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Glande labiosternale

La glande labiosternale est un organe prosomatique qui caractérise la famille des Theridiosomatidae. Situé au-dessous du cerveau dans la partie ventrale du prosome ou céphalothorax, il s'ouvre extérieurement sur le sternum par un pore que précède le labium (Fig.1 à 4)

Introduction

La glande labiosternale est un organe sĂ©crĂ©teur exocrine qui semble propre aux seuls Theridiosomatidae, petite famille d’ AraignĂ©es “ Labidognathes â€ť, pour la plupart tropicales, se rattachant aux Araneoidea les plus primitives et dont la biologie parait encore mal connue[1].

Fig.1 -Wendilgarda mustelina arnouxi : les deux orifices ou pores labiosternaux (O). G, gnathocoxae - L, labium - S, sternum (M.E.B.).

Dans leurs Ă©tudes morphologiques de Wendilgarda amĂ©ricaines, Archer (1953) et Brignoli (1972) ont signalĂ© l’existence de petites “ fossettes â€ť sternales (“sternal pits â€ť) rapprochĂ©es du labium, retrouvĂ©es plus tard par Wunderlich (1980 : “ sternal-organ â€ť)[2] chez d’autres genres de Theridiosomatidae (Theridiosoma, Ogulnius, Epeirotypus) et qu’il considère comme une autapomorphie familiale.

UltĂ©rieurement, Coddington (1988) les signale encore comme caractères de diagnostic dans sa monographie sur tous les genres connus de Theridiosomatidae[1]. Wunderlich a prĂ©cisĂ©, que les “ organes sternaux â€ť ont l’ aspect d’ invaginations sacciformes, de nature

Fig.2 - Détail de la précédente. Orifice ou pore labiosternal gauche (O) de Wendilgarda mustelina arnouxi, détail (M.E.B.). S, sternum.

glandulaire, mais il s’est uniquement basé sur l’examen superficiel et grossier de préparations éclaircies, sans exploration histologique, la seule valable[2].

Les premières Ă©tudes histologiques par coupes sĂ©riĂ©es (C.H.) et ultrastructurales (microscopie Ă©lectronique Ă  balayage, M.E.B. et Ă  transmission, M.E.T.) de l’ “organe sternal” ont Ă©tĂ© effectuĂ©es par A.Lopez & al (1983,1988,1993[3] - [4] - [5]). Elles apportent la preuve formelle qu’il est de nature glandulaire et s’ouvre bien Ă  l’extĂ©rieur par la fossette (“pit”). Ils ont Ă©galement proposĂ© d’appeler cette dernière “ pore labio-sternal â€ť et la structure qui y dĂ©bouche, “ organe labio-sternal â€ť, ces noms composĂ©s exprimant mieux leur position très antĂ©rieure au contact du labium.

Fig.3 - Theridiosoma sp.Orifice ou pore labiosternal (O), détail .G, gnathocoxa - L, labium - S, sternum (M.E.B).

Le matériel étudié se composait de 3 Theridiosomatidae néotropicaux : Wendilgarda mustelina arnouxi (Guadeloupe), Theridiosoma sp. (Martinique) et Naatlo splendida ex Theridiosoma splendidum de Guyane française.

Organe labio-sternal

Pore labio-sternal

Vu au microscope Ă©lectronique Ă  balayage (M.E.B.), il se prĂ©sente comme un orifice rĂ©gulier situĂ© sur le sternum  au contact de son bord antĂ©rieur et de l’extrĂ©mitĂ© du labium, donc de la suture labio-sternale,  Il est rĂ©gulier, ovalaire et bordĂ© d’une petite margelle postĂ©rieure chez Wendilgarda mustelina arnouxi (Fig.1,2), Ă  peu près circulaire et de niveau avec la surface du tĂ©gument chez Theridiosoma sp, de Martinique (Fig.3), ouvert obliquement en bas, en avant et un peu en dedans, et mesurant de 10 Ă  20 µm de diamètre.

