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Gisèle de Failly

Gisèle de Failly (née le et morte le à Paris) est une pédagogue française, fondatrice des Centres d'Entraînement aux Méthodes d'Éducation Active (CEMÉA).

Gisèle de Failly
Portrait de Gisèle de Failly
Gisèle de Failly (à droite)
Biographie
Naissance
16e arrondissement de Paris
DĂ©cès (Ă  83 ans)
16e arrondissement de Paris
Nationalité Française
Thématique
Profession PĂ©dagogue (en) et psychologue

Biographie

Enfance

Gisèle de Failly, née le . Issue d'une famille bourgeoise catholique traditionnelle, Gisèle de Failly se détache assez vite du schéma familial, jusqu'à rompre tout lien. C'est une jeune femme indépendante, qui possède une grande soif d'apprendre.

Formation, développement des idées personnelles

Gisèle de Failly a suivi une formation scientifique.

C'est au cours de voyages Ă  l'Ă©tranger que sa vision de l'Ă©ducation change fondamentalement :

« J’avais visitĂ©, dans la banlieue de Londres, un Ă©tablissement secondaire d’avant-garde qui accueillait 2 000 enfants et jeunes de onze Ă  dix-huit ans et, en entrant dans une vaste pièce que l’on appelait « laboratoire d’histoire et de gĂ©ographie », [...] j’avais pu voir des Ă©lèves de tous âges, affairĂ©s dans les travaux que leur assignaient des « tâches » prĂ©vues pour accomplir un programme minimum qui permettait d’atteindre le niveau des examens officiels et laissait le reste du temps Ă  l’activitĂ© libre. Chacun Ă  son grĂ© faisait ses recherches, disposait ses papiers par terre ou sur un mur, relevait une information, Ă©crivait, dessinait, peignait, allait vers une bibliothèque. Des groupes de discussion se formaient, les petits se mĂŞlant souvent aux grands avec curiositĂ©. Le maĂ®tre, professeur d’histoire, se trouvait parmi les jeunes et venait lĂ  oĂą on l’appelait. J’étais en admiration devant cet ordre dans le dĂ©sordre, ordre de la pensĂ©e qui se cherche et se construit dans le foisonnement de la vie. Le « laboratoire de mathĂ©matiques » oĂą je passai quelques instants Ă©tait non moins animĂ© et actif. J’eus l’occasion de voir ailleurs d’autres essais : l’école Decroly Ă  Bruxelles ; l’Odenwald Schule en Suisse ; des classes nouvelles en France, notamment au lycĂ©e d’OrlĂ©ans, etc., mais ces premières impressions d’un monde nouveau entrevu oĂą la sĂ©lection, la compĂ©tition n’avaient plus de sens, devaient me donner la certitude qu’une autre Ă©ducation Ă©tait possible et la volontĂ© de contribuer Ă  la transformation des idĂ©es habituellement reçues et des prĂ©jugĂ©s sur lesquels nous vivions[1]. »

En 1932, au VIe Congrès mondial de la Ligue internationale, auquel quarante nations participaient et dont le thème était : « l’éducation dans ses rapports avec l’évolution sociale », Gisèle de Failly découvre « des bases scientifiques aux expériences dont [elle a vu] la réalisation ». Cependant, à la suite d'un incident dans une école pratiquant ces expérimentations éducatives (un rêve raconté par un enfant en classe mettant en cause un notable), et aux démêlés qui en découlèrent avec l'administration, elle « mesure l’impossibilité de se lancer dans des voies nouvelles à l’intérieur du cadre institutionnel[1] ».

En 1934, Gisèle de Failly suit un cours d'été dirigé par Maria Montessori, qui l'ouvre à d'autres horizons. Tout en subvenant à ses besoins, elle obtient un diplôme de psychologie appliquée, à l'institut de psychologie, afin de « mieux appréhender les problèmes de l'éducation »[1]. Jusqu’en , elle exerce la fonction de « chargée de la coordination des éléments du service social » à la mairie de Suresnes dont le maire, Henri Sellier, devint quelques mois plus tard ministre de la Santé du Front populaire. Gisèle doit faire face à des problèmes sociaux importants, qui élargissent son champ de vision de la personne à la population. Cependant, elle quitte ce travail dur pour des raisons de santé. Elle rejoint l'association de l'Hygiène par l'exemple (HPE), dont le but est l'installation d'équipements d'hygiène dans les communes rurales, souvent défavorisées.

