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Mabel Loomis Todd

Mabel Loomis Todd ou Mabel Loomis (, Cambridge - , Hog Island) Ă©tait une Ă©ditrice et Ă©crivaine amĂ©ricaine. Elle fut l'Ă©ditrice, Ă  titre posthume, des Ĺ“uvres d'Emily Dickinson et Ă©crivit elle-mĂŞme plusieurs romans et journaux racontant ses voyages avec son mari, l'astronome David Peck Todd.

Mabel Loomis Todd
Mabel Loomis Todd en 1897.
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  75 ans)
Hog Island (en)
SĂ©pulture
Wildwood Cemetery (d)
Nationalité
Formation
Activités
Conjoint
Enfant
Autres informations
Archives conservées par

Mabel Todd eut une relation complexe et mouvementĂ©e avec la famille Dickinson. Elle entretint une longue liaison avec le frère aĂ®nĂ© mariĂ© de la famille, William Austin Dickinson (en). Au cours du processus de publication de la poĂ©sie de Dickinson, marquĂ© par les controverses familiales, elle a librement modifiĂ© et adaptĂ© l'Ă©criture de la poĂ©tesse Ă  son propre style.

Biographie

Jeunesse et débuts

Mabel Loomis Todd adolescente vers 1866.

Elle est nĂ©e Mabel Loomis, le , fille de Marie Alden Wilder et Eben Jenks Loomis[2]. Bien que la lignĂ©e familiale remonte au temps des premiers colons du Mayflower en Nouvelle-Angleterre, avec Priscilla Mullins, ils vivent dans des conditions financières difficiles et Mabel passe une grande partie de son enfance dans des foyers d'accueil Ă  Cambridge, Ă  Concord et Ă  Washington. Elle est diplĂ´mĂ©e du collège pour filles, le Georgetown Female Seminary, Ă  Washington, puis Ă©tudie la musique au Conservatoire de musique de la Nouvelle-Angleterre Ă  Boston.

Elle rencontre l'astronome David Peck Todd en 1877 et l'Ă©pouse le . Le couple a eu une fille, Millicent Todd (Bingham) (1880-1968)[2].

Ils s'installent Ă  Amherst dans le Massachusetts en 1881, oĂą son mari reçoit une offre pour un poste de professeur d'astronomie au Amherst College[2].

Les années à Amherst

C'est dans cette ville qu'elle a une liaison avec Austin Dickinson, le frère d'Emily Dickinson[3] - [4] ; Austin est un Ă©minent avocat local qui sert en tant que trĂ©sorier de l'Amherst College. Elle et lui font plusieurs voyages ensemble, notamment Ă  Boston et s'Ă©crivent des lettres d'amour. Bien qu'il essaient de dissimuler leur liaison, elle est connue de beaucoup de monde[5].

Todd s'inquiète de dĂ©mĂ©nager dans une petite ville, habituĂ©e Ă  la vie urbaine des grandes agglomĂ©rations telles que Washington ou Boston, mais trouve vite des occupations. Elle rejoint la chorale de l’église, est active dans des reprĂ©sentations théâtrales locales, et ses journaux sont un compte rendu complet de ses activitĂ©s : Â« les concours de bowling et de tir Ă  l'arc, l'Ă©quitation – un matin de juin, elle parle d'Ă©quitation Ă  Leverett avant le petit dĂ©jeuner – et mĂŞme de la luge.... »[6].

Elle accompagne son mari David au Japon en 1887 pour photographier une Ă©clipse solaire, et devient ainsi la première femme occidentale Ă  escalader le Mont Fuji[7]. Elle Ă©crit de nombreux articles sur ce voyage pour The Nation, St. Nicholas et The Century Magazine[8]. Elle accompagne aussi son mari dans ses autres voyages pour photographier les Ă©clipses, de nouveau au Japon en 1896, puis Ă  Tripoli en 1900 et 1905, aux Indes orientales nĂ©erlandaises en 1901, au Chili en 1907 et en Russie en 1914[9]. En tout, elle a visitĂ© plus de trente pays sur les cinq continents[8].

Le voyage en Russie est leur dernier voyage Ă  l'Ă©tranger. L'Ă©clipse doit avoir lieu le , mais le , la Russie dĂ©clare la guerre Ă  l'Allemagne, alors que le couple est sur la route entre Kiev et Moscou. PlongĂ© dans l'incertitude qui en rĂ©sulte, le couple doit abandonner son projet et son Ă©quipement et regagne l'AmĂ©rique en passant par la Suède et le Danemark[8].

