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Madone Litta

La Madone Litta (en italien : Madonna Litta) est un tableau exécuté vers 1490 représentant une Vierge à l'Enfant allaitant (Madonna del latte). Conçu par Léonard de Vinci, l'exécution finale sur panneau est attribuée soit à Giovanni Antonio Boltraffio soit à Marco d'Oggiono et était destinée à une commande princiÚre.

Madone Litta
Artiste
Date
Vers 1490
Type
Technique
Détrempe sur bois transposée sur toile
Lieu de création
Dimensions (H Ă— L)
42 Ă— 33 cm
Mouvement
No d’inventaire
ГЭ-249
Localisation

DĂ©sormais sur toile, l'Ɠuvre est conservĂ©e dans les collections du musĂ©e de l'Ermitage de Saint-PĂ©tersbourg[1].

Description

On voit une femme se tenant debout et donnant le sein Ă  un bĂ©bĂ© nu. Il s'agit d'une reprĂ©sentation de la Vierge allaitant JĂ©sus enfant. La Vierge porte des habits de l'Ă©poque Renaissance italienne. Tenant le bĂ©bĂ©, elle se tient devant une construction ouverte par deux fenĂȘtres donnant sur un paysage. L'enfant tĂȘte et tient d'une main le sein, de l'autre un chardonneret.

Histoire du tableau

LĂ©onard de Vinci, TĂȘte de jeune femme, Paris, musĂ©e du Louvre. Une Ă©tude de la main de LĂ©onard extraite du Codex Vallardi.

L'Ɠuvre Ă©tant attribuĂ©e Ă  LĂ©onard et Ă  ses Ă©lĂšves, elle a vraisemblablement Ă©tĂ© conçue Ă  Milan, en Lombardie, Ă  la cour de la famille Visconti, sous la direction de LĂ©onard lui-mĂȘme, qui s'installe dans cette ville en 1482. La composition est postĂ©rieure Ă  celle de la Madonna Benois (1478) et les techniques des deux tableaux diffĂšrent. L'artiste a utilisĂ© ici la dĂ©trempe, une technique qui ne convenait pas aussi bien aux effets subtils du sfumato que lorsque l'on travaille avec de l'huile.

Trois Ă©tudes prĂ©paratoires, l’une — TĂȘte de femme presque de profil, de LĂ©onard de Vinci —, Ă  Paris au musĂ©e du Louvre et les deux autres — attribuĂ©es Ă  Boltraffio —, Ă  l'Institut nĂ©erlandais de Paris et aux MusĂ©es d'État de Berlin[2] confortent la thĂ©orie qui s’est esquissĂ©e ces derniĂšres annĂ©es : LĂ©onard aurait conçu le cadre gĂ©nĂ©ral de la composition, et l’un de ses Ă©lĂšves aurait Ă©tĂ© chargĂ© de peindre le tableau. On ne retrouve pas en effet dans le tableau « l'intĂ©rioritĂ© de l'expression, ni l'extraordinaire Ă©conomie du tracĂ©[3] » de l'Ă©tude du Louvre.

L'on sait qu'en 1495, le panneau est pour la premiĂšre fois restaurĂ© (ou prĂ©parĂ© pour ĂȘtre encadrĂ© et exposĂ© sous la forme d'un autel) par un inconnu Ă  Milan. Pendant prĂšs de trois siĂšcles, il est difficile de suivre la trace de ce tableau.

On peut suivre avec certitude l’histoire de la Madone Litta Ă  partir de 1784, quand le prince Alberico de Belgioioso d'Este l’achĂšte Ă  un certain Giuseppe Rho [?]. En 1813, Ă  la mort du prince, elle entre dans les collections de la famille Litta (d’oĂč elle tire son nom) Ă  Milan. En 1865, le duc Antonio Litta la vend au tsar Alexandre II pour l'Ermitage. À cette occasion, elle est transposĂ©e sur toile, ce qui a altĂ©rĂ© son Ă©tat[4].

Analyse critique

Madone à l'Enfant, épreuve au burin de Zoan Andrea [?] exécutée sur une plaque dont l'envers comporte une gravure qui représenterait Andrea Mantegna (BnF)[5].
Vierge du lait (vers 1500-1510) attribuée à Bernardino de Conti ou à un peintre lombard (Milan, musée Poldi Pezzoli).

Une Madonna del latte est gravĂ©e au dĂ©but du XVIe siĂšcle Ă  la maniĂšre mantegnesque et d'aprĂšs LĂ©onard (ci-contre) : le lien avec la Madona Litta a Ă©tĂ© Ă©tabli assez tĂŽt sans que l'on puisse en tirer de conclusion sinon que le tableau a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© reproduit en gravure.

Dans ses Notizia d'opere, Marcantonio Michiel écrit avoir vu en une Vierge allaitant de Léonard de Vinci dans la collection des Contarini, patriciens de Venise[6]. Toutefois, l'inventaire de Giacomo Contarini (1536-1595) dressé en 1599 puis en 1736, comporte à chaque fois la mention suivante : « una Madonna con bambin in tavola scola del Zambelin senza soaza »[7] ; Michel Hochmann (1987) estime que cette « Madone contarinienne » provient de l'école de Giovanni Bellini (Zambellin en vénitien), et demeure soit perdue, soit présente en Italie (à Brera ou à la Ca' d'Oro). Le lien entre Bellini et Mantegna est par ailleurs connu[8].

