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ProblĂšme de la galerie d'art

En informatique, plus précisément en géométrie algorithmique, le problÚme de la galerie d'art est un problÚme de visibilité bien étudié inspiré d'un problÚme réel. Il se formule comme suit :

« Quel est le nombre de gardiens (ou camĂ©ras) nĂ©cessaires pour surveiller une galerie d'art, et oĂč faut-il les placer ? »
Un polygone simple à 43 cÎtés représentant une galerie d'art, et quatre caméras couvrent cette galerie.

Formellement, la galerie d'art est représenté par un polygone simple et chaque gardien par un point du polygone. Un ensemble de points est dit surveiller ou couvrir un polygone si, pour tout point du polygone, il existe un point tel que le segment de droite entre et est entiÚrement contenu dans le polygone. On peut aussi interpréter les gardiens comme des caméras de surveillance et demander que l'ensemble de la galerie soit visible en balayage.

Le théorÚme de la galerie d'art

Le théorÚme de la galerie d'art, démontré par Våclav Chvåtal, donne un majorant du nombre minimal de gardiens. Il dit :

« Pour garder un polygone simple Ă  sommets, gardiens suffisent, et cette borne peut ĂȘtre atteinte ».

Historique

La question sur le nombre de gardiens nécessaires a été posée à Chvåtal par Victor Klee en 1973[1]. Chvåtal l'a prouvé peu de temps aprÚs[2]. La démonstration de Chvåtal a été simplifiée par Steve Fisk, au moyen d'un argument basé sur une coloration de graphe[3]. Fisk était alors professeur de mathématiques au Bowdoin College[4].

Le problÚme et le théorÚme de la galerie d'art est moins connu que les thÚmes standard de la géométrie algorithmique comme l'enveloppe convexe, la triangulation d'un polygone ou le calcul du diagramme de Voronoï, mais il figure dans divers manuels et cours de géométrie algorithmique[5] - [6] - [7] - [8] - [9] - [10] - [11].

La démonstration de Fisk

Une 3-coloration des sommets d'un polygone triangulĂ©. Les sommets d'une mĂȘme couleur donnent un ensemble de gardiens. Les sommets bleus par exemple fournissent un ensemble non-optimal de 3 gardiens. Il est possible de n'avoir que 2 gardiens, en les plaçant au nƓud bleu le plus en haut (et le plus Ă  gauche), et au nƓud rouge en bas Ă  droite.

La preuve de Steve Fisk[12] est courte et Ă©lĂ©gante : elle figure dans le livre Raisonnements divins[13]. La preuve est pour l'essentiel comme suit. On commence par trianguler le polygone (sans ajouter de nouveaux sommets). On procĂšde comme pour la triangulation : On utilise le fait que tout polygone simple Ă  au moins quatre sommets possĂšde au moins deux « oreilles ». Une oreille est un triangle avec deux arĂȘtes appartenant Ă  la frontiĂšre du polygone, et la troisiĂšme situĂ©e Ă  l'intĂ©rieur du polygone. L'algorithme consiste Ă  trouver une telle oreille, Ă  la retirer du polygone, ce qui donne un nouveau polygone plus petit, donc 3-coloriable par rĂ©currence, et ce coloriage est facilement Ă©tendu en coloriant le sommet supplĂ©mentaire de l'oreille avec la couleur restante. Dans une coloration en 3 couleurs, chaque triangle doit comporter les 3 couleurs. Les sommets de l'une des couleurs forment un ensemble de gardiens valide puisque chaque triangle du polygone est gardĂ© par son sommet de cette couleur. Comme les trois couleurs partitionnent les n sommets du polygone, la couleur avec le moins de sommets dĂ©finit un ensemble de gardiens valides avec au plus gardiens.

Illustration de la preuve

Pour illustrer la preuve, on considĂšre le polygone ci-dessous. La premiĂšre Ă©tape consiste Ă  trianguler le polygone (voir Figure 1). Ensuite, on applique un -coloriage correct (Figure 2) et on observe qu'il y a sommets rouges, bleus et verts. La couleur ayant le moins de sommets est le bleu ou le rouge, donc le polygone peut ĂȘtre couvert par gardes (Figure 3). Ceci est en accord avec le thĂ©orĂšme de la galerie d'art, car le polygone a sommets, et .

