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Pont Régemortes

Le pont Régemortes est un pont en pierre au dessus de l'Allier, à Moulins, dans le département homonyme. Il porte le nom de Louis de Règemorte[Note 1], l'ingénieur qui l'a conçu et construit au milieu du XVIIIe siècle. Pont innovant pour son époque, il fut le premier à résister aux fortes crues de la rivière. Il fait l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques depuis 1946.

Pont Régemortes
Image illustrative de l’article Pont Régemortes
Géographie
Pays France
Région Auvergne-Rhône-Alpes
Département Allier
Commune Moulins
Coordonnées géographiques 46° 33′ 42″ N, 3° 19′ 23″ E
Fonction
Franchit Allier
Fonction Pont routier
Caractéristiques techniques
Type Pont en maçonnerie
Longueur 301,50 m
Portée principale 19,50 m
Matériau(x) Pierre (matériau)
Construction
Mise en service 1763
Concepteur Louis de Règemorte
Historique
Protection Logo monument historique Inscrit MH (1946)
Géolocalisation sur la carte : France
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Pont Régemortes
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Pont Régemortes
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Pont Régemortes

Construction du pont

En 1750, Louis de Régemortes, ingénieur des turcies et levées de la Loire, fut chargé d'étudier le projet d'un pont destiné à remplacer celui qui avait été dessiné par Mansart en 1705 et qui avait été emporté par la crue de 1710 avant même d'être terminé. Les ponts à Moulins, comme la plupart de ceux qui étaient situés en aval de Vichy, ont au cours de l'histoire régulièrement été emportés par les violentes crues de l'Allier. Fort de son expérience sur la Loire et de l'échec du pont de Mansart, il constate que l'effondrement des ponts est dû à la puissance des crues mais également à la mobilité et à l'épaisseur des sables sur lesquels il repose, pouvant atteindre jusqu'à 16 m[1]. Les pilotis, sur lesquels reposaient les piles des précédents ponts ne pouvaient pas atteindre la couche de roche dure[1].

De 1750 à 1753, Régemortes établit un projet, qui fut approuvé par la municipalité de Moulins puis par un arrêt du Conseil du roi le . Ce projet comporte deux innovations[1] :

  • un radier général, déjà employé mais à plus petite échelle sur la Vienne, qui va apporter une bonne rigidité artificielle[1],
  • une large ouverture pour le passage des eaux avec 253 mètres[1] (pour une longueur totale d'environ 300 mètres) alors que le pont de Mansart n'en prévoyait que 113 mètres)[1].

Les travaux vont durer 10 ans, de 1753 à 1763. Régemortes fait détruire le quartier de la Madeleine en rive gauche[1], et y creuse, protégé de la rivière par un mur, la risberme, la première partie du radier sur une profondeur d'un 1,65 mètre et une largeur de 34 mètres[1]. Une première moitié de pont est construite côté rive gauche, entre 1753 et 1759. Une fois achevée, il fait construire une digue légère pour orienter le débit de la rivière sous cette partie du nouveau pont et permettre la construction d'un radier côté rive droite puis de la seconde moitié du pont[1]. L'ouvrage complet est achevé en 1763. Les déblais extraits de la rivière pour y placer le radier servent à la construction de digues côté rive droite pour protéger la ville de Moulins des crues[1].

Le pont mesure alors 300 mètres entre nus de culées avec 13 arches de 19,5 mètres[1]. C'est le premier pont de grande dimension qui ait été construit sur un radier général avec un tablier horizontal et droit. Le profil de travers offrait 7,78 m de chaussée, avec des trottoirs de 2,30 m chacun et un parapet de 72 cm[2].

Arche du pont Régemortes

En 1771, Régemortes a publié un volume richement illustré décrivant la construction du pont de Moulins et les techniques utilisées.

L'Allier traverse la ville de Moulins.

Depuis la construction

Le pont, côté aval

Le pont résistera jusqu'à nos jours à toutes les crues dont les deux crues exceptionnelles de 1790 et de 1866. Le pont servira de modèle pour le pont de Loire[1] à Nevers et le pont-canal du Guétin[1].

Jusqu'à l'achèvement en 1859 du pont ferroviaire (dit Pont de fer ou Pont noir) situé en amont, il sera le seul pont de Moulins et environs franchissant l'Allier.

Seconde Guerre mondiale

Lors de la Seconde Guerre mondiale, le colonel d'Humières[Note 2] était chargé de la défense du secteur de Moulins[3]. Il décida, contre l'avis du maire, René Boudet[3], qui souhaitait une « ville ouverte », d'établir une ligne de défense sur la rive gauche de l'Allier et de miner une des arches du pont, la cinquième en partant de la rive gauche[4], en disposant dessus six tonnes de nitrite[3].

Quand les Allemands envahirent la ville en provenant de Nevers et de la rive droite, le , il fit sauter[Note 3] l'arche du pont[5], à 14h10, pour empêcher, la traversée des troupes allemandes[Note 4]. Le souffle de l'explosion détruisit de nombreuses vitres de Moulins, dont celles de la salle du conseil municipal, alors en réunion extraordinaire[3].

