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Processus de branchement

En thĂ©orie des probabilitĂ©s, un processus de branchement est un processus stochastique formĂ© par une collection de variables alĂ©atoires. Les variables alĂ©atoires d'un processus stochastique sont indexĂ©es par les nombres entiers naturels. Les processus de branchement ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s en premier lieu pour dĂ©crire une population dans laquelle chaque individu de la gĂ©nĂ©ration produit un nombre alĂ©atoire d'individus dans la gĂ©nĂ©ration [1]. Par exemple, une population de bactĂ©ries dans laquelle chaque individu, indĂ©pendamment des autres, produit un nombre alĂ©atoire de descendants Ă  chaque pas de temps. Les processus de branchement peuvent aussi ĂȘtre utilisĂ©s pour modĂ©liser d'autres systĂšmes avec des dynamiques similaires, par exemple la propagation de noms de familles[2] dans une gĂ©nĂ©alogie ou de neutrons dans un rĂ©acteur nuclĂ©aire.

Formulation mathématique

La formulation la plus commune d'un processus de branchement est le processus de Galton-Watson. On définit récursivement la variable aléatoire Zn à valeurs dans pour désigner la taille de la population à la génération n, en commençant par . Supposons qu'on ait défini Zn pour . On définit alors un vecteur de variables aléatoires i.i.d à valeurs dans , dont chacune désigne le nombre de descendants de l'individu i de la population à la génération n. On pose alors

On peut également représenter le processus de branchement sous la forme d'une marche aléatoire. Posons . Considérons un vecteur de variables aléatoires iid. On définit alors récursivement:

et on arrĂȘte la marche si elle touche 0. Cette marche alĂ©atoire s'appelle la marche de Lukasiewicz[3]. Ici i ne reprĂ©sente plus le temps mais quelque chose de plus abstrait. Pour comprendre cette reprĂ©sentation, imaginez que l'on parcoure la population Ă  travers les gĂ©nĂ©rations en visitant un individu Ă  la fois, et que Si reprĂ©sente le nombre d'individus dĂ©couverts non visitĂ©s (notre but Ă©tant de visiter tous les individus). Chaque fois que l'on visite un individu, on peut retirer cet individu de Si (d'oĂč le -1), mais on dĂ©couvre par la mĂȘme occasion tous les enfants de cet individu (notĂ©s Xi), que l'on ajoute donc au total des individus dĂ©couverts non visitĂ©s. On peut alors choisir l'un des individus dĂ©couverts non visitĂ©s Ă  visiter ensuite. Si l'on atteint 0, c'est que tous les individus de la population ont Ă©tĂ© visitĂ©s. On peut Ă©galement voir cela comme si les individus ne se reproduisaient qu'un Ă  la fois (en mourant sur le coup).

Processus de branchement en temps continu

Pour les processus de branchement en temps discrets, le "temps de branchement" est fixĂ© Ă  1 pour tous les individus (tous les Ă©vĂ©nements de branchement ont lieu Ă  des temps entiers). Pour les processus de branchement Ă  temps continu, chaque individu attend un temps alĂ©atoire Ă  densitĂ© sur (c'est-Ă -dire continu). Une fois ce temps Ă©coulĂ©, l'individu se divise en un nombre alĂ©atoire de descendants. Les temps d'attente de diffĂ©rents individus sont indĂ©pendants, et sont indĂ©pendants de leur nombre de descendants une fois qu'ils se reproduisent. Dans le cas oĂč le temps d'attente suit une mĂȘme loi exponentielle pour toute la population, le processus est Markovien.

Exemple: Processus de Crump-Mode-Jager

Un processus de branchement de Crump-Mode-Jagers est un processus de branchement particulier. Ce processus est dĂ©fini comme suit: en partant d'un individu nĂ© au temps 0. Cet individu a un nombre alĂ©atoire de descendants N, nĂ©s Ă  des temps alĂ©atoires selon un processus de Poisson sur , dont les descendants suivent la mĂȘme loi de maniĂšre indĂ©pendante (translatĂ©e Ă  leur date de naissance)[4] - [5]. Ce processus a des implications importantes pour l'Ă©tude en biologie des dynamiques de populations[6].