Fig.4 - Plato juberthiei. Les deux orifices ou pores labiosternaux (P) G, gnathocoxae - L, labium - S, sternum (M.E.B.).

Cet aspect se retrouve chez d’autres Theridiosomatidae tels que Plato juberthiei de Guyane (Fig.4) et Ogulnius hayoti de Martinique.                              

Structure histologique.

L’organe s’abouchant au pore est pair, symétrique, paramédian, superficiel et repose sur le tégument sternal au voisinage immédiat du labium. Recouvert par la masse nerveuse sous-œsophagienne, il est constitué par un massif glandulaire et une poche réceptrice commune (Fig.5 à 8). Ainsi que l’indiquait Wunderlich d’après ses préparations éclaircies[2], cette poche est un “ sac ” s’ouvrant extérieurement au niveau du pore labio-

Fig.5 - Wendilgarda mustelina arnouxi : section longitudinale de la glande labiosternale passant par son pore (P). G, massif glandulaire ; N, ganglions nerveux ; S, sécrétion (C.H.).

sternal, allongé (L = 90 à 100µm), plus large dans sa moitié postérieure (l = 60 à 70 µm) que dans l’antérieure (l = 40 µm), donc ovoïde ou piriforme (Fig.5,6) et orienté de telle sorte que son grand axe est à peu près horizontal, légèrement oblique en avant et un peu en dedans. Sa paroi est formée par une assise épidermique fine, bien visible seulement lorsqu’elle contient un pigment noir et surtout, par de la cuticule. Cette dernière, très mince au niveau du fond ou globalement chez Naatlo (2 µm), s’épaissit progressivement dans la partie antérieure (Wendilgarda) où elle atteint 4 µm et se raccorde à la chitine sterno-labiale (10 µm) sur le pourtour du pore (Fig.). Ainsi se

Fig.6 -Wendilgarda : autre section longitudinale de la glande labiosternale passant en dehors du pore. C, cuticule ventrale ; N, ganglions nerveux ; S, sécrétion ; T, "tigette" (C.H.).

présente-t-elle comme une invagination en profond récessus du tégument et repose sur ce dernier par sa face ventrale sans lui adhérer. La cavité ou lumière de la poche renferme un matériel amorphe éosinophile en boules et masses irrégulières. Chez Wendilgarda (Fig.), il englobe de curieuses saillies pariétales, sorte de “ tigettes ” cuticulaires se détachant sur le pourtour du fond, longues en moyenne de 15 µm, bi ou trifurquées à leur extrémité libre et s’y terminant en pointes plus ou moins divergentes (Fig.6 à 8). Elles sont remplacées par de simples “ dentelures ” postérieures chez Naatlo. Le massif glandulaire

Fig.7 - Coupe transversale de la glande labiosternale de Wendilgarda en coupe transversale. A, adénocytes - N, ganglion nerveux - P, paroi de la poche - S, sécrétion - T, "tigettes"

s’inscrit toujours dans une loge en triangle, haute d’environ 30 µm, que délimitent le pôle postérieur de la poche, les ganglions sous-œsophagiens et le tégument sternal. Ce massif est très compact chez Wendilgarda et Naatlo, ne dépassant pas vers l’arrière le niveau du ganglion de P II. Par contre, il est moins dense chez Theridiosoma, y adoptant une disposition en chapelet qui atteint le ganglion de P III. Il se compose de cellules ayant un aspect sécréteur, donc d'adénocytes, et de canalicules excréteurs flanqués par des cellules “ satellites ”. Les adénocytes sont volumineux (30 µm), oblongs, pourvus d’un

Fig.8 - Autre coupe transversale de la glande labiosternale de Wendilgarda. A, adénocytes ; C, cuticule ventrale - P, paroi de la poche - T, "tigettes"

noyau arrondi vésiculeux (8 à 10 µm), nettement nucléolé ; leur cytoplasme est basophile en périphérie et présente une zone centrale éosinophile, striée, de forme ovalaire, évoquant un “ réservoir ” où débute un très grêle canalicule également coloré par l’éosine. Les cellules “ satellites ” siègent entre les adénocytes et la paroi de la poche, ont un petit noyau allongé (4 µm), à chromatine abondante, un cytoplasme pâle peu visible et entourent les canalicules venant de se dégager des adénocytes. Ces conduits sont grêles, tortueux, convergent vers la paroi de la poche et la traversent en une zone limitée de son pôle postérieur, au niveau des dentelures.

