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Persécutions mariales

Les PersĂ©cutions mariales sont des persĂ©cutions religieuses menĂ©es Ă  l'encontre des rĂ©formateurs protestants et d'autres dissidents religieux en Angleterre durant le règne de Marie Tudor (1554-1558). Les exĂ©cutions de cette pĂ©riode sont enregistrĂ©es dans le Livre des Martyrs de Foxe. Les protestants anglais ont conçu une haine durable pour cette reine qu'ils ont surnommĂ©e Bloody Mary (« Marie La Sanglante Â»), ainsi que pour l’évĂŞque de Londres Edmund Bonner vu son implication dans les persĂ©cutions.

Plaque à Maidstone, Kent, commémorant ceux qui furent brûlés dans ces environs.

Contexte historique

La Réforme anglaise entraîne la fin du gouvernement ecclésiastique de l’Église catholique romaine en Angleterre, le contrôle royal sur l’Église, la suppression des institutions catholiques telles que les monastères et les chantres, l'interdiction du culte catholique, l'institution de services religieux et d'un clergé protestants. Durant la Réforme en Angleterre, de nombreuses personnes sont impliquées dans une guerre de religion confrontant catholiques et protestants.

L’avènement d'Édouard VI, premier roi protestant d'Angleterre, fait de 1547 une annĂ©e charnière de l'histoire de la RĂ©forme anglaise, et place le protestantisme en position dominante. Édouard meurt en 1553, laissant le trĂ´ne Ă  Lady Jane Grey qui s'y maintient environ deux petites semaines avant que la demi-sĹ“ur d’Édouard, Marie (catholique), ne la dĂ©pose et prenne la couronne. Marie règne de 1553 Ă  1558. Pendant son règne, elle restaure les relations jusque-lĂ  très dĂ©gradĂ©es avec Rome et rend l'Angleterre au catholicisme. De nombreux protestants s'opposent aux actions de Marie. Beaucoup sont exilĂ©s, et près de trois cents dissidents sont exĂ©cutĂ©s sur le bĂ»cher, ce qui lui valut le surnom de « Marie la Sanglante Â» (en anglais, Bloody Mary)[1].

Persécution

Des ennuis pour les protestants

Après l'accession de la Reine Marie au trône en 1553, et le décret sur le catholicisme qui s'ensuivit, les protestants se retrouvent devant un choix : l'exil, la réconciliation/conversion, ou la punition[2]. Plusieurs de ceux qui restent en Angleterre pour professer et défendre leur foi protestante sont brulés vifs et considérés par leurs partisans comme des martyrs. Pendant le règne de Marie, 284 protestants sont exécutés ; les victimes sont en majorité des hommes (seulement 56 femmes parmi les condamnés). Trente meurent en prison, mais la majorité des 284 personnes sont brûlés vives[3]. Alors que les “Persécutions mariales” proprement dites commencent avec l'exécution de quatre hommes d’Église[4], issus du protestantisme édouardien, le tendancieux Livre des Martyrs de John Foxe, qui enregistre les événements, offre un récit des exécutions qui dépasse les objectifs prévus (épuration du haut-clergé). Des commerçants sont aussi brûlés, tout comme les hommes mariés et les femmes, parfois ensemble ; on compte au moins un couple qui a été brûlé vif avec sa fille[4].

Procès judiciaires

Les jugements des « hĂ©rĂ©tiques Â» protestants sont des affaires judiciaires, rattachĂ©es Ă  un protocole lĂ©gal strict[5]. Au cours de la session qui a rĂ©tabli le royaume dans l'"obĂ©issance au pape", le Parlement rĂ©vise les lois sur l'hĂ©rĂ©sie[4]. Ă€ partir du , l'Angleterre mariale peut donc lĂ©galement juger et punir les personnes jugĂ©es coupables d'hĂ©rĂ©sie contre la foi catholique[6].

S'il est déclaré coupable, l'accusé est d'abord excommunié, puis livré aux mains des autorités séculières pour son exécution[7].

Les Martyrs mariaux

Les quatre premiers martyrs

  • John Rogers, preacher, traducteur biblique, lecteur Ă  la cathĂ©drale Saint-Paul de Londres – brĂ»lĂ© Ă  Smithfield, le [8].
  • Lawrence Saunders, prĂ©dicateur, recteur de l'Ă©glise londonienne de All Hallows – brĂ»lĂ© Ă  Coventry, le [9].
  • John Hooper, Ă©vĂŞque de Gloucester et de Worcester sous Édouard VI – brĂ»lĂ© Ă  Gloucester, le [9].
  • Rowland Taylor, recteur de Hadleigh dans le Suffolk – brĂ»lĂ© Ă  Aldham Common, le [9].

