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Lotte Lenya

Lotte Lenya, née Karoline W. Charlotte Blamauer le à Vienne (Autriche) et morte le à New York[1], est une chanteuse, récitante[2] et actrice autrichienne, naturalisée américaine. Elle fut et demeure l'une des interprètes les plus connues des songs de son premier époux, Kurt Weill. Son interprétation d'une entremetteuse dans Le Visage du plaisir (1961) lui a valu une nomination pour l’Oscar du meilleur second rôle. Elle a interprété le rôle de la rancunière Rosa Klebb dans le film de la série James Bond intitulé Bons Baisers de Russie (1963).

Lotte Lenya
Description de cette image, également commentée ci-après
photo de Carl Van Vechten (1962)
Informations générales
Nom de naissance Karoline Wilhelmine Charlotte Blamauer
Naissance
Vienne (Autriche)
Décès
New York (États-Unis)
Activité principale chanteuse, actrice
Genre musical comédie musicale
Années actives 1922–1981
Labels Orchestrola (1930), Homocord (1930), Electrola E.H., Philips, Columbia
Site officiel http://kwf.org/lotte-lenya/discography2

Biographie

Les débuts

Née dans une famille catholique ouvrière de Vienne[3], Charlotte (« Lotte ») Lenya était d'origine allemande. Elle part étudier la danse à Zurich en 1914, et trouve un emploi de comédienne au théâtre local. C'est là qu'elle adopte son nom de scène, alors orthographié Lotte « Lenja ».

Premiers succès

En 1921, elle repart chercher du travail à Berlin, et lors d'une audition pour « Nuit magique » (Zaubernacht) en 1924 fait la connaissance d'un jeune compositeur, Kurt Weill, qu'elle épouse en janvier 1926. En 1927, sa rencontre avec Bertolt Brecht marque le début d'une longue collaboration : lors du festival de Baden-Baden, elle chante Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny. En 1928, c’est la création de L'Opéra de quat'sous à Berlin, qui est désormais son rôle-phare. Elle interprète aussi le rôle de Jenny dans le film de Pabst qui sort en 1931. Tout au long de la République de Weimar, ses interprétations font l'objet de multiples enregistrements sur disque sans cesse réédités depuis[4] - [5].

L'émigration

La séparation d'avec Kurt Weill (dont elle divorcera par la suite), l'arrivée au pouvoir des Nazis la poussent à quitter l'Allemagne : en , elle s'installe à Paris où elle tient le premier rôle dans le ballet de Brecht et Weill, Les Sept Péchés capitaux.

Elle part ensuite avec Kurt Weill aux États-Unis : ils s'installent à New York le [6] et se remarient l'année suivante[7]. Au cours de l'été 1936, le dramaturge américain Paul Green (en) et la productrice Cheryl Crawford louent une grande maison au no 277 de Trumbull Avenue à Nichols (Connecticut), à quelques kilomètres du Pine Brook Country Club, la salle de répétition du Group Theatre de New York[8] - [9]. C'est là que Paul Green et Kurt Weill mettent la dernière main à leur comédie musicale Johnny Johnson (en) qui fait scandale (le titre de l’œuvre reprend le nom le plus fréquent dans les listes de victimes américaines de la guerre de 1914-18). Lotte devient l'amante de Paul Green[10] - [11].

Participation à l'effort de guerre

Alors que Kurt Weill réclame sans succès un passeport américain aux services de l'Immigration, Lotte et lui se remarient. En 1941, le couple s'achète sa propre maison à New City (comté de Rockland), à environ 50 km au nord de New York. Avec l'entrée en guerre des États-Unis, Lotte multiplie les spectacles, les émissions de radio et les enregistrements phonographiques pour Voice of America : ainsi en 1944, elle enregistre deux songs de Weill (Wie lange noch, sur des paroles de Walter Mehring ; et Und was bekam des Soldaten Weib) pour le War Office à destination de l'Allemagne.

Après l'échec à New York de la comédie de Kurt Weill, The Firebrand of Florence (en) en 1945, Lotte Lenya décide de se retirer de la scène[7].

