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Primicerius

Du latin primicerius (pl. primicerii ; en grec : primikērios, πρÎčÎŒÎčÎșÎźÏÎčÎżÏ‚), le titre de primicier (on trouve Ă©galement primicĂšre) dĂ©signait dans l’Empire romain tardif et dans l’Empire byzantin certains dignitaires de la cour ainsi que certains chefs de dĂ©partements dans l’administration civile et militaire. Il fut aussi utilisĂ© dans l’Église pour dĂ©signer les supĂ©rieurs de certaines Ă©glises ou chapitres ainsi que les responsables de divers groupes comme les chantres ou les lecteurs.

insigne du primicerius notariorum tel qu'indiqué dans la Notitia dignitatum
Insigne du primicerius notariorum tel qu'indiqué dans la Notitia dignitatum.

Étymologiquement, le terme dĂ©rive de primus in cera, (c.a.d. in tabula cerata) signifiant « le premier [primus] inscrit sur une tablette de cire [cera] ».

Empire romain tardif et Empire byzantin

Cour et administration civile

Le terme primicerius semble apparaitre sous le Dominat[note 1]. Ainsi l’eunuque dĂ©signĂ© sous Constantin comme praepositus sacri cubiculi (« prĂ©posĂ© Ă  la chambre sacrĂ©e »), marquant par lĂ  sa basse origine, devint au siĂšcle suivant le primicerius sacri cubiculi ou parakimomĂšne. Il Ă©tait alors le chef des nombreux chambellans desservant l’appartement, la table et la garde-robe du souverain[1].

Le titre[note 2] fut Ă©galement portĂ© par divers dignitaires de la cour dont les fonctions Ă©taient reliĂ©es Ă  la personne de l’empereur, tel l’eidikon ou le vestiarion. D’autres primicerii dirigeaient divers dĂ©partements du palais (scrinia) dont celui des notaires (notarii en latin, notarioi ou taboularioi en grec)[2]. Certains d'entre eux parvinrent aux plus hautes fonctions. Ainsi le primicier Staurakios, premier ministre de l’impĂ©ratrice IrĂšne, fut chargĂ© en 781 de se rendre Ă  la cour des Francs pour nĂ©gocier le mariage de Constantin VI avec une fille de Charlemagne[3].

À partir du rĂšgne de NicĂ©phore III BotaniatĂšs (v. 1001-1081), les services du palais furent dirigĂ©s par un megas prim[m]ikērios ou grand primicier, responsable de l’ordre soit au palais, soit Ă  l’extĂ©rieur lorsque l’empereur participait Ă  une expĂ©dition. Le faste de la cour perdant de son Ă©clat et le TrĂ©sor se vidant, l’inflation des titres fit que ceux-ci correspondirent de moins en moins aux fonctions ; le « primicier de la cour Â» (πρÎčΌΌÎčÎșηρÎčÎżÏ‚ της αύλης) devint une sorte de maitre des cĂ©rĂ©monies, chargĂ© de placer chacun au poste qu’il devait occuper au palais, en particulier parmi les corps de la garde[4]. On trouve des prim[m]ikērioi dans l’Empire byzantin et le despotat de MorĂ©e jusqu’à leur conquĂȘte par les Ottomans[2].

Administration militaire

Dans l’armĂ©e romaine du Bas-Empire, le primicier Ă©tait un officier dont le rang venait aprĂšs celui de tribun militaire, mais avant celui de sĂ©nateur[5]. On retrouve surtout les primicerii dans les unitĂ©s associĂ©es Ă  la cour impĂ©riale, en particulier chez les gardes du palais. Ainsi du IVe au VIIe siĂšcle, les protectores domestici et les scholĂŠ palatinĂŠ Ă©taient dirigĂ©s par un primicier, de mĂȘme que les fabriques d’armes, lesquelles comme les scholĂŠ Ă©taient sous la juridiction du magister officiorum[2] - [5]. En dehors de l’entourage du prince, d’autres primicerii faisaient partie de l’État-major des commandants militaires de rĂ©gions (duces), de mĂȘme que de certaines unitĂ©s de l’armĂ©e rĂ©guliĂšre[5]. Dans l’Empire byzantin, sous la dynastie des ComnĂšne, on trouve des primikērioi commandant certains rĂ©giments palatins comme les manglabitai, les vardariotai, les vestiaritai et la garde varĂšgue[2]. Le grand primicier Tatikios, eunuque et fils d’un captif sarrasin, accĂ©da aux plus hauts postes de l’armĂ©e sous Alexis Ier (v. 1058-1118) et accompagna les princes croisĂ©s jusqu’à Antioche[4].