Martyrs connus de la Persécution (1555-1558)

Cette liste n'est pas exhaustive

1555

  • William Hunter, le , Brentwood
  • Robert Ferrar, brĂ»lĂ© le , Carmarthen
  • Rawlins White, brĂ»lĂ©, Cardiff
  • George Marsh, brĂ»lĂ© le , Chester
  • Jokn Schofield, brĂ»lĂ© le , Chester
  • William Flower, brĂ»lĂ© le , Westminster
  • John Cardmaker, brĂ»lĂ© le , Smithfield
  • John Warne, brĂ»lĂ© le , Smithfield
  • John Simpson, brĂ»lĂ© le , Rochford
  • John Ardeley, brĂ»lĂ© le , Rayleigh
  • Dirick Carver de Brighton, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomas Harland de Woodmancote, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • John Oswald de Woodmancote, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomas Avington d'Ardingly, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomas Reed d'Ardingly, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomas Haukes, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomas Watts
  • Nicholas Chamberlain, brĂ»lĂ© le , Colchester
  • Thomas Ormond, brĂ»lĂ© le , Manningtree, Buried in St. Micheals & All Angels Marble placed in 1748
  • William Bamford, brĂ»lĂ© le , Harwich
  • Robert Samuel, brĂ»lĂ© le , Ipswich
  • John Newman, brĂ»lĂ© le , Saffron Walden
  • James Abbes Shoemaker, de Stoke by Nayland brĂ»lĂ© Ă  Bury St Edmunds en
  • William Allen, travailleur de Somerton brĂ»lĂ© Ă  Walsingham en
  • Robert Glover, brĂ»lĂ© le Ă  Coventry
  • Cornelius Bongey (ou Bungey), brĂ»lĂ© le Ă  Coventry
  • Nicholas Ridley, brĂ»lĂ© le Ă  l'extĂ©rieur du Balliol College, Oxford
  • Hugh Latimer, brĂ»lĂ© le Ă  l'extĂ©rieur du Balliol College, Oxford
  • John Philpot, brĂ»lĂ©

1556

  • Agnes Potten, brĂ»lĂ©e le , Ipswich, Cornhill
  • Joan Trunchfield, brĂ»lĂ©e le , Ipswich, Cornhill
  • Thomas Cranmer, brĂ»lĂ© le , Ă  l'extĂ©rieur du Balliol College, Oxford
  • Thomas Hood de Lewes, brĂ»lĂ© aux alentours du , Lewes
  • Thomas Miles de Hellingly, brĂ»lĂ© aux alentours du , Lewes
  • John Tudson de Ipswich, brĂ»lĂ© Ă  Londres
  • Thomas Spicer de Beccles, brĂ»lĂ© lĂ  le
  • John Deny de Beccles, brĂ»lĂ© lĂ  le
  • Edmund Poole de Beccles, brĂ»lĂ© lĂ  le
  • Joan Waste, 1er aoĂ»t, brĂ»lĂ©e Ă  Derby

1557

  • William Morant, brĂ»lĂ© Ă  la fin du mois de mai, St. George's Field, Southwark[10]
  • Stephen Gratwick, brĂ»lĂ© Ă  la fin du mois de mai, St. George's Field, Southwark[10]
  • (unknown) King, brĂ»lĂ© Ă  la fin du mois de mai, St. George's Field, Southwark[10]
  • Richard Sharpe, brĂ»lĂ© le , Cotham Bristol
  • William et Katherine Allin de Frittenden et cinq autres personnes, brĂ»lĂ©s le Ă  Maidstone
  • Richard Woodman de Warbleton, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • George Stevens de Warbleton, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Alexander Hosman de Mayfield (en), brĂ»lĂ© le , Lewes
  • William Mainard de Mayfield (en), brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Thomasina Wood de Mayfield (en), brĂ»lĂ©e le , Lewes
  • Margery Morris de Heathfield, brĂ»lĂ©e le , Lewes
  • James Morris, son fils, of Heathfield, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Denis Burges de Buxted, brĂ»lĂ© le , Lewes
  • Ann Ashton de Rotherfield, brĂ»lĂ©e , Lewes
  • Mary Groves of Lewes, brĂ»lĂ©e le , Lewes
  • John Noyes de Laxfield, Suffolk, brĂ»lĂ© le
  • Joyce Lewis de Mancette, brĂ»lĂ© Ă  Lichfield le [11].

