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La Lettre volée

La Lettre volée (« The Purloined Letter » dans l'édition originale) est une nouvelle d'Edgar Allan Poe, parue en décembre 1844. On retrouve dans cette nouvelle le chevalier Auguste Dupin, apparu dans Double Assassinat dans la rue Morgue.

La Lettre volée
Image illustrative de l’article La Lettre volée
La lettre volée une seconde fois
Publication
Auteur Edgar Allan Poe
Titre d'origine
The Purloined Letter
Langue Anglais américain
Parution avril 1844
dans The Gift for 1845
Intrigue
Genre Littérature policière
Lieux fictifs Paris
Personnages Auguste Dupin
Nouvelle précédente/suivante

Résumé

Le détective Auguste Dupin est informé par G..., le préfet de police de Paris, qu'une lettre de la plus haute importance a été volée dans le boudoir royal. Le moment précis du vol et le voleur, D..., sont connus du policier, mais celui-ci est dans l'incapacité d'accabler le coupable. Malgré des fouilles extrêmement minutieuses effectuées au domicile du voleur, G... n'a en effet pas pu retrouver la lettre. Mettre la main sur cette dernière est pourtant d'une grande importance, car son possesseur se retrouve en mesure d'exercer des pressions sur le membre de la famille royale à qui il l'a dérobée. G... en vient donc à demander l'aide de Dupin. Quelques semaines plus tard, Dupin restitue la lettre au préfet. Il explique alors au narrateur comment certains principes simples lui ont permis de retrouver la lettre.

Comme dans Double assassinat dans la rue Morgue, La Lettre volée met en scène Dupin et ses célèbres facultés d'analyse. La réflexion logique est au centre de la nouvelle, et toute une part de l'intrigue s'appuie sur les difficultés à trouver une solution rationnelle à la disparition de la lettre. Lors de sa visite à Dupin, G... explique les raisonnements qui lui ont permis de découvrir l'identité du voleur, D..., et ceux qui lui ont permis de déduire que la lettre était toujours en sa possession, cachée quelque part dans son domicile.
En dépit de ses certitudes, G... n'est pourtant pas parvenu à récupérer l'objet : le mystère, pour lui, résulte donc de cette incapacité à obtenir des résultats malgré la possession d'éléments suffisants, en principe, pour réussir.

Si Dupin réussit, lui, à résoudre cette apparente contradiction, c'est parce qu'il a su raisonner autrement que le policier, dont les déductions, pour justes qu'elles soient, n'ont pas suffi à résoudre l'affaire. G... a en vain cherché la lettre en la supposant cachée : il a sondé tous les espaces pouvant abriter une lettre qu'on aurait voulu dissimuler. Dupin comprend lui que si G... a échoué, c'est que la lettre volée a volontairement été mise en évidence par le criminel. Loin d'être rangé dans un endroit secret, le billet est en évidence dans le bureau du coupable : la lettre a été froissée, maquillée d'un autre sceau et d'une autre écriture après avoir été pliée à l'envers. Si elle n'attire pas l'attention c'est qu'elle semble sans valeur, ordinaire.

Discussion

  • L'Ă©pigraphe « Nil sapientiae odiosius acumine nimio » ( « Rien en fait de sagesse n'est plus dĂ©testable que d'excessives subtilitĂ©s » ) que Poe attribue Ă  SĂ©nèque ne figure pas dans l'Ĺ“uvre rĂ©pertoriĂ©e de ce dernier.
  • Pour ne pas Ă©veiller les soupçons du criminel, Dupin substitue Ă  la lettre volĂ©e une autre similaire, mais par provocation, il y a Ă©crit (en français dans le texte de Poe) : « Un dessein si funeste, S'il n'est digne d'AtrĂ©e, est digne de Thyeste. », une rĂ©fĂ©rence Ă  deux frères ennemis de la mythologie grecque.
  • Le linguiste Jean-Claude Milner a Ă©mis en 1985 l'hypothèse que Dupin et D... sont frères[1] (hypothèse Ă©tayĂ©e entre autres par la rĂ©fĂ©rence finale de Dupin Ă  AtrĂ©e et Thyeste).
  • Dans son SĂ©minaire sur la Lettre volĂ©e, le psychanalyste Jacques Lacan compare les deux vols de la lettre en montrant que le deuxième comporte les trois rĂ´les caractĂ©risant le premier, mais qu'ils sont tenus par des personnages diffĂ©rents : le regard qui ne voit rien (le roi, puis la police), le regard qui voit cet aveuglement et croit que la lettre ne risque rien (la reine, puis le ministre D.), et enfin le regard qui voit les deux autres et comprend que la lettre est disponible pour celui qui voudrait s'en saisir (le ministre D., puis Dupin).
  • Dans son sĂ©minaire Facteur de la VĂ©ritĂ©, Jacques Derrida reprend l'analyse de Lacan, et la critique en dĂ©voilant sa mĂ©taphysique intrinsèquement « phallocentrique ». Il montre comment Lacan emploie un tel regard limitĂ© (« politique de l'autruche ») dans son analyse du/des triangle(s) dramatique(s).

Correspondances

  • Cette nouvelle prĂ©sente de curieuses analogies avec Les Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas, roman publiĂ© quelques mois auparavant. Dans les deux rĂ©cits, un ministre (le ministre D... / le cardinal de Richelieu) a dĂ©robĂ© Ă  la reine un objet (la lettre / les ferrets) dont la production aux yeux du roi la compromettrait gravement. Ce vol est destinĂ© Ă  servir la politique du ministre. L'utilisation d'un fac-similĂ© (fac-similĂ© de la lettre / fabrication de deux autres ferrets) va rĂ©tablir la position de la reine tout en laissant croire au ministre qu'il dispose toujours de l'avantage que lui avait confĂ©rĂ© le vol.
  • Dans son roman Le Bouchon de cristal, Maurice Leblanc utilise Ă  son tour le procĂ©dĂ© consistant Ă  mettre en Ă©vidence un objet que tous croient Ă  tort dissimulĂ© dans un endroit tenu secret.
  • Dans le film Charade, Audrey Hepburn est Ă  la recherche d'un butin et comprend tardivement qu'il est constituĂ© de timbres de collection exposĂ©s au vu de tous.
  • Dans 120, rue de la Gare, roman policier de LĂ©o Malet, adaptĂ© au cinĂ©ma et en bande dessinĂ©e, un exemplaire de La Lettre volĂ©e figure Ă  plusieurs reprises. La clĂ© de l'Ă©nigme de cette nouvelle est d'ailleurs explicitement Ă©voquĂ©e pour parler de la manière dont fut retrouvĂ©e la perle volĂ©e.

Référence

  1. Jean-Claude Milner, Détections fictives, coll. « Fictions & Cie », Le Seuil, 1985.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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