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Grégoire le Patrice

GrĂ©goire II le Patrice (grec: Î“ÏÎ·ÎłÏŒÏÎčÎżÏ‚ , latin: Flavius Gregorius) Ă©tait un exarque de Carthage.

Grégoire II le Patrice
Fonctions
Exarque d'Afrique
–
Prédécesseur Nicétas
Successeur Gennadios II
Biographie
Date de décÚs
Lieu de décÚs Sufétula
Nationalité Empire romain (partie orientale)

Parent probable de la dynastie des HĂ©raclides, GrĂ©goire Ă©tait un partisan de l’Église chalcĂ©donienne et mena une rĂ©bellion en 646 contre l’empereur Constant II en rĂ©action au soutien de ce dernier au monothĂ©lisme. AprĂšs avoir usurpĂ© le titre impĂ©rial, il fit face Ă  une invasion arabe en 647. Il affronta les envahisseurs et fut vaincu lors de la bataille de SufĂ©tula, oĂč il pĂ©rit.

GrĂ©goire le Patrice Ă©tait un champion de l’orthodoxie et avait protĂ©gĂ© Maxime le Confesseur. La population berbĂšre l’apprĂ©ciait et il jouissait mĂȘme de la sympathie du pape ThĂ©odore 1er[1].

Biographie

Origines

GrĂ©goire Ă©tait liĂ© par le sang Ă  l'empereur HĂ©raclius et Ă  son petit-fils Constant II, et Ă©tait peut-ĂȘtre le fils du cousin d'HĂ©raclius, NicĂ©tas[2]. GrĂ©goire est d'abord attestĂ© comme exarque d'Afrique ("patrikios d'Afrique" d'aprĂšs ThĂ©ophane le Confesseur) en [3] - [4], mais a peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  Ă©tĂ© nommĂ© exarque sous HĂ©raclius[5].

Controverse religieuse

Les VIe et VIIe siĂšcles verront un bouillonnement de dĂ©bats thĂ©ologiques qui dĂ©finissent le christianisme[6]. Entre autres, il y a des tensions entre les supporteurs de ChalcĂ©doine (le Christ possĂšde deux natures unies sans confusion) et ceux du monophysisme (une seule nature du Christ). L'exarchat de Carthage Ă©tait dans la tourmente interne en raison du conflit entre la population principalement orthodoxe chalcĂ©donienne et les partisans du monothĂ©lisme.

HĂ©raclius, dĂ©sirant une solution de compromis sur le dĂ©bat concernant la nature du Christ, se tournera vers le monothĂ©lisme, c’est-Ă -dire que le Christ possĂšde une seule volontĂ©. En 638, HĂ©raclius fait promulguer l’EkthĂ©sis, afin d’imposer le monothĂ©lisme Ă  tout l’empire. Si certains patriarches d’Orient l'acceptent, il y aura aussi des opposants. En 640, le pape Jean IV condamne l’EkthĂ©sis et Maxime le Confesseur s’y opposera fermement[7]. Les populations berbĂšres restĂšrent attachĂ©s aux traditions de l’orthodoxie et les innovations en matiĂšre de foi de l’empereur les indignaient[8].

En 643, les Omeyyades avaient capturĂ© la CyrĂ©naĂŻque et la moitiĂ© de la Tripolitaine, avec Tripoli. Omar ordonne l'arrĂȘt de leur expansion[9].

Pour calmer les tensions religieuses dans l’exarchat, GrĂ©goire le Patrice organisa en - un dĂ©bat public - entre Maxime le Confesseur, un proĂ©minent dĂ©fenseur de l’orthodoxie chalcĂ©donienne, et Pyrrhus, monothĂ©lite et patriarche de Constantinople. À la conclusion du dĂ©bat, Pyrrhus se convertit Ă  l’orthodoxie et accompagna Maxime Ă  Rome[10]. Cependant, Constant II tenait Ă  imposer le monothĂ©lisme. C’est dans ce contexte religieux que deux des trois principaux gouverneurs en occident - les exarques Olympios et GrĂ©goire le Patrice - vont se rebeller[11].   

RĂ©bellion

Le monde méditerranéen à l'époque de la révolte de Grégoire.

