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Kojiki

Le Kojiki (ć€äș‹èš˜, litt. Chronique des faits anciens aussi prononcĂ© Furukoto fumi) est un recueil de mythes concernant l’origine des Ăźles formant le Japon et des kamis, divinitĂ©s du shintoĂŻsme. Avec le Nihon shoki, les lĂ©gendes contenues dans le Kojiki ont inspirĂ© beaucoup de pratiques et de croyances du shintoĂŻsme. Il est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme le plus ancien Ă©crit japonais existant encore de nos jours et est entiĂšrement Ă©crit en langue japonaise[1] - [2], en caractĂšres chinois.

Édition française du Kojiki.
Kojiki
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ƒuvre dĂ©rivĂ©e

Le Kojiki est une compilation des rĂ©cits du conteur Hieda no Are par le chroniqueur ƌ no Yasumaro, sur l’ordre de l’impĂ©ratrice Genmei. Il lui fut offert en 712.

Contexte historique et politique

AppelĂ© Yamato par ses habitants, le nord du KyĆ«shĆ« et l'est du HonshĆ« composent, Ă  partir du VIe siĂšcle, un ensemble de territoires dirigĂ©s par des familles (maison ou uji) rĂ©unies autour d'un monarque appelĂ© ƍkimi, appellation transcrite Ă  l'aide de lettres chinoises qui signifient « grand roi » ou « grand souverain », et installĂ© dans la rĂ©gion du Kinki. Cette monarchie, le Yamato, est en rĂ©alitĂ© placĂ©e sous la domination des dynasties chinoises Sui et Tang qu'ils appellent pĂ©jorativement le pays des « Wa »[3].

Cependant, l'arrivĂ©e de colons et de marchands venus de la pĂ©ninsule corĂ©enne (Kikajin) eux-mĂȘmes porteurs de nouveaux schĂ©mas culturels et politiques chinois poussent les ƍkimi, pris dans d'incessantes luttes intĂ©rieures minant progressivement leur autoritĂ©, Ă  adopter progressivement le modĂšle de gouvernement plus stable de Chang'an[3]. Ainsi le VIIe siĂšcle voit se dĂ©clencher plusieurs rĂ©formes qui visent Ă  structurer le royaume de maniĂšre plus centralisĂ©e : les rĂ©formes de Shƍtoku Taishi et de la reine Suiko en , puis la rĂ©forme de Taika menĂ©e par Tenji en et les changements plus radicaux de Tenmu (rĂšgne de Ă  ) poursuivis ensuite par sa veuve Jitƍ (rĂšgne de Ă  ). Ces deux derniers personnages dotent Ă©galement le pays d'un arsenal juridique complet compilĂ© en et directement inspirĂ© du systĂšme chinois : le code de Taihƍ. Ils structurent le Yamoto autour d'une administration Ă©tatique complexe mais stable et le soustraient Ă  la dĂ©pendance chinoise[4] - [5].

En outre, Tenmu, tout en favorisant l’essor du bouddhisme, du confucianisme et du taoĂŻsme, rapproche davantage l'image du monarque des divinitĂ©s locales : il se dĂ©signe lui-mĂȘme comme « manifestation vivante de la divinitĂ© » (珟焞 (akitsukami)) et confirme sa filiation avec la dĂ©esse du soleil Amaterasu (mĂȘme si les souverains ƍkimi le prĂ©cĂ©dant se rĂ©clamaient dĂ©jĂ  de la dĂ©esse). Il envoie rĂ©guliĂšrement une vestale au sanctuaire d'Ise (sanctuaire d'Amaterasu) et inaugure la coutume qui consiste Ă  en reconstruire le temple central tous les vingt ans. Dans cette optique, il renomme le Yamato en Japon — Nihon ou Nippon (æ—„æœŹ) Ă©tymologiquement « origine (æœŹ, hon) du Soleil (æ—„, ni) » — et devient l’empereur du « pays oĂč le soleil se lĂšve » face Ă  la Chine, le « pays oĂč le soleil se couche ». Il prend Ă©galement le titre de Tennƍ[Note 1] et proclame ainsi l'Ă©quivalence de sa position avec celle des empereurs chinois. ParallĂšlement Ă  cela, il ordonne en la confection d'une chronique officielle, le Kokushi ou le Jƍko no shoji, qui fixe « l'histoire officielle de la monarchie et des grands faits anciens ». Ce texte, aujourd'hui disparu, a fort probablement servi de base d'inspiration Ă  la rĂ©daction des chroniques impĂ©riales de , le Kojiki et de , le Nihon shoki[7] - [5].

