Marché du livre ancien et d'occasion

Le Marché du livre ancien et d'occasion est à la fois complémentaire et concurrent du marché du livre neuf, mais c'est surtout la complémentarité qui apparait, avec un "taux de substituabilité" du livre neuf pour cause de prix "relativement faible"[1] , de 16 % selon la seule enquête économétrique disponible[1] même si certaines sources croient en un "lent déclin du consentement à payer le prix du neuf"[1].

C'est dans la grande majorité des cas un livre supplémentaire, que le client n’aurait pas acheté neuf[1] , le plus souvent parce qu’il est épuisé, mais aussi parce que le prix aurait de toutes façons été un barrage[1].

Pour l’édition grand public, un "tsunami" sur les ventes était attendu en raison de la dématérialisation des livres permis par le livre électronique, mais il se s'est finalement pas produit[1]. Le marché de l'occasion, organisé sur la base juridique de l’épuisement des droits après une première vente[1], en a finalement profité[1] mais sans canibaliser le marché du livre neuf.

Google Livres service en ligne de numérisation de livres lancé par Google en décembre 2004, a notamment offert le téléchargement d'ouvrages libres de droits et promis de permette de trouver où emprunter un exemplaire de livre en bibliothèque, via une bibliothèque virtuelle revendiquant 7 millions de livres en 2008[3], puis 15 millions en 2010, dont une partie seulement consultable directement depuis le site (3 millions aux États-Unis)[4]. En 2019, Google Books contient plus de 25 millions de volumes[5].

Mais la transformation en fichiers numériques des livres ne représentait toujours que moins de 1% de l'édition en 2011[6], et les experts estiment désormais plus prudemment que cette proportion ne dépassera pas 10 % à 15 % du total, dans les dix ans qui viennent[6], la loi sur le prix unique du livre ayant réussi à stabiliser ce marché, selon les observateurs[6]. Les librairies indépendantes représentaient encore un quart du commerce du livre en France en 2006[7], les librairies de second rang étant les moins touchées quand les ventes baissent[7] et dès cette époque la profession observe ses contraintes nouvelles, Internet et la téléphonie mobile, qui "sont des concurrents de plus en plus en plus présents"[7] car "à la fois consommateurs de temps et d'argent" de même que les "ventes couplées avec la presse"[7] y réagissant en soignant la disponibilité des ouvrages recherchés par les internautes. Toutes les grandes librairies ont dès le début des années 2010 leur propre site[6] et dans le quartier latin de Paris à partir de mars 2011, le site Cql.com recense les stocks de chaque libraire[6], permettant au lecteur d'aller dans la librairie détentrice du livre qu'il cherche[6]. Résultat, la survivance en France en 2011 de 15000 lieux exerçant une activité régulière de vente de livres[6], dont 2500 très actifs[6], ce qui fait que l'hexagone compte autant de librairies que l'ensemble du territoire des États-Unis[6] et le seul Quartier latin que tout Manhattan[6]. Lors de l'ouverture du 200e Espace culturel Leclerc, en mai 2011 à Paris, le distributeur Michel-Edouard Leclerc estime cependant qu'"en matière culturelle, l'offre dicte la demande"[6] et juge "suicidaire que la publicité pour le livre à la télévision soit réduite au sponsoring de quelques émissions littéraires"[6].

Selon le sociologue Vincent Chabault, un libraire d’occasion est aujourd’hui de moins en moins un professionnel du livre et de plus en plus un manutentionnaire dans un entrepôt de Momox ou de Recyclivre, ou même un simplement un particulier qui souhaite "revendre directement ses ouvrages lus ou glanés"[8], via une plate-forme comme Leboncoin, favorisant la banalisation de la consommation d’occasion[9], et contribuant à ce que le lecteur la privilégie.

Sur Leboncoin, la mise en valeur du livre est facilité par l'espace d'une annonce, qui autorise une énumération des informations jugées intéressantes[9] "suivie d’un descriptif des particularités"[9] en l'absence d’un tiers de confiance, accompagné d'estimations de prix via "les sources d’information sur lesquelles elles reposent" ou pas, les prix étant assez standard et l'usage immédiat[9].

