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Gestion de crise

La gestion de crise est l'ensemble des modes d'organisation, des techniques et des moyens qui permettent à une organisation de se préparer et de faire face à la survenance d'une crise, puis de tirer les enseignements de l'évÚnement pour améliorer les procédures et les structures dans une vision prospective.

Les conséquences d'un ouragan, une situation de crise.

Rappel : qu'est-ce qu'une crise ?

Étymologiquement parlant, le mot « crise » associait les sens de « dĂ©cision » et « jugement » ; en grec ancien, « ÎșÏÎŻÏƒÎčϛ », la crise, est une dĂ©cision, entre deux choix possibles. Une crise suppose donc une prise de dĂ©cision, une action pour s’en sortir. La crise est une situation insolite caractĂ©risĂ©e par son instabilitĂ©, qui oblige Ă  adopter une gouvernance spĂ©cifique pour revenir au mode usuel de vie. Par gestion de crise, on entend ce mode de gouvernance[1].

La notion de crise a ensuite par extension décrit la phase décisive d'une maladie (individuelle ou épidémique). Puis, hors du champ médical, le terme « crise » s'est étendu à l'idée de troubles, de situations de déséquilibre profond, puis de désordre graves (sociaux, économique, politique, géopolitique, climatique, etc.).

Ce concept venant du champ mĂ©dical s'est Ă  nouveau rapprochĂ© du domaine de la santĂ© pour dĂ©crire et gĂ©rer des Ă©tats critiques en matiĂšre de risque pandĂ©mique, de maladies infectieuses Ă©mergentes ou du systĂšme de prise en charge sanitaire. Il est Ă©galement trĂšs attachĂ© aux domaines Ă©conomiques et financiers, puis des ressources Ă©cologiques dans une sociĂ©tĂ© mondialisĂ©e plus que jamais dĂ©pendante de ressources finies, productrices de dĂ©chets toxiques ou dangereux, et dĂ©pendante d'un systĂšme oĂč la valorisation d'un capital est presque entiĂšrement basĂ©e sur sa consommation, pour entretenir un systĂšme de production qui n'a pas de rĂ©gulation politique forte et qui est une menace pour la santĂ© des Ă©cosystĂšmes et d'une partie de la population. Il peut de plus y avoir une contradiction dans les termes. La crise semble parfois mĂȘme ĂȘtre un mode de gestion. Ainsi peut-on lire dans un rapport français de 2006 :

« "Gérer la crise" est d'un certain point de vue une contradiction dans les termes. On ne gÚre pas le tourment, le trouble ; on s'efforce d'éviter qu'il se produise, d'en minimiser les effets ou de rétablir l'ordre. »[2]

— Jean-François Girard et al., Rapport de la mission d'Ă©valuation et d'expertise de la veille sanitaire en France

Grandes phases d'une gestion de crise

Anticiper et se préparer semble nécessaire pour mieux réagir en cas de survenance de la crise. Le gestionnaire de risque doit donc analyser, évaluer et hiérarchiser les risques principaux, les enchaßnements possibles de causes et conséquences, et leur trouver des parades, des moyens d'adaptation et de restauration.

  • La dĂ©marche d'analyse de risque commence par l'identification des objectifs principaux de l'entitĂ© qui la mĂšne. Un risque est relatif. Il ne prĂ©sente thĂ©oriquement de gravitĂ© que s'il met en danger la rĂ©alisation d'un de ces objectifs.
  • L'Ă©tape suivante est l'Ă©valuation du couple probabilitĂ© d'occurrence / gravitĂ© potentielle. Le gestionnaire de risque va chercher Ă  parer les risques dont la gravitĂ© couplĂ©e Ă  la probabilitĂ© est la plus Ă©levĂ©e. Pour cela, une Ă©valuation sĂ©parĂ©e des deux grandeurs sera rĂ©alisĂ©e selon des critĂšres objectifs et/ou subjectifs. Ensuite, les deux grandeurs seront multipliĂ©es pour obtenir une cotation.
Exemple :

Le risque que ma femme me quitte (cotĂ© 4/5 en termes de gravitĂ©) si je passe encore la soirĂ©e Ă  regarder le foot chez les copains prĂ©sente une probabilitĂ© de 5/5. La cotation globale est de 4*5 = 20 sur une Ă©chelle qui s'arrĂȘte Ă  25 (5*5).

Une fois les risques classés par ordre décroissant, le gestionnaire de risque va chercher les leviers d'actions permettant d'y parer. Cette recherche sera menée en analysant les différentes relations de cause à effet pouvant amener à la réalisation du risque.

Ceci nécessite de disposer de moyens et outils de veille et d'évaluation et donc de prévision, et si possible de prévention. Des moyens partagés et une approche collaborative permettraient d'en diminuer les coûts.

Anticipation

L'anticipation d'une crise vise à anticiper sur la possible survenance d'événements générateurs de crise, par la mise en place de mesures adaptées.

Ces mesures visent à réduire la probabilité de survenance déterminée lors de l'analyse de risque.

Prévision

C'est la définition et la localisation du danger. Il existe des dangers imprévisibles, mais la préparation à gérer un danger est le moyen d'accélérer les réponses et la résilience en cas de crise d'une autre nature.

