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Paul-Napoléon Roinard

Paul Arthur NapolĂ©on Roinard, nĂ© le Ă  Neufchâtel-en-Bray et mort le Ă  Courbevoie[1], est un peintre, librettiste et poète libertaire français.

Paul-Napoléon Roinard
Paul Napoléon Roinard par Louis Anquetin en 1893.
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  74 ans)
Courbevoie
Nom de naissance
Paul Arthur Napoléon Roinard
Nationalité
Formation
Activités

Biographie

Après avoir passĂ© son enfance jusqu’à douze ans Ă  Neufchâtel, Roinard fit ses Ă©tudes au lycĂ©e de Rouen oĂą il se faisait un peu gloire d’être mauvais Ă©lève au possible. Ă€ vingt ans, après une lutte opiniâtre avec sa famille, il monta Ă  Paris, oĂą il arriva au milieu d’un orage Ă©pouvantable, après un tamponnement dans le tunnel des Batignolles, circonstances oĂą il vit encore un prĂ©sage Ă  tous ses malheurs. Élève Ă  la fois Ă  l’École des Beaux-Arts et Ă  l’École de mĂ©decine, il se mit en mĂŞme temps Ă  Ă©crire des milliers de vers qu’il dĂ©truisit ensuite, au nombre desquels un drame : Savonarole et un proverbe : En tout il faut considĂ©rer la fin, qu’il offrit alors sans succès au Théâtre-Français.

BrouillĂ© avec sa famille, après un an de service militaire au 11e rĂ©giment de ligne, il mena alors pendant sept annĂ©es une vie de misère, manquant de tout, mĂŞme de logement. Grâce Ă  sa santĂ© robuste, il s’en sortit, et finit par vivre tant bien que mal en utilisant ses talents de peintre dans de la peinture pour l’exportation, ses talents de poète Ă  rimer des devises pour papillotes de confiseurs, et toute sa bonne volontĂ© dans diverses besognes, comme un emploi Ă  la SociĂ©tĂ© gĂ©nĂ©rale, d’oĂą de formidables erreurs dans ses comptes le firent congĂ©dier dès le premier mois.

La peinture pour l’exportation allait si bien qu’il put bientĂ´t se remettre Ă  la poĂ©sie et publier, en 1886, son premier recueil de vers : Nos Plaies, livre de rĂ©volte intellectuelle et sociale, satire amère et dure. Ce livre l’introduisit dans les milieux littĂ©raires. ll frĂ©quenta le Chat Noir, fonda avec quelques amis la SociĂ©tĂ© La Batte, d’oĂą devait sortir le mouvement libertaire et qui donna son concours Ă  la première reprĂ©sentation du Théâtre-Libre. Il dirigea la Revue Septentrionale, collabora Ă  divers quotidiens et revues, notamment Ă  l’Écho de France. On le sollicita mĂŞme un jour d’écrire un ouvrage en vers pour lequel on s’engageait Ă  le faire dĂ©corer, mais la croix, le moindre ruban, Ă©tait pour lui l’enrĂ©gimentement dans le bataillon commun et il ne put que refuser.

RetirĂ© Ă  l’écart de 1889 Ă  1891, Roinard s’appliqua Ă  retirer de la circulation tous les exemplaires de Nos Plaies qu’il put rencontrer, et conçut l’idĂ©e de son livre : la Mort du RĂŞve, dont les premiers fragments parurent dans la seconde PlĂ©iade. Il reparut dans le monde littĂ©raire en , pour fonder avec Zo d'Axa le journal anarchiste l’Endehors. Il donna, en , au Théâtre d’Art une adaptation, reprĂ©sentĂ©e avec la musique de Mme Flamen de LabrĂ©ly, du Cantique des Cantiques, dont il avait lui-mĂŞme composĂ© la dĂ©coration. Le rĂ©sultat ne fut pas au rendez-vous de cette tentative : l’idĂ©e de Roinard, qui avait voulu faire intervenir les parfums comme moyens d’évocation scĂ©nique, parut si nouvelle qu’on le traita de fou.

Roinard prit ensuite la Direction des Essais d’Art libre, oĂą il organisa, en 1894, l’Exposition des Portraits du prochain siècle, qui eut lieu dans la galerie Le Barc de Boutteville. Les Portraits du prochain siècle consistaient en portraits des jeunes Ă©crivains et artistes qui devaient ĂŞtre un jour de grands artistes et de grands Ă©crivains. Roinard complĂ©ta mĂŞme le sens de cette exposition en publiant un volume de biographies de tous ces futurs grands hommes, au nombre desquels lui-mĂŞme figurait. Cette nouvelle tentative ne fut pas moins bien accueillie que l’introduction des parfums sur la scène. On se moqua, on ridiculisa, et Roinard dut garder en carton deux autres volumes consacrĂ©s aux musiciens et aux savants de l’avenir.