Comme pour le marché du neuf, le marché du livre ancien et d'occasion, appartient à celui des biens singuliers[2]. Tous deux sont plus ou moins bien complétés par des moyens permettant aux lecteurs dans la vie quotidienne de trouver les bons produits, sous forme des "boîtes à outil", analysés dans un livre de 2007 par le sociologue Lucien Karpik, spécialiste des contributions sur l'économie de la qualité, en traitant aussi d'autres marchés concrets (grands vins, produits de luxe, services des professions libérales)[10] - [11].

Mais concernant le livre, le prix ne parvient pas à donner de "signal marchand" fiable de la qualité du contenu[2], produisant une incertitude pour l'acheteur qui peut nécessiter une "adaptation" entre le contenu et l’attente du lecteur[2], avec l'appel des "dispositifs de jugement" appelés aussi "repères à l’achat"[2], beaucoup plus présents sur le marché du livre neuf que sur celui du livre d'occasion: "critique journalistique, prix littéraire, bouche-à-oreille, avis du libraire, prescription de l’enseignant, etc"[2].

Les critiques de livres peuvent aussi émaner d'applications web de catalogage social comme Babelio, permettant enregistrer des bibliothèques personnelles, éventuellement partagées et commentées par d'autres utilisateurs inscrits. En juin 2021, Babelio comptait une communauté de 1,1 million d'utilisateurs[12], mais d'autres réseaux sociaux du livre populaires existent, comme Booknode et Livraddict].

La valeur du livre dépend aussi selon Lucien Karpik d'autres critères, mais très fluctuants et incertains, comme l’auteur et à sa réputation, l’éditeur, ou encore une collection[2], plus présents sur le marché du livre d'occasion. Cependant, dès 2006, les libraires se plaignant par ailleurs "de la profusion" des titres neufs (4000 par mois)[7], qui entraîne une augmentation du taux invendus renvoyés à l'éditeur[7], "passé en moyenne de 22 % à 24 %"[7].

Si les prix sont bien plus bas que dans le neuf, les marges bénéficiaires sont au contraire plus élevées avec au moins 50 % pour le livre d'occasion contre 35 % à 40 % pour le livre neuf[2]. Ces marges bénéficiaires plus élevées sont nettes des frais spécifiques aux ventes de livres anciens: par exemple chez Momox, les vendeurs envoient sans frais de port les livres, la plate-forme Internet en assurant le coût à leur place pour les inciter à le faire[13] et les paie dans la semaine par un virement bancaire[13], même si c'est souvent pour une somme dérisoire[13], tout en leur mettant à disposition de quoi les scanner sur l’application en ligne.

Certains vendeurs historiques s'appuient sur la rentabilité dans le livre d'occasion pour continuer à vendre des livres neufs, à la rentaiblité plus aléatoire, comme Gibert.

D'autres tirent près de la moitié de leurs ventes en volume du livre d'occasion, comme eBay, qui a vendu en France 715 000 ouvrages de seconde main (dont la moitié de BD et de livres de super-héros) contre 1,2 million de livres neufs.

Certaines plate-formes Internet comme Amazon, Rakuten, eBay ou la Fnac affirmaient de leur côté à la presse prélever entre 20 % et 30 % sur le prix de la vente[13] sans que leur chiffre d'affaires diminue : chez Rakuten, les ventes de livres d’occasion ont connu 16 % de hausse en France entre le premier semestre 2018 et celui de 2019[13]. Parmi ces plate-formes Internet, eBay, Cdiscount, Rakuten contrôlent la grande majorité des transactions[13], mais on trouve aussi AbeBooks, filiale d'Amazon, spécialiste des ouvrages anciens, rares et épuisés[13], et les start-up françaises Kiwibook et Swapbook, cette dernière touchant surtout les étudiants[13]. Les marges plus élevées que dans le neuf viennent aussi du fait qu'il n'y a pas de retour auprès de l’éditeur si un ouvrage ne trouve pas preneur[13], obligeant à couvrir le risque d'invendu, cependant réduit par la faible valeur d'achat.

