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Journal de Murasaki Shikibu

Le Journal de Murasaki Shikibu (çŽ«ćŒéƒšæ—„èš˜, Murasaki Shikibu nikki) ou Journal de dame Murasaki est un recueil d’anecdotes sur la vie Ă  la cour de Heian Ă©crit par Murasaki Shikibu, dame de compagnie et auteur du cĂ©lĂšbre Dit du Genji (æșæ°ç‰©èȘž, Genji monogatari), probablement entre 1008 et 1010. La plus grande partie de l’Ɠuvre s’attache Ă  dĂ©crire les cĂ©rĂ©monies pour la naissance du premier fils de l’impĂ©ratrice Shƍshi, le reste dĂ©crivant les relations de Murasaki avec les autres dames de compagnie et ses rĂ©flexions plus personnelles sur la vie au palais, la fuite du temps et les relations humaines. Sa structure particuliĂšre peut laisser Ă  penser qu'une importante partie du journal a Ă©tĂ© perdue.

Journal
Titre original
çŽ«ćŒéƒšæ—„èš˜, Murasaki Shikibu nikki
Langue
Auteur
Murasaki Shikibu
Traduction
Genre
Époque de l'action
1000 -1010
Date
2014
Date de création
ca. 1008
Date de parution
Lieu
Pays
Japon de l'Ă©poque Heian (d)
Éditeur
Ă©ditions Verdier
ƒuvre dĂ©rivĂ©e
ISBN 10
2864327708
Murasaki Shikibu écrivant, par Tosa Mitsuoki, détail de ses illustrations du Dit du Genji (XVIIe) dans un style proche du yamato-e ancien.

Un emaki du XIIIe siÚcle, nommé Murasaki Shikibu nikki emaki (lit. Rouleaux enluminés du journal de Murasaki Shikibu), illustre le journal dans le style classique du yamato-e.

Contexte

Murasaki Shikibu sur une estampe nishiki-e de 1765 par Komatsuken.

Au IXe siĂšcle, une nouvelle forme d’écriture japonaise, les kana, se popularise et permet le dĂ©veloppement d’une littĂ©rature en langue vernaculaire en vogue Ă  la cour, surtout parmi les femmes, car les hommes Ă©tudiaient principalement les kanjis chinois. Des genres tels que le roman (monogatari) ou le journal intime (nikki) gagnent ainsi en popularitĂ©[1] - [2]. La culture de Heian et la vie au palais connaĂźt son Ăąge d’or au XIe siĂšcle, en particulier Ă  travers les lettres, et les dames de compagnie de la cour impĂ©riale tenaient communĂ©ment un journal[3].

Rédigé probablement entre 1008 et 1010, les fragments restants du Journal de Murasaki Shikibu apportent un éclairage crucial sur Murasaki Shikibu, compte tenu du manque de sources la concernant par ailleurs. La plupart des détails de sa vie y figurent, ainsi que dans son recueil de poÚmes compilé en 1014[4].

Murasaki Shikibu devient donc dame de compagnie Ă  la cour en 1006. Si son vrai nom reste un mystĂšre, elle appartient Ă  une branche secondaire des Fujiwara. Son pĂšre, un Ă©rudit de littĂ©rature chinoise, enseigne Ă  ses enfants la langue et la culture classique de Chine. Murasaki suit d’abord son pĂšre lorsqu’il devient gouverneur de la province d'Echizen, puis elle rentre Ă  Kyƍto (alors Heian-kyƍ) quelques annĂ©es plus tard pour se marier, bien que son Ă©poux dĂ©cĂšde peu aprĂšs en 998 ou 1000 ; elle a de lui une fille[5]. Puis, Ă  la demande de Fujiwara no Michinaga, elle entre Ă  la cour comme dame de compagnie de l’impĂ©ratrice Shƍshi[6]. La plus grande partie de son journal a Ă©tĂ© Ă©crit durant cette pĂ©riode ; en effet, s’il contient divers Ă©lĂ©ments autobiographiques, la plus grande partie est rĂ©servĂ©e aux descriptions des cĂ©rĂ©monies et de la vie au palais[5].