Ses premières expérimentations sur l'éducation nouvelle

En 1936, une occasion se présente pour son projet : Mme Fillon, institutrice en école maternelle, propose que les installations réalisées dans les écoles aménagées et bien situées servent l'été pour recevoir des enfants en colonie de vacances. Le projet séduit l'association, il est nommé « Maisons de campagne des écoliers ». Une école à quatre classes est choisie. Elle est située à Saint-Maurice-sur-Moselle, dans les Vosges, pays de petite montagne, ce qui, pour l'association, avait son importance. L’école possède lavabos, douches, cantine. Le directeur de l'école apporte son aide à l'organisation de deux séjours de 27 enfants chacun. Gisèle s'implique beaucoup dans ce projet et découvre les problèmes du recrutement des enfants, des « surveillants », des directrices, des points de vue et exigences des organisateurs et des nombreux problèmes matériels (visite médicale, rapports avec les parents, trousseau)[1]. Les directrices et Gisèle développent un projet pédagogique qui doit « profondément différencier les Maisons de campagne des écoliers des colonies de vacances, et particulièrement de la colonie-caserne, qui se répandait, avec sa hiérarchie, ses règlements, sa discipline »[1]. Durant le séjour, Gisèle est frappée par l'ignorance des « surveillantes » embauchées, « qui découvraient la montagne en même temps que les enfants et n'avaient pas la moindre idée de ce que pouvait être leur rôle »[1].

Au retour, l'association comprend l'importance de former les personnes encadrantes, afin d'assurer la qualitĂ© du sĂ©jour[1]. Gisèle de Failly propose que cette formation soit faite sur place, avec des enfants. L'inspectrice de la jeunesse et des sports organise en une rencontre entre Gisèle et AndrĂ© Lefèvre[2], commissaire national des Éclaireurs de France de l'Ă©poque, qui, de son cĂ´tĂ©, avait depuis longtemps un projet de formation des surveillants. Il avait mĂŞme entrepris en 1911 de former avant la colonie les jeunes qui devaient l’accompagner. MalgrĂ© les rĂ©ticences de Gisèle de Failly, qui a une vision traditionnelle du scoutisme (sexes sĂ©parĂ©s, grands groupes, hiĂ©rarchie, ...), les deux personnes trouvent de nombreuses similitudes dans leurs visions des centres pour enfants (mixtes, de petite taille, avec beaucoup d'activitĂ©s de nature) et de la formation (pratique et pas seulement thĂ©orique)[3]. Souhaitant inviter des personnes de la France entière Ă  la formation, elles craignent juste que le prix du trajet et le sacrifice des congĂ©s ne rebutent les candidats. Pour mettre les chances de son cĂ´tĂ©, l'association politise alors le projet (dans la mouvance du Front populaire). Gisèle de Failly prend contact avec LĂ©o Lagrange, le « ministre des Loisirs », avec Mme Brunschwicg, secrĂ©taire d’État Ă  l’Éducation nationale, avec Suzanne Lacore, secrĂ©taire d’État Ă  la SantĂ© publique, dont dĂ©pendaient alors les colonies de vacances. Henri Sellier qu'elle connait dĂ©jĂ  lui donne une subvention de 10 000 francs. Jean Zay, ministre de l'Ă©ducation, mobilise les inspecteurs et directeurs d'Ă©cole normale (formant les instituteurs), en signant une circulaire, pour trouver des instructeurs expĂ©rimentĂ©s et des stagiaires. Les hauts fonctionnaires jugent le projet comme une attaque Ă  la hiĂ©rarchie (pourquoi former des enseignants qui exercent depuis 10 ans et connaissent mieux leur mĂ©tier que personne?), mais le ministre de la santĂ© ne souhaite pas s'occuper des colonies de vacances et dĂ©lègue volontiers cette tâche. Finalement, 160 personnes s'inscrivent en quelques jours, et le nombre de participants est augmentĂ© Ă  60.

Le premier « centre d'entraînement » organisé par Gisèle de Failly et André Lefèvre a lieu à Pâques 1937, à Beaurecueil, au pied de la montagne Sainte-Victoire, avec une quinzaine d'instructeurs. Gisèle de Failly y apprend la possibilité d'instaurer une égalité entre instructeurs et stagiaires et l'intérêt des réunions de bilan entre instructeurs à la fin de chaque journée, puis s'aperçoit que c'est une méthode qui est donnée au stagiaire pour encadrer les enfants et les éduquer. Elle découvre grâce aux autres instructeurs différentes activités qui peuvent être des supports à l'éducation (le conte, la musique avec fabrication d'instruments, ...). Ce stage deviendra a posteriori l'événement fondateur symbolique des Centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (CEMÉA).

