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Radinerie

La radinerie est une forme d'avarice. Le philosophe grec ThĂ©ophraste distingue avarice (ÎŒÎčÎșÏÎżÎ»ÎżÎłÎŻÎ±)[1]de radinerie (ÎŒÎčÎșÏÎżÏ†ÎčÎ»ÎżÏ„ÎčÎŒÎŻÎ±)[2] : la radinerie est un manque de prodigalitĂ© ; l'avarice est une Ă©pargne excessive.

DĂ©finition

Historiquement, le terme « radin » dĂ©signe d’une maniĂšre pĂ©jorative une personne avare, c’est-Ă -dire qui a de l’argent mais refuse de le dĂ©penser, mĂȘme quand c’est utile. Le personnage a Ă©tĂ© caricaturĂ© par MoliĂšre sous les traits d’Harpagon, dans la piĂšce de thĂ©Ăątre L’Avare, ou par Balzac dans son roman EugĂ©nie Grandet. Le hĂ©ros de dessins animĂ©s Picsou, crĂ©Ă© par Carl Barks pour les studios Walt Disney, a Ă©galement rĂ©pandu une image nĂ©gative du radin, celle d’un homme qui amasse et garde tout son argent.

Aujourd’hui assumĂ©s, les radins forment une communautĂ© de nouveaux consommateurs. Ils utilisent notamment Internet pour rĂ©aliser des Ă©conomies et dĂ©penser plus intelligemment[3].

En France, cette tendance a Ă©mergĂ© au dĂ©but des annĂ©es 2000, dans un contexte de baisse du pouvoir d’achat et de hausse des prix aggravĂ©e par le passage Ă  l’euro[4]. En 2001, Priceminister, un site spĂ©cialisĂ© dans la vente de produits culturels d'occasion, a lancĂ© une campagne de publicitĂ© autour du slogan « Devenez radins »[5] ; en , PlanĂšte Saturn, une chaĂźne de grandes surfaces d'Ă©lectromĂ©nager et de multimĂ©dia, s'appuie sur le slogan « plus radin, plus malin »[6].

Internet a donné naissance à une communauté de « nouveaux économes » qui s'en servent pour comparer les prix, recevoir des échantillons gratuits, profiter de bons d'achat, de réduction et de codes promotionnels, gagner des cadeaux ou des produits gratuits, imprimer des offres de remboursement, profiter de prix dégriffés, bénéficier d'offres gratuites, participer à des ventes privées, à des sondages rémunérés, etc.[7] Face à la vie chÚre, les économes sont aussi devenus des adeptes des magasins hard-discount et du low cost[8]. Symbole de la culture du gratuit, Internet a amplifié le phénomÚne traditionnel des « bons plans » et des bonnes affaires autour de sites proposant des astuces pour dépenser moins[9]. Ce mode de dépense lui fait plus rapprocher de la définition des économes, c'est-à-dire des consommateurs qui dépensent plus malin plutÎt que dépenser le moins possible.

Un nouveau mode de consommation

Le « nouveau radin » n’a pourtant plus rien d’un Harpagon. Il est dĂ©sormais responsable, engagĂ©, et paradoxalement, plus gĂ©nĂ©reux. « Consommacteur » avisĂ©, il favorise le recyclage et la rĂ©cupĂ©ration, pratique le troc ou l’achat-vente entre particuliers et prĂŽne le « systĂšme D » comme mode de vie. Il veut donner du sens Ă  ses achats et s’interroge sur la logique de nos sociĂ©tĂ©s d’hyperconsommation[10]. Ce consommateur d’un nouveau genre dĂ©fend des valeurs de partage et Ă©change ses bons plans sur Internet, au sein de la communautĂ© des radins, Ă  travers sites et forums spĂ©cialisĂ©s[11].

Les plus militants d’entre eux, Ă©cologistes, altermondialistes, se reconnaissent dans la mouvance des casseurs de pub, des freegan, ou de ceux qui prĂŽnent la dĂ©croissance, c'est-Ă -dire la rĂ©duction globale de la production et de la consommation des pays riches. Ils se placent ainsi dans la lignĂ©e de la simplicitĂ© volontaire, un mouvement nĂ© au milieu des annĂ©es 1980, aux États-Unis, et qui incite Ă  travailler, gagner et dĂ©penser moins pour vivre plus heureux.

Remarques

Le radin est encore parfois mal perçu en sociĂ©tĂ©. D'un point de vue psychologique, l’avarice peut dĂ©truire ceux qui souffrent d’une relation trop difficile avec l’argent[12]. On peut aussi s’interroger sur le paradoxe d'une tendance issue de la sociĂ©tĂ© de consommation, au moment oĂč ces « nouveaux radins » intĂ©ressent de plus en plus les distributeurs et les publicitaires, pour qui ils constituent dĂ©sormais une vĂ©ritable cible marketing[13].

Notes et références

  1. Les CaractĂšres, X
  2. Les CaractĂšres, XXII
  3. Ils pompent Ă©galement l’argent de leurs amis et n’hesitent Pas Ă  faire exprĂšs de ne pas prendre leur carte bancaire lorsque le moment de payer est venu . Leur plus grand adepte et en quelque sorte le gourou de cette communautĂ© ce nome Nouredine mimouni. En effet ce prĂȘcheur invĂ©tĂ©rĂ© de la radinerie prĂŽne la non dĂ©pense et se veut Ă©conome jusqu’a La moile. Claire Chantry, « Les Français adoptent la «radin attitude» », Le Parisien,‎ (lire en ligne).
  4. Clara Dufour, « Le nouveau radin aime dĂ©penser malin », Le Figaro,‎ (lire en ligne).
  5. « Publicité OFFline : Comment l'Internet communique "pour de vrai" », sur Le Journal du Net, .
  6. Delphine Masson, « PlanĂšte Saturn et Connexion Ă  l'assaut de la citadelle Darty », StratĂ©gies, no 1336,‎ (lire en ligne).
  7. Julie Pacorel, « Au bonheur du radin », Le Nouvel Observateur, no 2166,‎ semaine du 11 mai 2006 (lire en ligne).
  8. Sabine Syfuss-Arnaud, « Le moteur de la conso carbure au low cost », Challenges,‎ (lire en ligne).
  9. Catégorie « Réduction et promotions » sur l'ODP.
  10. Alexandre LĂ©vy, « Les nouveaux radins », L'Express,‎ (lire en ligne).
  11. Christophe Alix et Laure Noualhat, « La dĂ©brouille des consommateurs », LibĂ©ration,‎ (lire en ligne).
  12. Catherine Marchi, « Autopsy : Je suis radin(e) », Psychologies magazine,‎ (lire en ligne).
  13. Marie-JoĂ«lle Gros, « Radins et fiers de l'ĂȘtre », LibĂ©ration,‎ (lire en ligne).

Bibliographie

  • Catherine Cusset, Les Confessions d'une radine, Paris, Gallimard, coll. « Blanche », , 138 p. (ISBN 2-07-076815-5)
  • Jacques Dutertre, Vivez plus riche, vive les radins : remboursĂ© en une semaine, Paris, Christine Bonneton, coll. « Des rĂ©ponses pratiques », , 272 p. (ISBN 2-86253-326-2)
  • Marie-JoĂ«lle Gros, Radins, Paris, Editions PrivĂ©, (ISBN 2-35076-081-2)



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