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Prisonniers de guerre allemands de la Première Guerre mondiale en France

Sur environ 530 000 Allemands capturĂ©s par l’armĂ©e française au cours de la guerre, 421 655 Ă©taient prisonniers Ă  la date de l’armistice du 11 novembre 1918, après dĂ©cès, rapatriements de malades et invalides, libĂ©rations Ă  la suite d’échanges depuis le dĂ©but de la guerre, tandis que 535 000 Français Ă©taient retenus prisonniers dans le Reich Ă  la mĂŞme date. Les Allemands constituent la grande majoritĂ© des prisonniers de guerre en France, l'armĂ©e d'Autriche-Hongrie ayant Ă©tĂ© très peu engagĂ©e sur le front de l'Ouest et reprĂ©sentent près de la moitiĂ© des 993 109 prisonniers de guerre allemands dĂ©tenus par les AlliĂ©s [1].

Prisonniers allemands en France.

Toutefois les chiffres proposés précédemment sont largement exagérés. Il s'agit en fait de l'ensemble des prisonniers de l'axe et pas des seuls soldats allemands. Les prisonniers allemands ont été environ 410000 durant toute la guerre et ils ne sont qu'environ 3500000 à la fin des hostilités[2].

Comme dans les principales autres puissances belligérantes, la plus grande partie des prisonniers est mise au travail.

Entrée en captivité

Les captures ont principalement eu lieu lors des grandes offensives Marne en 1914, Champagne, Somme, mais furent rares pendant les périodes de stabilisation du front (guerre de position).

Par entente avec la Russie, les prisonniers alsaciens, lorrains et polonais capturĂ©s sur le front de l’est furent transfĂ©rĂ©s en France oĂą ils bĂ©nĂ©ficièrent de conditions privilĂ©giĂ©es. La nationalitĂ© française Ă©tait accordĂ©e aux Alsaciens et Lorrains acceptant de s’engager dans l’armĂ©e française. 17 650 acceptent et sont engagĂ©s dans le front d'Orient ou dans la marine pour leur Ă©viter d'ĂŞtre repris par les Allemands sur le front de l'Ouest. Les autres sont mis au travail[3]. 1 500 prisonniers tchèques et slovaques de l'armĂ©e austro-hongroise s'enrĂ´lent dans la nouvelle armĂ©e tchĂ©coslovaque constituĂ©e Ă  la fin de la guerre.

Environ 50 000 civils, principalement ressortissants allemands, austro-hongrois, prĂ©sents en France au dĂ©but du conflit, fonctionnaires allemands d’Alsace-Lorraine capturĂ©s lors de l’entrĂ©e de l’armĂ©e française sur une partie du territoire de l'Alsace en 1914, furent internĂ©s. Un service des internĂ©s administratifs fut crĂ©Ă© dès . Progressivement, les femmes avec enfants et les internĂ©s de plus de 50 ans furent libĂ©rĂ©s. Ă€ la fin de la guerre, le nombre d'internĂ©s Ă©tait rĂ©duit Ă  15 000 dont 6 000 Allemands [4].

Conditions de vie

Dès avant la Conventions de la Haye, la réglementation applicable aux prisonniers capturés par l’armée française avait été fixée par une instruction du relativement libérale. Cette instruction prévoyait la résidence sur parole des officiers. Cette disposition ne fut appliquée qu’au début de la guerre. Par la suite, les officiers, exemptés de travail conformément aux Convention de La Haye, furent ensuite enfermés dans des camps qui leur étaient réservés.

Les prisonniers Ă©taient rĂ©partis dans 500 sites de dĂ©tention très variĂ©s, tels qu’anciens couvents, casernes dĂ©saffectĂ©es. Certains centres Ă©taient d’importance tel celui de l’Île-Longue clĂ´turĂ© de barbelĂ©s dans la rade de Brest qui hĂ©bergeait 5 000 internĂ©s civils. Le niveau de confort de ces sites Ă©tait très variable, entre celui de l’Île longue, relativement salubre, et Ă  l'autre extrĂŞme, les bateaux-pontons dĂ©labrĂ©s oĂą dormaient les travailleurs employĂ©s au percement du tunnel du Rove, très inconfortables.

