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Propulsion hybride (fusée)

Un propulseur hybride est un moteur-fusée utilisant un mélange d'ergols liquides (ou gazeux) et solides. Ce type de motorisation présente l'avantage, comme tous les moteurs-fusées, de pouvoir fonctionner en l'absence d'atmosphère puisque le carburant et le comburant sont embarqués. Ses caractéristiques en font un compromis entre un moteur-fusée à ergols liquides et un propulseur à propergol solide. Par rapport à un moteur-fusée à ergols liquides, il est de conception plus simple et donc moins fragile et brûle des ergols qui ne sont pas susceptibles d'exploser. Contrairement à un propulseur à propergol solide, la poussée du moteur peut être à tout moment modulée ou interrompue.

Son utilisation est jusqu'à présent limitée car les performances obtenues en pratique restent décevantes. L'exemple de mise en œuvre le plus connu est celui des avions spatiaux SpaceShipOne et SpaceShipTwo qui l'utilisent ou doivent l'utiliser pour effectuer des vols suborbitaux : dans ce cas le choix de ce type de propulsion est lié à des considérations de coût et de sécurité. Des recherches récentes sur de nouveaux carburants plus efficaces pourraient offrir d'autres débouchés pour ce type de propulsion.

Principes de fonctionnement

Schéma d'un propulseur hybride

Le moteur-fusée hybride repose, comme la majorité des moteurs-fusées, sur la combustion très exothermique d'un carburant et d'un comburant qui produit un grand volume de gaz de combustion qui s'échappent à grande vitesse du moteur en produisant la poussée désirée. Un moteur-fusée hybride comporte principalement un réservoir pressurisé contenant le comburant (ou oxydant) sous forme liquide ou gazeuse, une chambre de combustion ménagée au sein d'un bloc de carburant qui se présente sous une forme solide (bloc de propergol), et une valve séparant ces deux éléments. La chambre de combustion est, dans le cas le plus simple, un canal cylindrique unique percé dans le bloc de propergol dans le sens longitudinal, au bout duquel se situe la tuyère par laquelle les gaz produits sont expulsés (cf. schéma ci-contre).

Lorsque l'on veut faire fonctionner le moteur, un système d'allumage est activé dans la chambre de combustion et la valve est ouverte. Le comburant liquide ou gazeux qui est sous pression s'écoule dans la chambre de combustion où il se vaporise et réagit avec le carburant solide en s'enflammant. La combustion du comburant et du carburant se propage à la surface du bloc de propergol solide. Les particules de propergol sont liquéfiées à la surface du bloc puis gazéifiées par la chaleur dégagée et viennent se mélanger avec le comburant. Les gaz chauds produits sont expulsés par la pression vers la sortie de la chambre de combustion où se trouve une tuyère qui canalise et accélère les produits de la combustion en fournissant la poussée à la fusée.

Dans sa forme la plus simple, la chambre de combustion est un simple trou cylindrique (le canal) percé au centre du bloc de propergol. Pour obtenir une poussée supérieure, plusieurs canaux peuvent être percés, ce qui augmente la surface du bloc de propergol exposée à la combustion. Des formes complexes (par exemple étoile à n branches) peuvent être également utilisées pour moduler la poussée en fonction du temps, en déterminant la cinétique de combustion au moyen de la géométrie de la surface de combustion, laquelle conditionne la réaction du comburant sur le combustible.

Le bloc de propergol est précédé d'une pré-chambre dans laquelle une première combustion engendre l'évaporation du comburant — si ce dernier est liquide. Carburant et comburant ne se mélangent pas dans les proportions idéales dans la chambre de combustion : il tend à y avoir un excès de comburant au centre du canal et un excès de carburant à la surface du bloc de propergol. Les imbrûlés qui en résultent sont brassés naturellement dans la chambre de post-combustion, un espace ménagé entre l'extrémité finale du bloc de propergol et la tuyère, et y achèvent leur combustion.

L'efficacité de la propulsion hybride repose en grande partie sur la vitesse avec laquelle la surface du combustible se vaporise pour se mélanger avec le comburant. Cette vitesse, dite de régression, actuellement trop faible, est le principal problème rencontré dans la mise au point d'une propulsion hybride viable.

Avantages et inconvénients de la propulsion hybride

SpaceShipOne premier avion spatial Ă  propulsion hybride
Dans les années 1990 des recherches non concluantes ont été effectuées par la société Amroc sur des moteurs hybrides de puissance élevée

La propulsion hybride présente des avantages et des inconvénients, certains évidents, d'autres moins, par rapport aux deux autres modes principaux de propulsion des fusées : le moteur-fusée à ergols liquides et le propulseur à propergol solide. En voici un bref résumé :

Avantages par rapport au moteur-fusée à ergols liquides

  • La propulsion hybride est plus simple sur le plan mĂ©canique car elle ne nĂ©cessite pas de turbopompe, la tuyauterie est limitĂ©e et le système d'injection est gĂ©nĂ©ralement peu sophistiquĂ©.
  • Elle utilise des carburants plus denses, car en phase solide, donc occupant moins de volume.
  • Ces carburants peuvent inclure des additifs mĂ©talliques tels que l'aluminium, le magnĂ©sium, le lithium ou le bĂ©ryllium, qui permettent d'augmenter l'impulsion spĂ©cifique.

Avantages de la propulsion hybride par rapport Ă  un propulseur Ă  propergol solide

  • L'impulsion spĂ©cifique thĂ©orique est supĂ©rieure.
  • Le risque d'explosion est plus faible sinon nul. Les problèmes d'homogĂ©nĂ©itĂ© du bloc de propergol n'entraĂ®nent pas de risque d'explosion.
  • Le fonctionnement d'un moteur hybride peut ĂŞtre contrĂ´lĂ© : il peut ĂŞtre arrĂŞtĂ©, redĂ©marrĂ©, et la poussĂ©e peut ĂŞtre modulĂ©e en injectant une plus ou moins grande quantitĂ© d'oxydant.
  • Des oxydants non dangereux et non toxiques, comme l'oxygène liquide, peuvent ĂŞtre utilisĂ©s.

