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Quand mourut Jonathan

Quand mourut Jonathan est un roman de Tony Duvert paru en avril 1978 aux Ă©ditions de Minuit en France[1] et aux Ă©ditions Gay Men's Press au Royaume-Uni.

Quand mourut Jonathan
Auteur Tony Duvert
Éditeur Les Éditions de Minuit
Date de parution avril 1978
Nombre de pages 244
ISBN 9782707302199

Genèse

À l'époque de ses fréquents allers et retours entre le Maroc et la France, Tony Duvert aurait eu des rapports sexuels avec un garçon de six ans que sa mère, apparemment peu attentive, lui avait confié. L'auteur se serait inspiré de leur histoire pour écrire son roman, Serge étant le double littéraire du garçon et Jonathan, le sien. Dans le premier ouvrage qu'il a consacré à Tony Duvert, Gilles Sebhan avait recueilli suffisamment d'éléments pour conclure que cette histoire avait réellement eu lieu. Il estimait qu'elle s'était déroulée en partie à Thoré-la-Rochette, dans la maison familiale des Duvert, auquel fait penser le décor de passages du roman. Il n'avait cependant pu découvrir comment s'appelait l'enfant ni ce qu'il était devenu[2]. Dans son second ouvrage sur le sujet, Sebhan a pu établir que l'histoire s'était déroulée uniquement à Paris et non en province comme dans le roman, que l'enfant s'appelait Jean et qu'il était mort d'une overdose au début des années 1980[3].

Résumé

Jonathan est un peintre solitaire de 27 ans, vivant seul à la campagne. Un jour, il se lie d'amitié avec une mère célibataire, Barbara, et son enfant de six ans, Serge, dont il devient complice. Deux ans passent. Alors que le garçon est désormais âgé de huit ans, son amie lui confie la garde de son fils pour une semaine. Quelques jours plus tard, Barbara, alors aux États-Unis, fait savoir par courrier à Jonathan qu'elle ne peut venir récupérer Serge avant deux mois. Ayant le jeune garçon sous sa responsabilité, Jonathan tente de l'occuper comme il peut. Au fil des jours, leur amitié intime se transforme en amour charnel, si bien que le jeune peintre ne parvient plus à se passer de Serge durant un été entier.

Perturbé lorsque Serge retourne à Paris, Jonathan tente par tous les moyens de l'oublier mais n'y parvient pas et sombre peu à peu dans l'alcoolisme et la dépression. Maîtrisant de plus en plus difficilement ses pulsions sexuelles, il tente de copuler avec des garçonnets, repérés lors de balades, mais ne trouve dans ces pratiques aucune satisfaction affective ou charnelle. Entre-temps, Barbara retrouve et épouse Simon, le père de son fils, mais se fâche avec Jonathan pour lequel elle éprouve une méfiance croissante. Grâce à Simon, Jonathan et Serge finissent par se rencontrer de nouveau et le jeune garçon, désormais âgé de dix ans, vient passer un nouvel été chez Jonathan. Les deux amis en profitent pour relancer leur relation. Cependant, deux mois plus tard, Simon ordonne à Jonathan de ramener Serge à Paris. Dans le train qui les amène à la capitale, les deux garçons tentent d'élaborer des stratagèmes pour se retrouver en cachette. En vain.

À l'approche des vacances de Pâques, Serge demande à son père s'il peut retourner chez Jonathan. Simon accepte mais doit avant tout demander son consentement à Barbara qui, de plus en plus hostile à Jonathan, refuse net. Simon tente de la convaincre au cours d'une longue discussion dans le lit conjugal, mais Barbara lui fait comprendre qu'elle ne changera pas d'avis. Dans la chambre mitoyenne, Serge, qui a entendu leur conversation, décide de fuguer pour aller retrouver Jonathan. Il met son plan à exécution le lendemain même alors que l'appartement familial est vide. Après avoir erré plusieurs heures en périphérie de Paris, il se met à faire du stop au bord d'une route puis, pris de remords et de désespoir, il se suicide en se jetant sous une voiture.

Le roman se veut une critique de la société et vise avant tout des institutions telles que l’école et la famille.

Accueil critique

La critique est unanimement positive et souligne le cĂ´tĂ© apologique, presque « militant Â», qui Ă©mane du roman en faveur de la pĂ©dophilie oĂą le principal objet d'intĂ©rĂŞt s'avère ĂŞtre le jeune garçon qui symbolise Ă  lui seul la source d'un amour « fascinant, irrĂ©sistible Â» et la recherche de « son propre paradis perdu Â» (La Quinzaine littĂ©raire)[4]. La signification mĂŞme de l'« innocence Â» est remise en question dans le cas des enfants et apparaĂ®t comme un « Ă©tat qui se trouve retranchĂ©, Ă  l’écart absolu des gens et des projections des grands. Â» (Les Nouvelles littĂ©raires)[4].

Pour Bertrand Poirot-Delpech du Monde, qui livre une critique très complète de l'ouvrage en , « les parents feraient mieux de se documenter aux sources, c’est-Ă -dire en lisant non des traitĂ©s de psychosocio mais des tĂ©moignages directs de la nouvelle gĂ©nĂ©ration Â», faisant ainsi allusion Ă  l'aventure amoureuse vĂ©cue par les deux personnages du roman qu'il qualifie principalement d'« association biologique Â» qu'il compare Ă  « des bĂŞtes s’épouillant, ou des plantes Ă©liminant mutuellement les poisons nuisibles Ă  l’autre[4]. Â» Il souligne Ă©galement le progressif passage Ă  l'adolescence de Serge qui marque un tournant tragique dans la relation qu'il entretient avec Jonathan : « Après une sĂ©paration forcĂ©e le couple traquĂ© se reforme. Mais l’enfant est devenu quelqu’un d’autre. Il a suffi de ces quelques mois, qu’a si bien dĂ©crits Montherlant, oĂą apparaissent des duvets et des influences imprĂ©visibles, Ă©trangers. L’enfant a appris Ă  nommer ce qu’il sentait intensĂ©ment hors de tout vocable, et changĂ© la chose pour le mot ; triste troc. Son corps se sent de trop, objet rapportĂ©. Ses Ă©treintes n’ont plus leur place dans la suite des plaisirs et des jours. Â» Finalement, la leçon Ă  tirer du roman selon lui est que « l’amour meurt de se vouloir social et vit de plonger dans l’animalitĂ©. Loin des contrats et des contraintes, le bonheur y retrouve son innocence de bĂŞtes au gĂ®te, son violent goĂ»t de ferme. Â»

Références

  1. Louis Ceschino, Thierry Guichard, « Le Matricule des Anges : Quand mourut Jonathan - Tony Duvert », sur www.lmda.net (consulté le )
  2. Sebhan 2010, p. 92-99.
  3. Sebhan 2015, p. 82-85.
  4. Les Éditions de Minuit, « Quand mourut Jonathan », sur www.leseditionsdeminuit.fr (consulté le )
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