En 1893, Mabel Todd accompagne David Ă  l'Exposition universelle de Chicago[10].

De 1894 Ă  1913, elle travaille pour l'association Village Improvement Ă  Amherst, pour la prĂ©servation des vieux arbres, et elle soutient les projets de Frederick Law Olmsted pour Amherst[11]. L'organisation nationale des Filles de la RĂ©volution amĂ©ricaine est fondĂ©e en 1890, et Mabel contribue au dĂ©marrage de la branche locale – en 1896, elle aide Ă  fonder la branche Marie Mattoon Ă  Amherst[12] et la branche Betty Allen Ă  Northampton[13]. Elle aide aussi Ă  fonder le Club des femmes d'Amherst en 1893[14] et la SociĂ©tĂ© Historique d'Amherst en 1902[15].

Elle est une artiste peintre de talent, et Ă©tudie la musique – l'harmonie, le chant et le piano au Nouveau Conservatoire de Nouvelle-Angleterre de Boston. Alors qu'elle est Ă  Amherst, elle monte un club de musique ; elle donne Ă©galement des cours de peinture, de chant et de piano. Ă€ 40 ans en 1896, elle cesse de chanter en public[15].

Entre 1890 et 1913, elle se consacre à des cycles de conférences réguliers le long de la côté Est des États-Unis, depuis la Floride jusqu'en Californie, au sujet de ses voyages et d'autres de ses centres d'intérêt. De 1880 à 1913, elle aura en tout écrit ou édité douze ouvrages ainsi que des centaines d'articles traitant de littérature, d'astronomie et de voyages.

En 1917, la détérioration de la santé et l'instabilité mentale de David force le président d'Amherst, Alexandre Meiklejohn, à lui faire prendre une retraite anticipée. Le couple s’installe à Coconut Grove en Floride[16], où David est hospitalisé en 1922. Mabel continue à plaider pour des causes caritatives, en particulier pour la préservation de la nature et de la vie sauvage ; elle est active dans l'aide à la Société Audubon (créée en 1905) qui tente de préserver Hog Island dans le Maine, du sur-développement.

Mabel Loomis Todd fait une première hémorragie cérébrale en 1913 qui la laisse en partie paralysée du côté droit[8]. Elle meurt d'une hémorragie cérébrale, le , sur Hog Island, Maine[3]. Elle est enterrée aux côtés de David au cimetière Wildwood d'Amherst, près de la tombe d'Austin Dickinson.

Après son décès, sa fille Millicent Todd fait don des trouvailles que sa mère a rapportées de ses nombreux voyages au Musée Peabody d'archéologie et d'ethnologie de l'université Yale et au Peabody Essex Museum de Salem[8].

Éditrice de Dickinson

Couverture de Dickinson Poèmes, 1890

Todd n'a jamais rencontrĂ© personnellement Emily Dickinson[17] et, bien que les deux femmes Ă©changent des lettres, il a Ă©tĂ© dit que « Mabel a bel et bien dĂ©truit la famille Dickinson »[18]. Sa première rĂ©fĂ©rence Ă  Dickinson se trouve dans une lettre Ă  ses parents du , quelques mois après son dĂ©mĂ©nagement Ă  Amherst, oĂą elle dĂ©crit la poĂ©tesse comme une recluse n’ayant pas quittĂ© sa maison depuis quinze ans. Elle se rĂ©fère Ă  elle comme Ă  « une dame que les gens appellent le Mythe. Elle est la sĹ“ur de M. Dickinson, et semble ĂŞtre le point culminant de toute la bizarrerie familiale »[19].

Après la mort de Dickinson en 1886, sa jeune sĹ“ur Lavinia Norcross Dickinson (en) dĂ©truit toutes ses lettres, comme on le lui a ordonnĂ©. Dickinson ne laisse cependant aucune instruction concernant ses poèmes, et avait, Ă  l'origine, demandĂ© Ă  sa belle-sĹ“ur Susan Dickinson de superviser leur publication. Lorsque le travail de cette dernière l'empĂŞche de s'occuper rapidement de la publication – elle voulait publier des poèmes avec une approche holistique en les contextualisant avec les lettres, les manuscrits, les dessins d'Emily Dickinson, un travail de publication très peu conventionnel pour l'Ă©poque mais très proche des Ă©crits de Dickinson[20] â€“ Lavinia sollicite la collaboration de Todd et de Thomas Wentworth Higginson[21]. Le premier volume des Poèmes by Emily Dickinson est publiĂ© en 1890, et inclut de nombreuses modifications par Todd. Higginson, qui avait soutenu les Ă©crits de Dickinson pendant sa vie, collabore Ă©galement avec Todd sur Poems: Second Series en 1891. Higginson, cependant, dĂ©teste les altĂ©rations de l’œuvre par Todd et se retire de la collaboration. Cette dernière Ă©dite alors seule deux volumes des lettres de Dickinson en 1894 et Poems: Third Series en 1896. Un compte rendu dĂ©taillĂ© du processus de publication est apportĂ© dans l'ouvrage Ancestors' Brocades de Millicent Todd Bingham en 1945. Selon la chercheuse Brenda Wineapple, le troisième livre Ă©ditĂ© sans Higginson, « est le plus expurgĂ© » des trois[22].