  • Figure 1
    Figure 1
  • Figure 2
    Figure 2
  • Figure 3
    Figure 3

Variantes

ProblĂšme de la forteresse. Pour 13 sommets, il faut 5 gardiens.

La majoration de Chvåtal reste valable si la restriction des gardiens aux sommets est affaiblie à des gardiens à tout point qui n'est pas à l'extérieur du polygone.

Il existe d'autres gĂ©nĂ©ralisations ou spĂ©cialisations du thĂ©orĂšme de la galerie d'art original[14]. Par exemple, pour les polygones orthogonaux, c'est-Ă -dire des polygones dont les cĂŽtĂ©s se joignent Ă  angle droit, il suffit de gardiens. Il existe au moins trois dĂ©monstrations diffĂ©rentes de ce rĂ©sultat, aucune n'est simple, l'une par Kahn, Maria Klawe et Daniel Kleitman; une autre par Anna Lubiw; et encore une autre par Jörg-RĂŒdiger Sack et Godfried Toussaint (en)[15].

Un problÚme similaire consiste à déterminer le nombre minimal de gardiens nécessaires pour couvrir l'extérieur d'un polygone (c'est le « problÚme de la forteresse »): sont suffisants et parfois aussi nécessaires. En d'autre termes, couvrir l'extérieur, qui est infini, est plus exigeant que de couvrir l'intérieur fini[16].

Complexité algorithmique

Le problĂšme de calcul

Des algorithmes efficaces existent pour trouver des ensembles de gardiens placés aux sommets du polygone et qui vérifient la majoration de Chvåtal, donc d'au plus gardiens.

David Avis et Godfried Toussaint[17] ont prouvĂ© qu'un tel placement peut ĂȘtre calculĂ© en temps dans le pire des cas, en utilisant une mĂ©thode de diviser pour rĂ©gner. Kooshesh et Moret 1992 ont donnĂ© un algorithme en temps linĂ©aire en utilisant l'algorithme de la preuve de Fisk et l'algorithme linĂ©aire de triangulation de Bernard Chazelle.

Un algorithme de calcul a Ă©tĂ© proposĂ© par Couto, de Rezende et de Souza 2011 pour les gardiens placĂ©s aux sommets. Les auteurs ont menĂ© de nombreux tests avec diverses classes de polygones qui ont montrĂ© que des solutions optimales peuvent ĂȘtre trouvĂ©es en un temps relativement court mĂȘme pour des polygones Ă  plusieurs milliers de sommets[18].

Le problÚme de décision

ConsidĂ©rĂ© comme un problĂšme de dĂ©cision, le problĂšme de la galerie d'art est le problĂšme de dĂ©terminer, Ă©tant donnĂ© un polygone et un entier k, si ce polygone peut ĂȘtre gardĂ© avec au plus k gardiens. Ce problĂšme est -complet[19], oĂč est la classe de complexitĂ© qui correspond au fragment existentiel de la thĂ©orie des corps rĂ©els clos. Les variations usuelles (comme restreindre les positions des gardiens aux sommets ou aux arĂȘtes du polygone) sont NP-difficiles[20].

Approximation

En ce qui concerne un algorithme d'approximation pour le nombre minimum de gardiens, Eidenbenz, Stamm et Widmayer 2001 ont montrĂ© que le problĂšme est APX-difficile ; ceci implique qu'il est peu probable qu'un rapport d'approximation meilleur qu'une constante fixĂ©e puisse ĂȘtre rĂ©alisĂ© par un algorithme d'approximation en temps polynomial. Toutefois, on ne connaĂźt pas d'algorithme avec un rapport d'approximation constant. En revanche, une approximation logarithmique du nombre minimum de gardien peut ĂȘtre obtenue en rĂ©duisant le problĂšme au problĂšme de couverture par ensembles[21]. Il a Ă©tĂ© montrĂ© par Pavel Valtr[22] que le systĂšme d'ensembles dĂ©rivĂ© d'un problĂšme de galerie d'art a une dimension de Vapnik-Tchervonenkis bornĂ©e, ce qui permet d'appliquer des algorithmes de couverture par ensembles basĂ©s sur des Δ-rĂ©seaux (en) dont le rapport d'approximation est le logarithme du nombre optimal de gardiens plutĂŽt que du nombre de sommets du polygone[23]. Pour le cas de gardiens sans restriction sur leur position, le nombre potentiellement infini des positions rend le problĂšme encore plus difficile[24]. Si l'on force les gardiens Ă  occuper des positions sur une grille fine, un algorithme d'approximation logarithmique plus compliquĂ© peut ĂȘtre obtenu sous des hypothĂšses additionnelles peu contraignantes[25].