Le journal

Présentation

Helen McCullough explique que le genre littĂ©raire du nikki bungaku (lit. « journal intime ») se rapproche en fait plus de mĂ©moires autobiographiques que du journal intime. Murasaki fournit diverses informations au lecteur : anecdotes sur elle-mĂȘme ou les autres dames, descriptions des grandes cĂ©rĂ©monies, parfois Ă©maillĂ©es de poĂšmes waka[7]. Ainsi, dans les journaux intimes de l’époque de Heian, l’auteur trie et retravaille les Ă©lĂ©ments qu’il dĂ©crit. Le temps est traitĂ© de façon similaire : plutĂŽt que dĂ©coupĂ© chronologiquement (gĂ©nĂ©ralement par jour), le nikki peut prĂ©senter de longues entrĂ©es pour de brefs Ă©vĂ©nements et en ignorer bien d’autres. Ce genre littĂ©raire se caractĂ©rise donc par une narration Ă  la troisiĂšme personne, non centrĂ©e sur l’auteur et incluant parfois des Ă©lĂ©ments fictifs ou historiques[7].

Le journal de Murasaki Shikibu peut ĂȘtre divisĂ© en trois parties : la premiĂšre et la plus vaste s’attache Ă  dĂ©crire les cĂ©rĂ©monies liĂ©es Ă  la naissance du fils aĂźnĂ© de Shƍshi (impĂ©ratrice et fille de Fujiwara no Michinaga), la seconde prĂ©sente plusieurs lettres dans lesquelles Murasaki dĂ©crit et analyse les personnes et les dames de la cour, enfin la derniĂšre est une compilation de courtes anecdotes[8]. Cependant, peu d’informations sont donnĂ©es sur la jeunesse de l’auteur, avant son entrĂ©e Ă  la cour[8]. Elle confie toutefois avoir Ă©tudiĂ© le chinois avec son frĂšre Nobunori :

« Quand mon frĂšre Nobunori [...] Ă©tait enfant, mon pĂšre avait grand souci d'en faire un bon Ă©rudit du chinois comme lui, et venait souvent l’écouter lire ses leçons. En ces occasions, j’étais toujours prĂ©sente, et comprenait si rapidement cette langue que j’étais bientĂŽt capable de corriger les erreurs de mon frĂšre. Alors, mon pĂšre prit l’habitude de soupirer en disant : « Si seulement tu Ă©tais un garçon, comme je serais fier et heureux. » Mais [...] la plupart des gens me disaient que mĂȘme les garçons devenaient gĂ©nĂ©ralement impopulaires si l’on apprenait leur penchant pour ces livres. Alors pour une fille, cela aurait Ă©tĂ© pire encore, et je pris garde de dissimuler que j’étais capable d’écrire ne serait-ce qu’un caractĂšre chinois. »

— Murasaki Shikibu[9]

Le journal dĂ©crit la vie au palais du point de vue de Murasaki, comme les kimonos des femmes ou la beautĂ© des vĂȘtements et de la prĂ©sentation des plats lors des banquets Ă  la cour[8]. Elle semble particuliĂšrement sensible Ă  la nature, Ă©crivant sur sa beautĂ© ou le changement des saisons et du temps. D’un autre cĂŽtĂ©, elle expose aussi la vulgaritĂ© qu'elle pouvait constater, tels des hommes saouls devenant mauvais et courtisant les dames de compagnie. Elle confie enfin sa tristesse et sa solitude, ainsi que le peu d’amies qu’elle avait[10]. Le journal contient aussi des anecdotes sur les scandales de la cour, par exemple les femmes chassĂ©es du palais Ă  cause de leur comportement ou de leur Ăąge, l’ivresse lors de fĂȘtes ou encore sa propre peur de vieillir. Finalement, pour Murasaki, les femmes de la cour manquent de volontĂ©, d’éducation et d’expĂ©rience avec les hommes[11].