Au cœur du développement des CEMÉA

11 stages ont lieu en 1939, et en 1943 on totalise 3 000 stagiaires formĂ©s depuis la crĂ©ation des centres d'entrainement. En , Gisèle de Failly devient directrice des CEMÉA, Henri Laborde dĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral. Le mouvement prend de l'ampleur Ă  la libĂ©ration, avec des subventions versĂ©es par le ministère de l'Ă©ducation qui apportent une lĂ©gitimitĂ© Ă  l'association et lui permettent de passer ses bĂ©nĂ©voles responsables (dont Gisèle) en permanents. Elle en devient un personnage charismatique. Elle fonde en 1946 la revue des CEMÉA Vers l'Ă©ducation nouvelle, et y Ă©crira près de 120 articles, puis crĂ©e les Ă©ditions du scarabĂ©e. Avec Laborde, l'Ă©cole nouvelle de Boulogne est dĂ©veloppĂ©e. Cette expĂ©rience pĂ©dagogique dure de 1947 Ă  1952.

En 1967, elle devient déléguée générale, à la mort d'Henri Laborde. En 1969, elle laisse sa fonction à Denis Bordat.

Ses principes d'Ă©ducation

C'est petit à petit que Gisèle de Failly a développé ses principes de l'éducation nouvelle, grâce à de nombreuses rencontres. Ce n'est qu'en 1957 qu'elle les résume, à travers des conférences et un texte, les principes qui guident notre action : cessions de formations laïques, mixes, courtes, sans les enfants, en internat, pour immerger les adultes dans le monde des enfants tout en permettant de donner des connaissances théoriques, et en laissant une large place à la pratique (et le droit à l'erreur avant le contact aux enfants) et à l'éducation par le jeu; colonies de vacances mixtes, laïques, en petit groupe, avec un attachement aux besoins de chaque individu (épanouissement personnel) mais aussi à l'apprentissage de la vie en collectivité, apprentissage par le jeu, acquisition d'autonomie, ... Elle réaffirme également le droit aux vacances, aux loisirs, à l'éducation et à la culture pour tous. Si les méthodes continuent d'évoluer et si aucun stage ne se ressemble, les principes développés par Gisèle de Failly restent toujours d'actualité 50 ans plus tard, non seulement pour le monde périscolaire mais aussi pour celui de l'éducation [4]:

  • « Tout ĂŞtre humain peut se dĂ©velopper et mĂŞme se transformer au cours de sa vie. Il en a le dĂ©sir et les possibilitĂ©s.
  • Il n’y a qu’une Ă©ducation. Elle s’adresse Ă  tous. Elle est de tous les instants.
  • Notre action est menĂ©e en contact Ă©troit avec la rĂ©alitĂ©.
  • Tout ĂŞtre humain, sans distinction de sexe, d’âge, d’origine, de convictions, de culture, de situation sociale a droit Ă  notre respect et Ă  nos Ă©gards.
  • Le milieu de vie joue un rĂ´le capital dans le dĂ©veloppement de l’individu.
  • L’éducation doit se fonder sur l’activitĂ©, essentielle dans la formation personnelle et dans l’acquisition de la culture.
  • L’expĂ©rience personnelle est un facteur indispensable du dĂ©veloppement de la personnalitĂ©.
  • La laĂŻcitĂ©, c’est l’ouverture Ă  la comprĂ©hension de l’autre dans l’acceptation des diffĂ©rences et dans le respect du pluralisme. C’est aussi le combat pour la libertĂ© d’expression de chacun et contre toute forme d’obscurantisme, de discrimination, d’exclusion et d’injustice. » (extraits des principes)

Références

  1. S’il avait été difficile de naître, il serait plus difficile encore de grandir, Gisèle de Failly, dans Les Ceméa, qu’est-ce que c’est ?, Denis Bordat, ed François Maspero, 1976
  2. « André Lefèvre », sur Scoutopedia (consulté le ).
  3. « Cappy : Création des CEMEA », sur Scoutopedia (consulté le ).
  4. Quelques principes qui guident notre action, 1957, congrès des CEMEA de Caen

Voir aussi

Bibliographie

Gisèle de Failly a écrit près de 120 articles dans la revue Vers l'éducation nouvelle.

  • Qu'est-ce qu'un stage de formation, AndrĂ© Sirota, article de la revue des CEMÉA Vers l'Ă©ducation nouvelle no 533, , 89 p., p. 62 Ă  74.

Articles connexes

Liens externes

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