En 646, GrĂ©goire lance une rĂ©bellion contre Constant II. La raison Ă©tait le soutien de ce dernier au monothĂ©lisme, mais c'Ă©tait sans doute aussi une rĂ©action Ă  la conquĂȘte musulmane d'Égypte et la menace que les musulmans prĂ©sentaient sur l'Afrique byzantine. Compte tenu de l'Ă©chec du gouvernement impĂ©rial Ă  Constantinople Ă  arrĂȘter l'avancĂ©e des musulmans, c'Ă©tait, selon les mots de Charles Diehl, « une grande tentation pour le puissant gouverneur d'Afrique de se sĂ©parer de l'empire faible et Ă©loignĂ© qui semblait incapable de dĂ©fendre ses sujets ». Les diffĂ©rences doctrinales, ainsi que l'autonomie Ă©tablie depuis longtemps de l'exarchat, ont renforcĂ© cette tendance[12].

Outre les motifs religieux, il est possible que la révolte de Grégoire le Patrice soit une tentative de résistance et d'indépendance contre le fardeau fiscal imposé par Constantinople sur la province[13]. Le chroniqueur arabe Al-Tabari prétend que la révolte de Grégoire a été provoquée par une taxe de 300 livres d'or demandée par Constant II. Des sources arabes affirment qu'aprÚs avoir été proclamé empereur, il a frappé des piÚces de monnaie a sa propre effigie, mais aucune n'a été trouvée jusqu'ici[14] - [15]. Il semble que Maxime le Confesseur et le Pape Théodore I ont encouragé ou au moins soutenu Grégoire dans cette aventure. La révolte semble avoir trouvé un large soutien parmi les berbÚres romanisés, mais aussi parmi les berbÚres de l'intérieur.

Grégoire s'installa à l'intérieur des terres, dans la ville de Sufétula, ce qui le protégeait d'une éventuelle expédition punitive à Carthage par des troupes impériales[16]. De là, il était possible de surveiller et contrÎler l'intérieur des terres. De plus, la région environnante était riche en agriculture, ce qui permettait d'approvisionner les soldats et montures[17].

Chute

En 647, le successeur d'Omar (mort en 644), Othman, a ordonnĂ© Ă  Abdallah ibn Saad d'envahir l'Exarchat avec 5000 hommes. En Égypte, Ibn Sa'd adjoint d'autres effectifs jusqu'Ă  atteindre une armĂ©e de 20 000 combattants[18]. Les musulmans ont envahi l'ouest de la Tripolitaine et se sont avancĂ©s jusqu'Ă  la limite du nord de la province byzantine de ByzacĂšne. GrĂ©goire s'est confrontĂ© aux Arabes Ă  leur retour Ă  SufĂ©tula, mais il fut vaincu et aurait, selon certaines sources Ă©tĂ© tuĂ©[19] - [20]. Agapios de Manbij et certaines sources syriaques affirment qu'il a survĂ©cu Ă  la dĂ©faite et a fui vers Constantinople, oĂč il s'est rĂ©conciliĂ© avec Constant II. Les chroniqueurs arabes mentionnent qu’il aurait pĂ©ri dans la bataille. Kaegi est d'avis que GrĂ©goire aurait pĂ©ri[21].  Il est racontĂ© dans les rĂ©cits arabes, que sa fille, combattant au cĂŽtĂ© de son pĂšre, fut capturĂ©e par les vainqueurs. Elle se suicida en se jetant en bas d’un chameau lors de la marche de retour de l’armĂ©e arabe vers l’Égypte[22]. Le destin de sa fille est probablement un ajout romantique par des chroniqueurs arabes au rĂ©cit[23].

AprĂšs la mort de GrĂ©goire, les Arabes ont mis Ă  sac SufĂ©tula et ont attaquĂ© les travers de l'exarchat, tandis que les Byzantins se sont retirĂ©s dans leurs forteresses. Incapables d'assaillir les fortifications byzantines et satisfaits des Ă©normes pillages qu'ils avaient faits, les Arabes acceptĂšrent de partir en Ă©change du paiement d'un lourd tribut en or[24]. Ils auraient obtenu 2 500 000 dinars, soit 300 talents d'or[25].

Mort ou survivance ?