Probabilité d'extinction à terme

Une question centrale dans la thĂ©orie des processus de branchements est la probabilitĂ© d'extinction Ă  terme, probabilitĂ© qu'il ne reste plus personne aprĂšs un nombre fini de gĂ©nĂ©rations. Le modĂšle le plus simple est le processus de Galton-Watson, oĂč la population dĂ©bute avec un seul individu Ă  la gĂ©nĂ©ration (discrĂšte) zĂ©ro, et oĂč chaque individu se reproduit indĂ©pendamment des autres selon une mĂȘme loi de moyenne ÎŒ. Dans ce cas l'espĂ©rance de la taille de la population Ă  la gĂ©nĂ©ration n est ÎŒn. Si ÎŒ < 1, alors l'espĂ©rance de la taille de la population tend vers 0 Ă  une vitesse exponentielle, ce qui implique une probabilitĂ© d'extinction Ă  terme de 1. Si ÎŒ > 1, alors la probabilitĂ© d'extinction Ă  terme est infĂ©rieure strictement Ă  1 (mais gĂ©nĂ©ralement diffĂ©rente de 0). Si ÎŒ = 1, alors l'extinction Ă  terme a lieu avec probabilitĂ© 1, sauf dans le cas extrĂȘme oĂč chaque individu a exactement un descendant.

En Ă©cologie thĂ©orique (en), le paramĂštre ÎŒ d'un processus de branchement s'appelle le taux de reproduction de base.

Processus de branchement taille-dépendants

Les processus de branchements taille-dépendants sont pertinents, typiquement, lorsque des phénomÚnes de régulation interviennent à l'échelle de la population tout entiÚre. Par exemple, en écologie intervient couramment une capacité porteuse qui limite la taille maximale de la population par la quantité de ressources disponibles[7].

Krishna Athreya a identifié trois types de processus de branchements taille-dépendants couramment utilisés. Il s'agit de mesures de branchement sous-critique, stable, et super-critique[8].

Simulation de processus de branchements

Les simulations de processus de branchement sont beaucoup utilisĂ©s en biologie Ă©volutive[9] - [10]. Les arbres phylogĂ©nĂ©tiques, par exemple, peuvent ĂȘtre simulĂ©s par des processus de branchement, ce qui permet de reconstituer l'histoire passĂ©e de populations Ă  partir de donnĂ©es de sĂ©quençage gĂ©nĂ©tique[11].

Processus de branchement multitype

Dans un processus de branchement multitype, les individus ont chacun un type parmi n (potentiellement infini). À chaque pas de temps (dans un cadre discret), un individu de type i produit un nombre alĂ©atoire d'individus de chaque type dont la loi dĂ©pend de i. Un Ă©vĂ©nement de branchement pour un individu est donc donnĂ© par un vecteur alĂ©atoire de avec une certaine loi.

Par exemple, prenons une population de Cellules Souches CancĂ©reuses (CSCs) et non-cancĂ©reuses (CSNCs). À chaque pas de temps, chaque CSC produit deux CSCs avec probabilitĂ© (division symĂ©trique), produit une CSC et une CSNC avec probabilitĂ© (division asymmĂ©trique), produit une CSC avec probabilitĂ© (stagnation), et meurt (ne produit rien) avec probabilitĂ© ; parallĂšlement, chaque CSNC produit deux CSNCs avec probabilitĂ© (division symĂ©trique), produit une CSNC avec probabilitĂ© (stagnation), et meurt avec probabilitĂ© [12].

Loi des grands nombres pour les processus multitype

La loi forte des grands nombres pour les processus de branchement multitypes stipule que, sous certaines conditions, conditionnellement à la croissance exponentielle de la population, la proportion des différents types converge presque sûrement à un vecteur constant.