Historiquement "l'élément fondamental du métier" a toujours été "la recherche d’occasion de gains", une démarche s'inspirant du modèle professionnel des brocanteurs[2], en tirant bénéfice des "opportunités offertes par les différences de règles d’évaluation et d’échange" entre des sous-espaces différents de marché[2], auxquels ces professionnels ont accès pour s'approvisionner en fonction du prix de rachat aussi bas que possible, selon Dominique Vallet, libraire parisien[2]. Pour entretenir des sources d’approvisionnement[2], ils s'appuient de longue date sur un « capital de connaissances » et un réseau de relations [2]. Plus secondairement, ils envisagent "une hypothétique demande qui permettra d’écouler rapidement les volumes"[2].

Le prix souvent dérisoire auxquels se procurent les livres d'occasion leurs revendeurs vient de l'histoire de cette activité: il était d'usage bien avant l'émergence des plate-forme Internet, selon Vincent Chabault, maître de conférences en sociologie à l'Université Paris Descartes[2], qui a distingué plusieurs sources d'approvisionnement historiques:

• les "ventes mortuaires"[2], qui désignent, selon le langage des bouquinistes, le rachat de bibliothèques après un décès ou un déménagement, l'héritier ou le propriétaire étant déjà accaparé par la revente des meubles[2], ce qui permet de lui racheter l’ensemble d'un lot[2], l'acquéreur effectuant ensuite son propre "tri entre les invendables et les « pépites »"[2], l'opportunité de gain sur les seconds permettant d'assurer le coût de ce tri[2].
• les salles de vente comme celle de "Drout-Nord, réputée pour vendre des meubles, des tableaux et des objets hétéroclites sans grande valeur"[2], et qui pratiquent des "ventes d’ensembles de livres"[2]. Dans ces salles de vente, les assistants du commissaire-priseur ne prennent en général pas le temps de montrer les livres, citant simplement un ou deux titres sur un lot de plusieurs dizaines[2].
• l'achat à un autre professionnel, toujours par lot[2], qui augmente encore le caractère aveugle de l'acquisition, le revendeur n'étant pas présent au moment de la première acquisition.

A l'autre extrémité du spectre des prix des livres d'occasion, sur les plate-forme Internet, des algorithmes influencent le marché de l'occasion, en tentant de calculer le "potentiel de recommercialisation"[1], conditionnant la décision de placer ou non une référence sur le marché de l'occasion, selon sa disponibilité estimée[1], chez lui et chez ses concurrents[1], ce qui signifie que la valeur d'un livre peut être estimée à zéro, de manière arbitraire et entraîner sa destruction.

Ces algorithmes sont utilisés par les plateformes internet comme Better world books, Recyclivre, Momox et d’autres pour calculer un ajustement instantané du prix[1], ce qui fait que le libraire d’occasion est parfois un métier proche de celui d'informaticien[1].

Après avoir inspiré beaucoup de questions dans les années 2000, les algorithmes du livre de seconde main "se sont simplifiés" considérablement, se contentant souvent de repérer sur Internet les prix déjà fixés par d’autres plate-forme pour une même référence, afin d'offrir l'option de se placer en dessous d'un concurrent aussi bien référencé sur Google[1].

Ces algorithmes du livre sont beaucoup plus limités que ceux permettant de définir les tarifs des places dans les trains de la SNCF, mis en place depuis les années 2000 pour organiser une confrontation en temps réel des algorithmes d’optimisation commerciale et des clients potentiels.

Les nouveaux tarifs de la Poste ont contraint, à la fin des années 2010, les acheteurs de livre d'occasion à contribuer aux frais d’envoi pour les plis dépassant trois centimètres d’épaisseur[2].