Dimensions supérieures

Exemple d'un polyÚdre avec des points à l'intérieur qui ne sont visibles d'aucun de ses sommets.

Si le musĂ©e est reprĂ©sentĂ© en dimension supĂ©rieure par un polyĂšdre, alors il peut ne pas suffire de positionner un gardien sur chaque sommet pour couvrir la totalitĂ© du musĂ©e. MĂȘme si les surfaces du polyĂšdre sont alors sous surveillance, il est possible que des points Ă  l'intĂ©rieur du polyĂšdre ne puissent pas ĂȘtre visibles[26].

Notes

Références

Livres
  • Joseph O'Rourke, Art Gallery Theorems and Algorithms, Oxford University Press, (ISBN 0-19-503965-3, lire en ligne).
  • Mark de Berg, Otfried Cheong, Marc van Kreveld et Mark Overmars, Computational geometry : algorithms and applications, Springer Verlag, , 3e Ă©d., 386 p. (ISBN 978-3-540-65620-3 et 3-540-65620-0, prĂ©sentation en ligne, lire en ligne), chap. 3 (« Polygon Triangulation »), p. 45-61.
  • Luca Castelli Aleardi et Steve Oudot, Introduction Ă  la gĂ©omĂ©trie algorithmique et ses applications, École polytechnique de Paris, coll. « Cours INF562 », , 123 p. (lire en ligne).
  • Jean-Daniel Boissonnat, GĂ©omĂ©trie algorithmique : des donnĂ©es gĂ©omĂ©triques Ă  la gĂ©omĂ©trie des donnĂ©es : Leçon inaugurale du cours, Paris, Librairie ArthĂšme Fayard et CollĂšge de France, , 73 p. (ISBN 978-2-213-70765-5 et 978-2-213-70512-5, lire en ligne).
  • Jacob E. Goodman et Joseph O'Rourke (Ă©diteurs), The Handbook of Discrete and Computational Geometry, CRC Press, , 2e Ă©d. (ISBN 1-58488-301-4).
  • (en) Herbert Edelsbrunner, Algorithms in Combinatorial Geometry, Berlin/Heidelberg/Paris etc., Springer-Verlag, coll. « EATCS Monographs on Theoretical Computer Science » (no 10), , 423 p. (ISBN 3-540-13722-X, lire en ligne).
  • (en) JĂĄnos Pach et Pankaj K. Agarwal, Combinatorial Geometry, New York/Chichester/Brisbane etc., John Wiley & Sons, , 354 p. (ISBN 0-471-58890-3).
  • (en) JĂĄnos Pach et Micha Sharir, Combinatorial Geometry and its Algorithmic Applications : The Alcala Lectures, Providence, R.I., American Mathematical Society, coll. « Mathematical Surveys and Monographs » (no 152), , 235 p. (ISBN 978-0-8218-4691-9, lire en ligne).
  • (en) Kurt Mehlhorn et Stefan Naeher, LEDA, A Platform for Combinatorial and Geometric Computing, Cambridge, Cambridge University Press, , 1018 p. (ISBN 0-521-56329-1, lire en ligne).
Articles
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  • Alok Aggarwal, The art gallery theorem : Its variations, applications, and algorithmic aspects (thĂšse Ph. D.), Johns Hopkins University, .
  • David Avis et Godfried T. Toussaint, « An efficient algorithm for decomposing a polygon into star-shaped polygons », Pattern Recognition, vol. 13, no 6,‎ , p. 395–398 (DOI 10.1016/0031-3203(81)90002-9, lire en ligne).
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  • Jörg-RĂŒdiger Sack et Godfried Toussaint, « Guard placement in rectilinear polygons », dans Godfried Toussaint (Ă©diteur), Computational Morphology, North-Holland, , p. 153–176.
  • Thomas Shermer, « Recent Results in Art Galleries », Proceedings of the IEEE, vol. 80, no 9,‎ , p. 1384–1399 (DOI 10.1109/5.163407, lire en ligne).
  • Pavel Valtr, « Guarding galleries where no point sees a small area », Israel J. Math., vol. 104, no 1,‎ , p. 1–16 (DOI 10.1007/BF02897056).

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