AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

René Lucet

René Lucet est un directeur de caisse de la Sécurité sociale française, né le à Fontainebleau, en France. Découvert mort le dans sa villa au sein du quartier Saint-Barnabé à Marseille, les circonstances de son décÚs sont mystérieuses et pourraient résulter d'un assassinat.

René Lucet
une illustration sous licence libre serait bienvenue
Biographie
Naissance
DécÚs
Sépulture
Nom de naissance
René Philippe Lucet
Nationalité

Biographie

À l'Ăąge de vingt ans, RenĂ© Lucet entre, en 1963, Ă  la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Melun, en tant qu'employĂ© et poursuit parallĂšlement ses Ă©tudes de droit (licence en droit) ; il occupe ensuite un poste de rĂ©dacteur juridique, aprĂšs avoir obtenu le diplĂŽme du CNESS (Centre national d'Études de la SĂ©curitĂ© sociale). Il revient Ă  la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Melun en tant que secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral appuyĂ© par FO et le CNPF pour prendre en main cet organisme dirigĂ© par M. Bonamy, directeur proche de la CGT. Il devient ensuite directeur de cet organisme aprĂšs l'avoir dirigĂ© en tant que directeur adjoint avec un directeur fantoche. DĂšs 1972, il est l'un des premiers directeurs de caisse Ă  s'informatiser : il est alors le plus jeune directeur de CPAM Ă  l'Ăąge de trente-deux ans. Le , il devient directeur de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) des Bouches-du-RhĂŽne, qui est la seconde de France en importance aprĂšs celle de Paris (1 500 000 assurĂ©s sociaux Ă  gĂ©rer, avec un personnel de 3 500 agents et un budget de remboursement de trente millions de francs, soit l'Ă©quivalent de plus de dix millions d'euros des annĂ©es 2020). Il veut rĂ©former cette caisse qui ne fonctionne pas bien Ă  l'Ă©poque : quelque 800 000 dossiers de remboursement ou de gestion sont en souffrance, les dĂ©lais de rĂšglement sont d'un mois environ, des grĂšves Ă  rĂ©pĂ©tition ont lieu, l'absentĂ©isme des agents est de 31 %. Il dĂ©sire augmenter sensiblement les centres de paiement qui existaient alors dans Marseille, afin de faciliter la vie des usagers et veut les faire passer de 28 Ă  45. Le conseil d'administration de la caisse, Ă  composition paritaire (reprĂ©sentants du patronat et des syndicats), vote d'ailleurs cette proposition le . Il choisit alors une procĂ©dure rapide mais discutable, celle des marchĂ©s de grĂ© Ă  grĂ©, et il engage un budget trĂšs important de prĂšs de vingt-trois millions de francs, soit l'Ă©quivalent de plus de sept millions d'euros des annĂ©es 2020.

Il impose, par des mĂ©thodes musclĂ©es, un assainissement des finances. En particulier, il met fin Ă  la dĂ©lĂ©gation de service public dont avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© plusieurs mutuelles liĂ©es Ă  la CGT. Apparemment, le syndicat en avait profitĂ© pour se constituer une caisse noire. Il dĂ©couvre aussi un systĂšme de financement proche de la mafia marseillaise. À cette Ă©poque, de sensibilitĂ© gaulliste (ancien adhĂ©rent de l'Union des Jeunes pour les ProgrĂšs, dans sa jeunesse Ă  la section de Fontainebleau), adhĂ©rent actif de Force ouvriĂšre quand il est entrĂ© Ă  la caisse de Melun, ancien conseiller municipal au moment oĂč Paul SĂ©ramy Ă©tait le maire de Fontainebleau, franc-maçon (Ă  la Grande Loge de France), il aurait pu devenir ministre des Affaires sociales si la droite avait gagnĂ© les Ă©lections de . Mais aprĂšs l'Ă©lection de François Mitterrand, il perd tous ses appuis[1].

Le nouveau gouvernement dĂ©cide, en , sur demande de la CGT, de procĂ©der Ă  une enquĂȘte et Ă  une inspection faite par l'Inspection GĂ©nĂ©rale des Affaires Sociales sur sa gestion et ses mĂ©thodes de gouvernance. Cette enquĂȘte est faite Ă  charge Ă  compter de septembre et son rapport final est communiquĂ© Ă  l'intĂ©ressĂ© le . À sa suite, RenĂ© Lucet produit un rapport de 28 pages contrant systĂ©matiquement toutes les affirmations du rapport produit par cette inspection. Le , le conseil d'administration de la caisse renouvelle, aprĂšs avoir l'entendu pendant 5 heures, sa confiance Ă  son directeur (votes contre : CGT et CFDT).