Portraits de Fujiwara no Michinaga et de Shƍshi

Murasaki Shikibu dĂ©crit Fujiwara no Michinaga de façon peu flatteuse, en particulier les sections oĂč il prend en charge les premiers jours du prince Atsuhira, Ă©clipsant l’empereur Ichijƍ lui-mĂȘme et les prĂȘtres. Il s’occupe ainsi des cĂ©rĂ©monies et, aprĂšs cela, rend visite Ă  l’enfant deux fois par jour[10]. Toutefois, tous ces faits sont longuement relatĂ©s sur la moitiĂ© du journal, si bien que plusieurs spĂ©cialistes y voient plutĂŽt un hommage Ă  Michinaga[4]. Divers passages dĂ©crivent Ă  ce sujet les lieux de l’accouchement (chez Michinaga), les vĂȘtements et les tapisseries blanches, ainsi que le rituel consistant Ă  couper une mĂšche de cheveux de la mĂšre. Michinaga est autorisĂ© Ă  visiter sa fille et son petit-fils seize jours aprĂšs, date Ă  laquelle une cĂ©rĂ©monie de purification est organisĂ©e[12]. Murasaki dĂ©crit avec force dĂ©tails les vĂȘtements portĂ©s pour l’occasion, par exemple : « Saemon no Naishi portait l’épĂ©e. Elle avait revĂȘtu un manteau uni jaune-vert, une traĂźne plus foncĂ©e Ă  l’ourlet, et un obi et des ceintures brodĂ©es de soie orange et blanche en damier. »[12]

L'impĂ©ratrice Shƍshi et son enfant, entourĂ©s des dames de compagnie au palais. DĂ©tail du Murasaki Shikibu nikki emaki (XIIIe).

Dans sa traduction anglaise de 1982, Richard Bowring avance que le conflit entre Murasaki et la mĂšre de Shƍshi (premiĂšre femme de Michinaga) Ă©mane probablement des avances flagrantes faites par son mari Ă  l’auteur. Michinaga Ă©tait trĂšs probablement l’homme le plus influent Ă  la cour, et donc parmi la sociĂ©tĂ© de Shƍshi et de sa mĂšre Rinshi ; Murasaki dĂ©crit ainsi une scĂšne oĂč Michinaga embarrasse grandement sa fille et sa femme par ses pitreries, Ă©tant ivre, sans qu’elles ne puissent intervenir[11]. D’aprĂšs Keene, la vie au palais de Heian telle que prĂ©sentĂ©e par Murasaki apparaĂźt comme l’antithĂšse de la cour qu’elle esquisse dans son roman du Dit du Genji, oĂč la supĂ©rioritĂ© morale du prince Genji contraste fortement avec la grossiĂšretĂ© de Michinaga[10].

Dames de compagnie

Sei Shƍnagon, rivale de Murasaki, au palais de Heian. DĂ©tail des Rouleaux des notes de chevet dans un style hakubyƍ (peinture monochrome Ă  l'encre).

Sei Shƍnagon (auteur des Notes de chevet (æž•è‰ć­, Makura no sƍshi)) Ă©tait une femme lettrĂ©e au service de l’impĂ©ratrice Teishi (Sadako), rivale de Shƍshi. Les deux impĂ©ratrices Ă©taient en compĂ©tition pour rĂ©unir dans leur entourage les dames de compagnie les mieux Ă©duquĂ©es ; en consĂ©quence, Sei Shƍnagon et Murasaki deviennent rivales. Il est possible que Sei Shƍnagon ait quittĂ© la cour quand Murasaki y arrive vers 1006, cinq ans aprĂšs la mort de Teishi. NĂ©anmoins, Murasaki semble l’avoir connue, du moins via les rumeurs dĂ©sobligeantes Ă  la cour de Shƍshi. Elle Ă©crit par exemple :

« La principale caractĂ©ristique de Sei Shƍnagon est son extraordinaire suffisance. Mais examinez les compositions prĂ©tentieuses en lettres chinoises qu’elles dispensaient Ă  la cour, et vous dĂ©couvrirez qu’il s’agit d’une succession d’impairs. Son plus grand plaisir consiste en choquer les gens, et comme chaque excentricitĂ© finit par devenir douloureusement familiĂšre, elle adopte des mĂ©thodes de plus en plus outrageantes pour attirer l’attention. Elle fut autrefois une personne de goĂ»t, raffinĂ©e, mais elle cĂšde dĂ©sormais Ă  tous les excĂšs qu’il lui prend fantaisie d’imaginer, mĂȘme dans les circonstances les plus inappropriĂ©es. Elle aura bientĂŽt perdu toute considĂ©ration, et je ne sais ce qu’il adviendra d’elle quand elle sera trop ĂągĂ©e pour ses tĂąches actuelles. »

— Murasaki Shikibu[13]

Dans l’entourage de Shƍshi gravitent Ă©galement la poĂšte Izumi Shikibu et la romanciĂšre Akazome Emon[14]. De mĂȘme que pour Sei Shƍnagon, Murasaki se montre critique envers elles, Ă©crivant sur la premiĂšre : « Izumi Shikibu est un Ă©crivain amusant, mais il y a quelque chose de fort peu satisfaisant chez elle. Elle possĂšde un don pour dĂ©prĂ©cier ses compositions par une Ă©criture nĂ©gligĂ©e, et en poĂ©sie, un sujet intĂ©ressant ou bien un modĂšle classique Ă  imiter lui est nĂ©cessaire. Il ne me semble pas dĂ©celer la moindre poĂ©sie en elle[15]. »

Murasaki Shikibu, estampe bijin-ga de Tsukioka Yoshitoshi, 1876.