Ultrastructure

L’étude ultrastructurale chez Naatlo et Wendilgarda (Lopez, 1988, 1993[4] - [5]) montre que les cellules et les canaux sont bien rĂ©unis en unitĂ©s glandulaires fonctionnelles toutes semblables (SchĂ©mas 1 et 2) dont la sĂ©crĂ©tion est reçue par la poche collectrice. Cette dernière et l’ensemble de tous les canaux qui y aboutissent, rĂ©cepteurs inclus, constituent un appareil cuticulaire global. Chez les deux espèces Ă©tudiĂ©es, l'unitĂ© glandulaire comporte une cellule sĂ©crĂ©tante ou adĂ©nocyte et la partie de l'appareil cuticulaire qui le dessert, soit un  canalicule rĂ©cepteur, un canalicule excrĂ©teur ou conducteur et des cellules canaliculaires (SchĂ©mas 1 et 2).

SchĂ©ma 1 - Wendilgarda mustelina arnouxi (Guadeloupe) : unitĂ© glandulaire labiosternale (1) et dĂ©tails (2, 3)(M.E.T.).  B, partie basale de l'adĂ©nocyte - Cc1, cellule canalaire proximale - Cc2, cellules canalaires intermĂ©diaires - Cc3, cellules canalaires distales - Cd, canalicule conducteur - Da, digitation apophysaire - G, Golgi (dictyosome) - Gs, grains de sĂ©crĂ©tion (2) - Mt, mitochondries - Mv, microvilli - O, orifices  excrĂ©teurs - Rd, canalicule rĂ©cepteur - S, "section-raccourci". Flèches : grains de sĂ©crĂ©tion (1) et canalicule rĂ©cepteur (2)

Adénocyte

Il se présente comme une grosse cellule pyramidale.Son pôle externe ou basal, au contact du sinus hémolymphatique, montre quelques invaginations de la membrane (Wendilgarda)(Schéma 1) ou est régulièrement arrondi, sans indentations particulières (Naatlo)(Schéma 2) En revanche, son pôle apical est caractérisé par une invagination de l’espace extracellulaire en “ cul de sac ” ou “ doigt de gant ”, occupant le grand axe adénocytaire, légèrement

Schéma 2 -Naatlo splendida (Guyane) : unité glandulaire labiosternale (M.E.T.). Cc1, cellule canalaire proximale - Cc2, cellule canalaire distale - Cd, canalicule conducteur - Ep, épicuticule - Ex, exocuticule - Gs, grains de sécrétion - Mt, mitochondries - Mv, microvilli - O, orifice excréteur - Pc, poche collectrice - R, réticulum endoplasmique - Rd, canalicule récepteur - S, sécrétion. S (en noir), "section raccourci".