Par la ministre de tutelle (Nicole Questiaux), il fait l'objet de mesures de suspension de sa fonction de directeur de CPAM de Marseille le [2].

À la suite des enquĂȘtes policiĂšres menĂ©es aprĂšs le dĂ©cĂšs de RenĂ© Lucet, est dĂ©couverte une imbrication de deux rĂ©seaux. Le premier Ă©tait basĂ© Ă  Marseille, fondĂ© par Dominique (Nick) Venturi, un ancien truand rescapĂ© de la guerre des gangs qui avait suivi l'arraisonnement du yacht Combinatie dans les annĂ©es 1950 et avait fait prĂšs de vingt-cinq morts en moins de vingt ans. Il fabriquait de fausses factures destinĂ©es Ă  alimenter des caisses noires Ă©lectorales pour des politiciens provençaux.

Le second, niçois, Ă©tait dirigĂ© par un inspecteur des impĂŽts de cette ville, Julien Zemour, cousin des truands du mĂȘme nom, et qui bĂ©nĂ©ficiait nĂ©cessairement de la complicitĂ© des directeurs des hĂŽpitaux, « victimes » de cette fraude.

Le scandale révélera la corruption de nombreux fonctionnaires dans diverses mairies de toute la France et de toutes couleurs politiques (Paris, Nice, Marseille, Clermont-Ferrand, Le Havre, Perpignan
)[3]

RenĂ© Lucet est retrouvĂ© mort le ; officiellement, il s'est suicidĂ© en se tirant deux balles dans la tĂȘte et des diffamtions suivront aprĂšs sa mort violemment combattue par la veuve Lucet[4] - [5].

Une violente polémique s'ensuit[6]. La droite accuse le gouvernement de l'avoir acculé au suicide. La gauche s'étonne de cette mort et se demande s'il ne s'agit pas d'un meurtre[7]. René Lucet aurait été tué parce qu'il en savait trop sur certains financements politiques[8].

Plus d'un fait est troublant[9]. Tout d'abord, RenĂ© Lucet s'est suicidĂ© de deux balles dans la tĂȘte. Selon les rapports d'autopsie, les deux balles Ă©taient mortelles et successives et ont Ă©tĂ© tirĂ©es dans le mĂȘme orifice.

Ensuite, l'un des policiers lave la main de RenĂ© Lucet aprĂšs avoir relevĂ© les empreintes, ce qui empĂȘche de faire un test Ă  la cire pour savoir si le mort a rĂ©ellement tirĂ© (test connu par toutes les polices du monde depuis bien longtemps).

Pour terminer, le commissaire Marza rĂ©dige un rapport le indiquant que ni la prĂ©sence de sang au plafond, ni la position de RenĂ© Lucet, ni le tir de deux balles successives ne peuvent ĂȘtre expliquĂ©s, comme le rĂ©vĂšle Le Canard enchaĂźnĂ© du .

Le , le corps de RenĂ© Lucet est exhumĂ© : le collĂšge d'experts affirme que les deux balles ont Ă©tĂ© tirĂ©es successivement et que RenĂ© Lucet Ă©tait vivant quand la deuxiĂšme fut tirĂ©e. Robert Badinter s'indigne que le procureur de Marseille Albert Vilatte n'ait pas fait remonter de telles informations et qu'il ait mĂȘme refusĂ©, dans un premier temps, le rapport du commissaire Marza. DĂšs la fin mars, le procureur Vilatte est mutĂ© et promu avocat gĂ©nĂ©ral prĂšs la Cour d'Appel de Paris "dans l'intĂ©rĂȘt du service". Pierre Truche, avocat gĂ©nĂ©ral Ă  la cour Ă  Grenoble le remplace. Quant Ă  Marcel Guilbot, procureur gĂ©nĂ©ral Ă  Aix-en-Provence, il est remplacĂ© par Georges Beljan, ancien directeur de cabinet de Robert Badinter[10] - [11] - [12] - [13].

Une instruction sur les causes de la mort de RenĂ© Lucet est ouverte sur dĂ©cision du Parquet de Marseille, un mois aprĂšs la constatation du dĂ©cĂšs. L'instruction de cette affaire est confiĂ©e au juge d'instruction Bernadette AugĂ© le 23 mars[14] - [15]et en mai de l'annĂ©e 1984, 13 personnes sont Ă©crouĂ©es par Mme Françoise Llaurens-GuĂ©rin, juge d'instruction, et de l'enquĂȘte, conduite par la section Ă©conomique et financiĂšre de la police judiciaire de Marseille[16]. En , la juge d'instruction rend une ordonnance de non-lieu, sans avoir pu Ă©claircir l'affaire[17].