Roinard pensa, un moment, revenir dĂ©finitivement Ă  la peinture pour l’exportation mais, persĂ©vĂ©rant nĂ©anmoins quelque temps, il frĂ©quenta le Club d’Art Social, avant de se retirer de nouveau Ă  l’écart, pour Ă©crire un grand drame de synthèse rĂ©volutionnaire, dont l’idĂ©e le hantait, intitulĂ© la LĂ©gende rouge. Au moment oĂą il allait le commencer, les revers reprirent : saisi, expulsĂ©, il se vit jeter Ă  la rue, dĂ©possĂ©dĂ© de tout, et obligĂ© de chercher un autre toit. Il eut pourtant lieu d’éprouver, dans ces infortunes la consolation comme poète de voir un brocanteur acheter en bloc Ă  la vente tous les exemplaires de Nos Plaies qu’il avait si patiemment soustraits Ă  la curiositĂ© du public, pour en garnir toutes les boĂ®tes des quais, au point qu’il n’était pas un bouquiniste qui n’en eĂ»t sa part.

Lors du procès des Trente, intentĂ© par le gouvernement aux anarchistes, Roinard se sentit compromis par sa participation Ă  la SociĂ©tĂ© La Butte, sa frĂ©quentation au Club d’Art Social, sa collaboration Ă  l’Endehors et son empressement Ă  rĂ©pandre les listes de protestations contre l’expulsion de Alexandre Cohen et l’arrestation de Jean Grave. Il pensa que le premier devoir d’un homme passionnĂ© pour la libertĂ© Ă©tait de la conserver,  et sans attendre le verdict, la nuit mĂŞme, il s’exila sans raison sĂ©rieuse Ă  Bruxelles : il n’était nullement compromis ; jamais on n’avait pensĂ© Ă  lui ; son nom n’avait mĂŞme pas Ă©tĂ© prononcĂ© ; son imagination de poète avait seule tout fait.

ArrivĂ© dans la capitale belge avec cent sous en poche, Roinard vĂ©cut lĂ  au moyen de dessins au Petit Bleu, d’articles dans des revues, faisant de l’aĂ©rostation, de la littĂ©rature et de la peinture, jusqu’à des affiches qu’on lui commandait et qu’on lui laissait pour compte, manquant une fois d’être expulsĂ© comme anarchiste, une autre fois jouant Joad dans une reprĂ©sentation d’Athalie avec le comĂ©dien Raymond, trouvant encore le temps, au milieu de cette vie active, de flâner, de rĂŞver, de bavarder avec des artistes et des Ă©crivains, et mĂŞme de travailler Ă  sa grande Ĺ“uvre Les Miroirs, pièce en cinq actes et en vers. Au bout de deux ans, jour pour jour, il revint Ă  Paris. L’exil ne l’avait changĂ© en rien. Sa fortune s’était seulement un peu augmentĂ©e. Parti avec cinq francs, il revenait avec cinq francs dix.

AussitĂ´t rentrĂ© Ă  Paris, Roinard songea Ă  faire reprĂ©senter Les Miroirs. Il ouvrit dans ce but une souscription. Mais lĂ  encore le poète avait comptĂ© sans sa chance. Tout Ă©tait prĂŞt et on allait jouer, quand, sous l’effet de l’affaire Dreyfus, les souscripteurs s’éclipsèrent, laissant le rideau baissĂ© sur l’œuvre et ses interprètes. Ce revers, oĂą huit cents francs avaient Ă©tĂ© dĂ©pensĂ©s en pure perte, fit presque regretter sa bonne vie pittoresque en Belgique Ă  Roinard. La revue La Phalange ouvrit cependant une souscription pour la publication de ce drame, mais Roinard se dĂ©cida Ă  revenir exclusivement Ă  ses poèmes. Il se remit Ă  travailler Ă  son livre la Mort du RĂŞve, qu’il publia en 1902, et Ă  l’occasion duquel un banquet lui fut offert, le de la mĂŞme annĂ©e, par des artistes et des Ă©crivains, sous la prĂ©sidence de Rodin. La presse garda le silence le plus unanime sur cet important Ă©vĂ©nement et dès lors, Roinard ne travailla plus guère : « dĂ©couragĂ©, malade, retirĂ©, blotti Ă  Belleville dans un coin de grand air et sous un nid de feuilles, rendant Ă  Paris silence pour silence ».

Roinard a collaboré à L’Avenir de Rouen, La Pléiade, le Mercure de France, la Revue encyclopédique, L'Humanité, le Journal de Paris, Le Réveil, L'Endehors, La Hève, La Revue septentrionale, L’Alceste, Le ParisienL'Écho de France, les Essais d’art libre, La Plaine, le Petit Bien et Le Public de Bruxelles, la Revue des Beaux-Arts et des Lettres, le Beffroi, La Phalange, la Revue de Paris et de Champagne, etc.