Prisonniers allemands encadrés par des Spahis.

5 056 prisonniers furent envoyĂ©s au Maroc pour des travaux publics et 4 685 en AlgĂ©rie et Tunisie certains employĂ©s comme ouvriers agricoles remplaçant les indigènes mobilisĂ©s. Ă€ la suite de protestations du gouvernement allemand, motivĂ©es par les difficultĂ©s climatiques, les maladies et la torture, ces prisonniers furent rapatriĂ©s en France[5].

Les prisonniers étaient autorisés à envoyer 4 cartes et 2 lettres par mois et recevaient des rations de 600 grammes de pain par jour fin 1917, à une époque où elles étaient de 250 grammes pour les prisonniers français en Allemagne, à la suite du Blocus de l'Allemagne[6].

Entre 22 105 et 25 229 prisonniers allemands sont morts en France au cours de la guerre[7] - [8]

Travail

Le travail des prisonniers Ă©tait autorisĂ© par les Conventions de la Haye et Ă©galement prĂ©vu par l’instruction de 1893 au profit de l’État, des collectivitĂ©s, des entrepreneurs et des particuliers qui envisageait la possibilitĂ© d'un Ă©tablissement Ă  leur propre compte[9]. Les prisonniers ont Ă©tĂ© mis Ă  la disposition d’employeurs tenus par un cahier des charges dĂ©taillĂ© par lequel ils s’engageaient Ă  fournir la nourriture, savon, chauffage, l’outillage nĂ©cessaire et au paiement minimum de 15 centimes par jour Ă  chaque prisonnier augmentĂ© de primes de rendement[10]. En situation de pĂ©nurie de main d’œuvre, une partie des demandes des employeurs n’a pu ĂŞtre satisfaite. Fin 1917, 48 000 Ă©taient employĂ©s dans l’agriculture, 36 000 dans les industries d’armements, 40 000 dans le transport (manutentions portuaires), 42 000 dans les mines et les travaux publics[11]. Ă€ l’armistice, 400 000 Ă©taient au travail dont 10 % dans l’industrie d’armement [12] ce qui Ă©tait interdit par les Conventions de La Haye. Des secteurs variĂ©s de l’économie ont Ă©tĂ© concernĂ©s. Des prisonniers ont Ă©tĂ© employĂ©s au dĂ©chargement dans les ports, Ă  l’assainissement du marais de la Salièvre dans le dĂ©partement du Puy-de-DĂ´me, au percement du tunnel du Rove entre l’étang de Berre et la MĂ©diterranĂ©e, Ă  la construction du stade de Lyon (stade Gerland) de l’hĂ´pital de Lyon (actuel hĂ´pital Herriot), Ă  des travaux forestiers, Ă  la construction de voies ferrĂ©es, travail qui s’est rĂ©vĂ©lĂ© très peu utile, puisque 3 lignes Chorges-Barcelonnette, La Mure-Gap, Albi-Saint-Affrique, ne furent finalement pas exploitĂ©es et une quatrième, celle de Carmaux-Vindrac, dont l’ouverture fut diffĂ©rĂ©e au , fut fermĂ©e le [13].

  • Prisonniers allemands en corvĂ©e.
    Prisonniers allemands en corvée.
  • Prisonniers allemands revenant du travail.
    Prisonniers allemands revenant du travail.
  • Chantier avec prisonniers allemands.
    Chantier avec prisonniers allemands.

Libération des prisonniers

Prisonniers allemands au travail porte de BĂ©thune Ă  Lille en 1919.