Les inconvénients de la propulsion hybride

La propulsion hybride présente un certain nombre d'inconvénients qui, jusqu'à présent, ont empêché son développement :

  • Le principal est la trop faible vitesse de rĂ©gression du bloc de propergol. L'oxydant et le combustible se mĂ©langent mal car la vaporisation de la surface du bloc de propergol est trop lente du fait d'un transfert thermique insuffisant. Par ailleurs, celui-ci ne se combine pas de manière uniforme le long du bloc de propergol. Pour augmenter la vitesse de combustion, le bloc de propergol peut-ĂŞtre percĂ© de plusieurs canaux, mais au dĂ©triment du volume de carburant, et avec des phĂ©nomènes d'instabilitĂ© en fin de combustion.
  • Le ratio entre comburant et carburant se dĂ©grade en fin de combustion du fait de l'agrandissement progressif de la chambre de combustion. La propulsion se fait moins efficace.
  • Le comburant doit ĂŞtre injectĂ© avec une pression importante dans la chambre de combustion (elle doit ĂŞtre supĂ©rieure Ă  celle qui règne dans la chambre elle-mĂŞme), ce qui impose un rĂ©servoir de comburant particulièrement rĂ©sistant, donc lourd. Si on veut conserver un rĂ©servoir lĂ©ger, il faut installer une turbopompe, laquelle rĂ©introduit la complexitĂ© mĂ©canique que la propulsion hybride est prĂ©cisĂ©ment censĂ©e Ă©viter.

Historique

Les recherches sur la propulsion hybride remontent Ă  plus de 50 ans. De petits moteurs hybrides ont Ă©tĂ© utilisĂ©s dans des programmes de drones amĂ©ricains entre 1968 et 1983 (Sandpiper, Has, Firebolt) en utilisant comme carburant du polybutadiène hydroxytĂ©lĂ©chĂ©lique (PHBT). Dans les annĂ©es 1990, un projet ambitieux menĂ© par la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine Amroc (aujourd'hui disparue) a testĂ© des propulseurs avec une poussĂ©e de 1,2 MN.

Mais ces tentatives n'ont jamais débouché sur des applications pratiques dans le domaine de la propulsion des fusées car la vitesse de régression trop faible, du fait d'un transfert thermique insuffisant entre la partie la plus chaude de la chambre de combustion et la surface du bloc de propergol, ne permet pas d'atteindre les poussées recherchées.

Projets de recherche sur la propulsion hybride et applications

Applications

  • La principale application connue est l'utilisation d'un moteur hybride sur les avions fusĂ©e SpaceShipOne et SpaceShipTwo. Le premier avion, expĂ©rimental, a pu, grâce Ă  ce type de motorisation, atteindre l'altitude de 100 km. Le deuxième avion, qui doit ĂŞtre produit en plusieurs exemplaires, effectuera, Ă  compter de 2014, des vols suborbitaux en transportant des touristes. Le choix de la propulsion hybride dĂ©coule d'impĂ©ratifs de sĂ©curitĂ© et de coĂ»t. La propulsion hybride du SpaceShipOne a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e par la sociĂ©tĂ© SpaceDev qui dĂ©veloppe par ailleurs deux petits lanceurs Ă  propulsion hybride, Streaker et Dream Chaser (mĂ©thode abandonnĂ©e depuis). Tous ces moteurs utilisent de manière classique du protoxyde d'azote (oxydant liquide) et un dĂ©rivĂ© du polybutadiène hydroxytĂ©lĂ©chĂ©lique.

Projets expérimentaux

La principale piste explorée aujourd'hui par les projets en cours sur la propulsion hybride porte sur l'utilisation de nouveaux combustibles comme des formes de paraffine, qui permettent d'obtenir des vitesses de régression 3 à 4 fois supérieures à celles des combustibles classiques[1].

  • L'universitĂ© Stanford a un programme de longue haleine portant sur la propulsion hybride : le projet Perigrine a pour objectif le dĂ©veloppement d'une fusĂ©e-sonde capable de hisser Ă  une altitude de 100 km une charge utile de kg. Il utilise de nouveaux carburants, un bloc de propergol Ă  base de paraffine dont la vitesse de rĂ©gression est de trois fois supĂ©rieure Ă  celle des carburants utilisĂ©s jusqu'Ă  prĂ©sent.
  • Le projet Perseus de l'ONERA et du CNES comprend, entre autres, le dĂ©veloppement d'un lanceur capable de mettre en orbite un nano-satellite (10 kg) grâce Ă  une fusĂ©e Ă  propulsion hybride[2].

Références

  1. (en) « Wax Hybrids », Science@NASA (consulté le )
  2. CNES - projet PERSEUS

Sources

  • (en) Adam Okninski, Wioleta Kopacz, Damian Kaniewski et Kamil Sobczak, « Hybrid rocket propulsion technology for space transportation revisited - propellant solutions and challenges », FirePhysChem, vol. 1, no 4,‎ , p. 260-271 (DOI 10.1016/j.fpc.2021.11.015, lire en ligne)
    Etat des lieux de la recherche et des développements de la propulsion hybride en 2021.
  • (en) George P Sutton et Oscar Biblarz, Rocket Propulsion Elements 8e Ă©dition, Hoboken, N.J., Wiley, , 768 p. (ISBN 978-0-470-08024-5, lire en ligne)

Voir aussi

Liens internes

Liens externes

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