Moussa Traoré
Moussa Traoré (), né le à Sébétou dans la région de Kayes et mort le à Bamako, est un militaire et un homme d'État malien, président de la République de 1968 à 1991.
Moussa Traoré | |
Moussa Traoré en 1989. | |
Fonctions | |
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Président de la République du Mali[N 1] | |
– (22 ans, 4 mois et 7 jours) |
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Élection | 19 juin 1979 |
RĂ©Ă©lection | 9 juin 1985 |
Premier ministre | Mamadou Dembélé |
Président du gouvernement | Yoro Diakité (provisoire) |
Prédécesseur | Modibo Keïta (président du gouvernement) |
Successeur | Amadou Toumani Touré (président du Comité de transition pour le Salut du peuple, de facto) Alpha Oumar Konaré (indirectement) |
Biographie | |
Nom de naissance | Moussa Traoré |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Kayes (Afrique-Occidentale française) |
Date de décès | (à 83 ans) |
Lieu de décès | Bamako (Mali) |
Nationalité | malienne |
Parti politique | UDPM |
Conjoint | Mariam Sissoko |
Entourage | Modibo Diarra (beau-fils) |
Religion | Islam |
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Présidents de la République du Mali | |
Biographie
Formation scolaire
Issu d'une famille malinké, Moussa Traoré est né le 25 Septembre 1936 à Sébétou dans la région de Kayes. Il s'y engage dans l'armée en 1954 et fait ses études à l’École des enfants de troupe de Kati (qui deviendra le Prytanée militaire de Kati), puis rejoint l'école d'officiers de Fréjus en 1960[1]. Il en sort major de sa promotion[2].
Parcours militaire
Moussa Traoré est nommé sous-lieutenant en 1961, puis lieutenant en 1963. Il part au Tanganyika (l’actuelle Tanzanie) en qualité d’instructeur auprès des combattants de mouvements de libération. Il est ensuite nommé instructeur à l’École militaire interarmes de Kati.
Présidence de 1968 à 1991
Le , Moussa Traoré participe au coup d’État qui renverse le président socialiste Modibo Keïta. Il devient président du Comité militaire de libération nationale, puis Président de la République le [3] - [4].
Toutes les activités politiques sont alors interdites[3]. Un régime policier est mis en place sous la direction du colonel Tiécoro Bagayoko. Des agents de renseignements vont dans les écoles pour écouter les cours des professeurs (le milieu scolaire et universitaire est en majorité hostile au régime militaire). Le socialisme économique de l’ancien président Modibo Keïta est abandonné.
En 1971, il accuse son Premier ministre Yoro Diakité de tentative de coup d'état et le fait incarcérer à la prison de Taoudeni où il meurt deux ans plus tard de mauvais traitement[4].
En 1972-1973, une sécheresse importante s’abat sur le Mali. L’aide internationale arrive mais l’argent est détourné.
Le , il fait adopter par référendum (99 % des voix) une constitution qui fonde la Seconde République, imposant un parti unique, une assemblée nationale et un président élu tous les 5 ans au suffrage universel[4]. En 1976, il fonde l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), parti unique[3] - [4], ainsi que l’Union nationale des femmes du Mali et l’Union nationale des jeunes du Mali, organisations auxquelles respectivement toutes les femmes et tous les jeunes doivent alors adhérer.
Le , l’ancien président Modibo Keïta meurt de façon suspecte en détention à l’âge de 62 ans, entraînant une forte mobilisation populaire : des milliers de personnes se rendent à ses obsèques, auxquelles participent également des délégations officielles de pays voisins (notamment Guinée et Côte d’Ivoire). Le régime militaire réagit violemment en procédant à de nombreuses arrestations, mais Moussa Traoré est obligé d’expliquer à Radio-Mali les raisons de la mort de Modibo Keita, due selon lui à « un œdème aigu des poumons »[4], mais ces explications ne convainquent personne.
Le , Moussa Traoré fait arrêter Tiécoro Bagayoko et Kissima Doukara, respectivement directeur de la Sûreté nationale et ministre de la Défense, qu’il accuse de préparer un complot.
Lors des premières élections de la seconde république en 1979, Moussa Traoré est l'unique candidat à la présidentielle[4].
Il propose d’aller vers une ouverture politique ce qui lui permet d’acquérir le soutien de certains intellectuels comme Alpha Oumar Konaré qui acceptera le poste de ministre des Arts et de la Culture pendant quelques années.
En 1980, des manifestations étudiantes sont réprimées. Leur chef Abdoul Karim Camara, dit « Cabral », décède sous la torture, le [4].
En 1982, il est promu général d’armée. Moussa Traore entreprend un rapprochement avec l'Union soviétique et les pays socialistes. Le nombre d'étudiants maliens en Europe de l'est explose; la coopération initiée sous Keita, devient une priorité pour le Mali qui reçoit l'essentiel de son aide des états socialistes. Quand des Maliennes regardaient vers l'URSS (1961-1991) Enjeux d'une coopération éducative au féminin, Tatiana Smirnova et Ophélie Rillon, Cahiers d'Etudes africaines, 2017; Conditions de vie et d’études de « migrants étudiants » africains en URSS et en Russie : quels facteurs ont pu contribuer à leurs difficultés et à leurs stratégies d’adaptation ? I. Camara, Journal of international Mobility 2018/1 (N° 6), >.