Dès lors que la première vente d’un exemplaire d’une œuvre est autorisée par l’éditeur, il ne peut plus s’opposer juridiquement aux reventes ultérieures[2]. Les revendeurs doivent cependant tenir un « livre de brocante » répertoriant leurs achats et l’identité de leurs fournisseurs[2]. Les possibilités de rémunérer éditeur et auteur lors de cette revente sont souvent présentées comme passant par une taxation alimentant un fonds[1], afin d'obtenir un partage de la valeur créée par le marché de seconde main[1] et reposerait sur une traçabilité des transactions des plate-forme internet comme celles de Momox[1] mais ne pourrait inclure les transactions plus marginales du vide-grenier de village ou de la kermesse de l’école[1].

L'ancien ministre de l'économie Hervé Gaymard, qui estime que marché de l'occasion pèse près de 42 % de l'ensemble des ventes de livre[19], a ainsi remarqué le prix d'occasion est systématiquement proposée à côté du prix neuf chez des vendeurs comme Amazon et la Fnac[19]. Il a donc souhaité instaurer le versement à l'auteur d'un pourcentage sur chaque vente de livre d'occasion[19]. Il a également rédigé un rapport sur le prix du livre numérique[19] et une proposition de loi sur l'exploitation numérique des livres indisponibles du 20ème siècle[19].

Vincent Monadé, président du Centre national du livre (CNL), milite lui aussi pour cette taxe afin de « procurer de nouvelles ressources aux auteurs »[13] et d'éviter « les risques de distorsion de concurrence qui existent quant au prix unique du livre » instauré par le ministre de la culture Jack Lang en 1981[13].

Dans le même ordre d'idées, le classement des livres par les places de marché (« comme neuf », « état neuf », « très bon état », etc.) est source de confusion selon le médiateur du livre[13].

Les premiers collectionneurs seraient issus de la Mésopotamie ancienne, considérée comme le « berceau de l'écriture » et le terme est également fréquemment associées à des figures comme Aristote[20], surnommé « le liseur » par Platon[20] ou bien Noé[20], considéré comme « le premier bibliophile de l'histoire »[20].

La tradition des bouquinistes parisiens débute aux alentours du XVI^e siècle avec des petits marchands colporteurs mais sous la pression de la corporation des libraires, un règlement de 1649 interdit les boutiques portatives et l’étalage de livres sur le pont Neuf.

Mais les bouquinistes, qui ont évolué pour s'adapter à la demande spécifique des touristes étrangers en vacances à Paris[1], même s'ils ont en même temps « digitalisé » leur offre[1], n’ont plus le même rôle qu'au cours des siècles précédents, dans la "circulation de la culture imprimée" car dans les années 2020 la moitié des transactions se déroule sur les plateformes Internet[1], qui réunissent des offres diverses, aussi bien celles d’opérateurs-détaillants comme Chapitre.com, que de vendeurs qui fondé leurs propres "places de marché"[1], type Amazon ou Rakuten, pas toutes spécialisées dans le livre, certains étant aussi présents sur le marché physique, comme Gibert, Momox, et Recyclivre[1].

La longue histoire du marché du livre ancien et d'occasion a progressivement contribué à la démocratisation de la lecture[1] . Sa croissance a en même temps été favorisée par des "dispositifs qui ont visé à élargir le public de lecteurs et de lectrices" en général, avec l'élévation du niveau moyen de connaissance, comme les "cabinets de lecture sous la Restauration"[1] puis trois décennies plus tard l'implantation de bibliothèques publiques vers 1860[1].

En Angleterre, La seule bibliothèque publique financée par l’État au début du XIXe siècle était la British Museum Library[21], mais les "cabinets de lecture" ont prospéré par les ventes de livres d’occasion dès le début dy XIXème siècle[21]. Certains courants religieux ou utilitaristes menaient une action pour l’alphabétisation[21], en général dans des zones rurales, depuis le XVIIIe siècle[21], comme la Society for Promoting Christian Knowledge (SPCK)[21] ou les écoles du dimanche? en général évangélistes[21]. Dès 1835, la SPCK avait fondé environ 2500 bibliothèques de prêt en Angleterre et une trentaine au Pays de Galles[21], qui pouvaient atteindre pour certaine plus d’un millier de volumes[21].

