Siège de Castelnuovo

Contexte

Les relations entre l'Empire ottoman et Charles Quint

À la suite de l'invasion de l'Autriche par les armées ottomanes et à l'échec du siège de Vienne en 1529, les princes protestants allemands décident de mettre de côté leur différends avec Charles Quint, empereur romain germanique, et de participer à la guerre contre leur ennemi commun en Europe centrale. Les Turcs sont repoussés jusqu'à leurs bases de départ en Hongrie. La menace ottomane est ainsi conjurée sur terre, mais en Méditerranée, la flotte turco-algérienne de Barberousse (qui est aussi le maître de la régence d'Alger) représente une menace grave pour les navires et ports chrétiens. En 1534, Barberousse s'empare de Tunis, mais en est chassé en 1535 par la flotte d'Andrea Doria, amiral de Charles Quint.

La guerre vénéto-ottomane (1537) et la Sainte Ligue (1538)

En 1537, Soliman et Barberousse lancent une offensive contre les possessions de Venise, à Corfou, puis dans le duché de Naxos. L'année suivante, le pape Paul III forme une alliance, la Sainte Ligue, avec Charles Quint, la République de Venise, le Pape Paul III et l'archiduc Ferdinand d'Autriche, frère de l'empereur, envisageant de détruire la flotte turco-barbaresque voire de prendre Constantinople. Andrea Doria est nommé responsable de la flotte alliée et Ferrante Gonzaga, vice-roi de Sicile, des opérations terrestres dans les Balkans.

Néanmoins, les rêves de détruire les forces ottomanes se dissipent rapidement car la flotte alliée ne réunit que 130 navires (à peu près le même nombre que la flotte ottomane en Méditerranée) au lieu des 200 prévus. Parallèlement, des mésententes apparaissent entre les chefs de la Sainte Ligue ; les Italiens, qui fournissent beaucoup de navires (mais beaucoup moins d'hommes) jalousent les Espagnols qui composent la majeure partie des troupes embarquées et occupent les postes supérieurs. Par ailleurs, la France, allié traditionnel des Ottomans, menace de reprendre la guerre contre l'Espagne. Ces mésententes ont des conséquences graves : alors que Barberousse se trouve encerclé dans le golfe d'Arta, il réussit à échapper à une destruction quasi certaine avec très peu de dommages ; la Sainte-Ligue perd ainsi une occasion unique.

La prise de Castelnuovo et ses suites

Malgré cet échec, les Tercios espagnols, appuyés par des renforts de Venise, décident de passer à l'action en se déployant sur la terre ferme et en attaquant les Ottomans. Ils prennent ainsi la forteresse stratégique de Castelnuovo, sur la côte dalmate. L'archiduc Ferdinand cesse de payer le tribut au sultan, prévu par le traité à la suite du siège de Vienne. Cependant, le succès de Castelnuovo, au lieu d'unifier la Sainte Ligue, la morcelle encore plus.

Les Vénitiens réclament en effet immédiatement la cession de la forteresse, située entre leurs enclaves de Raguse et Cattaro et importante pour garantir leur domination sur l'Adriatique. Mais pour des raisons que même les historiens modernes ne s'expliquent pas, Charles Quint refuse de céder la position. En conséquence, les Vénitiens rompent leur alliance avec lui et retirent leur navires de la Sainte Ligue ; les navires du Pape se retirent également par la suite.

Castelnuovo n'est donc plus dĂ©fendue que par 3 000 hommes du Tercio de Naples commandĂ©s par AndrĂ©s de Sarmiento et soutenus par 49 navires commandĂ©s par Doria pour les ravitailler et les dĂ©fendre contre les 200 navires que pouvaient rĂ©unir les Musulmans. En raison de cette disparitĂ© ainsi que de nouvelles pressions françaises, Doria dĂ©cide de retirer tous ses navires de la zone. La garnison se retrouve alors complètement isolĂ©e, face Ă  la passivitĂ© des VĂ©nitiens et de ses propres supĂ©rieurs en Italie.