Avec d'autres régimes africains; il organise en 1985 une tentative de déstabilisation du Burkina Faso afin de favoriser le renversement de Thomas Sankara. Soutenu par la Côte d'Ivoire et le Togo, il fait circuler des rumeurs attribuant à des militaires burkinabés une violation de la frontière et entre en guerre pour quelques semaines avec le Burkina Faso. La Central Intelligence Agency (CIA) note dans un câble que « La guerre est née de l'espoir de Bamako que le conflit déclencherait un coup d’État au Burkina Faso[5]. »
En 1990 sont fondés le Congrès national d’initiative démocratique (CNID) par l’avocat Mountaga Tall et l’Alliance pour la démocratie au Mali (ADEMA) par Abdramane Baba. Ces deux associations vont avec l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) et l’Association malienne des droits de l'homme (AMDH) combattre le régime de Moussa Traoré et exiger le multipartisme.
Le coup d’État de 1991
Le , une manifestation à Bamako composée de milliers d'étudiants est réprimée par les armes, faisant plus de 200 morts. Le soulèvement se poursuit jusqu'au 24 mars[6]. Le , un coup d’État militaire mené par le lieutenant colonel Amadou Toumani Touré renverse Moussa Traoré[3]. Le Comité de transition pour le salut du peuple est mis en place avec le colonel Touré à sa tête.
Après la présidence
Moussa Traoré est emprisonné à la prison de Markala. En , lors d'un procès qualifié de Nuremberg malien, il est condamné à la peine de mort pour crimes de sang commis entre janvier et par un tribunal de Bamako[7]. Il est incarcéré ainsi que tous les membres de sa famille, dont son petit-fils de 6 ans qui a purgé une peine de 14 mois[8]. Il est le premier chef d'État africain à devoir répondre de ses actes devant la justice de son pays[9]. Ayant été condamné à mort, ainsi que son épouse Mariam, Moussa Traoré est déchu de ses droits civiques, et ne peut donc plus voter. Il considère cependant avoir été condamné pour des crimes qu'il n'a pas commis, et avoir été la victime d'un complot politique. Pour lui, le massacre du a été orchestré par l'opposition politique et les socialistes français qui auraient fait venir des mercenaires au Mali afin de le déstabiliser[10]. Il est ainsi gracié en 1997[11].
Le président Alpha Oumar Konaré commue sa peine pour « crimes économiques » en prison à vie le puis, en , le gracie[3] - [2]. Il est accusé d'avoir détourné pendant son règne plus de 2 milliards de dollars d'argent public[9].
Le Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR) est un parti politique malien qui se réclame de Moussa Traoré[10].
Cheick Modibo Diarra, ancien Premier ministre du Mali, est marié à sa fille[12]. Moussa Traoré vit depuis sa libération dans une grande villa du quartier Djikoroni-Para à Bamako offerte par le gouvernement malien[8] - [9].
Il est jusqu'à sa mort considéré comme un « sage ». Il reçoit ainsi quelques jours avant sa mort les colonels ayant mené le coup d'État de 2020 au Mali[6]. Mort le 15 septembre, il est inhumé le 18 septembre à l'issue de funérailles nationales présidées par le chef de la junte Assimi Goïta[13].
Prix et récompenses
- MĂ©daille remise par Mouammar Kadhafi pour saluer son combat pour l'Afrique (2009)[14].
Notes et références
Notes
- Président du Comité militaire de libération nationale du 19 novembre 1968 au 24 juillet 1979.
Références
- « L’EFORTOM-EFORTDM », sur RFI, (consulté le )
- « Biographie de Moussa Traoré », sur Africasuccess.org (consulté le )
- Mounia Daoudi, « L’ancien dictateur Moussa Traoré gracié », sur Rfi.fr, (consulté le )
- Benjamin Roger, « Mali : retour sur le régime de Moussa Traoré en dix dates », sur Jeuneafrique.com, (consulté le )
- Bruno Jaffré, « Mais qui a assassiné Thomas Sankara ? », sur Le Monde diplomatique,
- « Mali : l'ancien président autocrate Moussa Traoré est décédé », sur Le Point, lepoint.fr, (consulté le ).
- https://www.ina.fr/video/CAC9300754
- Michème Ouimet, « La Presse au Mali: entrevue avec l'ex-dictateur Traoré », sur Lapresse.ca, (consulté le )
- Thalia Bayle, « Séries d’été: Les mille et une vies du malien Moussa Traoré (14/30) », sur Mondafrique.com, (consulté le )
- « Moussa Traoré, ancien Président du Mali : « C’est la vérité qui fait peur » », sur Mali24.info, (consulté le )
- « Mali : l’ancien autocrate Moussa Traoré est mort », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
- Tanguy Berthemet, Fabrice Nodé-Langlois, « Cheick Diarra, la trajectoire imprévue », sur Lefigaro.fr, (consulté le )
- « Mali : l'ex-dictateur Moussa Traoré inhumé à Bamako après des obsèques nationales », sur Le Point, lepoint.fr, (consulté le ).
- Modibo Fofana, « Destin : que devient Moussa Traoré ? », sur Journaldumali.com, (consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- Le Mali sous Moussa Traoré, ouvrage collectif
Liens externes
- Ressource relative Ă la vie publique :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Le procès Moussa Traoré sur Ina.fr