La relation entre Todd et la famille Dickinson, cependant, s'avère difficile. La jeune sĹ“ur d'Emily, Lavinia, dĂ©tentrice des droits d'auteur des poèmes, souhaite dĂ©cider de la part des revenus gĂ©nĂ©rĂ©s revenant Ă  Todd et de la rĂ©tribuer elle-mĂŞme, plutĂ´t que la maison d'Ă©dition rĂ©partisse les gains. Mais le conflit s'avère inutile, car la publication ne rapporte pas de bĂ©nĂ©fices[23]. En 1896, Todd et la famille Dickinson se retrouvent dans une bataille juridique concernant la propriĂ©tĂ© des biens appartenant Ă  Austin Dickinson. Celui-ci a laissĂ© une partie de ses terres Ă  Todd et Ă  son mari, mais Lavinia, qui a commencĂ© le processus pour rendre ce don lĂ©gal change d'avis et les poursuit en 1898 pour rĂ©cupĂ©rer les terres. Elle gagne le procès, mais Todd refuse de poursuivre le projet de publication jusqu'Ă  la mort de Lavinia[24]. ConsĂ©quence de leurs dĂ©saccords, les manuscrits d'Emily Dickinson sont rĂ©partis entre les deux familles.

Martha Dickinson Bianchi, la nièce de la poĂ©tesse, hĂ©rite des manuscrits de sa mère Susan, sauf ceux appartenant aux Todd. Entre 1913 et 1937, elle publie quatre livres de poĂ©sie d'Emily et deux biographies avec l'aide d'Alfred Leete Hampton[25]. Todd, fâchĂ©e de cette publication rivale et supposant ĂŞtre la seule ayant droit sur les Ĺ“uvres de Dickinson, publie une mise Ă  jour de sa propre Ă©dition en 1931[26]. En 1945, sa fille Millicent publie plusieurs poèmes provenant des manuscrits de Todd[27]. En 1955, elle en publie trois de plus[28]. Elle finira par en faire don au Amherst College après la mort de sa mère[29].

Travaux

Ĺ’uvres originales

  • Mabel Loomis Todd, Footprints, (OCLC 2692762)
  • Mabel Loomis Todd, Total Eclipses of the Sun, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 3838009)
  • Mabel Loomis Todd, Corona and Coronet : Being a Narrative of the Amherst Eclipse Expedition to Japan, Boston and New York, Houghton, Mifflin and Company, (OCLC 931060)
  • Mabel Loomis Todd, Witchcraft in New England, Springfiled, MA, F.A. Bassette Company, (OCLC 528846)
  • Mabel Loomis Todd, A Cycle of Sunsets, Boston, Small, Maynard and Co, (OCLC 3837985)
  • Mabel Loomis Todd, Tripoli the Mysterious, Boston, Small, Maynard and Co, (OCLC 4725475)

Poèmes d'Emily Dickinson

  • Emily Dickinson, Poems by Emily Dickinson, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 551319074)
  • Emily Dickinson, Poems, Second Series, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 858413163)
  • Emily Dickinson, Poems,Third Series, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 29187960)

Lettres d'Emily Dickinson

  • Emily Dickinson, Letters of Emily Dickinson 1830–1886, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 776139426)

Autres poèmes

  • Cara E. Whiton-Stone, A Cycle of Sonnets, Boston, Roberts Brothers, (OCLC 558426696)

Articles (sélection)

  • Mabel Loomis Todd, « Emily Dickinson's Letters », The Bachelor of Arts, vol. 1,‎ , p. 39–66

Manuscrits

  • Mabel Loomis Todd, Mabel Loomis Todd Papers, (OCLC 122552303)

