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SA-1 (Apollo)

SA-1, pour « Saturn Apollo-1 », fut le premier vol du lanceur américain Saturn I, premier de la famille de lanceurs Saturn, et la première mission du programme Apollo. La fusée fut lancée le de Cap Canaveral, en Floride[1] - [2], pour une mission très courte, d'une durée n'excédant pas quinze minutes.

SA-1
SA-1 au décollage, le 27 octobre 1961.
SA-1 au décollage, le .
Données de la mission
Organisation Drapeau des États-Unis NASA
Objectif Vol d'essais
Masse 52 480 kg
Lanceur Saturn I
Date de lancement 15 h 6 min 4 s UTC
Site de lancement Drapeau des États-Unis LC-34, Base de lancement de Cap Canaveral
DurĂ©e 15 minutes
Fin de mission 15 h 21 min 4 s UTC
Point de retombée Océan Atlantique
Distance parcourue 331,5 km
Paramètres orbitaux
Nombre d'orbites Aucune (vol suborbital)
ApogĂ©e 136,2 km
Navigation

Objectifs

Le premier étage de Saturn I était une énorme évolution en termes de taille et de puissance, comparé à tout ce qui avait pu être lancé avant. Il était trois fois plus gros, demandait six fois plus de carburant et produisait dix fois plus de poussée que la fusée Jupiter-C qui avait mis en orbite le premier satellite américain, Explorer 1, en 1958.

À ce moment-là, la NASA avait décidé de ne pas employer la technique du « all up testing », dans laquelle la totalité d'un système est testée du premier coup. L'agence spatiale américaine avait en fait prévu de tester chaque étage de fusée dans un lancement séparé et, pour la mission SA-1, seul le premier étage, le S-I, fut opérationnel.

Ce vol avait pour objectif de tester la structure du véhicule de lancement au cours d'un vol suborbital et employait une partie supérieure inerte provenant d'une fusée Jupiter.

Assemblage et mise en place du lanceur

SA-1 avant le lancement.

Comme il s'agissait du premier vol d'une Saturn, ses systèmes étaient toujours en cours de développement. Ce fut la première fois qu'un étage de fusée fut livré par barge à Cap Canaveral, et cette manœuvre permit de démontrer que cela pourrait être réalisé pour les étages plus imposants des futures fusées Saturn. Le premier étage et les deux étages supérieurs factices arrivèrent le [3] sur la barge nommée Compromise. Elle connut quelques problèmes pendant le voyage, s'échouant quatre fois en raison de cartes nautiques peu fiables. Sur le trajet du retour, la barge percuta un pilier de pont, subissant quelques dégâts mineurs.

Le premier étage fut érigé sans grande difficulté cinq jours plus tard sur le complexe de lancement 34 (LC-34) de la base de Cap Canaveral. Les tests furent effectués avec un léger retard sur les prévisions. À cette période, les tests n'étaient pas automatisés et nécessitaient l'activation et le basculement manuels de nombreux interrupteurs dans le centre de contrôle, puis l'observation des réactions de la fusée à la suite de ces manipulations.

