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Robe Delphos

La robe Delphos est une robe inventĂ©e en 1907 par Mariano Fortuny y Madrazo et sa femme Henriette Negrin. Ce vĂȘtement de soie a suscitĂ© un grand intĂ©rĂȘt, tant par la libertĂ© de mouvement qu'il permet, que pour sa technique de fabrication, rompant avec les crĂ©ations habituelles des couturiers, plus rigides.

Portrait, par JoaquĂ­n Sorolla y Bastida, en 1909, de Elena Sorolla GarcĂ­a, artiste espagnole, vĂȘtue d'une robe Delphos de Mariano Fortuny
Sergei Yesenin, Isadora Duncan et leur fille adoptive, Irma, vĂȘtue d’une robe Delphos de Mariano Fortuny, en 1922
La sculpture grecque : l'Aurige de Delphes

Description

Ce vĂȘtement est en satin de soie plissĂ©. Il peut ĂȘtre roulĂ© ou pliĂ© pour ĂȘtre mis dans une boĂźte, et retrouve pour autant sa forme et ses plis une fois revĂȘtu. La robe est d'ailleurs vendue roulĂ©e Ă  l'Ă©poque[1]. Il allonge la silhouette. Il tombe sur les Ă©paules (mais le dĂ©colletĂ© et les manches font l’objet de subtiles variantes) et moule le corps sans recourir aux coutures habituelles. DiffĂ©rentes teintures peuvent ĂȘtre utilisĂ©es, et quelquefois mĂ©langĂ©es, donnant l'impression de couleurs se fondant les unes dans les autres. Un lien de soie maintient la robe Ă  l'encolure et Ă  la taille. Des perles de verres de Murano la dĂ©corent, en lestant les ourlets et les pans[2] - [3].

Histoire

Les crĂ©ateurs de ce vĂȘtement, et du plissĂ© de soie qui le rend possible, sont Henriette Negrin et son mari Mariano Fortuny, peintre, photographe, scĂ©nographe, inventeur, et accessoirement couturier. D'origine espagnole, il s'installe Ă  Venise un peu avant les annĂ©es 1900, se passionne tout autant pour cette ville, pour l'antiquitĂ© grecque, pour l'aesthetic movement anglais et pour les techniques nouvelles de ce dĂ©but du XXe siĂšcle[2] - [4]. L'Ă©poque est alors Ă  l’apparition de nouvelles silhouettes que certains couturiers tentent d'imposer, tel Paul Poiret[5].

Le , Mariano Fortuny dĂ©pose un brevet Ă  Paris sur ce vĂȘtement, le brevet d'invention n° 408.629, intitulĂ© « Genre de vĂȘtement pour femmes ». Il y prĂ©cise notamment qu'il s'agit d'une robe « consistant essentiellement en un fourreau ouvert Ă  ses deux extrĂ©mitĂ©s dont les bords sont rapprochĂ©s Ă  la partie supĂ©rieure de maniĂšre une ouverture centrale d'encolure, deux ouvertures latĂ©rales pour les bras et deux ouvertures Ă  bords rapprochĂ©s par un laçage s'Ă©tendant le long des bras avec des coulisses obliques [
] pour permettre d'ajuster le dessous de la manche. »[6]. Cette robe doit son nom Ă  l'aurige de Delphes, une cĂ©lĂšbre sculpture de la GrĂšce antique, et l'un des cinq seuls grands bronzes qui nous soient parvenus de l'Ă©poque classique[2]. La robe rencontre le succĂšs et se voit portĂ©e, entre autres, par Peggy Guggenheim, Luisa Casati et plusieurs artistes, mondaines ou riches hĂ©ritiĂšres[1].

Un des éléments du succÚs de cette robe d'« inspiration néoclassique[5] », pendant plus de quarante ans car plusieurs fois rééditée, reste le plissé singulier de la soie que réussit à réaliser Mariano Fortuny. Celui-ci contribue à allonger la silhouette, à l'exemple de la sculpture antique, tout en s'adaptant à tous les corps par sa coupe : cette derniÚre peut atténuer les formes, comme les souligner, suivant la façon dont elle est accessoirisée et portée[5]. Mariano Fortuny a, sur ce point, ses secrets de fabrication[3] - [7].

Bien que le brevet porte le nom de Mariano Fortuny, son Ă©pouse Henriette Fortuny, qui Ă©tait couturiĂšre et artiste en arts textiles, en revendique la crĂ©ation dans une lettre qu'elle Ă©crivit Ă  Elsie McNeill au moment de la vente de l’entreprise Ă  cette derniĂšre. Henriette Fortuny lui demande de cesser la production des robes Delphos et justifie sa dĂ©cision en prĂ©cisant qu'il s'agit de « sa propre crĂ©ation »[8].

Cette crĂ©ation inspire ultĂ©rieurement d'autres couturiers, notamment Madeleine Vionnet, qui partage la mĂȘme passion pour la GrĂšce antique, ou en 1993, Issey Miyake, avec ses collections Pleats Please [Des plissĂ©s, s'il vous plaĂźt][2]. Par l'utilisation d'un textile polyester plissĂ© Ă  chaud Ă  la presse, Issey Miyake obtient Ă  son tour des plis permanents[7].

Références

  1. Brunel 2017, p. 144.
  2. Worsley 2011, p. 16-17.
  3. Site du Palais Galliera
  4. LM 1993, Le Monde.
  5. Desemerie 2018.
  6. Renard 2014, p. 67.
  7. Beneytout 2015, p. 32.
  8. Note 1, p.73, « A short biographical note on Henriette Nigrin, creator of Delphos », DatatÚxtil numéro 36, p.73-84 (en anglais et espagnol)

Voir aussi

Bibliographie

  • RĂ©daction LM, « Sans Visa. Parcours. Greenaway s'invite au Palais Fortuny », Le Monde,‎ (lire en ligne). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article.
  • Harriet Worsley (trad. de l'anglais), 100 idĂ©es qui ont transformĂ© la mode [« 100 ideas that changed fashion »], Paris, Éditions du Seuil, , 215 p. (ISBN 978-2-02-104413-3), « La robe « Delphos » », p. 16-17. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article.
  • Isabelle Renard, « Mariano Fortuny », dans Fashion Mix. Mode d’ici, crĂ©ateurs d’ailleurs, Palais Galliera et Ă©ditions Flammarion, , p. 66-70. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article.
  • Jean-Jacques Boucher, Le dictionnaire de la soie : dĂ©couvrir son histoire de ses origines jusqu’à nos jours, Fernand Lanore, , 655 p. (lire en ligne), « Fortuny Mario », p. 241.
  • Christelle Beneytout, Guide des tissus par projets de couture, Éditions Eyrolles, , 199 p. (lire en ligne), « Les apprĂȘts esthĂ©tiques », p. 32. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article.
  • Jacques Brunel, « Fortuny le magnifique », L'Express diX, vol. supplĂ©ment Ă  L'Express, nos 1/10,‎ , p. 140 Ă  146. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • Denis Bruna (dir.), ChloĂ© Demey (dir.), Pierre-Jean Desemerie et al., Histoire des modes et du vĂȘtement : du Moyen Âge au XXIe siĂšcle, Éditions Textuel, , 503 p. (ISBN 978-2845976993), « 1905-1914 : un faux-semblant de libertĂ© ? », p. 310. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article

Webographie

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