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Lucien de Montagnac

François Joseph Lucien de Montagnac (Pouru-aux-Bois, – Sidi-Brahim, ) est un officier français, acteur controversé de la conquête de l'Algérie.

François Joseph Lucien de Montagnac
Lucien de Montagnac
Lucien de Montagnac, autoportrait

Naissance
Pouru-aux-Bois (France)
Décès
Sidi-Brahim (Algérie)
Mort au combat
Origine Drapeau de la France Français
Allégeance Drapeau du Royaume de France Royaume de France
Grade Lieutenant-colonel
Années de service 1819 – 1845
Commandement 15e LĂ©ger
Conflits Expédition d'Espagne
Conquête de l'Algérie
Faits d'armes Bataille de Sidi-Brahim
Distinctions Chevalier de la Légion d'honneur Chevalier de la Légion d'honneur (décret du 18 mars 1841)

Biographie

Né à Pouru-aux-Bois dans les Ardennes, il est le fils de Joseph Marie de Montagnac et d'Elisabeth Victoire Chardon. Il intègre l'École spéciale militaire de Saint-Cyr en 1819 (2e promotion). À la sortie d'école, en 1821, il intègre l'infanterie. Nommé sous-lieutenant au 1er régiment d'infanterie de ligne en , Montagnac participe à la campagne d'Espagne en 1823 et, est promu lieutenant le .

Après l'insurrection républicaine à Paris en juin 1832, qu'il réprime sévèrement, Montagnac refuse la Légion d'honneur qui lui était offerte par le roi Louis-Philippe. Il fait valoir qu'il est « résolu à attendre cette récompense d'une occasion où il saurait mieux la mériter ».

Capitaine en 1836, Montagnac est envoyé en Afrique. Mis à l'ordre du jour de l'armée le , il accepte cette fois sa décoration en 1841[1]. Le , il est élevé au grade de chef de bataillon. Pendant cette période, il confirme sa brutalité à l'égard des populations locales. « Nous nous sommes établis au centre du pays… brûlant, tuant, saccageant tout, écrit-il le [2]. Quelques tribus pourtant résistent encore, mais nous les traquons de tous côtés, pour leur prendre leurs femmes, leurs enfants, leurs bestiaux. » Son acharnement n'épargne pas les femmes : « On en garde quelques-unes comme otages, les autres sont échangées contre des chevaux, et le reste est vendu à l’enchère comme bêtes de somme. » [3], et il vante les exécutions sommaires qu'il multiplie[4] tout en regrettant les effets de la conquête sur les populations[5]. Dans sa correspondance lors de la conquête d'Algérie, publiée par son neveu, on trouve les phrases suivantes : « Voilà, mon brave ami, comment il faut faire la guerre aux arabes : tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger des bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs ; en un mot en finir anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens… », et aussi : « [...] Qui veut la fin veut les moyens. - selon moi, toutes les populations qui n’acceptent pas nos conditions doivent être rasées, tout doit être pris, saccagé, sans distinction d’âge ni de sexe ; l’herbe ne doit plus pousser où l’armée française a mis le pied »[6].

En mai 1843, à la tête de six compagnies d'élite du 61e et d'un détachement de spahis, il se distingua par son intrépidité lors d'un engagement dans lequel il combattit avec le bras droit cassé. Pendant près de deux mois, il se faisait mettre à cheval par ses soldats et marchait avec eux. À l'issue de cette bataille, Montagnac avait perdu l'usage de la main droite et dut apprendre à écrire de la main gauche. Le général Baraguay d'Hilliers fut chargé de lui transmettre les témoignages de satisfaction du ministre de la guerre qui, le , le fit élever au grade de lieutenant-colonel.

Bataille de Sidi-Brahim

Le , Montagnac était commandant supérieur du poste de Nemours, (province d'Oran) aujourd'hui Ghazaouet. Répondant à l'appel des tribus voisines qui craignaient une razzia menée par Abd el-Kader, le lieutenant-colonel Montagnac avec 450 hommes du 15e Léger se porte à leur secours (390 du 8e Bataillon de Chasseurs d'Orléans et 60 du 2e Régiment de Hussards). Entraîné dans une embuscade, il est attaqué par cinq à six mille cavaliers menés par Abd-el-Kader. La colonne est presque entièrement détruite et une centaine d'hommes sont faits prisonniers[7]. Montagnac, qui marchait en tête de l'avant-garde, est tué dans le combat.

Son cadavre est réduit en lambeaux et sa tête coupée par les troupes d'Abd-el-Kader, de même que toutes les têtes des soldats français tués au combat, soit deux cent cinquante en tout. Les prisonniers sont forcés à transporter les têtes enduites de miel (pour les conserver) jusqu'au camp des vainqueurs, puis de les disposer en cercle. Une fête se tient autour des têtes ; Abd-el-Kader les expédie au roi du Maroc, pour signaler sa force[8].