RĂ©daction

L'empereur Tenmu aurait ordonnĂ© Ă  Hieda no Are de compiler les traditions et gĂ©nĂ©alogies de l’époque. Hieda no Are se serait inspirĂ© du Teiki et du KyĆ«ji[8]. À la mort de Tenmu, le projet fut repris par l’impĂ©ratrice Genmei, qui ordonna Ă  ƌ no Yasumaro de mettre par Ă©crit ce qu’avait recueilli Hieda no Are. Il mit quatre mois Ă  le faire et remit le rĂ©sultat final Ă  Genmei le . Cependant, faute de versions intermĂ©diaires, on ignore ce que ƌ no Yasumaro y a ajoutĂ©.

Contenu

Page d’une version manuscrite de 1371 à 1372.

Le Kojiki contient de nombreuses chansons et poĂšmes. Alors que les rĂ©cits historiques et les mythes sont Ă©crits sous une forme de chinois mĂ©langĂ© avec un nombre important d’élĂ©ments linguistiques japonais, les chansons sont Ă©crites avec des caractĂšres chinois employĂ©s pour transmettre les sons seulement. Cette utilisation spĂ©ciale des caractĂšres chinois s’appelle man'yƍgana ; une connaissance de la chose est essentielle pour comprendre ces chansons. De plus, elles ont Ă©tĂ© Ă©crites dans un dialecte de la rĂ©gion de Yamato du VIIe au VIIIe siĂšcle environ appelĂ© Jƍdai nihongo (äžŠä»Łæ—„æœŹèȘž, litt. « japonais de l’ñge supĂ©rieur »).

Le Kojiki est divisĂ© en trois volumen : le Kamitsumaki (䞊添, litt. « Rouleau prĂ©cĂ©dent »), le Nakatsumaki (äž­ć·», litt. « Rouleau intermĂ©diaire ») et le Shimotsumaki (äž‹ć·», litt. « Dernier rouleau »). Il s’agit de la numĂ©rotation chinoise des volumes d’un livre[9].

Le Kamitsumaki inclut la prĂ©face et se concentre sur les divinitĂ©s de la crĂ©ation et sur la naissance de diverses autres dĂ©itĂ©s et de leurs aventures fantastiques. La plus cĂ©lĂšbre de ces aventures est celle d’Amaterasu, la dĂ©esse du soleil, qui envoya sur terre son petit-fils Ninigi pour fonder les prĂ©mices de la lignĂ©e impĂ©riale.

Le Nakatsumaki dĂ©bute avec l’histoire du premier empereur, Iwarehiko (ou son nom posthume : Jinmu), de la dĂ©fense de ses terres natales d’Izumo Ă  KyĆ«shĆ« jusqu’à sa conquĂȘte du Japon et se termine avec le 15e empereur, ƌjin. Plusieurs de ces histoires sont de l’ordre du mythe et le contenu historique allĂ©guĂ© est hautement suspect. Par ailleurs, pour des raisons inconnues, le 2e et le 9e empereurs japonais sont citĂ©s, mais leurs accomplissements sont en grande partie oubliĂ©s. Certains historiens pensent que ces empereurs furent inventĂ©s afin de crĂ©er une illusion de vraisemblance dans les dates.

Une des principales histoires de ce volume est celle de Yamato Takeru.

Le Shimotsumaki couvre du 16e empereur, Nintoku, au 33e empereur, Suiko et, à la différence des volumes précédents, fait référence de façon trÚs limitée aux déités qui sont pourtant si présentes dans le premier et deuxiÚme volume. Toutefois, peu de renseignements sur le 24e et du 33e empereur sont donnés. Les derniers chapitres sont purement chronologiques.