Opinions

« Roinard est une sorte de vague poète bohème, révolutionnaire et ignoré »

— Paul Léautaud, Journal littéraire, 24 mars 1906.

Ĺ’uvres

  • Nos plaies, poĂ©sies, couverture dessinĂ©e par l’auteur, Paris, Soc. typographique, 1886, in-18 ;
  • Chanson d'amour, poĂ©sie, musique de Louis Hesse. Paris, Durdilly. s. d., en feuille ;
  • Six Ă©tages, rĂ©cit en vers, Paris, Ed. Girard, s. d., en feuille ;
  • Berceuse, poĂ©sie, s. 1. n. d. [Paris, Ed. Girard], 2 ff., la couverture sert de titre (50 exempl.).
  • Ă€ Dieu, s’il existe, Paris, chez l’auteur, 7, rue PixĂ©rĂ©court, s. d., en feuille, ;
  • La Mort du rĂŞve, poèmes, Paris, Soc. du Mercure de France, 1902, in-8° ;
  • Sur l'avenue sans fin, poème, Paris et Reims, Revue de Paris et de Champagne (et chez l’auteur), 1906, in-8°.
  • Portraits du prochain siècle (1894) ;
  • La PoĂ©sie symboliste. Trois entretiens sur les temps hĂ©roĂŻques, pĂ©riode symboliste, au Salon des artistes indĂ©pendants, 1908. Nos maĂ®tres et nos morts, par P.-N. Roinard. Les Survivants, par Victor-Émile Michelet. La Phalange nouvelle, par Guillaume Apollinaire (1908) ;
  • Les Miroirs, moralitĂ© lyrique en cinq phases, huit stades, sept gloses et en vers, Éd. de « La Phalange », 1908 introuvable Ĺ“uvre majeure ;
  • La LĂ©gende rouge, synthèse d'idĂ©es et de caractères rĂ©volutionnaires, suivi d'un dĂ©bat sur Le nombre et la rime et d'un ballet-mimodrame, La Ronde des fleurs (1921) ;
  • Chercheurs d'impossible. Contre-partie du Donneur d'illusions, fĂ©erie tragique, 5 actes, 11 tableaux, en vers, 1929.

Préfaces et notices

  • Portraits du prochain siècle, Paris, Girard, 1894, in-18.
  • Ĺ’uvres posthumes de Paul Audricourt. Paris, Mouillot, 1902, in-18 ;
  • SoirĂ©e d’Art social. Programme illustrĂ© par Deluermoz.

On trouve, en outre, des poèmes de P.-N. Roinard dans les ouvrages suivants : Poètes du Nord, 1880-1902, morceaux choisis publiĂ©s par A.-M. Gossez. Paris, Ollendorff, 1902, in-18 ; Anthologie des Poètes normands contemporains, par M.-C. Poinsot. Paris, Floury s. d., in-18.

Sources

Références

  • LĂ©on Bloy, LĂ©on Bloy devant les cochons, Paris, Chamuel, 1894, in-18.
  • LĂ©on Bloy, Le Mendiant ingrat, Bruxelles, Deman, 1898, in-18.
  • LĂ©on Bocquet, « P.-N. Roinard », Le Beffroi (Lille), .
  • Jean Court, Le Cantique des Cantiques au Théâtre d’Art, Mercure de France, .
  • Georges Docquois, Le Congrès des Poètes, Paris, Bibliothèque artistique et littĂ©raire, 1894, in-16.
  • FĂ©licien Fagus, « P.-N. Roinard », La Revue des Beaux-Arts et des Lettres, ; Sur le mĂŞme, Revue blanche, .
  • A.-M. Gossez, Poètes du Nord. 1880-190S, morceaux choisis, accompagnĂ©s d’un essai bio-bibliographique, etc., Paris, Ollendorff, 1902, in-18.
  • Julien Leclercq, « Roinard », notice dans les Portraits du prochain siècle, Paris, Girard, 1894, in-18.
  • M.-C. Poinsot, Anthologie des poètes normands contemporains (Portraits de P.-N. Roinard), Paris, Floury, s. d., in-16.
  • Anonyme, « Banquet Ă  Roinard » La Plume, .
  • Anonyme, Échos. Les FĂŞtes CornĂ©liennes de Rouen, Mercure de France, .

Iconographie

  • Louis Anquetin : Portrait Ă  l’huile, 1885 (appartient Ă  M. Roinard) ; Portrait Ă  l’huile [Exposition des Portraits du prochain siècle, chez Le Barc de Boutteville, 1893] (appartient Ă  M. Roinard), reprod. dans la Revue EncyclopĂ©dique, .
  • A. Brière, « Croquis », La Plume, .
  • F. CourchĂ© : Dessin Ă  la plume, reprod. dans le Messager Parisien, 1888.

Notes et références

Liens externes

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