Vol

Préparation pré-vol

La prĂ©paration prĂ©alable au lancement dĂ©buta le Ă  7 h 0 EST[4]. L'Ă©quipe des mĂ©caniciens affectĂ©e Ă  la fusĂ©e devait ce matin-lĂ  vĂ©rifier les panneaux de contrĂ´le des fluides Ă  haute pression, les mâts soutenant les câbles et ceux servant Ă  transfĂ©rer le carburant, ainsi que des bras maintenant la fusĂ©e au sol (anglais : holddown arms). La section de douze hommes affectĂ©e aux ergols, dirigĂ©e par Thomas Pantogliano, vĂ©rifia l'installation du carburant RP-1 Ă  12 h 30 pendant qu'une autre Ă©quipe se chargeait de mettre sous pression la bouteille d'hĂ©lium qui allait pressuriser le rĂ©servoir pendant le vol[4]. Une heure plus tard, le carburant RP-1 commença Ă  couler dans les rĂ©servoirs de la fusĂ©e. Le remplissage Ă©tait divisĂ© en trois phases principales. Tout d'abord, les techniciens remplissaient les rĂ©servoirs Ă  seulement 10 % de leur capacitĂ© en utilisant une procĂ©dure manuelle et un dĂ©bit faible de seulement 750 litres par minute, afin de vĂ©rifier qu'il n'y ait pas de fuites. Une fuite dans le mat d'amenĂ©e du carburant fut dĂ©tectĂ©e et rapidement rĂ©parĂ©e. Ensuite, Ă  14 h 30, l'Ă©quipe de remplissage dĂ©gagea le pas de tir pour la phase de remplissage rapide en mode automatique, dĂ©signĂ©e « fast fill ». Lors de cette seconde phase, le carburant remplissait les rĂ©servoirs Ă  un dĂ©bit bien plus Ă©levĂ©, de 7 570 litres par minute, ce qui permit de remplir les rĂ©servoirs Ă  97 % en environ 35 minutes[4]. La dernière phase retournait Ă  un dĂ©bit de remplissage faible pour les 3 % de carburant restants Ă  injecter dans les rĂ©servoirs. Comme il Ă©tait possible et assez facile d'Ă©liminer un potentiel trop-plein, la fusĂ©e disposant d'un système de vidange intĂ©grĂ©, l'Ă©quipe de remplissage injecta un lĂ©ger excĂ©dent (3 %)[5] du carburant requis pour la mission. Juste avant le lancement, l'Ă©quipe retira le carburant excĂ©dentaire des rĂ©servoirs pour revenir au niveau dĂ©sirĂ©[4].

Le compte-Ă -rebours, d'une durĂ©e de dix heures, dĂ©marra Ă  23 h 0, lorsque le pas de tir LC-34 bascula sur l'alimentation Ă©lectrique d'urgence du complexe de Cap Canaveral. Cette installation permettait de fournir une alimentation en Ă©nergie Ă©lectrique relativement stable et Ă  l'abri des fluctuations et des imprĂ©vus rencontrĂ©s sur le rĂ©seau normal. Ă€ T-570, soit 570 minutes avant l'heure de lancement prĂ©vue, les circuits Ă©lectriques et les composants de la fusĂ©e commencèrent Ă  se mettre en tempĂ©rature. Cinq minutes après, l'opĂ©rateur des panneaux de contrĂ´le activa les huit canaux de tĂ©lĂ©mesure, suivis par une sĂ©rie de tests de calibration. Ă€ T-510, les officiers du site effectuèrent une heure de vĂ©rifications au radar[4].

L'oxygène liquide commença Ă  remplir ses rĂ©servoirs Ă  3 h 0 le jour suivant, soit Ă  T-350. La mĂŞme procĂ©dure que pour le RP-1 fut employĂ©e, avec une première phase de remplissage Ă  10 % pour vĂ©rifier qu'il n'y ait pas de fuites dans les rĂ©servoirs ou sur la ligne d'alimentation, d'une longueur de 229 m, ainsi que pour refroidir les canalisations en prĂ©vision de la phase de remplissage rapide de cet ergol Ă  très basse tempĂ©rature[4]. Alors que la phase de remplissage automatique rapide depuis le rĂ©servoir de 473 000 litres d'oxygène liquide faisait appel Ă  une pompe centrifuge, l'opĂ©ration de prĂ©-refroidissement Ă  10 % ne reposait que sur la pression prĂ©sente dans le rĂ©servoir[4]. Le remplissage complet ne fut pas effectuĂ© directement, et le niveau Ă  10 % dans les rĂ©servoirs de la fusĂ©e fut maintenu pendant quatre heures[4].

Les procédures de remplissage furent suivies par une phase de tests de l'alimentation interne de la fusée, à partir de T-270. Une fois les différents systèmes testés pour s'assurer du bon fonctionnement des batteries du lanceur, à T-255, la fusée fut à nouveau reliée à son alimentation externe, en attente du lancement[4].

Lancement

SA-1 lors de son lancement, le .

