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Produit extérieur

En mathématiques, la notion de produit extérieur permet de rendre compte de façon algébrique des concepts d'aires et de volumes orientés et, en dimension quelconque, de déterminants, à travers le produit des vecteurs qui sous-tendent les sous-espaces considérés.

C'est un produit dans le sens oĂč il forme avec l'addition et la multiplication scalaire une algĂšbre sur un corps, dite extĂ©rieure. Il est qualifiĂ© d'extĂ©rieur vraisemblablement dans la mesure oĂč son rĂ©sultat est linĂ©airement indĂ©pendant de ses opĂ©randes.

Bien que son nom ne l'indique pas, le produit extérieur est alterné. En ce sens il se distingue du produit tensoriel, dont il constitue en fait une antisymétrisation.

Histoire

Le produit extérieur a été imaginé vers 1844 par le mathématicien allemand Hermann Grassmann. Ce concept a été intégré par William Kingdon Clifford à son algÚbre géométrique, appelée aussi algÚbre de Clifford, laquelle généralise et développe les travaux de Grassmann ainsi que ceux de William Rowan Hamilton en 1843 sur les quaternions.

MĂȘme notation que le produit vectoriel

Parmi les obstacles Ă  la comprĂ©hension de la notion de produit extĂ©rieur, il faut insister sur le fait que le symbole , appelĂ© chevron en français mais souvent dĂ©signĂ© par le mot anglais wedge, notamment Ă  travers la commande Ă©quivalente en TEX, est universellement employĂ© pour dĂ©signer le produit extĂ©rieur, opĂ©ration associative pouvant porter sur les vecteurs de tout espace vectoriel, mais coĂŻncide aussi avec celle employĂ©e en France pour dĂ©signer le produit vectoriel, c'est-Ă -dire une opĂ©ration non associative portant uniquement sur les vecteurs d'un espace euclidien orientĂ© Ă  trois dimensions. De natures diffĂ©rentes, ces deux opĂ©rations entretiennent des relations Ă©troites (liĂ©es Ă  la dualitĂ© de Hodge), d'oĂč un risque de confusion[1].

Plus gĂ©nĂ©ralement, du fait de l'existence de nombreux isomorphismes plus ou moins naturels entre les objets en jeu, les domaines concernĂ©s par le calcul extĂ©rieur sont affectĂ©s d'un certain nombre de variations terminologiques et de notations selon les communautĂ©s scientifiques qui les emploient, variations qui peuvent aussi ĂȘtre sources de confusion.

Produit extérieur de vecteurs

Propriétés

Différents produits extérieurs.

Contrairement au produit vectoriel de deux vecteurs, le produit extĂ©rieur de deux vecteurs de E, appelĂ© bivecteur, n'est pas un vecteur du mĂȘme espace mais d'un nouvel espace, notĂ© Λ2(E). Alors que le produit vectoriel n'est dĂ©fini que dans un espace Ă  3 dimensions, le produit extĂ©rieur est dĂ©fini pour tout espace vectoriel.

Le produit extérieur est bilinéaire :

Le produit extérieur de deux vecteurs est alterné, c'est-à-dire que

ce qui, par bilinéarité, implique qu'il est antisymétrique[2] :

Si l'espace E est pourvu d'une mĂ©trique euclidienne, alors Λ2(E) aussi et la norme du bivecteur est

C'est l'aire du parallélogramme construit sur les deux vecteurs a et b.

Relation avec le produit vectoriel

Le produit extérieur et le produit vectoriel de Gibbs sont liés par une relation de dualité. Le résultat d'un produit vectoriel est en effet un bivecteur déguisé, le bivecteur étant remplacé par le vecteur qui en est le dual dans l'espace à trois dimensions. Ceci explique pourquoi le produit vectoriel n'est valable que dans un espace à trois dimensions. C'est, en effet, uniquement dans un tel espace que le dual d'un bivecteur est un vecteur.