Une passerelle en bois sera assez rapidement installée[3] et l'arche no 9 sera reconstruite en béton et blocs de pierres quelques mois plus tard, fin 1940, par les ingénieurs TPE Marme et Gervois[1] - [2].

Durant l'Occupation, cette partie de la rivière Allier marquait la ligne de démarcation qui séparait la France en deux, une zone occupée au nord et à l'ouest et zone libre au sud. La ligne séparait également le quartier de la Madeleine (seule partie de Moulins en zone libre) du reste de la ville. Le pont Régemortes sera un des principaux points de passage.

Ne peuvent alors franchir le pont que les possesseurs de laisser-passer. Outre les contrôles de l'armée puis de la douane allemande, la gendarmerie française contrôle elle aussi le pont, pour lutter contre le marché noir. Le passage clandestin seul ou avec l'aide de passeurs[6] à travers la rivière est alors la seule solution pour ceux qui ne possèdent pas de laisser-passer.

Après guerre

Le pont fait l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques par arrêté du [7].

L'exploitation de gravières après guerre, contribueront à l'abaissement du lit de l'Allier, fragilisant le radier[1]. Pour le renforcer, un seuil d'enrochement sera créé et du béton sera injecté[1].

Tourisme

La vue à l'entrée du pont en arrivant depuis l'ouest, côté rive gauche, offre un alignement particulièrement remarquable de 4 flèches issues des deux principaux édifices religieux de la ville :

Même si ce dernier est moins haut, l'effet de perspective contribue à ce que les 4 flèches paraissent depuis cet angle de vue de même hauteur.

Notes et références

Notes

  1. Plusieurs formes du patronyme sont attestées. Celle qui domine lorsqu'il s'agit du pont de Moulins est la forme "Régemortes", qu'il a lui-même adoptée dans l'ouvrage de 1771 où il décrit la construction du pont.
  2. Le colonel François d'Humières (1878-1952), originaire de la région d'Aurillac, était comme ses quatre frères, officier de cavalerie. En septembre 1939, il fut rappelé de sa retraite, qu'il avait pris 3 ans plus tôt, puis fut nommé commandant de la place d'armes de Moulins, au quartier Villars, et de la subdivision militaire de l'Allier. Il était alors sous les ordres de son frère, le général d'Humières qui commandait la 13e région militaire, basée à Clermont-Ferrand.
  3. Faute de cordon de détonateur disponible, les six tonnes de nitrites furent explosées, selon des historiens locaux, en tirant dessus au canon. Cette explication par un tir de canon est aujourd'hui contestée : cf. Jacqueline Débordes, La Guerre secrète à bicyclette, tome 3 : Simone Léveillé, Clermont-Ferrand, De Borée, 2003, p.61-62.
  4. En juin 1940, les Allemands franchirent l'Allier à Moulins par le pont de chemin de fer (le « pont Noir ») qui n'avait pas été détruit (source : Trividic, p. 399).

Références

  1. Jean-Michel Delaveau, Franchir l'Allier : A la découverte de 130 ponts, Champetières, éditions de la Montmarie, , 288 p. (ISBN 978-2-915841-38-1), p. 194 à 197.
  2. Ingénieurs des ponts et chaussées : Chavagnac, Ducoussot, Marme, Wennagel, Riobé, Rambaud, Lehuédé, 1940 - 1948 40 ouvrages reconstruits : inauguration du pont du Veurdre par M. Christian Pineau Ministre des Travaux Publics des Transports et du Tourisme, Crépin Leblond, , 73 p., allocution de M. R. Chavagnac, de M. Lafond, maire du Veurdre, de M. Pineau.
  3. Jean Débordes, L'Allier dans la guerre : (1939-1945), Clermont-Ferrand, De Borée, , 503 p. (ISBN 2-84494-020-X), chap. 1 (« La débâcle »), p. 21 à 25.
  4. Jacqueline Débordes, La Guerre secrète à bicyclette, tome 3 : Simone Léveillé, Clermont-Ferrand, De Borée, 2003, p. 57.
  5. Robert Trividic, « Un adolescent dans la seconde guerre mondiale entre le Bourbonnais, le S.T.O. et la clandestinité », Bulletin de la Société d'émulation du Bourbonnais, t. 78, , p. 399.
  6. "De l'entrée en guerre à l'armistice" sur le site des Archives départementales de l'Allier.
  7. « Pont de Regemortes », notice no PA00093229, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Voir aussi

Bibliographie

  • Louis de Régemortes, Description du nouveau pont de pierre construit sur la rivière d'Allier à Moulins (1771).
  • Marcel Prade, Les ponts monuments historiques, Poitiers, Éd. Brissaud, 1988, p. 45-47. (ISBN 2903442819)
  • Jean-Michel Delaveau, Franchir l'Allier : à la découverte de 130 ponts, Champetières, Éditions de la Montmarie, , 288 p. (ISBN 978-2-915841-38-1).
  • Hélène Camus, « Sous Louis XV, Monsieur de Régemortes met un terme aux tribulations séculaires du pont de Moulins », Cahiers bourbonnais, no 213, 2010, p. 49-58.
  • M. T. Téty, « Louis de Régemortes à Moulins : une rivière, une ville, un pont enfin il y a 250 ans », Études bourbonnaises, n° 331, .

Articles connexes

Liens externes

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