flexueuse et renferme un canalicule récepteur en position centrale. Cette invagination est bordée par des microvilli convergeant vers le canalicule récepteur, très nombreuses, longues en moyenne de 3 µm et remarquables par leur aspect très particulier. Aplaties en lamelles, elles se présentent comme des expansions foliacées beaucoup plus larges (1 µm) à la base qu’au sommet qui s’effile régulièrement en cône allongé. Elles ont ainsi un contour à peu près triangulaire, parfois cordiforme ou en “ as de pique ” lorsqu’il existe un léger pincement au-dessus de leur base (Wendilgarda) (Schéma 1 : 2). En outre, ces microvillosités ne sont pas planes mais sinueuses, et plus ou moins incurvées sur leurs deux axes. Elles s’appliquent enfin étroitement les unes contre les autres en s’imbriquant (Schémas 1,2 ; Fig.) et ne ménagent que des espaces virtuels ou que souligne un matériel osmiophile très peu abondant. Cette juxtaposition dense des microvilli crée des images très particulières dues à l’accolement : “ nids d’abeille ” lorsqu’elles sont coupées transversalement ; bandes transversales grenues équidistantes ou festons de zonation régulière (Fig.) lorsque leurs coupes sont obliques. Les mêmes microvillosités renferment des filaments intermédiaires (Wendilgarda), des microtubules longitudinaux (Naatlo) s’étendant de la base à l’apex où ils se disposent en couronne, et, dans ce même apex, une petite densification terminale.Le noyau siège en général dans la partie moyenne de l’adénocyte. Il est volumineux, clair, arrondi ou ovoïde et contient un nucléole réticulé excentrique. Sa chromatine est abondante, dispersée dans le nucléoplasme et forme aussi de petites mottes marginales. L’enveloppe nucléaire est en nette continuité avec le réticulum endoplasmique. Ce dernier est granulaire ou rugueux. Chez Wendilgarda, il est formé par de petits sacs variqueux, siégeant surtout près de la cavité extracellulaire et en périphérie, tandis que chez Naatlo, il paraît plus abondant et se compose de cisternae allongées, planes ou incurvées, formant par empilement un ergastoplasme développé, surtout dans la périphérie de l’adénocyte qui leur doit sa basophilie. Le chondriome est également remarquable par son abondance. Il se compose de mitochondries volumineuses, à matrice claire et crêtes sinueuses, réparties sans ordre apparent, très plastiques, souvent accolées en amas compacts et alors déformées par compression réciproque.De même, l’appareil de Golgi ou complexe golgien est très développé, du moins chez Wendilgarda. Il réunit des dictyosomes nombreux, petits, localisés près de la cavité extracellulaire, constitués chacun par un empilement de 3 à 5 saccules plus ou moins dilatés, présentant une face “cis” (proximale ou de formation) en rapport avec le réticulum endoplasmique et une face “trans” (de sortie ou de maturation) orientant sa concavité vers l’espace extracellulaire. Par cette face et les bords de ses saccules, chaque dictyosome bourgeonne un essaim de vésicules golgiennes recouvertes (réseau transgolgien), qui grossissent progressivement et donnent ainsi naissance aux grains de sécrétion.Ces grains sont arrondis ou anguleux, limités par une membrane et contiennent un matériel opaque, d’abord finement grenu, ensuite homogène et très osmiophile. Ils gagnent la base des replis microvillositaires, y émettent de petites protubérances s’abouchant dans les interstices et libèrent ainsi leur contenu qui s’insinue entre les microvilli jusqu’ au canalicule récepteur. Les autres organites subcellulaires sont de petites vésicules d’endocytose (pinocytose) entre les microvilli, des endosomes rejoints par les précédentes, des ribosomes libres, des microtubules pouvant s’engager dans les microvilli, des microfilaments qui y pénètrent aussi et des lysosomes secondaires, sans localisation précise, plus ou moins anguleux et à contenu membranaire hétérogène.

Appareil cuticulaire individuel

Drainant et emmagasinant la sécrétion de chaque adénocyte, il est formé par l’ensemble des canalicules récepteur et conducteur, ce dernier, qu'entourent des cellules canaliculaires, jusqu'à sa terminaison (orifice) dans la poche collectrice.