Église

Dans l’administration ecclĂ©siastique, on donnait le titre de primicier aux chefs des collĂšges des notarii et des defensores qui occupaient une place importante dans l’administration de l’Église pendant l’AntiquitĂ© tardive et le dĂ©but du Moyen Âge[6].

À partir du Ve ou du VIe siĂšcle, on donna ce titre en Occident aux directeurs des sĂ©minaires formant les jeunes clercs. Une inscription datant de 551 et trouvĂ©e Ă  Lyon mentionne ainsi « Stephanus primicerius scolae lectorum servientium in ecclesia Lugdunensi »[7]. Isidore de SĂ©ville traite dans son « Epistola ad Ludefredum » des obligations du primicier des clercs subalternes[8]. De par ses fonctions, le primicier se voyait Ă©galement attribuer certaines responsabilitĂ©s dans la direction des cĂ©rĂ©monies liturgiques[6].

Au VIIIe siĂšcle, la rĂšgle de Chrodegang et les statuts d’Amalarius de Metz[note 3] font du primicier le premier capitulaire, aprĂšs l’archidiacre et l’archiprĂȘtre, responsable des clercs subalternes et dirigeant les cĂ©lĂ©brations liturgiques ainsi que le chant. La fonction de primicier devint ainsi une fonction spĂ©cialisĂ©e dans de nombreux chapitres grĂące Ă  la transformation graduelle de l’ancienne fonction de chef de la schola cantorum ou lectorum[6].

Dans l’Église orthodoxe orientale, le titre est utilisĂ© tant pour dĂ©signer les supĂ©rieurs des groupes de notarioi et tabularioi de la bureaucratie ecclĂ©siastique, que les personnes responsables des lecteurs, chantres, etc. d’une Ă©glise[2]. Au Moyen Âge et jusqu'Ă  la suppression des chapitres ecclĂ©siastiques en 1790 en France, le grand chantre (le primicerius) Ă©tait la troisiĂšme « dignitĂ© Â» d'un chapitre canonial, aprĂšs le doyen et le sous-doyen (decanus et subdecanus).

Dans l’Église orthodoxe russe moderne, le titre de primicerius (primikirii) est donnĂ© Ă  un clerc junior (quelquefois un lecteur ou un sous-diacre) qui porte un cierge ou une torche devant un Ă©vĂȘque pendant les processions liturgiques ou au cours de l’office divin.

Notes et références

Notes

  1. Le Dominat est la seconde des deux phases de gouvernement de l'ancien Empire romain, qui dura de 285 (environ) jusqu'Ă  la chute de l'Empire d'Occident en 476.
  2. Pour la distinction entre « titre » et « fonction », voir l’article « Glossaire des titres et fonctions dans l'Empire byzantin ».
  3. Amalarius de Metz (780-v. 850) Ă©tait un liturgiste qui devint archevĂȘque de TrĂȘves en 811. Il Ă©crivit le Liber Officialis et autres textes sur la messe.

Références

  1. Bréhier 1970, p. 85.
  2. Kazhdan 1991, vol. 3, « Primikerios », p. 1719.
  3. Bréhier 1970, p. 247.
  4. Bréhier 1970, p. 124.
  5. RE 1956, p. 614-624.
  6. Kirsch 1911.
  7. Le Blant 1856, p. 142, n. 65.
  8. P.L. LXXXIII, 896.

Bibliographie

  • Louis BrĂ©hier, Le monde byzantin, vol. 2 : Les institutions de l’Empire byzantin, Paris, Albin Michel, coll. « L’évolution de l’humanitĂ© », (1re Ă©d. 1949).
  • Jean DarrouzĂšs, Recherches sur les offikia de l’Église byzantine, Institut français des Ă©tudes byzantines, coll. « Archives de l'Orient chrĂ©tien », , 626 p. (ISBN 978-90-429-3108-4).
  • (en) Alexander Kazhdan (dir.), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, , 1re Ă©d., 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6 et 0-19-504652-8, LCCN 90023208).
  • (en) Johann Peter Kirsch, « Primicerius », dans The Catholic Encyclopedia, vol. XII, New York, Robert Appleton Co, (lire en ligne).
  • Edmond Le Blant, Inscriptions chrĂ©tiennes de la Gaule antĂ©rieures au VIIIe siĂšcle, vol. I : Provinces gallicanes, Paris, Impression impĂ©riale, .
  • (en) John H. Rosser, The A to Z of Byzantium, Lanham, The Scarecrow Press, (ISBN 978-0-8108-5591-5).
  • (de) Georg Wissowa (dir.), RealencyclopĂ€die der classischen Altertumswissenschaft, vol. VIII (suppl.), Stuttgart, J. B. Metzler, , p. 614-624.
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