Quant Ă  La Madone de Laroque, tableau dĂ©couvert dans le sud de la France en 1998, l'inventaire Contarini donne bien une Madone Ă  l'Enfant avec Jean-le-Baptiste, mais cette Ɠuvre, parfaitement identifiĂ©e, est de Guiseppe Porta dit Salviati.

Interprétation

Giovanni Antonio Boltraffio, Vierge et l'Enfant (vers 1493-1499), Londres, National Gallery.

Le thĂšme de la Vierge allaitant se retrouve aussi bien dans les lieux de culte publics (Andrea Pisano pour l'Ă©glise Santa Caterina de Pise, Ambrogio Lorenzetti pour le couvent augustinien de Lecceto) que pour un usage votif privĂ© (toute la sĂ©rie de mĂ©daillons peints par l‘atelier de Hans Memling « qui Ă©taient suspendus dans la chambre ou dans le lit Ă  baldaquin comme un talisman religieux[9]. »). Pour la Madonna Litta, il est difficile de trancher faute de documents, mais le petit format du tableau fait plutĂŽt penser Ă  un usage privĂ©.

Comme souvent dans les Madonne del latte, L’Enfant JĂ©sus tient dans sa main gauche un chardonneret captif, symbole de la Passion. L’expression de la Vierge a Ă©tĂ© travaillĂ©e avec une attention toute particuliĂšre comme le montre le dessin prĂ©paratoire de LĂ©onard de Vinci[10] du musĂ©e du Louvre. Elle est empreinte Ă  la fois de tendresse maternelle et de gravitĂ©. C’est qu’elle traduit la double nature du Christ, que la Vierge regarde Ă  la fois comme son enfant et comme le fils de Dieu.

La composition montre une grande familiaritĂ© avec toute l'Ɠuvre de LĂ©onard. Le visage de la Vierge reprend l’idĂ©al de beautĂ© fĂ©minin crĂ©Ă© par son maĂźtre Andrea del Verrocchio, « les mĂȘmes paupiĂšres tombantes, le mĂȘme visage dĂ©licatement modelĂ©[11] ». Le visage de la Vierge est presque de profil, donnant ainsi l'impression qu'il se tourne vers l'Enfant. Le paysage, avec les montagnes dans le lointain, est typique des recherches de perspective aĂ©rienne de LĂ©onard. La complexitĂ© de la coiffe, son mouvement annonce les Ă©tudes de LĂ©onard pour la Sainte Anne et la LĂ©da. Mais l’exĂ©cution gĂ©nĂ©rale diffĂšre de la main du maĂźtre.

En effet, la rĂ©alisation dans son ensemble, plus sensible au finito que LĂ©onard, l’exĂ©cution du paysage, plus sĂšche, trahissent la main d’un Ă©lĂšve de LĂ©onard plutĂŽt que celle du maĂźtre lui-mĂȘme.

Le nom le plus souvent proposé pour identifier l'élÚve exécuteur de la composition peintre est celui de Giovanni Antonio Boltraffio[12], alors que David Alan Brown préfÚre y voir quant à lui un travail de Marco d'Oggiono[13].

Notes et références

  1. Des copies de l’Ɠuvre se trouvent au Fogg Art Museum de Cambridge, et Ă  Milan, au chĂąteau des Sforza et au musĂ©e Poldi Pezzoli.
  2. Sur ces trois dessins, voir les notices 21, 110 et 111 rĂ©digĂ©es par Françoise Viatte dans le catalogue de l’exposition LĂ©onard de Vinci, dessins et manuscrits, RMN, 2003.
  3. Françoise Viatte, notice 21 du catalogue de l’exposition LĂ©onard de Vinci, dessins et manuscrits, RMN, 2003
  4. F.Zöllner, LĂ©onard de Vinci, tout l’Ɠuvre peint et graphique, Taschen, 2003, p. 27.
  5. 514. Vierge Ă  l’Enfant, d’aprĂšs LĂ©onard, par Zoan Andrea (?), dans sa maniĂšre mantegnesque.
  6. Notizia d'opere di Disegno, Ă©dition Morelli de 1800, p. 83-84.
  7. « Une Madone avec enfant sur panneau école de Zambelin sans cadre ».
  8. M. Hochmann « La collection de Giacomo Contarini », in : Mélanges de l'école française de Rome, 1987, 99-1, pp. 447-489, sur Persée.
  9. Dirk de Vos, cat. exp. Bruges Hans Memling, 1994, p. 136-137
  10. Il s'agit d'un dessin trÚs poussé du visage de la Vierge, tracé à la pointe de métal sur du papier bleu pùle avec des rehauts de blanc.
  11. Ernst Gombrich (1982), « Ideal and type in italian Renaissance Painting », in : New light on Old Masters, On the Renaissance, tome IV, édition Phaedon, 1986.
  12. Celui des élÚves de Léonard de Vinci dont le style est, pour reprendre la formule de Martin Kemp dans The Marvellous Works of Nature and man (1981), « the most polished » (« le plus lissé de tous »).
  13. D. A. Brown, Madonna Litta, XXIX Lettura Vinciana, Florence, 1990.
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