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Inuksuk

Un inuksuk, ou inukshuk, (/i.nuk.suk/, de l'inuktitut : ᐃᓄᒃᓱᒃ, pluriel : ᐃᓄᒃᓱᐃᑊ, inuksuit ; appelĂ© inukhuk en inuinnaqtun, iñuksuk en iñupiaq, inussuk en groenlandais) est un empilement de pierres (ou cairn) construit par les peuples inuit et yupik dans les rĂ©gions arctiques d'AmĂ©rique du Nord, depuis l'Alaska jusqu'au Groenland, en passant par l'Arctique canadien. Sa forme et sa taille peuvent varier.

Inuksuk est un terme inuktitut composĂ© des morphĂšmes inuk (« ĂȘtre humain ») et -suk (« substitut, agissant Ă  la place de »), signifiant « ce qui a la capacitĂ© d'agir comme un ĂȘtre humain »[1].

Par extension, le mot inuksuk en est venu Ă  dĂ©signer, dans l’art inuit, Ă  partir des annĂ©es 1960[2], puis dans la culture populaire, une construction de pierres empilĂ©es adoptant une forme humaine. Un tel monument anthropomorphe est, en inuktitut, plutĂŽt considĂ©rĂ© comme un inunnguaq (pluriel : inunnguait), signifiant « ce qui ressemble Ă  un ĂȘtre humain[3] ».

Fonctions

Selon Taamusi Qumaq : « Les inuksuk ont Ă©tĂ© utilisĂ©s pour repĂ©rer les endroits oĂč les caribous marchaient en grand nombre. Quand il y avait plusieurs inuksuk ensemble, on les appelait des « Nalluni». Ils indiquaient le point sur la rive vers lequel les caribous nagent en traversant un lac. Quand les caribous nageaient avant qu'ils arrivent au rivage, on commençait Ă  attaquer en les piquant avec un harpon[4] ».

Inuksuit faisant partie d'un systÚme de rabattage de caribous situé sur la rive nord des Dismal Lakes (en), photographie prise en par Rudolph Martin Anderson lors d'une mission d'exploration dans les Territoires du Nord-Ouest (Canada).

Chez les Inuits, les inuksuit ont jouĂ© un rĂŽle important dans la chasse traditionnelle au caribou. Ils Ă©taient disposĂ©s, comme des Ă©pouvantails de pierre pour attirer les caribous dans un cul de sac, lieu d'embuscade sur une colline. Les chasseurs, armĂ©s d'arcs et de flĂšches, Ă©taient cachĂ©s derriĂšre les inuksuit. Les femmes et les enfants servaient de rabatteurs. Les inuksuit pouvaient aussi servir de point de repĂšre ou de cairn identifiant la position d'une cache pour la nourriture. Les inuksuit servaient aussi Ă  marquer les limites d’un territoire. Les inuksuit servaient de repĂšre pour les inuits ; son bras le plus long indiquait la position du village ou de la ville la plus proche. Si une corne de cervidĂ© est posĂ©e sur l'inuksuk, de la nourriture est enfouie sous un tas de pierre devant l'inuksuk.

Michel Noël, dans Nunavimiut : art inuit- inuit art, voit dans ces constructions un geste artistique :

« VoilĂ  un autre mystĂšre des rĂ©gions nordiques. Certains croient que les inuksuit sont des balises, des phares que les ancĂȘtres inuit ont Ă©rigĂ©s pour indiquer une route, signaler l’embouchure d’une riviĂšre , annoncer un lieu propice pour monter une tente, chasser, pĂȘcher, s’approvisionner en eau fraĂźche.

Les Inuit auraient pu tout simplement empiler des pierres les unes sur les autres. Mais non! Ils ont crĂ©Ă© des gĂ©ants de roc. Ils ont Ă©rigĂ©s des inuksuit solides, durables qui dĂ©montrent sans l’ombre d’un doute leur crĂ©ativitĂ©, leur sens artistique et leur fiertĂ©. Les sculpteurs ont fait un choix judicieux de formes, de couleurs, de textures. Ils ont assorti, agencĂ©, Ă©quilibrĂ© les pierres pour crĂ©er de savantes mosaĂŻques qui plaisent et Ă©meuvent[5]. »

De nos jours, il en subsiste encore sur les collines, dispersés ici et là sur la terre gelée, visibles à des kilomÚtres. Les voyageurs peuvent les utiliser comme des repÚres directionnels.