1558

  • Roger Holland, brĂ»lĂ© Ă  Smithfield avec sept autres personnes
  • William Pikes ou bien Pickesse d'Ipswich, brĂ»lĂ© le , Brentford avec cinq autres personnes
  • Alexander Gooch de Melton, Suffolk, brĂ»lĂ© le , Ipswich Cornhill
  • Alice Driver de Grundisburgh brĂ»lĂ©e le , Ipswich Cornhill
  • P Humphrey, brĂ»lĂ© en novembre, Bury St Edmunds
  • J. David, brĂ»lĂ© en novembre, Bury St Edmunds
  • H. David, brĂ»lĂ© en novembre, Bury St Edmunds

Ironie de l'exécution de John Rogers

Avant l'accession de Marie Tudor sur le trône, John Foxe, un des rares clercs de son temps opposé à l'exécution par le feu des hérétiques les plus obstinés, a contacté John Rogers pour qu'il intervienne en faveur de Joan Butcher, une anabaptiste condamnée à être brûlée vive en 1550[12]. Rogers, prédicateur protestant et chapelain du roi, refuse d'intervenir, justifiant le supplice des hérétiques, méthode d'exécution « suffisamment douce » en regard d'un crime aussi grave que l'hérésie[13].Plus tard, après l’avènement de Marie et la conversion de l'Angleterre au catholicisme, John Rogers, qui s'exprime avec véhémence contre le nouvel ordre, est brûlé à son tour comme hérétique[14].

Sources

Les textes officiels concernant ces jugements sont limités aux accusations formelles et aux sentences[7]. La liste complète des victimes fait apparaître 284 victimes exécutées à quoi s'ajoute une trentaine de personnes décédées en prison[15]. Trois de ces victimes sont commémorées par un monument gothique érigée à Oxford, en Angleterre. Ils sont connus localement comme les Marian Martyrs[16].

Au-delà de ces relevés factuels, les documents auxquels les historiens se réfèrent pour le contexte et les détails sont des textes écrits par les proches des accusés qui détaillent arrestations et interrogatoires afin de rallier le soutien des sympathisants des protestants contre les lois religieuses mariales. S'ils fournissent ainsi un récit de première main sur le déroulement des faits, ils sont aussi imprégnés de subjectivité[17].

L'historien britannique Geoffrey Elton a avancé que « beaucoup [de ces victimes] étaient des fanatiques et que certaines d'entre elles pouvaient avoir adhéré à des opinions radicales (telles l'anabaptisme) qui leur auraient également valu d'être poursuivies par un gouvernement protestant »[18]. Il y eut 9 exécutions de cette nature sous le gouvernement d’Élisabeth Ire et 2 sous le règle de Jacques Ier.

Voir aussi

Références

  • (en) Margaret Baker, Discovering London Statues and Monuments, Princes Risborough, Shire Publications,
  • (en) Amos Blanchard, Book of Martyrs : Or, A History of the Lives, Sufferings and Triumphant Deaths of the Primitive and Protestant Martyrs from the Introduction of Christianity to the Latest Periods of Pagan, Popish, Protestant, and Infidel Persecutions. Compiled from Foxe’s Book of Martyrs and other Authentic Sources., N. G. Ellis,
  • (en) Eamon Duffy, Fires of Faith : Catholic England under Mary Tudor, New Haven, Yale,
  • (en) Christopher Haigh, The English Reformation Revised, Londres, Cambridge,
  • (en) Judith M. Richards, Mary Tudor, Londres, Routledge,
  • (en) Gina Alexander, Bonner and the Marian Persecutions

Notes

  1. Haigh, The English Reformation Revised, Cambridge 1987
  2. Richards, Mary Tudor, Routledge 2009, p. 186
  3. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale 2008, p. 79
  4. Richards, Mary Tudor, Routledge 2009, p. 196
  5. Richards, Mary Tudor, Routledge 2009, p. 195
  6. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale 2008, p. 91
  7. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale 2008, p. 102
  8. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor", Yale 2008, p. 113
  9. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor", Yale 2008, p. 98
  10. Blanchard (1844), p.272
  11. Richings, R (1860) The Mancetter martyrs: the suffering and martyrdom of Mr Robert Glover and Mrs Joice [sic] Lewis (London: pp xiii/xiv)
  12. Richards, Mary Tudor, Routledge 2009, p. 193
  13. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale 2008, p. 87
  14. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale 2008, p. 97
  15. Ces listes sont disponibles ici et ici.
  16. [Baker, Margaret. Discovering London Statues and Monuments. Princes Risborough: Shire Publications, 2003. Print.], additional text.
  17. Duffy, Fires of Faith: Catholic England Under Mary Tudor, Yale, 2008, p. 103.
  18. (en) G.R. Elton, The Reformation : 1520-1559, Cambridge, Cambridge University Press, , 742 p. (ISBN 978-0-521-34536-1, lire en ligne), Chap X : G.R. Elton, "The Reformation in England", p. 286
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