Notes et références

  1. « http://hdl.handle.net/10079/bibid/4277710 » (consulté le )
  2. Sharon Leiter 2007, p. 387.
  3. (en-US) « Mabel Loomis Todd, the Adulteress Who Made Emily Dickinson Famous - New England Historical Society », sur newenglandhistoricalsociety.com (consulté le )
  4. Longsworth, Polly (2010). Austin and Mabel: The Amherst Affair & Love Letters of Austin Dickinson and Mabel Loomis Todd. New York: Penguin
  5. Peter Gay 1984, p. 90.
  6. Mabel Loomis Todd, Her Contributions to the Town of Amherst, p. 6
  7. Milicent Bingham (1935), p. 8-9
  8. (en-US) « Mabel Loomis Todd in the World », sur amhersthistory.org (consulté le )
  9. Milicent Bingham (1935), p. 46-49
  10. Milicent Bingham (1935), p. 13
  11. Milicent Bingham (1935), p. 18-19
  12. Milicent Bingham (1935), p. 21
  13. Milicent Bingham (1935), p. 24
  14. Milicent Bingham (1935), p. 13-16
  15. Milicent Bingham (1935), p. 40-41
  16. Milicent Bingham (1944), p. 398
  17. Leiter, 389
  18. « Emily Dickinson, Sweeping up the Heart », The Economist,‎ , p. 83
  19. Sewall, 216
  20. Susan and Emily Dickinson: Their Lives in Letters by Martha Nell Smith. Dickinson Electronic Archives
  21. Leiter, Sharon. Critical Companion to Emily Dickinson: A Literary Reference to Her Life and Work. New York: Facts on File, Inc., 2007: 284–285. (ISBN 0-8160-5448-7)
  22. Wineapple, 299
  23. Wineapple, 298
  24. Leiter, 285
  25. Longsworth, Polly. "'Whose But Her Shy—Immortal Face': The Poet's Visage in the Popular Imagination" in Language as Object: Emily Dickinson and Contemporary Art, edited by Susan Danly. Amherst, MA: Amherst College Press, 1997: 38. (ISBN 1-55849-066-3)
  26. Longsworth, Polly. "'Whose But Her Shy—Immortal Face': The Poet's Visage in the Popular Imagination" in Language as Object: Emily Dickinson and Contemporary Art, edited by Susan Danly. Amherst, MA: Amherst College Press, 1997: 38–39. (ISBN 1-55849-066-3)
  27. Martha Nell Smith, The Emily Dickinson Handbook, Amherst, Massachusetts, University of Massachusetts Press, , 113–137 p. (ISBN 1-55849-488-X), « Dickinson’s Manuscripts »
  28. Longsworth, Polly. "'Whose But Her Shy—Immortal Face': The Poet's Visage in the Popular Imagination" in Language as Object: Emily Dickinson and Contemporary Art, edited by Susan Danly. Amherst, MA: Amherst College Press, 1997: 39. (ISBN 1-55849-066-3)
  29. (en) « Mabel Loomis Todd (1856-1932), correspondent | Emily Dickinson Museum », sur www.emilydickinsonmuseum.org (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Millicent Bingham, Ancestors' Brocades : The Literary Debut of Emily Dickinson, New York, Harper & Brothers Publishers, (OCLC 221563777)
  • (en) Millicent Bingham, Mabel Loomis Todd, Her Contributions to the Town of Amherst, New York, George Grady Press, (OCLC 9178337)
  • (en) Peter Gay, Education of the Senses : The Bourgeois Experience : Victoria to Freud, New York, W. W. Norton and Company, , 534 p. (ISBN 0-393-31904-0)
  • (en) Sharon Leiter, Critical companion to Emily Dickinson : a literary reference to her life and work, New York, Facts on File, Inc., , 448 p. (ISBN 978-0-8160-5448-0 et 0-8160-5448-7)
  • (en) Polly Longsworth, Austin and Mabel : The Amherst Affair & Love Letters of Austin Dickinson and Mabel Loomis Todd, New York, Penguin, (ISBN 978-0-374-10716-1 et 0-374-10716-5)
  • (en) Richard B. Sewall, The Life of Emily Dickinson, Cambridge, MA, Harvard University Press, (ISBN 0-674-53080-2)
  • (en) Brenda Wineapple, White heat : the friendship of Emily Dickinson and Thomas Wentworth Higginson, New York, Alfred A. Knopf, , 416 p. (ISBN 978-1-4000-4401-6 et 1-4000-4401-4)

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