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Jours glacés

Jours glacés (Hideg napok) est un film hongrois réalisé en 1966 par Andrås Kovåcs, d'aprÚs le roman éponyme de Tibor Cseres inspiré d'un drame historique réel. Le film a été récompensé du Grand Prix au Festival de Karlovy Vary en 1966.

Jours glacés

Titre original Hideg napok
RĂ©alisation AndrĂĄs KovĂĄcs
ScĂ©nario Tibor Cseres (hu) (roman)
A. KovĂĄcs
Acteurs principaux

ZoltĂĄn Latinovits
IvĂĄn Darvas
Ádam Szirtes

Pays de production Drapeau de la Hongrie Hongrie
Durée 97 minutes
Sortie 1966

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Synopsis

1946. Trois officiers et un caporal de nationalitĂ© hongroise, prĂ©sumĂ©s complices et coupables de la mort de milliers de personnes, attendent en prison leur prochain jugement... Dans leur geĂŽle, leurs conversations, axĂ©es sur la relation d'un Ă©vĂ©nement atroce - l' "opĂ©ration de nettoyage" d'ÙjvidĂ©k (aujourd'hui Novi Sad en Serbie), en , dans laquelle pĂ©rirent 3 300 personnes, jetĂ©es ensuite dans les eaux glacĂ©es du Danube -, mettent en lumiĂšre le systĂšme de responsabilitĂ© collective qui les a conduits Ă  ces extrĂ©mitĂ©s[1]...

Fiche technique

  • Titre original : Hideg napok
  • Titre français : Jours glacĂ©s
  • RĂ©alisation : AndrĂĄs KovĂĄcs
  • ScĂ©nario : A. KovĂĄcs, d'aprĂšs le roman de Tibor Cseres (hu), traduit et publiĂ© en français en 1971 (Gallimard, Collection du monde entier)
  • Photographie : Ferenc SzĂ©csĂ©nyi
  • Format : Noir et blanc - 2,35 : 1
  • Montage : MĂĄria DarĂłczy
  • Son : GĂĄbor ErdĂ©lyi
  • DĂ©cors : BĂ©la Zeichan
  • Costumes : Zsazsa LĂĄzĂĄr
  • Production : Mafilm, studio n°1, Budapest
  • DurĂ©e : 97 minutes
  • Pays d'origine : Drapeau de la Hongrie Hongrie
  • AnnĂ©e de rĂ©alisation : 1966
  • Sortie en France : fĂ©vrier 1968
  • Genre : Film dramatique

Distribution artistique

Commentaire

Lors de sa sortie à Budapest, Jours glacés suscita de vives polémiques, dont Jean-Pierre Jeancolas se fait l'écho dans son livre consacré au cinéma hongrois[2]. « Fallait-il remuer ce passé, au risque de ternir l'image de la Hongrie auprÚs de la communauté internationale ? », interroge-t-il.

AndrĂĄs KovĂĄcs, rĂ©alisateur du film, s'explique : « Ce que mon film aimerait attester c'est combien des hommes groupĂ©s en horde et surexcitĂ©s peuvent ĂȘtre capables d'infamies, indĂ©pendamment de leur nationalitĂ©. (...) Aux crimes perpĂ©trĂ©s par cent hommes, on voit mille personnes chercher des excuses - et finalement, c'est parfois toute l'opinion publique d'un pays qui est amenĂ©e Ă  minimiser ou Ă  justifier de telles forfaitures. Pour ces mĂȘmes raisons, mais aux yeux d'autres gens, les atrocitĂ©s commises par des groupes de fanatiques passent au compte des nations entiĂšres. »[3]

Une telle vision provoque l'admiration de Gilles Jacob qui voit en « KovĂĄcs, un homme dont la rĂ©flexion tĂ©moigne d'un courage antinationaliste inĂ©dit Ă  ce point au cinĂ©ma. »[4] Il est vrai qu'AndrĂĄs KovĂĄcs dit Ă©galement : « Chez nous, en Hongrie - Ă  petit peuple, grand hymne - les survivances d'une Ă©ducation nationaliste plusieurs fois sĂ©culaires agissent toujours sur la conscience individuelle. Pour bien des gens de chez nous, Hongrois est synonyme de perfection humaine, honnĂȘtetĂ©, intelligence, bontĂ©. Par Jours glacĂ©s, j'ai tenu Ă  protester contre les idĂ©es de ce genre (...) »[5]

Le rĂ©alisateur hongrois prĂ©cise, tout de mĂȘme, qu'il avait seulement voulu traiter une "situation" : « Je montre des Serbes passifs, soit, mais le problĂšme n'est pas dans l'Ă©tude d'un cas particulier, les Juifs, les Serbes etc. (...) il rĂ©side dans la situation », dit-il[6].

