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Initiative populaire fédérale suisse « Financer l'avortement est une affaire privée »

L'initiative populaire « Financer l'avortement est une affaire privée - Alléger l'assurance-maladie en radiant les coûts de l'interruption de grossesse de l'assurance de base » est une initiative populaire suisse, refusée par le peuple le .

Initiative populaire fédérale
Financer l'avortement est une affaire privée - Alléger l'assurance-maladie en radiant les coûts de l'interruption de grossesse de l'assurance de base

Déposée le
Déposée par Ad-hoc

Contre-projet non
Votée le
Participation 56,42 %
Résultat : rejetée[NB 1]
Par le peuple non (par 69,8 %)
Par les cantons non (par 20 5/2)[NB 2]

Contenu

L'initiative propose de modifier l'article 117 de la Constitution fédérale pour y ajouter un troisième alinéa spécifiant que les coûts liés à l'avortement ne sont pas pris en charge par l'assurance maladie obligatoire. Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement

Contexte historique

En Suisse, l'avortement « après la douzième semaine suivant le début des dernières règles » est interdit et considéré comme un délit selon les articles 118 à 121 du code pénal[2]. Entrés en vigueur au , ces articles sont le fruit d'âpres négociations ; en particulier, l'unique exception « en vue d'écarter un danger impossible à détourner autrement et menaçant la vie de la mère ou menaçant sérieusement sa santé d'une atteinte grave et permanente » est jugée à la fois insuffisante et trop permissive.

Le , une initiative « concernant la décriminalisation de l'avortement » est déposée à la Chancellerie fédérale pour obtenir une dépénalisation totale de l'interruption de grossesse. De nombreuses réactions politiques vont alors se produire dans le pays, dont une initiative du canton de Neuchâtel demandant d'abroger les articles du code pénal sur l'avortement et, à l'inverse, une pétition « Oui à la vie - Non à l'avortement » adressée au gouvernement fédéral avec 180 000 signatures et demandant le maintien et le renforcement de l'interdiction de l'avortement[3].

En parallèle, le Conseil fédéral confie dès à une commission d'experts la tâche d'examiner cette question ; incapable de trancher, cette commission rend en 1974 un rapport présentant plusieurs solutions possibles sans en recommander une en particulier. Le gouvernement présente alors au parlement, comme contre-projet indirect à l'initiative, une proposition de loi adoucissant les peines liées à l'avortement et prévoyant certains cas (médicaux, sociaux, éthiques ou eugéniques) dans lesquels une interruption de grossesse est tolérée.

Les deux chambres du parlement vont, dans les deux années suivantes, s'opposer sur la manière de régler l'interruption non punissable de la grossesse. Alors que le projet de loi fait la navette entre le Conseil national et le Conseil des États, une nouvelle initiative est lancée pour autoriser l'avortement pendant les 12 premières semaines de grossesse ; cette nouvelle initiative, une fois son aboutissement constaté par la Chancellerie fédérale, conduit les auteurs de la première à retirer leur texte en faveur de cette proposition[4]. Malgré ce soutien, l'initiative pour le délai est refusée en votation populaire le [5]. Une nouvelle initiative appelée « Droit à la vie » connaît le même sort le [6].

Les travaux fédéraux concernant la loi sur la protection de la grossesse se poursuivent en parallèle au parlement. La loi est finalement adoptée le ; si elle continue à considérer l'avortement comme un délit, elle prévoit également plusieurs exceptions dans le domaine médical, social, juridique (si la grossesse est le fruit d'un acte contraint) ou en cas de lésions de l'enfant[7]. Soumise au référendum, cette loi est rejetée en votation le [8].

Alors que de fait, entre 1980 et 1998, seules 5 condamnations pénales sont prononcées dans le pays pour une interruption de grossesse non autorisée[9], la Commission des affaires juridiques du Conseil national publie un premier rapport en vue d'une modification de la loi en faveur d'un délai de 12 semaines où l'avortement serait autorisé. Une initiative « pour la mère et l'enfant » est lancée en réaction à ce rapport ; cette initiative est refusée en votation par plus de 80 % des votants le , alors que, le même jour, une modification de la loi autorise le remboursement des frais liés aux cas autorisés d'interruptions de grossesse. C'est cette modification qui est attaquée par la présente initiative, qui demande que ces coûts soient pris en charge par une assurance complémentaire.

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative

La récolte des 100 000 signatures nécessaires débute le . Le , l'initiative est déposée à la Chancellerie fédérale, qui constate son aboutissement le [10].

Discussions et recommandations des autorités

Le Conseil fédéral[11] et le parlement[12] recommandent tous deux le rejet de l'initiative. Dans son message à l'Assemblée fédérale, le Conseil fédéral relève que la suppression du remboursement de l'interruption de grossesse par l'assurance-maladie obligatoire aurait des conséquences négatives sur le plan social (dû a un manque de clarté des textes définissant les cas de remboursement) et sur le plan sanitaire, avec un risque accru d'interruptions de grossesse pratiquées en dehors du cadre légal.

Les recommandations de vote des partis politiques sont les suivantes[13] :

Résultats

Soumise à votation le , l'initiative est rejetée par tous les cantons, à l'exception de celui d'Appenzell Rhodes-Intérieures[NB 2] et par 69,8 % des suffrages exprimés[14]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par canton pour ce vote[14] :

Notes et références

Notes

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».
  3. Les sections fribourgeoise, grisonne et genevoise de l'UDC laissent la liberté de vote, alors que les sections jurassienne et vaudoise recommandent le rejet de l'initiative

Références

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. « Articles 118 et ss. du Code pénal suisse », sur admin.ch (consulté le )
  3. « Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à une loi fédérale sur la protection de la grossesse, ainsi qu'au nouveau régime de répression de l'interruption de la grossesse » (7 octobre 1974) de la Feuille fédérale référence FF 1974 II 706
  4. « Publications des départements et d'autres administrations de la Confédération » (16 mai 1977) de la Feuille fédérale référence FF 1976 I 847
  5. « Votation no 274 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  6. « Votation no 330 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  7. « Loi fédérale sur la protection de la grossesse et le caractère punissable de son interruption » (13 octobre 1977) de la Feuille fédérale référence FF 1977 III 92
  8. « Votation no 285 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. Selon la statistique des jugements prononcés en vertu des art. 118 ss CP établie par l'[[Office fédéral de la statistique]], citée dans le Message du Conseil fédéral
  10. « Initiative populaire fédérale 'Financer l'avortement est une affaire privée - Alléger l'assurance-maladie en radiant les coûts de l'interruption de grossesse de l'assurance de base' » (consulté le )
  11. (9 mai 2012) de la Feuille fédérale référence FF 2012 4991
  12. [PDF] Chancellerie fédérale, Votation populaire du 9 février 2014 Explications du Conseil fédéral, (lire en ligne), p. 25-38
  13. Consignes de vote des partis actuellement représentés au parlement et des organisations
  14. « Votation no 579 - Résultats finaux officiels provisoires », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
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