Pour les processus de branchement à temps continu, les proportions des différents types au sein de la population vérifient un systÚme d'équations différentielles ordinaires, qui a un unique attracteur vers lequel converge le systÚme.

La monographie d'Athreya et Ney [13] résume les conditions sous lesquelles cette loi des grands nombres est valide. Ces conditions ont été affinées depuis[14] - [15].

Voir aussi

Notes et références

  1. K. B. Athreya, Encyclopedia of Environmetrics, (ISBN 978-0471899976, DOI 10.1002/9780470057339.vab032), « Branching Process »
  2. (en) Joachim Hermisson, « Noble names, branching processes and fixation probabilities », sur 9dok.net (consulté le )
  3. (en) « Random walks and graphs », (consulté le )
  4. (en) Cecilia Holmgren et Svante Janson, « FRINGE TREES, CRUMP–MODE–JAGERS BRANCHING PROCESSES AND m-ARY SEARCH TREES » (consultĂ© le )
  5. (en) Peter Jagers, Branching Processes with Biological Applications, London, John Wiley and Sons, (lire en ligne)
  6. (en) Amaury Lambert, « Probabilistic Models for the (sub)Tree(s) of Life » (consulté le )
  7. F. Thomas Bruss and M. Duerinckx (2015) "Resource dependent branching processes and the envelope of societies", Annals of Applied Probability. 25: 324–372.
  8. Krishna Athreya and Peter Jagers. Branching Processes. Springer. 1973.
  9. (en) O. Hagen, K. Hartmann, M. Steel et T. Stadler, « Age-Dependent Speciation Can Explain the Shape of Empirical Phylogenies », Systematic Biology, vol. 64, no 3,‎ , p. 432–440 (ISSN 1063-5157, PMID 25575504, PMCID 4395845, DOI 10.1093/sysbio/syv001)
  10. Oskar Hagen, Tobias Andermann, Tiago B. Quental, Alexandre Antonelli et Daniele Silvestro, « Estimating Age-Dependent Extinction: Contrasting Evidence from Fossils and Phylogenies », Systematic Biology, vol. 67, no 3,‎ , p. 458–474 (PMID 29069434, PMCID 5920349, DOI 10.1093/sysbio/syx082 AccĂšs libre)
  11. (en) Oskar Hagen et Tanja Stadler, « TreeSimGM: Simulating phylogenetic trees under general Bellman–Harris models with lineage-specific shifts of speciation and extinction in R », Methods in Ecology and Evolution, vol. 9, no 3,‎ , p. 754–760 (ISSN 2041-210X, PMID 29938014, PMCID 5993341, DOI 10.1111/2041-210X.12917)
  12. Xiufang Chen, Yue Wang, Tianquan Feng, Ming Yi, Xingan Zhang et Da Zhou, « The overshoot and phenotypic equilibrium in characterizing cancer dynamics of reversible phenotypic plasticity », Journal of Theoretical Biology, vol. 390,‎ , p. 40–49 (PMID 26626088, DOI 10.1016/j.jtbi.2015.11.008, arXiv 1503.04558, S2CID 15335040, lire en ligne)
  13. Krishna B. Athreya et Peter E. Ney, Branching Processes, Berlin, Springer-Verlag, , 199–206 p. (ISBN 978-3-642-65371-1)
  14. Svante Janson, « Functional limit theorems for multitype branching processes and generalized PĂłlya urns », Stochastic Processes and Their Applications, vol. 110, no 2,‎ , p. 177–245 (DOI 10.1016/j.spa.2003.12.002)
  15. Da-Quan Jiang, Yue Wang et Da Zhou, « Phenotypic equilibrium as probabilistic convergence in multi-phenotype cell population dynamics », PLOS ONE, vol. 12, no 2,‎ , e0170916 (PMID 28182672, PMCID 5300154, DOI 10.1371/journal.pone.0170916 AccĂšs libre, Bibcode 2017PLoSO..1270916J)
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