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Jean de Nanton

Jean de Nanton est un archevêque de Sens du XVe siècle, élu après la mort d'Henri de Savoisy () alors que la ville et la province se trouvaient sous la domination des Anglais, mort en détention au prieuré de Joigny le .

Jean de Nanton
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Biographie
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Conflit

Origines et avènement

Il est neveu d'un autre Jean de Nanton [1] (ou Jean de Nant), archevêque de Vienne de 1405 à 1423, puis évêque de Paris alors que la capitale était gouvernée par les Anglais († ). Cette famille tire son nom d'un ancien château situé en Bourgogne, dans le diocèse de Chalon, non loin de Cluny[2]. L'archevêque de Sens était le fils d'un troisième Jean de Nanton, seigneur de Cruzilles, de Pizay et de Noblens, co-seigneur de Nanton, frère aîné de l'évêque de Paris. Son propre frère aîné, héritier des titres familiaux, s'appelait Étienne de Nanton.

La ville de Sens, auparavant aux mains des Armagnacs, fut prise par les Anglo-Bourguignons le (quelques jours après le mariage, célébré à Troyes le par l'archevêque Henri de Savoisy, du roi d'Angleterre Henri V et de Catherine de Valois). Henri de Savoisy, auparavant exclu de sa métropole parce que tenant du duc de Bourgogne, y fut alors intronisé en présence de deux rois, deux reines et du duc Philippe le Bon. Mais la guerre civile avec les partisans du dauphin Charles (roi Charles VII à partir du ) se poursuivait. Henri de Savoisy lui-même, abandonnant Sens, se réfugia dans le château fortifié de cousins à Seignelay, où il mourut le .

À cette date une bonne part du chapitre de la cathédrale, chargé de l'élection des archevêques, avait fui. Jean de Nanton, qui était depuis 1409 abbé de Saint-Germain d'Auxerre, fut élu par un petit groupe de chanoines sur la présentation des autorités anglo-bourguignonnes. Il ne fit son entrée officielle dans la ville que le . Du fait de la guerre qui faisait toujours rage, on s'accorda pour simplifier et sécuriser le cérémonial : en principe, le nouvel arrivant devait s'arrêter avec sa suite, la veille de son intronisation, dans l'abbaye Saint-Pierre-le-Vif, où l'abbé devait héberger tout le monde pendant vingt-quatre heures ; en cette occasion, on décida que la cérémonie de l'accueil aurait lieu en une église dépendant du monastère située à l'intérieur des murs de la ville, Saint-Pierre-du-Donjon ; un acte fut dressé entre l'archevêque et l'abbé Dreux de Montaudier[3].

Le concile de Paris de 1429

Auparavant, l'archevêque élu avait tenu à Paris, alors sous administration du duc de Bedford, un concile de sa province ecclésiastique. Quatre de ses suffragants étaient présents : Jacques du Chastelier, évêque de Paris, Jean l'Aiguisé, évêque de Troyes, Jean de Briou, évêque de Meaux, et Jean de Frétigny, évêque de Chartres, tous élus sur la présentation du roi d'Angleterre ou du duc de Bourgogne (sauf peut-être Jean l'Aiguisé). Les trois autres suffragants s'étaient fait excuser : Jean de Saint-Michel, évêque d'Orléans, ennemi des Anglais et assiégé par eux dans sa ville[4], Jean de Corbie, évêque d'Auxerre, et Robert de Dangueil, évêque de Nevers (ces deux derniers pour des motifs ignorés). Le concile fut ouvert le au prieuré Saint-Éloi (dans l'Île de la Cité) et il fut conclu le suivant[5].

Ce concile avait été convoqué par le duc de Bedford lui-même. Il n'en protesta pas moins, sous l'inspiration principale de Jean l'Aiguisé, contre les mesures financières prises à l'encontre du clergé français par le gouverneur anglais : celui-ci s'était entendu en 1428 avec le pape Martin V pour le taxer d'un double décime, l'un perçu par les Anglais pour la guerre contre Charles VII, l'autre perçu par le Saint-Siège pour les dépenses d'une croisade projetée contre les Hussites[6]. Le concile déclara solennellement en appeler au pape qui aurait été mal informé, et si justice n'était pas rendue en cour de Rome, au prochain concile général. Contre Bedford, il alla jusqu'à la menace : « Le régent doit réfléchir aux misères et aux calamités dont le Seigneur n'a jamais manqué de frapper les princes qui ont voulu opprimer ainsi son Église rachetée de son précieux sang : les uns ont péri de mort violente, les autres ont été réduits en captivité, d'autres enfin ont été dépossédés des plus puissants royaumes »[7].

On adopta aussi dans ce concile de nouveaux statuts pour la province, divisés en quarante-et-un articles. Les sept premiers regardent le service divin (dont l'interdiction des jeux accompagnés d'actions indécentes pendant les fêtes des saints[8]). Les quatre suivants portent sur les devoirs des évêques (entre autres pour le choix des titulaires de bénéfices). Les neuf suivants réforment les monastères des ordres bénédictin et augustin. Ensuite il y en a cinq sur la réforme des mœurs ecclésiastiques (interdiction d'aller au cabaret, de trafiquer, de jouer publiquement en chemise à la paume, de porter des habits rouges ou verts, d'avoir des concubines). Les seize autres articles concernent les laïcs (interdiction des « œuvres serviles » les dimanches et fêtes, nommément l'exercice des métiers de barbier et de maréchal-ferrant, peines renouvelées contre les blasphémateurs, notamment ceux qui y seront pris pour la troisième fois, nécessité de la confession aux cinq grandes fêtes de l'année et au commencement du Carême...).