Usage actuel

Un inukshuk inauguré en devant l'HÎtel du Parlement à Québec, « en signe d'amitié entre la nation québécoise et la nation inuite[6] ».

L'inukshuk est un des thĂšmes de l'art inuit, entre l'abstrait et le figuratif.

Depuis la fin des années 1990, l'inukshuk s'est progressivement affirmé comme symbole des Inuits du Canada[7]. En 1999, à la suite d'une consultation populaire, il a été choisi pour figurer sur le drapeau et les armoiries du territoire canadien nouvellement créé du Nunavut[8], dont la population, selon le recensement fédéral canadien de 2006, est composée à 83,5 % d'Inuits[9]. Un inukshuk apparaßt également depuis 2005 sur le drapeau du Nunatsiavut, une région à autonomie limitée du Labrador gouvernée par les Inuits, qui représentent 89,6 % des habitants de cette région[10].

Une « interprĂ©tation contemporaine de l’inukshuk traditionnel » a aussi Ă©tĂ© choisie pour emblĂšme des Jeux olympiques d'hiver de 2010 Ă  Vancouver[11]. NommĂ© Ilanaaq, un mot signifiant « ami » en inuktitut, le nouveau logo a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© par le comitĂ© organisateur des jeux lors de son dĂ©voilement, le , comme un symbole « d'amitiĂ©, d'hospitalitĂ©, de dynamisme et d'esprit d'Ă©quipe », ainsi que des « vastes paysages » du Canada[12]. SĂ©lectionnĂ© parmi plus de 1 600 propositions par un jury d’experts internationaux, le concept gagnant a Ă©tĂ© Ă©laborĂ© par Elena Rivera MacGregor et Gonzalo Alatorre du Rivera Design Group, de Vancouver.

La construction d'un inukshuk peut ĂȘtre assimilĂ©e Ă  une Ɠuvre de land art et Ă  ce titre de nombreux amateurs se sont lancĂ©s dans l'Ă©dification de ces statues de pierres[13].

L'inuksuk dans la littérature

Notes et références

  1. Hallendy 2000, p. 22, 46 : « to act in the capacity of a human ». La traduction française est celle adoptée par Béatrice Collignon dans son compte rendu critique de l'ouvrage de Hallendy (Collignon 2002, p. 192).
  2. James A. Houston, Eskimo Prints, Barre Publishers, Barre (Mass.), 1967, p. 108.
  3. Hallendy 2000, p. 46 : « in the likeness of a human », traduction française de Collignon 2002, p. 192.
  4. Tamusi Qumaq : Inuksuit.
  5. Michel Avataq Cultural Institute, Nunavimiut : art inuit, Roussan, [1992?] (ISBN 2-921212-20-X et 978-2-921212-20-5, OCLC 36338025, lire en ligne)page 79.
  6. Bureau du premier ministre du QuĂ©bec, Le premier ministre du QuĂ©bec dĂ©voile un inuksuk sur les terrains de l’HĂŽtel du Parlement, communiquĂ© de presse, 24 octobre 2002 (page consultĂ©e le 26 aoĂ»t 2007).
  7. Graburn 2004.
  8. Gouverneur général du Canada, Création des armoiries et du drapeau du Nunavut [page web], page mise à jour le 30 avril 2009 (consultée le 20 août 2009).
  9. DonnĂ©es utilisĂ©es : Population ayant une identitĂ© inuite - rĂ©ponse unique : 24 640 ; Population totale : 29 474, d'aprĂšs Statistique Canada, Profil de la population autochtone de 2006 > Nunavut [en ligne], page mise Ă  jour le 24 juillet 2009 (consultĂ©e le 19 aoĂ»t 2009).
  10. DonnĂ©es utilisĂ©es : Population ayant une identitĂ© inuite - rĂ©ponse unique : 2 160 ; population totale : 2 410, d'aprĂšs Statistique Canada, Profil de la population autochtone de 2006 > Nunatsiavut [en ligne], page mise Ă  jour le 24 juillet 2009 (consultĂ©e le 19 aoĂ»t 2009).
  11. ComitĂ© d'organisation Vancouver 2010 (COVAN), Ilanaaq – EmblĂšme des Jeux olympiques d’hiver de 2010 Ă  Vancouver [page web] (page consultĂ©e les 21 aoĂ»t 2009 et 17 fĂ©vrier 2010).
  12. Comité d'organisation Vancouver 2010 (COVAN), Présentation de ILANAAQ : l'emblÚme des Jeux olympiques de 2010 à Vancouver rend hommage au Canada, communiqué de presse, 23 avril 2005 (page consultée les 21 août 2009 et 17 février 2010).
  13. https://picasaweb.google.com/117360017787353167762/Inukshuk?noredirect=1# Galerie en ligne.