Jours glacĂ©s est donc « Ɠuvre de moraliste. Mais le dĂ©bat qu'il ouvre sur la culpabilitĂ© ne se rĂ©duit pas Ă  une piĂšce de thĂ©Ăątre existentialiste : par la grĂące de sa mise en scĂšne, un effet de rĂ©el fait naĂźtre une Ă©motion qui gonfle et fait Ă©clater la rhĂ©torique », en conclut Jean-Pierre Jeancolas[7].

AndrĂĄs KovĂĄcs et l'adaptation du roman de Cseres

Au cours d'un entretien avec le critique RenĂ© PrĂ©dal, le rĂ©alisateur hongrois nous dit : « Tibor Cseres est un ami de longue date. Mais, lorsque son livre, qui est un roman assez court, avait paru, je n'en avais pas lu plus de deux pages ! DĂšs que je m'Ă©tais aperçu qu'il Ă©tait situĂ© pendant la guerre, je l'avais abandonnĂ© car le passĂ© ne m'intĂ©resse pas en tant que tel. J'Ă©tais d'autre part tout plein de problĂšmes actuels qui me semblaient d'un trĂšs grand intĂ©rĂȘt (...) Mais, quelque temps aprĂšs, Cseres m'a donnĂ© un scĂ©nario Ă  lire. Il aurait sans doute voulu que j'en fasse un film, mais c'Ă©tait trĂšs mauvais. (...) Alors, pour attĂ©nuer mon refus, je me suis dit : "Lisons au moins son livre, comme les critiques Ă  son sujet sont bonnes, il me sera facile de trouver des choses agrĂ©ables Ă  lui dire sur son Ɠuvre !" Je me suis alors aperçu que le livre abordait exactement les problĂšmes qui Ă©taient au centre de mes prĂ©occupations et notamment ceux de la responsabilitĂ©, c'est-Ă -dire des questions strictement actuelles et non pas historiques. »[8]

Notes et références

  1. Au sujet de ce drame, Raul Hilberg, dans son cĂ©lĂšbre ouvrage La Destruction des Juifs d'Europe (Gallimard, 1985 pour l'Ă©dition en français), Ă©crit ceci : « La Solution finale en Hongrie est une longue histoire. Elle s'amorça en 1941 et au dĂ©but de 1942 lorsque le pays Ă©tait gouvernĂ© par le premier ministre pro-allemand LĂĄszlĂł BĂĄrdossy. On put croire, durant cette pĂ©riode, que la Hongrie serait le premier pays Ă  ĂȘtre "dĂ©judaĂŻsĂ©". Deux Ă©pisodes survinrent pendant ce gouvernement : la dĂ©portation des "Juifs de l'Est" d'Ukraine sub-carpatique et le massacre de Juifs yougoslaves de Novi Sad. [...] Une flambĂ©e de violence se produisit en Yougoslavie occupĂ©e, quand le commandant Feketehalmy-Czeydner, arrĂȘta au cours d'une rafle plusieurs milliers de Serbes et de Juifs dans la ville de Novi Sad. Les survivants juifs (tĂ©moignages oraux de Gabriela Balaz, Slavko Weiss et Eliezer Bader recueillis en 1961-62 pour Yad Vashem) se rappellent que le 20 janvier 1942 la population reçut l'ordre de fermer les volets des maisons, tandis que les futures victimes Ă©taient emmenĂ©es dans les cabines d'un bain public et fusillĂ©es nues sur des plongeoirs d'oĂč leurs corps tombaient dans des trous pratiquĂ©s dans la glace recouvrant le Danube. »
  2. in : CinĂ©ma hongrois 1963-1988, Éditions du CNRS.
  3. in : Premier Plan, cité par C.-L. Levenson, déc. 1966.
  4. in : Les Nouvelles littéraires, février 1968.
  5. CitĂ© par Boleslaw Michalek in : Études cinĂ©matographiques, n° 73/77, nov. 1969.
  6. Cité dans Cinéma hongrois 1963-1988, par Jean-Pierre Jeancolas.
  7. op. cité.
  8. Entretien avec R. Prédal, Nice, mars 1968.

Liens externes

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