Ă€ deux heures de l'horaire de lancement prĂ©vu — qui Ă©tait fixĂ© Ă  9 h 0 —, le compte-Ă -rebours fut arrĂŞtĂ© en raison d'un rapport mĂ©tĂ©o dĂ©favorable. Il ne reprit qu'Ă  7 h 34. L'Ă©quipe de lancement approcha alors la tour de service sur sa zone de stationnement, Ă  180 mètres de la fusĂ©e et mit en place la procĂ©dure de remplissage rapide pour l'oxygène liquide Ă  T-100[4]. L'ordre de dĂ©gager le pas de tir fut donnĂ© vingt minutes plus tard et Ă  une heure du lancement, l'officier de sĂ©curitĂ© du pas de tir donna l'autorisation de remplir les rĂ©servoirs[4]. L'Ă©quipe de remplissage entama une sĂ©quence de prĂ©-refroidissement de 6 min 30 s afin de refroidir Ă  nouveau les circuits de l'oxygène liquide, qui n'avaient pas Ă©tĂ© utilisĂ©s pendant quatre heures. Une fois les voyants indiquant que cette phase Ă©tait terminĂ©e, la pompe de l'installation d'oxygène liquide remplit les rĂ©servoirs de la fusĂ©e Ă  un dĂ©bit de 9 500 litres par minute, le remplissage Ă  99 % Ă©tant atteint en seulement trente minutes[4].

Un second arrĂŞt du compte-Ă -rebours fut demandĂ©, Ă  9 h 14, car les Ă©quipes de lancement craignaient que la prĂ©sence d'une couverture nuageuse n'obstrue la vision des camĂ©ras devant filmer le lancement. Le dĂ©compte fut relancĂ© une demi-heure plus tard, lorsque le ciel redevint dĂ©gagĂ©. Pendant les vingt dernières minutes, l’équipe de lancement effectua les dernières vĂ©rifications de la tĂ©lĂ©mesure, du radar et du système de commande. Les opĂ©rations de dĂ©compte automatiques dĂ©butèrent Ă  T-364 secondes, rĂ©alisĂ©es par un sĂ©quenceur commandant des circuits utilisant des fonctions logiques[4]. Le sĂ©quenceur surveillait les paramètres de pression des rĂ©servoirs, des circuits hydrauliques et des pompes. Il ordonna une purge d'azote du compartiment moteur et ferma les Ă©vents des rĂ©servoirs d'oxygène pour les pressuriser. La fusĂ©e bascula sur son alimentation Ă©lectrique interne Ă  T-35 secondes, et le sĂ©quenceur commanda l'Ă©jection du mât supportant le câble d'alimentation externe dix secondes plus tard. L'inondation du pas de tir par des trombes d'eau dĂ©buta Ă  T-5 secondes. Ă€ ce moment-lĂ , la dĂ©tection de la moindre anomalie pouvait toujours mener Ă  une interruption du lancement par le système automatique contrĂ´lant la fusĂ©e[4].

MalgrĂ© les deux retards liĂ©s aux conditions mĂ©tĂ©orologiques, la fusĂ©e ne fut lancĂ©e qu'avec une heure de retard sur l'horaire prĂ©vu, Ă  10 h 6 min 4 s EST (soit 15 h 6 min 4 s UTC). Contrairement Ă  une idĂ©e reçue, il n'y avait personne derrière un gros bouton rouge pour initier la mise Ă  feu de la fusĂ©e : tout Ă©tait gĂ©rĂ© de façon entièrement automatique par le sĂ©quenceur, qui ordonna la mise Ă  feu d'une charge pyrotechnique constituĂ©e d'un petit bloc de propergol solide[4]. Les gaz de cette combustion mirent en mouvement une turbine, qui entraĂ®nait Ă  son tour les turbopompes qui amenaient le RP-1 et l'oxygène liquide vers la chambre de combustion, par l'intermĂ©diaire de clapets Ă  commande hydraulique, oĂą ils furent embrasĂ©s grâce Ă  un fluide hypergolique[4]. Les moteurs s'allumaient par paires et dĂ©veloppaient leur poussĂ©e nominale en 1,4 seconde. Un dernier contrĂ´le de la combustion fut effectuĂ©, suivi d'une Ă©jection des mâts d'alimentation en RP-1 et en oxygène liquide, puis des pinces qui retenaient la fusĂ©e sur sa base. Le dĂ©collage eut lieu 3,97 secondes après le premier allumage[4].