Une émission de France Inter Rendez vous avec X a été consacrée à l'affaire René Lucet le [18], ainsi qu'une autre sur RTL, de Jacques Pradel, L'Heure du crime du .

Notes et références

  1. http://tracescitoyennes.fr/doc_num.php?explnum_id=299
  2. Le Monde, « La lettre de Mme Questiaux et la rĂ©ponse de l'accusĂ© », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  3. JEAN CONTRUCCI, « " C'est une affaire politique ", nous dĂ©clare M. RenĂ© Lucet », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  4. PIERRE GEORGESJEAN CONTRUCCI, « Des experts sont chargĂ©s de rĂ©examiner les circonstances de la mort de RenĂ© Lucet VĂ©rifications », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  5. JEAN CONTRUCCI, « Mme Lucet dĂ©nonce " les horreurs qui salissent une famille Ă©prouvĂ©e " », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  6. JEAN CONTRUCCI, « ‱ M. Lucet, le directeur dĂ©mis par Mme Questiaux, se donne la mort ‱ Un dĂ©putĂ© U.D.F. demande une enquĂȘte parlementaire », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  7. https://www.vie-publique.fr/discours/200179-declaration-de-m-pierre-mauroy-premier-ministre-sur-la-politique-gouv
  8. DANIÈLE ROUARD, « ‱ M. Defferre dĂ©nonce une utilisation Ă©lectorale d'" un drame trĂšs triste " ‱ M. Pasqua : " Nous nous acheminons vers une guerre civile larvĂ©e "
 », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  9. JEAN CONTRUCCI., « Le suicide de RenĂ© Lucet n'est ni confirmĂ© ni infirmĂ© », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  10. Alain Laville, Le juge Michel, Chapitre : Le juge ne sera jamais vengé, éditeur France-Loisirs, 1982.
  11. B. L. G., « ‱ M. Beljean quitte le cabinet de M. Badinter ‱ Le procureur gĂ©nĂ©ral d'Aix-en-Provence est placĂ© en " congĂ© spĂ©cial " aprĂšs l'affaire Lucet », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  12. JEAN-MARC THÉOLLEYRE, « L'affaire des " grĂąces mĂ©dicales " de Marseille sera jugĂ©e par le tribunal de Versailles », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  13. Paul Cassia, Robert Badinter, un juriste en politique, éditeur Fayard, 2009.
  14. JEAN CONTRUCCI., « Le juge d'Instruction reprend certaines auditions dans l'affaire Lucet », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  15. PIERRE GEORGES, « Les " vendanges " de Marseille », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  16. JEAN CONTRUCCI., « Treize personnes sont Ă©crouĂ©es Ă  la prison des Baumettes 15 millions de francs auraient Ă©tĂ© dĂ©tournĂ©s au dĂ©triment de la SĂ©curitĂ© sociale », Le Monde,‎ (lire en ligne AccĂšs payant, consultĂ© le ).
  17. https://www.valeursactuelles.com/societe/enigmes-criminelles-laffaire-rene-lucet/
  18. « Rendez-vous avec X, le site non-officiel de l'émission de Patrick Pesnot », sur rendezvousavecmrx.free.fr (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean Montaldo, 850 jours pour abattre RenĂ© Lucet, Ă©d. Albin Michel, 336 p., .
  • Jean Cosson, Les Industriels de la fraude fiscale, Ă©d. Jean de Bonnot, 217 p., 1987.
  • L'argent secret des Ă©lections, Les Dossiers du « Canard enchaĂźnĂ© », no 27, mars-.
  • Jean-François Miralles, Il Ă©tait une fois RenĂ© Lucet, 1992.
  • Jules Ambroziak, Le voisin de la rue des Ă©carlates, Ă©d. le PhĂ©nix du Lion, 120 p., .

Ouvrages traitant indirectement de l'affaire

  • Jean-Charles de Fontbrune, ProphĂ©ties de Nostradamus pour le roy François, 1983.
  • GĂ©rard Badou, L'Ă©tat de santĂ© : Notre santĂ© aux mains des politiques, 1985.
  • Roland Passevant, Journaliste sous haute surveillance : 1981-1987 Ă  TF1, 1986.
  • JosĂ© d'Arrigo, Marseille mafias: Ce que personne n'ose dire, 2012.

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.