Annexes

Article connexe

Ouvrages

Articles

  • (es) JosĂ© AndrĂ©s Alonso de la Fuente, « Los inuksuit. Otra forma de ver el mundo », Revista espanola de antropologĂ­a americana, vol. 36, no 1,‎ , p. 205-215 (ISSN 0556-6533). [Lire en ligne] [PDF]
  • (es) Santiago David DomĂ­nguez-Solera, « "Inuksuit" en el oeste de Groenlandia: sĂ­mbolo y huella de la relaciĂłn ancestral de los inuit con el espacio », Revista Española de AntropologĂ­a Americana, vol. 44, no 1,‎ , p. 151–166 (ISSN 1988-2718, DOI 10.5209/rev_REAA.2014.v44.n1.47638, lire en ligne).
  • (en) Christopher M. Fletcher, « Inuit Symbols and Canadian Nationhood in the Imagined North », Images of the North. Histories, Identities, Ideas., Amsterdam/New York, Rodopi Publishers,‎ , p. 173-189. [Extraits (Google Livre)] (ISBN 978-90-420-2528-8)
  • (en) Christopher Fletcher, « Security, Sovereignty, Symbol: The Inuksuk in Global Position », dans Michelle Daveluy, Francis LĂ©vesque, et Jenanne Ferguson, Humanizing Security in the Arctic, CCI Press, (lire en ligne), p. 147-160.
  • (en) Nelson Graburn, « Inuksuk : Icon of the Inuit of Nunavut », Études / Inuit / Studies, vol. 28, no 1 « Art et reprĂ©sentation / Art and representation »,‎ , p. 69-82 (ISSN 0701-1008 et 1708-5268). [Lire en ligne] [html]
  • (en) Norman Hallendy, « Inuksuit : Semalithic Figures Constructed by Inuit in the Canadian Arctic », Threads of Arctic Prehistory : Papers in Honour of William E. Taylor Jr., Hull, Canadian Museum of Civilization,‎ , p. 385-408. (ISBN 066050751X et 9780660507514)
  • (en) Scott Heyes, « Protecting the Authenticity and Integrity of Inuksuit within the Arctic Milieu », Études / Inuit / Studies, vol. 26, no 2 « Populations et migrations / Populations and Migrations »,‎ , p. 133-156 (ISSN 0701-1008 et 1708-5268). [Lire en ligne] [html]
  • (en) Lynne McNeill, « "Traces of Coming and Going": The Contemporary Creation of Inuksuit on the Avalon Peninsula », Material History Review / Revue d'histoire de la culture matĂ©rielle, no 60,‎ , p. 48-57 (ISSN 1183-1073). [Lire en ligne] [PDF]
  • (en) Jeffrey Ruhl, « Inukshuk Rising : Iconification, Brand Canada and Vancouver 2010 », Canadian Journal of Globalization, vol. 1, no 1,‎ , p. 25-31. [Lire en ligne] [PDF]

Liens externes

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