Canaux

Le canalicule rĂ©cepteur est entièrement logĂ© dans la cavitĂ© extracellulaire de l’adĂ©nocyte et en forme l’axe (SchĂ©mas, Fig.). Il prĂ©sente une lumière très Ă©troite, aplatie (0,3 µm en moyenne) et une paroi formĂ©e par de l’épicuticule externe,  opaque aux Ă©lectrons, très mince (10 nm), rĂ©gulière, lisse sur ses deux faces, paraissant compacte et homogène chez Naatlo (SchĂ©ma 2), montrant en fait chez Wendilgarda deux couches discontinues lui donnant un aspect fenestrĂ© et s’interrompant peut-ĂŞtre aussi vers l’extrĂ©mitĂ© distale (SchĂ©ma 1-1). Ă€ ce niveau, le canalicule semble s’ouvrir dans la cavitĂ© extracellulaire, relativement spacieuse et contenant du matĂ©riel grenu. Partout ailleurs, le canalicule est en contact  avec les apex microvillositaires qui s’accolent Ă  lui. Il contient un matĂ©riel dispersĂ© et finement granuleux ou plus dense, homogène, très osmiophile semblant mouler la lumière.

Le canalicule conducteur est beaucoup plus long que le prĂ©cĂ©dent, lui fait suite au niveau de l’apex adĂ©nocytaire, dĂ©crit des sinuositĂ©s plus ou moins parallèles Ă  la poche collectrice (Fig.), gagne enfin la paroi  de cette dernière et s’y ouvre par un pore excrĂ©teur. Il prĂ©sente une lumière arrondie (D = 0,5 µm), vide ou Ă  contenu osmiopohile granuleux, et une paroi ininterrompue formĂ©e par deux couches d’épicuticule, l’une interne  mince, rĂ©gulière, lisse du cĂ´tĂ© de la lumière, l’autre externe plus dense, Ă©paissie en mamelons irrĂ©guliers, surtout dans la partie proximale oĂą ils forment des masses polylobĂ©es.

Cellules canaliculaires

Elles  enveloppent le canalicule conducteur depuis sa jonction avec le rĂ©cepteur jusqu'Ă  la poche collectrice commune.

Il semble n’y en avoir que deux, proximale et distale, chez Naatlo splendida (SchĂ©ma 2), cas le plus simple,  et un ensemble plus complexe chez Wendilgarda mustelina arnouxi (SchĂ©ma 1) oĂą seules, la première et la dernière peuvent ĂŞtre encore individualisĂ©es. Elles sont allongĂ©es, aplaties et s’enroulent autour du canalicule excrĂ©teur ou conducteur, leurs faces accolĂ©es formant un mĂ©so plus ou moins sinueux, clos par une zonula adherens. Le noyau est Ă©galement allongĂ© et dĂ©primĂ©, irrĂ©gulier, anguleux et renferme une chromatine compacte se condensant en grosses mottes ou blocs marginaux. Le cytoplasme, clair et peu abondant,  renferme des polysomes, quelques mitochondries, des microtubules se disposant en paquets longitudinaux et ne prĂ©sente jamais les stigmates d’une activitĂ© sĂ©crĂ©toire. La cellule proximale s’engage dans la cavitĂ© extracellulaire de l’adĂ©nocyte qui l’entoure d’une collerette cytoplasmique et qu’elle obture comme un bouchon au-dessus des microvilli. (SchĂ©mas 1,2). Elle  se dĂ©gage ensuite de cet adĂ©nocyte en entourant la partie initiale du  canalicule conducteur, se dirige avec lui vers la poche collectrice en s’insinuant parfois entre d’autres cellules sĂ©crĂ©trices  et est remplacĂ©e, soit par une succession des cellules “intermĂ©diaires” identiques (Wendilgarda) (SchĂ©ma 1-1 S) soit directement  par la cellule distale (Naatlo) (SchĂ©ma 2). Cette dernière court sous la cuticule de la poche, dĂ©pourvue d’épiderme Ă  ce niveau, et y entoure la partie terminale du canalicule conducteur jusqu’à l'orifice excrĂ©teur terminal (Fig.17, SchĂ©ma 1-3). Dans le cas de Wendilgarda, la cellule toute distale est particulièrement  allongĂ©e, pĂ©nètre avec le canalicule conducteur dans une pointe de "tigette" ("digitation") oĂą son cytoplasme, remontant bien au-delĂ  de l'orifice excrĂ©teur (SchĂ©ma 1-1), s'y moule Ă©troitement  ; il renferme des vĂ©sicules de rĂ©ticulum, des microtubules longitudinaux et des mitochondries de forme  parfois complexe (SchĂ©ma 1-2, Fig.17).