La plupart des textes arabes signalent la mort de GrĂ©goire dans la bataille, mais en l’insĂ©rant dans un rĂ©cit manifestement lĂ©gendaire sur le destin de sa fille. Au contraire, dans sa Chronique[26], Michel le Syrien signale que l’exarque survĂ©cut et fit aprĂšs la dĂ©faite sa soumission Ă  l’empereur Constant II[27]. Cette version n’est pas Ă  dĂ©daigner car une des traditions rapportĂ©es par Al-BalĂądhĂ»rĂź indique aussi que ce fut le Patrice, aprĂšs la dĂ©faite de SbeĂŻtla, qui nĂ©gocia la paix et l’indemnitĂ© versĂ©e aux Arabes (trad. Hitti et Murgotten, t. 1, p. 357)[28].

Références

  1. Diehl (1896), p. 555.
  2. (en) Paul A. Hollingsworth et Alexander Kazhdan, The Oxford Dictionary of Byzantium : « Gregory », Londre, New York, Oxford University Press, , 875 p.
  3. Winkelmann, Friedhelm, Lilie, Ralph-Johannes; et al. (2000). "Gregorios (# 2345)". Prosopographie der mittelbyzantinischen Zeit: I. Abteilung (641–867), 2. Band: Georgios (# 2183) – Leon (# 4270) (en Allemand). Walter de Gruyter. p. 49–50.
  4. Martindale, John Robert; Jones, Arnold Hugh Martin; Morris, J., eds. (1992). The Prosopography of the Later Roman Empire, Volume III: A.D. 527–641. Cambridge, Grande-Bretagne: Cambridge University Press, p. 554.
  5. Denys Pringle (1981). The Defence of Byzantine Africa from Justinian to the Arab Conquest: An Account of the Military History and Archaeology of the African Provinces in the Sixth and Seventh Century. Oxford, Grande-Bretagne: Rapport archĂ©ologiques britanniques, p. 46.
  6. Cameron(1993(2012)), p. 202-203
  7. Bernard Flusin, « Triomphe du christianisme et dĂ©finition de l'orthodoxie », Le monde Byzantin I. L’empire romain d’orient (330-641),‎ , p. 75
  8. Diehl (1896), p. 542.
  9. Diehl (1896), p. 557-558.
  10. Scott R. Moore, « Olympius (649-653 A.D.) », De Imperatoribus Romanis,‎ (lire en ligne)
  11. Chris Wickham, The Inheritance of Rome. Illuminating the Dark Ages 400-1000, New York, Penguin, , p. 265
  12. Charles Diehl (1896). L'Afrique Byzantine. Histoire de la Domination Byzantine en Afrique (533–709), p. 554-556. Paris: Ernest Leroux.
  13. Kaegi (2010), p. 120
  14. Diehl (1896), p. 557
  15. Roger Guery, « Le pseudo-monnayage de l'usurpateur GrĂ©goire, patrice d'Afrique. », Bulletin de la societĂ© francaise de numismatique,‎ , p. 66–68
  16. Kaegi (2010), p. 129.
  17. Kaegi(2010), p. 130
  18. Gabriel Camps, « Comment la BerbĂ©rie est devenue le Maghreb arabe. », Revue de l'Occident musulman et de la MĂ©diterranĂ©e, vol. 35, no 1,‎ , p. 7–24 (ISSN 0035-1474, DOI 10.3406/remmm.1983.1979, lire en ligne, consultĂ© le )
  19. Diehl (1896), p. 558-559.
  20. Pringle (1981), p. 47.
  21. Kaegi (2010), p. 131
  22. Diehl (1896), p. 559.
  23. Kaegi (2010), p. 131.
  24. Diehl (1896), p. 559-560.
  25. Hicham Djaït, Histoire générale de la Tunisie, t. II, Arles, Sud éditions, (ISBN 978-9-973-84421-7), p. 19
  26. Ă©d./trad Chabot, t. II, Paris, 1904, p. 440-441.
  27. cf. « Grégoire », dans EB, t. XXI, Aix, 1999, p. 3211-3213
  28. Yves ModĂ©ran, « Introduction. La conquĂȘte arabe », dans Les Maures et l’Afrique romaine (IVe – VIIe siĂšcle), Publications de l’École française de Rome, coll. « BibliothĂšque des Écoles françaises d’AthĂšnes et de Rome », (ISBN 978-2-7283-1003-6, lire en ligne), p. 685–709

Bibliographie

Articles connexes

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