Le traitĂ© d’armistice du 11 novembre 1918 prĂ©voyant le rapatriement immĂ©diat des prisonniers alliĂ©s sans rĂ©ciprocitĂ©, les captifs allemands prisonniers allemands sont pour la plupart restĂ©s en France jusqu’au dĂ©but de 1920. Après la fin du conflit, le plus grand nombre fut transfĂ©rĂ© dans les zones libĂ©rĂ©es pour travailler au dĂ©minage des champs de bataille, dĂ©sobuage, Ă  des opĂ©rations de terrassement et de reconstruction des zones dĂ©vastĂ©es. Un an après l’armistice, en , 306 000 Ă©taient au travail[14].

Les prisonniers furent rapatriĂ©s au dĂ©but de l'annĂ©e 1920, sous la pression du gouvernement amĂ©ricain qui s’opposa, par ailleurs, Ă  la demande du gouvernement français d’envoi en contrepartie de 400 000 travailleurs civils, qui auraient Ă©tĂ© payĂ©s par la RĂ©publique de Weimar, pour aider Ă  la reconstruction[15].

Notes et références

  1. Laffont, p. 847.
  2. MĂ©dard, p. 107.
  3. MĂ©dard, p. 135.
  4. Dictionnaire, p. 233.
  5. MĂ©dard, p. 76.
  6. MĂ©dard, p. 233.
  7. (en) Heather Jones, « Prisoners of War (Belgium and France) », International Encyclopedia of the First World War (WW1),‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. MĂ©dard, p. 38.
  9. MĂ©dard, p. 56.
  10. MĂ©dard, p. 60.
  11. MĂ©dard, p. 53.
  12. MĂ©dard, p. 62.
  13. MĂ©dard, p. 68.
  14. MĂ©dard, p. 256.

Voir aussi

Article connexe

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Jacques-Marcel Renard, Les prisonniers allemands en mains françaises durant le premier conflit mondial 1914-1920, Paris, SPM- l'Harmattan, , 280 p. (ISBN 978-2-38541-021-6)
  • Odon Abbal, Soldats oubliĂ©s, les prisonniers de guerre, Bez-et-Esparon, Études et Communication, , 262 p. (ISBN 2-911722-05-1)
  • Annette Becker, OubliĂ©s de la Grande guerre : humanitaire et culture de guerre, 1914-1918 : populations occupĂ©es, dĂ©portĂ©s civils, prisonniers de guerre, Paris, Éditions NoĂŞsis, , 405 p. (ISBN 2-911606-23-X)
  • Georges Cahen-Salvador, Les prisonniers de guerre (1914-1919), Paris, Payot, .
  • Dictionnaire de la Grande Guerre 1914 1918. Sous la direction de François Cochet et RĂ©my Porte. Article Prisonniers de guerre pages 846 Ă  849, Amboise/Paris, Robert Laffont, , 1120 p. (ISBN 978-2-221-10722-5)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Dictionnaire de la Grande guerre Sous la direction de Jean-Yves Le Naour. Article : les prisonniers de guerre. La massification des dĂ©tentions pages 356 Ă  364, Paris, Larousse, 2008, 495 p. (ISBN 978-2-03-589746-6)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • FrĂ©dĂ©ric MĂ©dard, Les prisonniers en 14-18. Acteurs mĂ©connus de la Grande Guerre, Saint-Cloud, Éditions SOTECA, , 350 p. (ISBN 978-2-916385-62-4)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (de) Jochen Oltmer (dir.), Kriegsgefangene im Europa des Ersten Weltkriegs, Paderborn, Schöningh, , 308 p. (ISBN 3-506-72927-6)
  • Bouglouan Denis, Les Monnaies des Prisonniers Civils et Militaires en France. (1914-1921) - Recherche des camps de prisonniers en France par l'Ă©tude des milliers de monnaies diffĂ©rentes circulant dans ceux-ci. 2020. (ISBN 979-8620654536).
  • Bouglouan Denis, L’argent des indĂ©sirables: La monnaie dans les camps d’internĂ©s civils en France (1914-20) - Les camps d'internĂ©s civils et les monnaies circulant dans ceux-ci. 2020. (ISBN 978-2956553052).
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