La compagnie de carabiniers restée au bivouac était parvenue à gagner le marabout de Sidi Brahim où elle résista courageusement aux attaques des assaillants. Les hommes n'avaient pour eux qu'une bouteille d'absinthe, ils durent boire leur urine pour apaiser leur soif ; privés de munitions, ils coupèrent en quatre leurs dernières balles. Abd-el-Kader, qui dirigeait lui-même cette attaque, bien qu'il ordonna de mettre à mort plusieurs prisonniers français, adressa plusieurs lettres écrites en français aux 80 carabiniers pour leur promettre la vie sauve, s'ils consentaient à se rendre ; ils refusèrent.

L'émir Abd El Kader fit couper la tête du capitaine Dutertre, fait prisonnier et amené devant le marabout pour exiger la reddition des chasseurs. Malgré tout, Dutertre, eut le temps d'exhorter les survivants à se battre jusqu'à la mort .

Vers le soir du 2e jour, le capitaine Géreaux, seul officier qui n'eût pas été tué avec le lieutenant Chappedelaine, sortit avec ses soldats pour se diriger sur Djemaâ Ghazaouet. À quelques kilomètres du camp, cette petite troupe ne put résister à l'affrontement contre des combattants berbères. Les chasseurs se frayèrent un passage à travers les centaines d'ennemis rassemblés. Le capitaine Géreaux fut tué et de ses 82 hommes, 11 seulement survécurent, dont un hussard.

Notes

  1. « François Joseph Lucien de Montagnac », base Léonore, ministère français de la Culture.
  2. Montagnac, Lettres d’un soldat, Plon, Paris, 1885, réédité par Christian Destremeau, 1998.
  3. Lettre datée du 31 mars 1842
  4. Lucien de Montagnac, Lettres d'un soldat, neuf ans de campagne en Afrique, Plon, Paris, 1885, lettre à un ami, 15 mars 1843, p. 299 : « On ne se fait pas d'idée de l'effet que produit sur les Arabes une décollation de la main des chrétiens : ils se figurent qu'un Arabe, qu'un musulman, décapité par les chrétiens ne peut aller au ciel ; aussi une tête coupée produit-elle une terreur plus forte que la mort de cinquante individus. Il y a déjà pas mal de temps que j'ai compris cela, et je t'assure qu'il ne m'en sort guère d'entre les griffes qui n'aient subi la douce opération. Qui veut la fin veut les moyens, quoi qu’en disent nos philanthropes. Tous les bons militaires que j’ai l’honneur de commander sont prévenus par moi-même que s’il leur arrive de m’amener un Arabe vivant, ils recevront une volée de coups de plat de sabre. (...) Voilà, mon brave ami, comment il faut faire la guerre aux Arabes : tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger des bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs; en un mot, anéantir tout ce qui ne rampe pas devant nous comme des chiens. » (lire sur Gallica).
  5. Ibid., lettre à sa sœur, 19 décembre 1844, p. 427 : « Et ces malheureuses populations aujourd'hui si vivaces, si belles, que deviendront-elles ? Elles iront toutes mourir de misère sur le bord d'une fontaine tarie ; celles qui échapperont au désastre viendront s'étioler sous les miasmes de notre civilisation infecte, et s'éteindre bientôt. Tel est pourtant le sort réservé à tous ces êtres que les évènements ont placés sous notre domination. Là où nous passons, tout tombe. » (lire sur Gallica).
  6. De montagnac - lettres d’un soldat, neuf années de campagnes en Afrique - correspondance inédite du colonel de Montagnac publiée par son neveu [Charles, fils de Elizé de Montagnac ]- Paris Plon 1885 ( 503 p).
  7. Ils furent conduits au Maroc près de la Moulouya, dans la Deira de l'émir Abd-el-Kader, avec la colonne de 200 hommes capturée par Abd-el-Kader à Sidi-Moussa, près d'Aïn-Témouchent, le 28/09/1845. La plupart de ces hommes (260) furent assassinés sur ordre de Moustapha Ben Tamy, khalifa et beau-frère de l'émir, la nuit du 25 avril 1846. Cf. sur Gallica -Maurice de Bongrain "Les captifs de la Deira d'Abd el Kader" Paris 1864 - et "Défense du lieutenant Marin devant le conseil d'enquête de Perpignan le 4 septembre 1847" Paris 1847
  8. Camille Leynadier et Bertrand Clauzel, Histoire de l'Algérie française, , 403 p. (lire en ligne), p. 455.

Bibliographie

Voir aussi

Articles connexes

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