Murasaki donne l’impression d’avoir Ă©tĂ© malheureuse et esseulĂ©e Ă  la cour. Elle abhorre en particulier les courtisans et les princes qui, ivres, prennent des maniĂšres discourtoises. Un fameux incident, souvent rapportĂ©, veut que le poĂšte Fujiwara no Kintƍ se joint un jour Ă  un groupe de femmes pour demander si Murasaki se trouve parmi elles (une allusion Ă  un personnage du Dit du Genji). Cette derniĂšre lui rĂ©pond sĂšchement qu’aucun personnage de son roman n’est prĂ©sent Ă  la cour, montrant son vif dĂ©plaisir. Puis elle en vient Ă  dĂ©crire le dĂźnĂ© : « Le conseiller Takai [
] commença Ă  tirer la robe de dame Hyƍbu en chantant une affreuse chanson, mais son Excellence ne dit mot. Je rĂ©alisai que la soirĂ©e s’inclinait vers l’ivrognerie, si bien que [...] dame Saishƍ et moi-mĂȘme dĂ©cidĂąmes de nous retirer. »[16] D’aprĂšs le journal, Keene dĂ©crit les courtisans Ă  la cour comme des « ivrognes faisant des blagues obscĂšnes et se frottant aux femmes »[16].

Bien que les femmes vivent recluses derriĂšre des paravents ou des panneaux, l’homme le plus influent de la cour a le privilĂšge de pouvoir s’immiscer dans leur intimitĂ©. Murasaki rapporte un incident oĂč Michinaga entre sans retenue dans sa chambre un matin : « Je ne peux voir le jardin depuis ma chambre [
] L’air est humide, et la rosĂ©e perle sur les feuilles. Le ministre des Affaires suprĂȘme [daijƍ-daijin] se promĂšne lĂ  [
] Il jaillit de derriĂšre mon paravent ! Sa noble apparition nous embarrasse et je me sens honteuse (pas encore maquillĂ©e et poudrĂ©e). »[17]

Souvent triste, elle semble donc mise Ă  l’écart, considĂ©rĂ©e comme originale ou timide[16]. Elle Ă©crit sur elle-mĂȘme : « Me considĂšrent-ils rĂ©ellement comme une chose ennuyeuse, je me le demande. Mais je suis ce que je suis [
] [Shƍshi] aussi a souvent fait remarquer qu’elle ne me pense pas ĂȘtre le genre de personne avec qui l’on peut se dĂ©tendre. [
] Je m’éloigne Ă  dessein des autres ; si seulement je pouvais ne pas repousser ceux pour qui j’éprouve un respect sincĂšre. »[16] Son caractĂšre solitaire semble toutefois lui avoir laissĂ© du temps pour Ă©crire malgrĂ© le monde Ă  la cour[16].

Le journal et le Dit du Genji

Peu de mentions sont faites au Dit du Genji dans le journal. Murasaki fait allusion Ă  une lecture pour l’empereur et au choix des papiers colorĂ©s et des calligraphes pour le manuscrit. Une autre anecdote rapporte que Michinaga aurait pris une copie du roman pour le donner Ă  la jeune sƓur de Shƍshi[18]. À l’inverse, le Dit du Genji se rĂ©fĂšre parfois Ă  des scĂšnes du journal ; la description dans le journal de la visite de l’empereur Ichijƍ Ă  Michinaga en 1008, avec son cortĂšge impĂ©rial splendide, correspond presque image par image au cortĂšge du chapitre 33 (Fuji no uraba, lit. Feuillage de la glycine) du roman, selon Haruo Shirane[19].

Style

Calligraphie du Murasaki Shikibu nikki emaki.