Retour sur scène

Mais à la mort de Kurt Weill, en 1950, le public veut la revoir sur scène. Elle fait son retour à Broadway dans Barefoot in Athens. Un éditeur influent, George Davis, réussit à la convaincre de reprendre le rôle de Jenny dans la nouvelle adaptation de Blitzstein de L'Opéra de quat'sous[7], qui lui vaut un Tony Award en 1956. Lotte ré-enregistre alors plusieurs des succès musicaux de sa période berlinoise, mais avec l'âge, sa voix est devenue plus grave : il faut transposer les parties de soprano de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny et des Sept Péchés capitaux[7]. Kurt Weill et elle-même employaient déjà le Sprechgesang à Berlin pour les pièces de Brecht, mais Lotte Lenya s'en sert désormais pour pallier les défauts de sa tessiture, tout en s'efforçant de respecter au mieux l’œuvre de son défunt mari[7]. Pour administrer les droits de cette œuvre et en promouvoir la connaissance, elle crée la Kurt Weill Foundation for Music. Elle assiste en personne aux enregistrements que fait Louis Armstrong de La complainte de Mackie, et c'est à cette occasion qu’Armstrong improvise l'air Look out for Miss Lotte Lenya! ; dans l'interprétation de la chanson, il ajoute « Lotte » à la liste des conquêtes féminines de Mackie. D'autres interprètes de Kurt Weill, comme Bobby Darin en 1959, perpétuent cette tradition du clin d’œil à la muse du célèbre compositeur.

En 1961, Lotte Lenya joue le rôle de la Contessa, une entremetteuse, dans Le Visage du plaisir, face à Vivien Leigh ; elle est sélectionnée pour l'Oscar du meilleur second rôle féminin (finalement attribué à Rita Moreno).

On la voit encore dans plusieurs films : en agent du SPECTRE par exemple, face à Sean Connery et Robert Shaw dans Bons Baisers de Russie [12](1963). Le 20 novembre 1966, elle joue « Fräulein Schneider » pour la première à Broadway de la comédie musicale Cabaret[7] dont la musique, composée par Kander et Ebb ressemble fort aux compositions de Kurt Weill ; il est en tout cas certain que la participation de Lotte Lenya fut une excellente publicité pour ce spectacle.

Lenya meurt d'un cancer à New York en 1981, elle est inhumée aux côtés de Kurt Weill dans le cimetière d'Haverstraw.

Postérité

En 2007, LoveMusik, une comédie musicale de Broadway, est consacrée aux relations orageuses entre Weill et Lenya, interprétée par Donna Murphy.

Lotte est encore citée dans les chansons de Fascinating Aïda.

Filmographie

Dans la littérature

La figure de Lotte Lenya est évoquée par Georges Bataille dans le Bleu du ciel, roman de 1935 :

« Je voulais me rappeler le visage de Dirty [maîtresse du narrateur], l’expression trouble de son visage. Le souvenir que j’avais m’échappait. Je pensai qu’elle ressemblait à Lotte Lenia [sic], mais, à son tour, le souvenir de Lotte Lenia m’échappait. Je me rappelai seulement Lotte Lenia dans Mahagonny : elle avait un tailleur noir d’allure masculine, une jupe très courte, un large canotier, des bas roulés au-dessus du genou. Elle était grande et mince, il me semblait aussi qu’elle était rousse. De toute façon, elle était fascinante. [...] Je cherchai à me rappeler la chanson de bordel de l’Opéra de quat’sous. Je ne pus retrouver les paroles allemandes, mais seulement les françaises. J’avais le souvenir, erroné, de Lotte Lenia la chantant[13]. »

Bibliographie

Notes

  1. D'après « Obituary », Variety Obituaries, no 2 décembre,‎ .
  2. D'après Biography of Kurt Weill, Pickford Prod., Inc, coll. « Yale Music Library »,
  3. Cf. Allan Kozinn, « Border crossing », New York Times, no 4 janvier,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. « Lotte Lenya Discography », Kurt Weill Foundation (consulté le )
  5. Records ‘Six Songs by Kurt Weill’ (1943) for Bost Records (BA 8) in New York
  6. (en) Kenneth T. Jackson, The Encyclopedia of New York City, New Haven, Conn./New York, The New York Historical Society; Yale University Press, , 1350 p. (ISBN 0-300-05536-6), p. 1252
  7. Kim H. Kowalke, « Lotte Lenya Biography », Kurt Weill Foundation, (consulté le )
  8. « Pinewood Lake website retrieved on 2010-09-10 », Pinewoodlake.org (consulté le )
  9. Cf. la monographie de la Trumbull Historical Society, « Images of America » (1997), p. 123
  10. D'après (en) Ethan Mordden, Speak Low (when you speak of love) : The Letters of Kurt Weill and Lotte Lenya, University of California Press, , 554 p. (ISBN 0-520-21240-1)
  11. D'après (en) Paul Green, A Southern Life : Letters of Paul Green, 1916-1982, The University of North Carolina Press; annotated edition edition, coll. « Fred W Morrison Series in Southern Studies », , 786 p., broché (ISBN 0-8078-2105-5, lire en ligne), p. 258
  12. « James Bond media website », Jamesbondmm.co.uk, (consulté le )
  13. Georges Bataille, le Bleu du ciel, Paris, Jean-Jacques Pauvert, , 185 p. (ISBN 2-264-00097-X), p. 126-127 (rééd. 10/18, 1970).

Liens externes

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