Fin de carrière

Après l'expulsion de la garnison anglaise de la ville de Sens (janvier 1430)[9], Jean de Nanton fut arrêté par des gens d'armes du roi Charles VII et enfermé dans le prieuré de Joigny, où il serait mort des mauvais traitements qui lui furent infligés. Cette arrestation se fit dans des circonstances peu nettes[10]. Il fut inhumé dans l'église abbatiale de l'abbaye cistercienne de Bellevaux en Franche-Comté, où d'autre membres de sa famille avaient leur sépulture[11].

Références

  1. http://jean.gallian.free.fr/comm2/Images/genealog/nanton/p1a.pdf
  2. Jean-Antoine Pithon-Curt, Histoire de la noblesse du Comté-Venaissin (sic), d'Avignon et de la principauté d'Orange..., 4 vol., Paris, David jeune, 1743-50 (rééd. Paris, Lafitte, 1970), t. II, p. 288. Une branche de cette famille s'installa dans la région de Valréas à la fin du XVIIe siècle.
  3. Archives départementales de l'Yonne, G 1, pièce 7. Voir Véronique Julerot, « La première entrée de l'évêque : réflexions sur son origine », Revue historique, n° 639, 2006, p. 635-675 (note 69). L'abbé Dreux de Montaudier fut prieur de Saint-Loup en 1420, abbé de Saint-Pierre-le-Vif le 28 septembre 1422, ensuite abbé de Saint-Germain-des-Prés de 1436 à 1439 (Gall. Christ., t. XII, col. 143).
  4. Le siège d'Orléans, secourue par Jeanne d'Arc, eut lieu du 12 octobre 1428 au 8 mai 1429.
  5. Siméon Luce, Jeanne d'Arc à Domrémy. Recherches critiques sur les origines de la mission de la Pucelle, Paris, H. Champion, 1886, p. 221-224. Michel Félibien (Histoire de la ville de Paris, Paris, G. Desprez et J. Desessartz, 1725, t. II, p. 810-811) dit que l'ouverture s'en fit le 1er mars, troisième dimanche du Carême, et qu'auparavant Jean de Nanton vint le 26 février au Parlement de Paris, cour qui lui recommanda la fidélité au « roi de France et d'Angleterre » (Henri VI) ; il dit aussi que la clôture eut lieu le 23 avril au collège des Bernardins. Dans l'inventaire des Archives départementales de l'Yonne, on lit : « Statuts du concile provincial de Sens, tenu au collège Saint-Bernard, à Paris, sous la présidence de Jean de Nanton, archevêque de Sens, assisté de ses suffragants ».
  6. De plus, une convention antérieure entre Bedford et le Saint-Siège, entérinée par une ordonnance du 26 novembre 1425 (enregistrée par le Parlement de Paris le 11 mars 1426), avait octroyé à la cour de Rome la collation des évêchés et la concession des trois quarts des bénéfices, un quart seulement étant maintenu aux ordinaires. Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, en avait négocié l'enregistrement par le Parlement.
  7. Siméon Luce, op. cit., p. 223.
  8. « La plus scandaleuse de toutes était la Fête des Fous, qu'on voit établie dans l'Église de Paris, et fixée au jour de la Circoncision, dès la fin du douzième siècle. Les clercs inférieurs choisissaient un d'entre eux qu'il revêtaient d'habits pontificaux et appelaient l'évêque des Fous. Après l'avoir fait officier et lui avoir servi dans l'église un grand repas mêlé de chansons et de dames, on le promenait par la ville, monté sur un char, avec un cortège qui amusait le peuple par des farces souvent très licencieuses ».
  9. Jeanne d'Arc et son armée se présentèrent devant la ville, près de la porte Saint-Didier, le 16 septembre 1429. Mais la ville était toujours tenue par une garnison anglaise, et l'armée passa son chemin en allant franchir l'Yonne un peu en aval. Cf. la plaque apposée en 1929 sur l'église Saint-Didier.
  10. Jean Jouvenel des Ursins, A, A, A, Nescio loqui (in Procès en nullité de la condamnation de Jeanne d'Arc, éd. Pierre Duparc, Société de l'Histoire de France, t. I, p. 484) : « En la conqueste que fist le roy, a Sens fut prins l'arcevesque de Sens qui lors estoit par aucuns des gens du roy, qui estoit viel et ancien ; et pour ce que il ne avoit riens et que il ne povoit payer finance on le tint tant et si longuement par prison que il ala de vie a trespassement ; et en fut parlé devers le roy, mais on n'en tenoit pas compte. Et disoient aucuns que il tenoit le parti des ennemis du roy ; qui estoit assez cause de luy faire commandement de vuider ce royaume, mais de le tenir prisonnier et mettre a finance il n'y a point de raison ».
  11. Bibliothèque municipale de Besançon, Ms. Baverel 46, p. 73 lire en ligne.

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