Le libraire Thomas Mudie vendait des livres d’occasion et journaux dans sa boutique à Londres[21] et son fils Charles Edward Mudie (1818-1890) ouvrit sa propre librairie en 1840 près de l’université de Londres fondée en 1836[21], décidant en 1842 dans faire aussi une bibliothèque de prêt pour une guinée par livre [22] alors que les tarifs étaient plutôt situés entre 4 et 10 guinées[23], atteignant près de 25000 abonnés en 1852[21]. Il faisait une publicité abondante dans la presse pour ses listes de livres correspondant selon lui à la demande des lecteurs[21], propageant l’idée d'une sélection de livres, reprise dans le nom de son cabinet de lecture[21], ce qui pour les éditeurs contribuait à la visibilité commerciale sur les livres inclus dans ces listes[21]. Dès 1855, il acheta 2500 exemplaires du 3e volume de "The History of England" de Macaula[21]y, mais fonda aussi un département consacré aux livres retirés des rayonnages, stockés dans le sous-sol[21]. Il avait des succursales, à Birmingham ou encore Manchester[21], et ses livres étaient expédiés par la poste dans toutes les régions d’Angleterre[21]. Son service de livraison à domicile de 9 camionnettes desservait 170 zones de Londres[21].

La baisse des prix des livres neufs apparue au milieu des années 1880[21], a progressivement fait diminuer les ventes de livre d'occasion, phénomène qui s'est amplifié après 1894[21], quand la plupart des nouveaux romans furent publiés en un seul volume au prix de seulement un shilling[21], parfois avec de la publicité[21].

Dans l'entre-deux-guerres, au Royaume-Uni, la bibliothèque commerciale Mudie a développé ses ventes de livres d'occasion[21], annoncées par des catalogues qui insistaient sur leur caractère récent[21], avec des titres comme “Recent Popular Books at Greatly Reduced Prices”[21].

Les clubs de lecture fondés dans l’immédiat après-guerre en France[1] puis l'innovation commerciale du livre de poche, lancé en 1953, en France et ensuite le succès de la formule "France Loisirs" lancée en 1970 ont fait aussi progresser la lecture en général[1].

L'intérêt accordé à l’histoire des livres, de l’édition et des lectures a progressé dès les années 1980 et inspiré les ouvrages de Jean Viardot[24] - [25] complétant les travaux vingt ans plus tôt de Lucien Febvre et Henri-Jean Martin[26].

Ce marché s’est "plateformisé depuis la fin des années 1990", phénomène analysé pendant cinq ans d'études sur le livre d'occasion par le sociologue Vincent Chabault, maître de conférences et chercheur au CNRS [27], qui avait dans un premier temps étudié les phénomènes de réaction plus globale à "l'amazonisation" du commerce [28] - . Dans cette période, il s’est aussi internationalisé, technicisé et démocratisé[1], tandis que "des non-libraires l’ont investi", en particulier "des entreprises éco-citoyennes, des associations, des particuliers"[1]. Ces organisations ont rationalisé leurs pratiques de tri comme de revente pour allonger la durée de vie du livre, qui devient "écolo"[1].

Ce marché est aussi de plus en plus stimulé par des formes d’échange non-marchandes, comme les boîtes à livres ou semi-marchandes, avec la revente de dons[1]. Des sociétés comme Better World Books, Ammareal et RecycLivre récupèrent ainsi gratuitement des livres auprès de particuliers, de bibliothèques et d’entreprises[13], puis les revendent, tout en s’engageant à reverser une partie de la vente à des organisations caritatives qui luttent contre l'illettrisme[13].

Le marché du livre d’occasion a bénéficié de la "crise des subprime" de 2008, qui a ponctionné le pouvoir d'achat et ainsi placé souvent les lecteurs dans "une recherche constante des petits prix", selon Nicolas Vielle, directeur d’exploitation du groupe Gibert, cité dans le « Monde des livres »[29] en plus d'"une recherche esthétique" et l'attrait pour "le charme des couvertures du passé".