IntĂ©rĂȘt historique du Kojiki

Le Kojiki est basĂ© sur des lĂ©gendes populaires datant du IVe au VIe siĂšcle (avant l’arrivĂ©e du bouddhisme au Japon) et n’est donc pas considĂ©rĂ© comme une source historique fiable. Cependant, c’est une Ɠuvre essentielle pour comprendre la pensĂ©e shintoĂŻste[8].

Le livre n’était presque plus Ă©tudiĂ© dans l’aprĂšs-guerre, Ă©tant jugĂ© complĂštement non historique. NĂ©anmoins, Ă  partir des annĂ©es 1960, les historiens ont commencĂ© Ă  penser que certains Ă©lĂ©ments du Kojiki pouvaient ĂȘtre basĂ©s sur des faits rĂ©els. De plus, il s’agit d’une des seules sources indigĂšnes sur le Japon de cette Ă©poque.

La localisation exacte des Ă©vĂšnements du Kojiki (tout comme celle du Yamato) n’est pas connue. Dans le texte, le Japon est appelĂ© pays intermĂ©diaire (è‘ŠćŽŸäž­ă€ć›œ, Ashihara no Nakatsukuni, litt. « le pays intermĂ©diaire aux plaines de roseaux »). Le pays est dit intermĂ©diaire car situĂ© entre la plaine cĂ©leste (é«˜ć€©ćŽŸ, Takamagahara) et le pays des morts (é»„æł‰ăźć›œ, Yomi no kuni). Le pays intermĂ©diaire est reliĂ© Ă  la plaine cĂ©leste par le pont flottant du ciel (ć€©ăźæ”źæ©‹, ame no ukihashi) et au pays des morts par la « pente vers le pays des tĂ©nĂšbres » (ă‚ˆă‚‚ă€ćčłć‚, yomotsu hirasaka).

Notes et références

Notes

  1. En ce sens, Tenmu est ainsi le premier souverain Ă  porter le titre de Tennƍ (empereur). Kƍgƍ est l'Ă©quivalent de impĂ©ratrice et ƌji de prince[6].

Références

  1. René Sieffert, « Kojiki », sur universalis.fr, EncyclopÊdia Universalis (consulté le ).
  2. Christopher Seeley, A History of Writing in Japan (lire en ligne).
  3. Souyri 2010, p. 81-82.
  4. Souyri 2010, p. 81-82 et 121.
  5. Philippi 2015, p. 16.
  6. Souyri 2010, p. 118.
  7. Souyri 2010, p. 121-133.
  8. Shibatata et Shibata 1969.
  9. En chinois, 侊, shĂ ng signifie dessus, mais Ă©galement prĂ©cĂ©dent et premier, 例, xiĂ  signifie sous, mais Ă©galement suivant et dernier.

Annexes

Texte original

  • (ja) Yoshinori Yamaguchi, Shinpen nihon koten bungaku zenshĆ« 1 : Kojiki, Shƍgakukan, (ISBN 4-09-658001-5).

Traductions et commentaires

  • Kojiki : chronique des faits anciens (trad. du japonais par Pierre Vinclair), Amiens, le Corridor bleu, , 234 p. (ISBN 978-2-914033-32-9).
  • Joffrey Chassat (prĂ©f. Bruno Traversi), Kojiki, mythes choisis, Éditions du CĂ©nacle, , 151 p..
  • (en) Donald L. Philippi, Kojiki, University of Tokyo Press & Princeton University Press, (1re Ă©d. 1969), 664 p..
  • Masumi Shibata et Maryse Shibata, Kojiki : chronique des choses anciennes, France, Maisonneuve et Larose, , 259 p..

Bibliographie générale

  • Nathalie CalmĂ©, « Le Kojiki. La genĂšse du monde shinto », Le Monde des Religions, no 89,‎ .
  • Pierre-François Souyri, Nouvelle histoire du Japon, Lonrai, Perrin, coll. « Japan Fondation », , 627 p. (ISBN 9782262022464).

Articles connexes

Liens externes

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