Gueules
Le gueules[1] est un émail héraldique de couleur rouge. En représentation monochrome, il est symbolisé par des hachures verticales, selon la méthode attribuée au jésuite héraldiste Silvester Petra Sancta[2], publiée en 1638[3].
Le gueules est appelé gules en héraldique anglaise (au vocabulaire d'origine anglo-normande), et keel (soit « gorge ») en héraldique néerlandaise.
Histoire
Cet émail a d'abord été appelé par les hérauts médiévaux vermillon, couleur de sang et d’écarlate, rouge. Parallèlement, la couleur rouge était désignée par sinople, mot originellement dérivé de la ville de Sinop (port de Paphlagonie), dont la terre de couleur rouge était employée dans les fresques (voir sinopia). La désignation de l'émail change de sens au milieu du XIVe siècle , et sinople ne désigne plus, depuis lors, que le vert. Durant le XIIe siècle et le XIIIe siècle, ce qui va devenir le "gueules"'est l'émail le plus employé dans les armoiries : l'historien médiéviste Michel Pastoureau le recense dans 60 % des armoiries européennes[4].
L'utilisation du terme « gueules » apparaît dans les armoriaux du XIIIe siècle, et devient générale au siècle suivant, Certains auteurs, comme Jouffroy d'Eschavannes, attribuent l'origine du terme à un mot d'origine persane gul ou ghiul (گل), qui désigne un rose pâle. L'étymologie est douteuse, et le rapprochement lointain, alors que le mot « gueules » était couramment utilisé dans le vocabulaire des teinturiers pour désigner la gorge de petits mustélidés (fouine, martre), et par extension, les fourrures faites à partir de celles-ci. Le mot est même utilisé dans le langage courant, témoin cette lettre de Bernard de Clairvaux à l'archevêque de Sens (Sur la conduite des évêques) parlant de « fourrures de gueules » dont se parent les évêques.
D'autres notent que, copiant l'usage romain de la toge prétexte, c'est la bordure, le collet (la gorge donc) des pelleteries qui est teinte en rouge au Moyen Âge[5]. D'autres encore voient dans ce mot la contraction du latin conchylium (« pourpre ») par retranchement de la syllabe chy.
Le terme bellic, repéré par Pierre Palliot dans les rôles médiévaux et attribué par lui à la couleur rouge[6], est une fausse interprétation. L'expression "bande de bellic" signifie "en oblique" (ce qui est devenu la bande moderne), et le fait qu'elle soit très souvent de couleur rouge lui a fait croire qu'il s'agissait de sa couleur.
Symbolique et signification
Ce qui suit ne concerne en rien l'héraldique.
Selon la symbolique développée par l'écrivain Marc de Vulson de La Colombière[7] - [8], le gueules est associé aux correspondances symboliques suivantes[2] :
Vertus théologales et cardinales | Justice, charité et amour ardent envers Dieu et son prochain. |
Vertus mondaines | Vaillance, fureur, noblesse, hardiesse et magnanimité. |
Vices | Cruauté, colère, meurtre, carnage. |
Complexions de l’homme | Colérique. |
Métaux | Cuivre, laiton ou airain dont on fait la mine rouge. |
Planète | Mars. |
Pierres précieuses | Rubis, pyrope, corail rouge. |
Signes du Zodiaque | Bélier, Lion, Sagittaire. |
Élément | Feu. |
Saison | Été, automne. |
Mois | Mars, juin, juillet et, selon certains[9], octobre. |
Jours de la semaine | Mardi, mercredi et samedi. |
Nombres | 3, 10. |
Arbres | Cèdre. |
Fleurs | Pivoine, œillet commun, rose rouge. |
Oiseaux | Pélican. |
Âge de l'homme | Virilité. |
Obligations du porteur | Secourir ceux que l’on voudrait oppresser par injustice. |
Voir aussi
Article connexe
Notes et références
- Le mot est considéré comme un singulier (au même titre que le sable, l'azur ou le sinople) par la majorité des auteurs. Il n'est cependant pas rare de le trouver employé au pluriel : « Les gueules sont un émail […]. »
- (es) Francisco Piferrer, Tratado de heráldica y blasón, Maxtor, , 96 p.
- In : Tesseræ gentilitiæ, ex legibus fecialium descriptæ, Rome, 1638, in-fol.
- (en) Michel Pastoureau, Black: The History of a Color, Princeton University Press, (ISBN 978-0-691-13930-2), p. 72.
- « Étymologie gueules », sur cnrtl.fr, Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le ).
- Pierre Palliot, La vraye et parfaicte science des armoiries, ou l'indice armorial de feu Louvan Geliot..., Dijon, Pierre Palliot, 1660, in f°. [Saffroy I-2229]
- Marc de Vulson de La Colombière, La Science héroïque, traitant de la noblesse, de l'origine des armes, de leurs blasons & symboles, Sébastien et Gabriel Cramoisy, , 494 p. (lire en ligne).
- « Le symbolisme du Gueules », sur dictionnairedessymboles.com (consulté le ).
- Jérôme de Bara, Le Blason des armoiries, Claude Rauot, , 70 p. (lire en ligne).