On peut passer d'un produit vectoriel à un produit extérieur au moyen de la relation suivante :

oĂč I est l'unitĂ© pseudoscalaire de l'espace Ă  3 dimensions. Ici la croix symbolise le produit vectoriel.

Relation avec le produit tensoriel

Selon le point de vue le plus classique, le fait qu'un parallĂ©lĂ©pipĂšde appuyĂ© sur une famille de vecteurs soit « aplati » dĂšs que cette famille est liĂ©e conduit Ă  envisager le produit extĂ©rieur comme rĂ©sultant d'une antisymĂ©trisation du produit tensoriel, c'est-Ă -dire de la forme la plus gĂ©nĂ©rale de produit associatif. Une telle antisymĂ©trisation est rĂ©alisĂ©e par un passage au quotient, en l'occurrence le quotient de l'algĂšbre tensorielle associĂ©e Ă  l'espace vectoriel sur lequel on travaille par l'idĂ©al bilatĂšre de cette algĂšbre qu'y engendrent les carrĂ©s tensoriels , puisque ceux-ci sont destinĂ©s Ă  ĂȘtre « aplatis ». On obtient ainsi l'algĂšbre extĂ©rieure d'un espace vectoriel . Ainsi, d'une certaine façon, la notion d'algĂšbre extĂ©rieure d'un espace vectoriel prĂ©cĂšde celle du produit extĂ©rieur de deux vecteurs.

Le produit extĂ©rieur et le produit tensoriel agissant au sein d'algĂšbres diffĂ©rentes, il n'est en principe pas possible de combiner dans une mĂȘme expression des produits tensoriels et des produits extĂ©rieurs. Ainsi, la formule

parfois prĂ©sentĂ©e comme une dĂ©finition du produit extĂ©rieur ne doit pas ĂȘtre prise au pied de la lettre, mais comme exprimant la possibilitĂ© d'injecter l'espace vectoriel dans , oĂč dĂ©signe le sous-espace vectoriel de l'algĂšbre extĂ©rieure engendrĂ© par les « parallĂ©logrammes » (ou bivecteurs) .

Cette injection permet en effet d'identifier à un sous-espace de , en identifiant le bivecteur au tenseur antisymétrique . Laurent Schwartz, dans son ouvrage Les tenseurs (Hermann, 1975), indique (p. 103) qu'une telle identification est peu recommandée.

Cependant, dans le cas particulier oĂč l'espace vectoriel est donnĂ© comme l'espace dual d'un espace , et s'interprĂštent alors naturellement comme, respectivement, algĂšbre des formes multilinĂ©aires alternĂ©es et algĂšbre des formes multilinĂ©aires sur F. Dans ce cas, les espaces vectoriels sont naturellement des sous-espaces des . En particulier, de ce point de vue, le produit extĂ©rieur de deux formes linĂ©aires est la forme bilinĂ©aire alternĂ©e dĂ©finie par la formule

Produit extérieur de multivecteurs

Le produit extérieur est aussi valable pour les multivecteurs. Par multivecteur on entend l'élément le plus général de l'algÚbre géométrique, à savoir, pour un espace à n dimensions :

oĂč les lettres grecques reprĂ©sentent des valeurs scalaires et les A indicĂ©s des p-vecteurs avec

Multiple produit extérieur

Dans le cas général, on peut former des entités que l'on peut appeler des p-vecteurs au moyen du produit extérieur. On a ainsi

Si p est strictement supĂ©rieur Ă  la dimension de l'espace E alors Λp(E) est l'espace nul.

Si n est Ă©gal Ă  la dimension de E alors Λn(E) est une droite vectorielle.

Par exemple si E est l'espace euclidien de dimension 3, les trivecteurs sont des multiples de l'unité pseudoscalaire I :

, oĂč le scalaire vaut le volume du parallĂ©lĂ©pipĂšde construit sur les vecteurs.

Notes

  1. Ce problÚme est inexistant en anglais car le produit vectoriel, appelé cross product, est noté .
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