 Poche collectrice

Sa paroi est bien formée par un revêtement chitineux et par une assise épidermique interrompue dans la zone où aboutissent les canalicules.Le revêtement chitineux montre une couche intérieure d’épicuticule (épicuticule externe et interne) en continuité avec la paroi des canaux au niveau de leurs pores excréteurs individuels (Schéma 2), et une couche extérieure d’épicuticule, plus épaisse, montrant des canaux-poraires (pores-canaux), stratifiée en unités laminaires, s’interrompant brusquement au niveau des mêmes orifices. Elles sont toutes deux en continuité avec celles du tégument ventral sur le pourtour du pore labio-sternal. L’endocuticule tégumentaire qui est d’ailleurs absente de toute la poche, s’y termine en un “coin effilé”.

Dans le cas simple de Naatlo (Schéma 2), l’épicuticule interne s’épaissit irrégulièrement entre les pores canalaires, formant des crêtes aiguës ou émoussées qui correspondent aux dentelures des coupes histologiques.

Dans celui, plus complexe de Wendilgarda (SchĂ©ma 1), la paroi de la poche s’inflĂ©chit brusquement dans les projections très saillantes qui avaient l’aspect de “tigettes” en microscopie photonique mais que nous pouvons qualifier ici “apophyses”, un peu incurvĂ©es, effectivement  ("pointes") Ă  leur extrĂ©mitĂ© libre et prĂ©sentant une section transversale oblongue. Comme le reste de la paroi, ces apophyses, effectivement bi- ou tri-furquĂ©es en digitations Ă  leur extrĂ©mitĂ©  libre (SchĂ©ma 1-3), sont formĂ©es par de l’épicuticule et une exocuticule plus mince qu’ailleurs, assez riche en canaux poraires renfermant des languettes cytoplasmiques. Leur axe est occupĂ© par des cellules Ă©pidermiques, par la cellule distale du canalicule conducteur (SchĂ©ma1-1)et la terminaison de ce dernier, ouvert en entonnoir sur le tiers infĂ©rieur de l’apophyse, au niveau de sa concavitĂ© (SchĂ©ma 1-3). 

Le contenu de la poche est un matĂ©riel sĂ©crĂ©toire opaque aux Ă©lectrons, intensĂ©ment osmiophile, amorphe, adhĂ©rant chez Wendilgarda Ă  la paroi et ses apophyses en une pellicule discontinue. Il  forme surtout des masses plus ou moins volumineuses et coalescentes, Ă  contours concaves chez Naatlo ou sphĂ©riques, homogènes ou criblĂ©es de lacunes arrondies, montrant, chez Wendilgarda, une “écorce” pĂ©riphĂ©rique.

Cellules Ă©pidermiques

Peu nombreuses, elles se logent entre la cuticule de la poche et les adĂ©nocytes, s’engrènent par leurs faces latĂ©rales, entourent aussi les cellules canalaires, leur sont unies par de petites jonctions subapicales (zonula adherens) et , dans le cas de Wendilgarda, pĂ©nètrent dans les axes des apophyses, y accompagnant le canal et sa cellule distale. Chaque cellule Ă©pidermique montre un noyau aplati, lenticulaire, Ă  chromatine dense formant des blocs irrĂ©guliers comme dans les cellules canalaires. Son cytoplasme contient des ribosomes et surtout, des  grains pigmentaires sphĂ©riques très osmiophiles, denses et homogènes. Le pĂ´le apical sous-cuticulaire est garni de microvillositĂ©s courtes et en petit nombre.

 Commentaires

Anatomie

Sur le plan anatomique, l’histologie est assez uniforme dans les trois  genres Ă©tudiĂ©s (Wendilgarda, Theridiosoma, Naatlo) qui diffèrent seulement par la disposition plus ou moins compacte de leur massif glandulaire et la structure pariĂ©tale de la poche collectrice, se singularisant chez Wendilgarda par ses curieuses "tigettes", apophyses de la M.E.T..