Certains acheteurs recherchant un espace de mise en relation fédérant la plus grande quantité possible d’offreurs mais aussi d'offres, s'intéressent à un site comme "Leboncoin, qui regroupe près de 2 millions d’annonces de livres[2] sur un total de 28 millions d’annonces, la part du livre s’élévant à 7 %[2].

Fondé en 2006, Leboncoin est devenu en six ans, selon les chiffres Médiamétrie d'octobre 2012[9], le deuxième site le plus populaire en France en temps passé, devant Google, YouTube ou eBay[9], avec des usages dans la continuité des brocantes, vide-greniers, et petites annonces papier[9] ou, "plus généralement, du don"[9], comme le recyclage des objets et les dons aux proches[9] et selon les chercheurs "des motivations plus variées que le simple intérêt et le calcul"[9]. Les échanges ne cessent d'y déborder vers le monde « réel »[9], car "le local y est central"[9], qui "permettent des rencontres porteuses d’une inclusion sociale qui rappelle l’expérience d’une identité non individualiste"[9]. Sur Leboncoin, via "une expérience de consommation simple et gratuite"[9], le "cadrage des transactions" assez différent de celui du concurrent eBay[9], très sécurisé mais d’une "plus grande complexité"[9], qui exige lui de s’identifier par des coordonnées réelles[9], choisir un mode de transaction pouvant être les enchères, puis signaler que la transaction a eu lieu et satisfait, via un système de notation et de commentaires[9].

Selon l'étude menée par le sociologue Renaud Garcia-Bardidia auprès de plusieurs dizaines d'utilisateurs[9], le passage par ce site diminue "les risques d’assimilation entre état des objets et image des donneurs ou des receveurs"[9], via "la délégation de la responsabilité de l’acquisition vers l’acquéreur"[9] par un acte d’achat, perçu comme une "remise en circulation"[9], permettant aussi un "gain de place, de temps et d’argent" sous une forme "plus pratique que les vide-greniers" ou plus simple que le système d’enchères d'Ebay, peu importe "la faiblesse des gains"[9].

Le "marché du livre ancien et d'occasion" de Paris, encore appelé "Marché Georges-Brassens", réunit plusieurs dizaines de vendeurs les samedis et dimanches de 9 h à 18 h[30], au n^o 104, rue Brancion, sous deux halles aux chevaux, vestiges des anciens abattoirs de Vaugirard, dans le parc Georges-Brassens, du 15^e arrondissement de Paris[30]. Les acheteurs, pour la plupart des particuliers peuvent y trouver des livres anciens et modernes, livres dédicacés, autographes, éditions originales numérotées, livres épuisés, gravures, affiches, vieux papiers, BD, photos, vinyles, livres jeunesse[30].

Ce marché est géré par l’association "Les pages parisiennes", qui se veut un espace d'échange entre les érudits, lecteurs, promeneurs et libraires[30].

Le marché du livre ancien et d'occasion fut créé en 1987 par le Groupement d'information promotion presse édition (GIPPE), une association loi de 1901[30]. Son organisation fut gérée entre novembre 2017 et mai 2021 par l'association (loi 1901) « Marché du Livre-Paris »[31]. La concession a été confié depuis cette date à l’association (loi 1901) « Les Pages Parisiennes ».

En 2017, Dominique Vallet, libraire depuis 1992 après des études d’histoire à la Sorbonne, a déplacé son large stock de livres d’occasion dans "une vaste demeure près du Massif central"[2], afin de le consacrer à la vente en ligne[2], tout en conservant celui de livres rares à Paris[2]. Auparavant, il avait tenu un stand au marché Georges Brassens puis une librairie, d'abord dans les Hauts-de-Seine et ensuite dans le cinquième arrondissement de Paris[2].

