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Mot-phrase en hongrois

Cet article traite des mots qui, dans les grammaires du hongrois, sont considérés comme des mots-phrases. Ce sont des mots (à l’exception des verbes) qui peuvent constituer à eux seuls une phrase simple. La plupart de ces mots sont inclus, dans les grammaires traditionnelles du français, parmi les interjections, et certains parmi les adverbes[1]. Quatre classes de mots font partie des mots-phrases : les interjections, les mots-phrases d’interaction, les modalisateurs et les onomatopées[2].

L’interjection

Les interjections sont des mots qui rendent l’expression réflexe de sensations et d’affects. À cause de cela, certaines sont communes à plusieurs langues, même éloignées génétiquement l’une de l’autre. Ainsi a-t-on, aussi bien en hongrois qu’en français, ah!, brrr!, hé!, óh!, etc.[3].

Le mot-phrase d’interaction

Ce type de mot-phrase est utilisé par le locuteur pour interagir avec le(s) destinataire(s) de son message. Dans cette classe il y a[3] :

  • des formules de salutation : hellĂł (familier), csaĂł (familier) « tchao », pá (familier) « au revoir », agyĹ‘ « adieu », szervusz « salut » ;
  • des mots affirmatifs : igen « oui », persze « bien sĂ»r », dehogynem « mais comment donc », ĂĽhĂĽm (façon graphique de rendre un complexe sonore non-articulĂ© utilisĂ© comme rĂ©ponse affirmative) ;
  • des mots nĂ©gatifs : nem « non », dehogy(is) « mais pas du tout » ;
  • des mots injonctifs : cicc ! « minou-minou ! », sicc (pour chasser le chat), hĂ©! « hĂ© ! », rajta! « allez ! », csitt! « pst ! », nesze! « tiens ! »

Généralement, les mots-phrases sont invariables, sauf les mots d’interaction szervusz et nesze, qui reçoivent la désinence personnelle pour la 2e personne du pluriel : szervusztok, nesztek.

Le modalisateur

En ce qui concerne le hongrois, cette classe de mots a été individualisée pour la première fois par Ilona H. Molnár[4]. La plupart des modalisateurs sont à l’origine des adverbes dérivés d’adjectifs ou de noms mais, à la différence de l’adverbe, le modalisateur n’exprime pas de circonstance objective et ne se trouve en rapport syntaxique avec aucun terme de la phrase simple. Par contre, il exprime l’attitude du locuteur à l’égard du contenu de tout l’énoncé où il est utilisé. De tels mots sont talán « peut-être », valószínőleg « probablement, vraisemblablement », esetleg « éventuellement », állítólag « dit-on », etc.[5].

On peut distinguer le modalisateur de l’adverbe selon plusieurs critères, dont les plus importants sont les suivants :

  • L’adverbe rĂ©pond Ă  la question spĂ©cifique pour le complĂ©ment qu’il exprime, alors que le modalisateur ne rĂ©pond pas Ă  une telle question : A fĂ©rfi termĂ©szetesen halt meg. « L’homme est dĂ©cĂ©dĂ© de mort naturelle » contre A kocsi elgázolta a fĂ©rfit, aki termĂ©szetesen meghalt. « La voiture a Ă©crasĂ© l’homme qui, naturellement, est mort ». TermĂ©szetesen du premier exemple rĂ©pond Ă  la question Hogyan ? « Comment ? », Ă©tant un complĂ©ment de manière, mais dans le second exemple c’est un modalisateur qui exprime le fait que le locuteur considère comme normal que l’homme soit mort dans la circonstance donnĂ©e.
  • L’adverbe ne peut rĂ©pondre Ă  une question totale oĂą il n’est pas prĂ©sent, mais le modalisateur peut rĂ©pondre Ă  une telle question. Étant donnĂ©, par exemple, l’affirmation GĂ©za könnyen találta el a cĂ©lt « GĂ©za a atteint la cible facilement », on peut poser la question GĂ©za eltalálta a cĂ©lt? « GĂ©za a-t-il atteint la cible ? », Ă  laquelle on ne peut pas rĂ©pondre Könnyen « Facilement ». Par contre, si l’affirmation est GĂ©za biztosan eltalálta a cĂ©lt « GĂ©za a sans doute atteint la cible », Ă  la mĂŞme question on peut rĂ©pondre par Biztosan « Sans doute », qui exprime une forte probabilitĂ©. (Je n’ai pas vu GĂ©za atteindre la cible, mais connaissant ses capacitĂ©s, je suis presque sĂ»r(e) qu’il l’a atteinte.)
  • Le modalisateur peut constituer Ă  lui seul une phrase simple, ce qui est frĂ©quent dans les dialogues. Il peut constituer une rĂ©ponse Ă  une question totale (– GĂ©za eltalálta a cĂ©lt ? – Biztosan), une rĂ©plique affirmative (– SikerĂĽlt felkeltenem a hallgatĂłság Ă©rdeklĹ‘dĂ©sĂ©t. – ValĂłban « – J’ai rĂ©ussi Ă  Ă©veiller l’intĂ©rĂŞt de l’auditoire. – En effet ») ou une rĂ©plique interrogative : – SikerĂĽlt felkeltenem a hallgatĂłság Ă©rdeklĹ‘dĂ©sĂ©t. – Igazán? « – J’ai rĂ©ussi Ă  Ă©veiller l’intĂ©rĂŞt de l’auditoire. – Vraiment ? »
  • Un adverbe peut porter l’accent tonique le plus fort de la proposition, alors qu’un modalisateur ne le peut pas. Dans A fĂ©rfi termĂ©szetesen halt meg « L’homme est dĂ©cĂ©dĂ© de mort naturelle », le mot le plus fortement accentuĂ© est l’adverbe, ce qui provoque, d’ailleurs, le dĂ©placement du prĂ©fixe verbal meg derrière le verbe. Par contre, dans A kocsi elgázolta a fĂ©rfit, aki termĂ©szetesen meghalt « La voiture a Ă©crasĂ© l’homme qui, naturellement, est mort », l’accent le plus fort frappe le verbe. Il y a une exception Ă  cette règle, celle des modalisateurs Ă  sens nĂ©gatif, qui peuvent porter l’accent principal : aligha « peu probablement », dehogy(is) « pas du tout », korántsem « loin de lĂ  ».
  • Ă€ la diffĂ©rence de l’adverbe, le modalisateur peut ĂŞtre Ă©liminĂ© sans que la structure syntaxique et prosodique de la phrase en soit affectĂ©e. Sa suppression change le sens de la phrase seulement du point de vue de l’attitude du locuteur.
  • Le modalisateur prĂ©sente des ressemblances avec la particule, notamment par son caractère hors syntaxe, mais s’en diffĂ©rencie par le fait qu’il peut constituer une phrase simple Ă  lui seul.