Il en est de mĂŞme pour  la structure fine des unitĂ©s entrant dans la constitution de l’organe labio-sternal et qui permettent de rattacher ses adĂ©nocytes Ă  la classe 3 des cellules glandulaires Ă©pidermiques d’Arthropodes (Noirot & Quennedey, 1974). Par leur groupement et le fait qu'elles dĂ©versent la sĂ©crĂ©tion  dans une poche collectrice commune, l’organe entier peut ĂŞtre considĂ©rĂ© comme “anatomiquement dĂ©fini” (Noirot & Quennedey, 1974).

Les microvillositĂ©s ont une forme très originale non observĂ©e dans les autres adĂ©nocytes d’ AraignĂ©es ([null spermathèque] de Telema tenella comprise) :) en lames trapĂ©zoĂŻdales d’épaisseur constante et jusqu’à 10 fois plus larges Ă  la base qu’au sommet chez Naatlo ; en expansions foliacĂ©es triangulaires, parfois cordiformes, chez Wendilgarda. Elles Ă©voquent  celles de l'adĂ©nocyte rĂ©trogonoporal par leur nombre très Ă©levĂ©, leur juxtaposition Ă©troite et le fait qu’elles semblent oblitĂ©rer la cavitĂ© extracellulaire. En revanche, elles diffèrent des replis apicaux de la  spermathèque chez Telema tenella  (Lopez, 1983) ainsi d'ailleurs chez les Insectes que des microlamelles, Ă©galement apicales des Bathysciinae souterrains (Juberthie-Jupeau & Cazals, 1983). Mais c’est surtout par le dĂ©veloppement remarquable de l’appareil cuticulaire et sa poche sacciforme que l’organe labiosternal diffère de toutes les autres glandes prosomatiques d’ AraignĂ©es. Une telle sĂ©paration du rĂ©servoir et des cellules sĂ©crĂ©trices qui lui sont annexĂ©es se rencontre  en revanche frĂ©quemment chez les Insectes : glande mĂ©tapleurale des Formicidae (Hölldobler & Engel-Siegel, 1984), glandes dĂ©fensives des ColĂ©optères TĂ©nĂ©brionidae (Eisner & al., 1964) ou glandes antennaires  des Pselaphidae  (De Marzo & Vit., 1983). NĂ©anmoins, la glande labiosternale prĂ©sente un Ă©tat de diffĂ©renciation moins poussĂ© que chez  ces Insectes  car sa poche est simple, non compartimentĂ©e et les unitĂ©s glandulaires , dont chacune ne comporte qu'un adĂ©nocyte, appartiennent toutes Ă  un seul et mĂŞme type. Elle est donc loin d'atteindre la complexitĂ© des glandes dĂ©fensives d' HĂ©tĂ©roptères et surtout, de la glande sternale des Rhinotermitidae (Quennedey, 1978).

Homologies

Sur le plan homologique, la glande labio-sternale pourrait ĂŞtre considĂ©rĂ©e  comme une variation des glandes segmentaires d' AranĂ©omorphes, sur un mode qui parait propre aux Theridiosomatidae. Tout se passe comme si le recessus collecteur et son ouverture, qui siègent normalement sur la coxa des P I ou sur la gnathocoxe des autres AraignĂ©es, se soient dĂ©placĂ©s vers la ligne mĂ©diane, en plein sternum et plus ou moins près du labium, chez les Theridiosomatidae.