Certains libraires de livres rares pour les bibliophiles, comme la librairie Jousseaume, fondée en 1826 à Paris dans la galerie Vivienne[2] ou celle fondée par Pierre-François Dutilleux, petit-fils d'un journaliste, connu pour ses interviews de grands écrivains, dans le 16ième arrondissement[2], vendent également des ouvrages d’occasion dans des bacs ou sur des étagères distinctes[2], acquis dans des salles des ventes ou directement auprès de particuliers[2]. Le second, ex-directeur du Syndicat de la librairie ancienne et moderne[2], a vendu pendant plus de vingt ans, via des petites annonces dans Le Figaro et Le Monde[2], répondant à environ 2000 demandes par mois via un stock de 100000 livres achetés en salles des ventes et au Marché aux puces[2], ainsi qu'un entrepôt à Saint-Cloud[2]. A la fin des années 1990, il a cédé son assortiment et sa base informatisée à la FNAC[2], mais ils ont été finalement acquis par Chapitre.com pour alimenter un site de vente en ligne[2].

Christophe Delage, libraire dans une petite rue du premier arrondissement de Lyon[2], a lui référencé une partie de son stock sur Livre Rare Book[2].

Site pionnier du commerce en ligne, fondé en 1995, Livre Rare Book revendique plus de 4 millions de références et 500 libraires disponibles[32] - [33], jusqu'au Québec ou Hong Kong, avec plus de 9000 connexions par jour. Le libraire de livres rares Pascal Chartier, gérant du site et présent au Salon du Livre de Paris 2015 créé le site en 2015 "comme une version web des catalogues papier"[33]. L'application permet de géolocaliser les librairies à proximité, ou le livre recherché[33], afin de "valoriser les rencontres physiques avec les libraires, dans les librairies"[33].

Recyclivre, qui opère aussi la revente d’occasion via internet, revendique un stock d'un "million de livres à portée de clic"[34], selon David Lorrain, fondateur de l’entreprise, et d'avoir sauvé 66000 arbres et économisé plus de 2 milliards de litres d’eau, tout en reversant depuis 2008, plus de 3,8 millions d'euros à des associations[35]. Elle a lancé un annuaire collaboratif en 2016[36] et recourt pour sa logistique à Log'ins, entreprise de région parisienne se charge de la récupération sur le territoire national[35], via les microbibliothèque, des collectes chez les particuliers une fois par semaine[35], avec un panier minimum de ventes de 10 euros[14], une partie s’effectuant auprès de 2000 partenaires et associations type Emmaüs, mais aussi auprès d'écoles, bibliothèques et médiathèques, pour alimenter un stock basé à Toulouse et six autres grandes villes de France, dont Bordeaux et Lyon[35], puis centralisé dans un entrepôt de la région parisienne[35]. De son côté, depuis 2014, le Fonds Decitre installe des « Boîtes à lire » en France[37].

Recyclivre a vu son "chiffre d'affaires décoller" en 2020, avec le confinement, passant de 7 à 8,5 millions d'euros en un an et affirmait en septembre 2022 vendre "entre 3000 et 4000 livres chaque jour" avec le statut de "premier vendeur français de livres d’occasion"[38]. Mais sur les 300000 volumes collectés en 2021, seulement 40 % ont pû être référencés, les autres étant en mauvais état ou sans code ISBN et écoulés auprès des bouquinistes ou recyclés[38] - [39] - [40].

Le marché français a d'abord été dominé par l'allemand Momox, géant allemand aux 312 millions d'euros de chiffre d'affaires mondial[14], qui impose un panier minimum de ventes de 10 euros[14], et Gibert, qui s'est lancé dans l'occasion dès 1888[14]. Ce dernier, principalement positionné sur le livre scolaire, réalisait en 2020 environ 115 millions d'euros de chiffre d'affaires par l'achat et la revente de sept millions de livres de seconde main par an[14], dont une partie dans une quinzaine de magasins[14]. Il a vu ensuite "surgir de nouveaux acteurs"[14], comme "La Bourse aux Livres", crée par trois étudiants lillois en janvier 2020[14], qui a collecté 420000 livres lors de sa première année mais ne rémunère les déposants qu'une fois les ventes réalisées [14], ou Kiwibook, fondée en 2017 à Nîmes, spécialisée dans la revente par lot sur sa plateforme Vendre-livre.fr, ou entre particulier sans frais ni commission via Kiwibook.fr[14].

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