À partir du milieu ou de la fin du Xe siĂšcle, les kana deviennent populaires parmi les courtisanes et les dames de la cour, ayant souvent trop peu Ă©tudiĂ© le chinois, discipline gĂ©nĂ©ralement rĂ©servĂ©e aux hommes. En consĂ©quence, de nouveaux genres littĂ©raires apparaissent, comme les journaux intimes (nikki) ; certains contiennent principalement de la poĂ©sie, d’autres sont des carnets de voyage, mais le thĂšme le plus commun reste la vie Ă  la cour, notamment les intrigues et les romances[20].

Les auteurs privilĂ©gient souvent les personnes haut placĂ©es de la cour : Murasaki consacre une partie de son journal Ă  des descriptions des cĂ©rĂ©monies impĂ©riales, comme celles en l’honneur du prince et futur empereur Go-Ichijƍ. D’autres sections sont rĂ©digĂ©es dans le genre Ă©pistolaire, oĂč sont rapportĂ©es ses relations avec les dames de compagnie au palais[21].

Peu de dates sont prĂ©cisĂ©es dans l’Ɠuvre, pas plus que d’informations sur les habitudes de travail de l’auteur ; Donald Keene remarque ainsi qu’il ne s’agit pas d’un « carnet d’écrivain ». Mais Ă  la diffĂ©rence d’autres chroniques officielles de l’époque, tenues par des historiens, le journal de Murasaki offre un contenu historique inĂ©dit, transcrivant le point de vue interne et les impressions sur le vif d’une courtisane. Cela confĂšre plus de vie aux Ă©vĂ©nements que le style abrupt des Ă©crits officiels[10]. Keene estime que le journal donne l’image d’une femme perspicace mais solitaire, ce qui explique une certaine mise Ă  l’écart. Murasaki critique trĂšs fortement les autres dames de compagnie, perçant leur rĂ©elle personnalitĂ© sous les apparences, qualitĂ© que Keene croit bĂ©nĂ©fique pour une romanciĂšre, mais peut-ĂȘtre contreproductive dans la vie en petite sociĂ©tĂ©[16]. Finalement, cette Ɠuvre est un recueil d’informations sur la vie Ă  la cour impĂ©riale de Heian, et bien qu’il n’en demeure que des fragments abĂźmĂ©s, elle est considĂ©rĂ©e comme une piĂšce importante de la littĂ©rature japonaise[10].

Traductions

Une des premiĂšres traductions de l’Ɠuvre est celle d’Annie Shepley Omori et Kochi Doi en anglais, datant de 1920 et publiĂ©e conjointement avec les journaux de Izumi Shikibu et de Sarashima sous le titre Diaries of Court Ladies of Old Japan. En français, la premiĂšre traduction revient Ă  RenĂ© Sieffert en 1978 : Journal de Murasaki-Shikibu, aux Publications orientalistes de France. Une autre version par Marc LogĂ© a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e en 1998 ; il s’agit en fait d’une traduction depuis l’anglais du travail d’Annie Shepley Omori et Kochi Doi, titrĂ©e Journaux des dames de cour du Japon ancien (aux Ă©ditions Picquier).

Peintures

DĂ©tail du Murasaki Shikibu nikki emaki oĂč des nobles ivres importunent les dames.

Un emaki du XIIIe siĂšcle, le Murasaki Shikibu nikki emaki, illustre le journal de Murasaki : il s’agit de longs rouleaux de papier narrant au lecteur une histoire au moyen de textes et de peintures, originaires de Chine et trĂšs populaires du XIIe au XIVe siĂšcle[22]. Si les peintures suivent les rĂ©cits et anecdotes du journal, la nostalgie y transparaĂźt plus car, Ă  l’époque de Kamakura, la culture de la cour de Heian apparaissait dĂ©jĂ  comme un « Ăąge d’or perdu »[23]. L’emaki appartient au style du yamato-e classique (proche par exemple du Genji monogatari emaki), avec des couleurs appliquĂ©es sur toute la surface du rouleau, rehaussĂ©es de poudre d’argent et d’or. Toutefois, le style pictural du XIIIe siĂšcle peut Ă©galement ĂȘtre notĂ© par la lĂ©gĂšretĂ© des tons, l’expression des visages et l’aspect plus dĂ©coratifs[24]. L’Ɠuvre semble avoir Ă©tĂ© commanditĂ©e par l’empereur Go-Horikawa vers 1233, conjointement Ă  une nouvelle version illustrĂ©e (disparue depuis) du Dit du Genji[23]. De nos jours, seuls quatre rouleaux subsistent dans divers musĂ©es ou collections privĂ©es au Japon, mais la disparitĂ© chronologique par rapport au journal laisse Ă  penser que l’ensemble original devait en compter bien plus[25].