Fonction

Sur le plan fonctionnel, la prĂ©sence d’un appareil terminal est en faveur de la production d’un sĂ©mio-chimique, phĂ©romone ou allomone, comme dans d’autres glandes tĂ©gumentaires d’AraignĂ©es. Cette sĂ©crĂ©tion doit avoir une composante glycoproteique (grand dĂ©veloppement du Golgi, positivitĂ© de l'adĂ©nocyte Ă  l'A.P.S.). Elle met certainement en jeu des phĂ©nomènes Ă©nergĂ©tiques intenses, un mĂ©tabolisme Ă©levĂ© (richesse du chondriome) et  des Ă©changes très actifs que traduit la conformation particulière des microvillositĂ©s, ces dernières accroissant considĂ©rablement la surface apicale de l'adĂ©nocyte. Il est peu probable que cette mĂŞme sĂ©crĂ©tion soit modifiĂ©e dans le canalicule conducteur car sa paroi est ininterrompue et les cellules-enveloppes ne prĂ©sentent aucune activitĂ© Ă©laboratrice. Sa rĂ©sorption dans la poche pourrait expliquer l’aspect très variable du matĂ©riel qui s’y est dĂ©posĂ©. L’attraction sexuelle ne peut ĂŞtre invoquĂ©e car les adultes des deux sexes et les immatures sont tous pourvus de glandes labio-sternales apparemment identiques.

En revanche, la sĂ©crĂ©tion, si elle est phĂ©romonale, pourrait intervenir dans la reconnaissance intra-spĂ©cifique, rĂ´le dĂ©jĂ  envisagĂ© pour les glandes segmentaires surtout rĂ©trognathocoxales, ou, s’il s’agit d’une allomone, dans l’attraction chimique des proies. Ces dernières, surtout des Micro-diptères NĂ©matocères [1], pourraient ĂŞtre alors saisies directement par l’AraignĂ©e lorsque sa toile est rudimentaire (Wendilgarda) ou s’engluer dans son piège orbiculaire Ă  dĂ©tente (Naatlo, Theridiosoma).         


Liens externes

www.european-arachnology.org/esa/wp-content/uploads/2015/08/067-076_Lopez.pdf

Bibliographie

  • A.Lopez, avec M.Emerit, 1983 - Wendilgarda mustelina arnouxi n.sp. et la glande labio-sternale des Theridiosomatidae (Araneae). Mem.BiospĂ©ol., 12, p. 67-76.
  • A. Lopez, L. Juberthie-Jupeau, « Structure et ultrastructure de la glande labio-sternale chez Theridiosoma splendidum (Tacz.)(Araneae : Theridiosomatidae) », XI European Arachnologisches Colloquium,‎ , p. 332-339 (lire en ligne)
  • A.Lopez, avec L. Juberthie-Jupeau, 1993 – Ultrastructure des glandes labio-sternales et pĂ©ri-buccales chez Wendilgarda mustelina arnouxi Lopez & Emerit (Araneae, Theriiosomatidae). Rev. Arachnol., 10 (4), p. 75-92.

Notes et références

  1. (en) Coddington, « The genera of the spider family Theridiosomatidae », Smithsonian Contributions to Zoology, no 422,‎ , p. 1-96 (DOI 10.5479/si.00810282.422)
  2. (de) J. Wunderlich, « Sternal-Organe der Theridiosomatidae - Eine bisher übersehene Autapomorphie (Arach. : Araneae) », Verh. naturwiss, no 23,‎ , p. 255-257.
  3. A.Lopez, avec M.Emerit, « - Wendilgarda mustelina arnouxi n.sp. et la glande labio-sternale des Theridiosomatidae (Araneae). », Mem.Biospéol., 12, p. 67-76.,‎
  4. Lopez,A. avec L. Juberthie-Jupeau, « - « Structure et ultrastructure de la glande labio-sternale chez Theridiosoma splendidum (Tacz.)(Araneae : Theridiosomatidae) », XI European Arachnologisches Colloquium, septembre 1988, p. 332-339 (lire en ligne) », XI European Arachnologisches Colloquium, septembre 1988, p. 332-339 (lire en ligne),‎
  5. A.Lopez, avec L. Juberthie-Jupeau, « – Ultrastructure des glandes labio-sternales et péri-buccales chez Wendilgarda mustelina arnouxi Lopez & Emerit (Araneae, Theriiosomatidae). », Rev. Arachnol., 10 (4), p. 75-92.,‎
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