Attentes et déceptions

Les ingénieurs avaient donné à la fusée seulement 75 % de chances de la voir décoller et seulement 30 % de chances de la voir réaliser un vol nominal[4]. Loin du pas de tir 34, les observateurs regardaient la fusée avec une certaine inquiétude, à mesure que le décompte se rapprochait du moment fatidique. Aucun des vols inauguraux précédents ne s'était déroulé sans souci, et la Saturn C-1 était un engin bien plus complexe que ses prédécesseurs[4].

Une défaillance sur le pas de tir, bien que peu discutée par les officiels du lancement, aurait été un désastre pour le reste du programme Apollo. La construction du pas de tir 37 (LC-37) ayant à peine commencé, une explosion sur le pas de tir aurait pu causer un retard d'un an aux fusées Saturn et au programme tout entier. La conception « en grappe » du premier étage de la fusée fut également une source d'inquiétude, avec ses huit moteurs et ses seize pompes, et les ingénieurs pensaient à ce moment-là avoir atteint les limites de ce concept[4].

Les habitants des environs avaient exprimĂ© leur inquiĂ©tude au sujet du son produit par la fusĂ©e au lancement. En effet, lors des essais au sol des moteurs au Redstone Arsenal, les ondes sonores avaient brisĂ© des fenĂŞtres Ă  12 km de lĂ  et certains habitants avaient ressenti le sol trembler sous leur pieds. Par mesure de prĂ©caution, des bouchons d'oreille avaient Ă©tĂ© fournis Ă  de nombreuses personnes et des installations de capteurs avaient Ă©tĂ© placĂ©es autour du site de lancement pour mesurer les ondes de choc produites pendant le lancement[4]. Finalement, le son produit par le lancement fut une dĂ©ception pour certains tĂ©moins[4] - [6], Ă©tant dĂ©crit comme celui d'une fusĂ©e Atlas, lorsque les observateurs se tenaient Ă  2,4 km au lieu de km pour un lancement de fusĂ©e Saturn. Il fut plus tard dĂ©terminĂ© que la diffĂ©rence entre Cap Canaveral et l'arsenal de Redstone venait des conditions atmosphĂ©riques, qui attĂ©nuaient une partie du bruit du lancement[4].

RĂ©ussite du vol

Le vol en lui-mĂŞme fut presque parfait[6]. La fusĂ©e atteignit une altitude de 136,5 km[7] et retomba dans l'ocĂ©an Atlantique Ă  345,7 km du pas de tir[1]. Le seul rĂ©el problème fut l'arrĂŞt des moteurs 1,6 seconde avant le moment prĂ©vu. Cette lĂ©gère anomalie fut attribuĂ©e au fait que les capteurs de densitĂ© des rĂ©servoirs de RP-1 avaient une lĂ©gère erreur de mesure, de seulement 0,4 %, soit 0,15 % au-dessus de la limite acceptable[4]. Il y eut donc une lĂ©gère erreur de remplissage et il y avait 400 kg d'oxygène liquide en trop et un manque de 410 kg de RP-1[4]. Pour le vol d'essais, SA-1 n'emportait que 83 % de la quantitĂ© d'ergols normale.

Notes et références

  1. (en) « Saturn SA-1 » [archive du ], NASA (consulté le ).
  2. (en) Mike Wright, « First Saturn Rocket Was Launched October 27, 1961 » [archive du ], MSFC History Office (consulté le ).
  3. (en) Lee Mohon, « This Week in NASA History: The First Saturn Rocket Arrives at Kennedy – Aug. 15, 1961 », NASA, (consulté le ).
  4. (en) Benson et Faherty 1978, p. 60–64. (lire en ligne)
  5. (en) Jim Dumoulin, « NASA Apollo Mission SA-1 », sur science.ksc.nasa.gov, KSC, (consulté le ).
  6. (en) « Saturn Blast 'Quieter' Than Expected », Miami Herald,‎ , p. 1.
  7. (en) « Saturn Test Flights », sur www.nasa.gov, NASA, (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Charles D. Benson et William Barnaby Faherty, Moonport : A History of Apollo Launch Facilities and Operations, CreateSpace Independent Publishing Platform, coll. « The NASA History Series », , 1re Ă©d., 656 p. (ISBN 1-4700-5267-9 et 978-1-47005-267-6, prĂ©sentation en ligne, lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

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