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

Sources primaires
Sources secondaires
  • (en) Louis FrĂ©dĂ©ric, Japan Encyclopedia, Harvard University Press, , 1108 p. (ISBN 0-674-01753-6, lire en ligne) (cf. l’édition originale en français : Le Japon : Dictionnaire et Civilisation, Laffont (ISBN 9782221067642))
  • (en) Kenneth G. Henshall, A History of Japan : From Stone Age to Superpower, St. Martin’s Press, , 242 p. (ISBN 978-0-312-21986-4)
  • (en) Donald Keene, Travelers of a Hundred Ages : The Japanese as revealed through 1000 years of diaries, Columbia University Press, , 468 p. (ISBN 978-0-231-11437-0)
  • (en) Amy Lowell, Diaries of Court Ladies of Old Japan : Introduction, Houghton Mifflin, , 195 p.
  • (en) Helen Craig McCullough, Classical Japanese Prose : An Anthology, Stanford University Press, , 578 p. (ISBN 978-0-8047-1628-4, lire en ligne)
  • (en) Chieko Irie Mulhern, Heroic with Grace : Legendary Women of Japan, M.E. Sharpe, , 326 p. (ISBN 978-0-87332-552-3, lire en ligne)
  • (en) Edwin O. Reischauer, Japan : The Story of a Nation, McGraw-Hill, , 4e Ă©d., 401 p. (ISBN 978-0-07-557074-5)
  • (en) Haruo Shirane, The Bridge of Dreams : A Poetics of "The Tale of Genji", Stanford University Press, , 312 p. (ISBN 978-0-8047-1719-9, lire en ligne)
  • (en) Haruo Shirane, Traditional Japanese Literature : An Anthology, Beginnings to 1600, Columbia University Press, , 1255 p. (ISBN 978-0-231-13697-6, lire en ligne)
  • (en) The Japan Book : A Comprehensive Pocket Guide, Kƍdansha International, , 160 p. (ISBN 978-4-7700-2847-1, lire en ligne)
  • (en) Marian Ury, « The Real Murasaki », Monumenta Nipponica, vol. 38, no 2,‎ , p. 175-189
  • (en) Arthur Waley, The Tale of Genji : A Novel in Six Parts : Introduction, Modern Library, , p. VII

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « The Diary of Lady Murasaki » (voir la liste des auteurs).
  1. Kodansha 2004, p. 475, 120
  2. Shirane 2008, p. 113-114
  3. Henshall 1999, p. 24-25
  4. Shirane 1987, p. 215
  5. (en) Tyler Royall, « Murasaki Shikibu: Brief Life of a Legendary Novelist - c. 973 – c. 1014" », Harvard Magazine,‎ (lire en ligne)
  6. Shirane 2008, p. 293
  7. McCullough 1990, p. 15-16
  8. Keene 1999, p. 40-41
  9. Waley 1960, p. VII
  10. Keene 1999, p. 42-44
  11. Ury 1983, p. 175-188
  12. Mulhern 1991, p. 86.
  13. Waley 1960, p. XIII.
  14. Mulhern 1991, p. 156.
  15. Murasaki Shikibu, traduit dans Waley 1960, p. XII.
  16. Keene 1999, p. 44-46
  17. Waley 1960, p. 10.
  18. Keene 1999, p. 46-47.
  19. Shirane 1987, p. 221.
  20. Reischauer 1990, p. 29.
  21. Shirane 2008, p. 448-449.
  22. Christine Shimizu, L’art japonais, Flammarion, coll. « Tout l’art », , 448 p. (ISBN 978-2-08-013701-2), p. 193
  23. (en) Penelope E. Mason et Donald Dinwiddie, History of Japanese art, Pearson Prentice Hall, , 432 p. (ISBN 978-0-13-117601-0), p. 182-183.
  24. Miyeko Murase (trad. de l'anglais), L’art du Japon, Paris, Éditions LGF - Livre de Poche, coll. « La PochothĂšque », , 414 p. (ISBN 2-253-13054-0), p. 164-165.
  25. (en) Hideo Okudaira (trad. Elizabeth Ten Grotenhuis), Narrative picture scrolls, vol. 5, Weatherhill, coll. « Arts of Japan », , 151 p. (ISBN 978-0-8348-2710-3), p. 131.
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