Le siège

En juillet 1539 Barberousse commença les prĂ©paratifs pour assiĂ©ger la forteresse par mer et par terre. La flotte turco-algĂ©rienne qui bloqua l'accès depuis la mer Ă©tait commandĂ©e par Barberousse en personne et Ă©tait composĂ©e de 130 galères et 70 galiotes et 20 000 marins vĂ©tĂ©rans formaient les Ă©quipages. Au mĂŞme moment une armĂ©e de 30 000 hommes commandĂ©s par l'ulema de Bosnie se dĂ©ploya sur terre. Pendant que les Turcs finissaient d'encercler la forteresse et creusaient des tranchĂ©es, les Espagnols effectuèrent plusieurs sorties pour gĂŞner les travaux. Au cours de l'une d'elles, 800 Espagnols surprennent les janissaires turcs, et leur causent des centaines de morts. MalgrĂ© leur très grande supĂ©rioritĂ© numĂ©rique, et le fait que les dĂ©fenseurs ne disposaient pas d'aliments frais, les premiers assauts furent repoussĂ©s. Les Turcs dĂ©cidèrent d'offrir une honorable reddition aux dĂ©fenseurs, mais Sarmiento refusa et leur rĂ©pondit : « venez quand vous le voulez ».

Entre le 24 et 25 juillet, les Turcs laissent 6 000 morts sur le terrain, les Espagnols 100. Le matin suivant, 600 Espagnols sortent de la forteresse et prennent les Turcs par surprise, et c'est la panique dans leur camp. Barberousse doit se rĂ©fugier Ă  bord de ses galères. Barberousse dĂ©cida alors d'utiliser son artillerie qu'il avait ordonnĂ© de dĂ©ployer Ă  des endroits stratĂ©giques au cours des nĂ©gociations. Durant plusieurs jours les canons gĂ©ants turcs bombardèrent la place, comme ils l'avaient fait des annĂ©es plus tĂ´t avec les murailles plus rĂ©sistantes de Constantinople ou de Vienne. Les Turcs s'emparèrent des ruines de la forteresse, et les Espagnols survivants se rĂ©fugièrent sur les murailles. Le 5 aoĂ»t, Barberousse lance l'attaque gĂ©nĂ©rale contre les murailles, mais malgrĂ© la perte d'une tour, les Espagnols ne se rendent toujours pas. Le 6 aoĂ»t la pluie empĂŞcha l'utilisation des armes Ă  feu, mais on combattit Ă  l'arme blanche. Le 7 aoĂ»t dernier jour de combats, la forteresse n'avait plus de murailles, et les 600 derniers Espagnols se battirent contre toute l'armĂ©e ottomane. Sarmiento et tous ses capitaines moururent dans les derniers combats. Après cela, les 200 Espagnols qui restaient encore en vie se rendirent. Certains furent exĂ©cutĂ©s sur place peu après la bataille, et le reste fut envoyĂ© Ă  Constantinople comme esclaves.

6 ans plus tard, le 22 juin 1545, un navire entra dans le port de Messine, avec à son bord des prisonniers qui s'étaient échappés des prisons de Constantinople. Parmi eux il y avait 25 Espagnols survivants de Castelnuovo.

Conséquences

Le courage avec lequel se battit le tercio de Sarmiento provoqua une grande admiration dans toute l'Europe, et des chansons et des poèmes furent écrits sur son exploit, même si au fil du temps il sombra dans l'oubli. La destruction de Castelnuovo, et de manière générale l'échec de la Sainte Ligue de 1538 contribua à renforcer la puissance navale ottomane à un moment où elle aurait pu être éliminée pour toujours. Au cours des années suivantes, les Turcs remportèrent d'importantes victoires comme celles d'Alger (1541), Tripoli (1551), Bougie (1555), Chypre (1570), La Golette (1573), ils s'allièrent même avec les Français pour attaquer Nice en 1543. Les Autrichiens furent contraints de payer à nouveau un tribut aux Ottomans, et les navires algériens furent une menace constante pour les navires espagnols en Méditerranée jusqu'à la bataille de Lépante en 1571.

Notes et références

  1. Alfred Morel-Fatio, « Une histoire inédite de Charles-Quint par un fourrier de sa cour », Mémoires de l'Institut de France, vol. 39, no 1,‎ , p. 1–40 (DOI 10.3406/minf.1914.1597, lire en ligne, consulté le )
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