Les modalisateurs expriment principalement :

  • l’évidence, avec l’indication de la source de celle-ci : szemlátomást « visiblement », állĂ­tĂłlag « dit-on », látszĂłlag « apparemment », valĂłban « effectivement » ;
  • l’évidence et/ou la modalitĂ© Ă©pistĂ©mologique subjective, par laquelle l’affirmation est qualifiĂ©e comme possible ou nĂ©cessaire, sur la base de l’expĂ©rience, de connaissances ou d’une supposition du locuteur : biztosan (synonyme bizonyára) « sans doute », kĂ©tsĂ©gtelenĂĽl « sans aucun doute », feltehetĹ‘leg « probablement », valĂłszĂ­nűleg « vraisemblablement », nyilvánvalĂłan « Ă©videmment », termĂ©szetesen « naturellement » ;
  • le souhait du locuteur : remĂ©lhetĹ‘leg « on peut l’espĂ©rer », lehetĹ‘leg « si possible » ;
  • l’attitude affective du locuteur Ă  l’égard du contenu de la phrase : szerencsĂ©re « heureusement », sajnálatosan « malheureusement ».

L’onomatopée

Les onomatopées sont des mots qui rendent[6] :

  • des bruits : bumm « boum » (explosion), puff (bruit d’un objet relativement mou tombant par terre), kipp-kopp « toc-toc » ;
  • des cris d’animaux : miau « miaou » (chat), kikirikĂ­ « cocorico » (jeune coq), nyihaha (hĂ©nissement du cheval) ;
  • des rĂ©flexes physiologiques : hapci « atchoum » (Ă©ternuement), hukk (hoquet).

Notes et références

  1. Cependant, Grevisse et Goosse 2007 traite le mot-phrase comme une partie du discours à part (pp. 1413–1423).
  2. Classification de Keszler 2000, p. 294, citée par Lakatos 2006, p. 5.
  3. P. Lakatos 2006, p. 5.
  4. H. Molnár 1968.
  5. Section d’après Kugler 2001.
  6. Bokor 2007, p. 252.

Sources bibliographiques

  • (hu) Bokor, JĂłzsef, SzĂłfajtan [« Parties du discours »], A. JászĂł, Anna (dir.), A magyar nyelv könyve [« Le livre de la langue hongroise »], 8e Ă©dition, Budapest, Trezor, 2007, (ISBN 978-963-8144-19-5), pp. 197–253 (consultĂ© le )
  • Grevisse, Maurice et Goosse, AndrĂ©, Le bon usage. Grammaire française, 14e Ă©dition, Bruxelles, De Boeck UniversitĂ©, 2007, (ISBN 978-2-8011-1404-9) (consultĂ© le )
  • (hu) H. Molnár, Ilona, « MĂłdosĂ­tĂł szĂłk Ă©s mĂłdosĂ­tĂł mondatrĂ©szletek a mai magyar nyelvben » [« Mots modalisateurs et fragments de phrase modalisateurs en hongrois contemporain »], Budapest, AkadĂ©miai KiadĂł, coll. Nyelvtudományi ÉrtekezĂ©sek, n° 60, 1968
  • (hu) Keszler, Borbála (dir.), Magyar grammatika [« Grammaire hongroise »], Budapest, Nemzeti TankönyvkiadĂł, 2000 (ISBN 963-19-2499-8)
  • (hu) Kugler, NĂłra, « PrĂłbák Ă©s szempontok a mĂłdosĂ­tĂłszĂłk elhatárolásához » [« Tests et critères de dĂ©limitation des modalisateurs »], Magyar NyelvĹ‘r, n° 2, 2001, (ISSN 1585-4515) (consultĂ© le )
  • (hu) P. Lakatos, Ilona (dir.), Grammatikai gyakorlĂłkönyv (mintaelemzĂ©sekkel Ă©s segĂ©danyagokkal) [« Exercices de grammaire (avec des analyses modèles et des matĂ©riaux auxiliaires) »], Budapest, BölcsĂ©sz Konzorcium, 2006 (consultĂ© le )

Bibliographie supplémentaire

  • (hu) Kiefer, Ferenc (dir.), Magyar nyelv [« Langue hongroise »], Budapest, AkadĂ©miai KiadĂł, 2006 (ISBN 963 05 8324 0) (consultĂ© le )
  • (hu) Nagy, Kálmán, Kis magyar nyelvtankönyv [« Petite grammaire du hongrois »], Bucarest, Kriterion, 1980
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