Exemple :

La préparation à une crise pandémique met en place des outils, mécanismes et réflexes proches et pour partie identiques à ceux qui seraient nécessaires en cas de crise de type guerre nucléaire, ou attaque bioterroriste.

La prévision de crise indique dans quelle limite de temps le danger peut affecter la population et les aménagements.

Protection

L'objectif de la protection (par exemple la protection civile) est de réduire la gravité de l'événement quand et s'il se produit.

Les mesures de protection sont étudiées et pré-déployées à l'avance, mais ne prennent toute leur importance que lorsque le risque s'est réalisé ; elles sont conçues pour en limiter les impacts et les dégùts collatéraux. Exemple : les bùtiments parasismiques.

Gestion de la crise

Selon le type d'événement générateur et les impacts et conséquences qu'il crée, une crise plus ou moins grave peut survenir, dont la résolution passe par un mode de gouvernance et un mode de communication spécifiquement adaptés à la situation : la gestion de crise et la communication de crise.

Lorsque l'événement affecte tout un pan d'activités, la gestion de crise s'accompagne généralement du déploiement d'un plan de continuité d'activités (qui fait partie des mesures de protection).

Quel que soit le type d’évĂ©nement auquel il faut faire face, la gestion de crise prĂ©sente certaines caractĂ©ristiques permanentes.

Diagnostic, action et décision

Elle exige une capacité de diagnostic, de bonne réaction et donc de décision.

La situation est avant tout une situation d'urgence. Il est déterminant de percevoir rapidement la gravité de la situation, les priorités induites et les décisions les plus adaptées aux circonstances.

Organisation

La gestion de crise requiert également de la part des autorités responsables une capacité à organiser et à rassembler les efforts des différents intervenants.

Dans la crise du tsunami, les diffĂ©rents pays touchĂ©s ont leurs propres institutions et divers systĂšmes d'organisations. Le prĂ©fet en France, est au centre de l'ensemble du dispositif : il veille Ă  l’unitĂ© et Ă  la cohĂ©rence des diffĂ©rentes interventions.

Communication

La communication de crise est fondamentale : en communication interne, il s'agit de permettre les actions et optimiser le temps de réaction en communiquant. Le terme est utilisé en communication externe pour alerter et informer et également pour conserver la confiance des parties prenantes ou du public le cas échéant pour l'avenir.

Son intĂ©rĂȘt est Ă©conomique et politique.

Retour d'expérience

Bilan de la gestion de crise.

GĂ©rer le risque, c'est agir sur deux domaines essentiels que sont la prĂ©vention et l'intervention, d'oĂč l'importance de tirer un bilan de la crise dans un souci de rĂ©silience.

Outils de la gestion de crise

Les principaux outils et moyens mobilisés sont :

  • le plan de gestion de crise : plan communal de sauvegarde (PCS), plan ORSEC (Organisation de la rĂ©ponse de sĂ©curitĂ© civile), plan de secours spĂ©cialisĂ© (PSS), ... quand ils existent et ont Ă©tĂ© correctement prĂ©parĂ©s ;
  • le plan de communication de crise : pour Philippe Collet, spĂ©cialiste de ces questions Ă  EDF pour l'industrie nuclĂ©aire[3], une bonne communication devrait traduire « le consensus entre les diffĂ©rents intervenants et cela aussi bien sur ce qui conforte leurs analyses rĂ©ciproques que sur les Ă©lĂ©ments de divergence » ;
  • les plans opĂ©rationnels de crise : plans de prĂ©vention : sĂ©curitĂ© (biens), sĂ»retĂ© (personnes), sĂ»retĂ© de fonctionnement (fiabilitĂ©) et plans de protection : plan de continuitĂ© d'activitĂ©s (mĂ©tier de l'entreprise), plan de secours (informatique).

En 2007, on voit apparaĂźtre un site Internet de crowdsourcing, Ushahidi, qui permet aux individus de collaborer Ă  la gestion de la crise. InventĂ© pour rĂ©pondre aux violences postĂ©lectorales au Kenya en 2007-2008, il a depuis Ă©tĂ© utilisĂ© lors de catastrophes majeures telles que le sĂ©isme de 2010 Ă  HaĂŻti, le sĂ©isme de 2010 au Chili et une tempĂȘte de neige Ă  Washington DC.

  • Les annĂ©es 2000 voient apparaĂźtre un nouveau mode de gestion de certaines crises (au sein des entreprises) : le « management de transition ».

Simulation de crise

Les crises Ă©tant essentiellement imprĂ©visibles, il est important de tout faire pour ĂȘtre Ă  mĂȘme, lorsque cela sera jugĂ© nĂ©cessaire, d’agir le plus rapidement et le plus efficacement possible.

À cet effet, des mises en situation sont organisĂ©es afin de mettre en pratique les grandes Ă©tapes de la gestion de crise listĂ©es prĂ©cĂ©demment ; dans le cadre universitaire (voir l’École nationale supĂ©rieure des mines de Nancy[4] et d'AlĂšs, l'UniversitĂ© Lille I[5], l’INSEEC, l'Institut National des Sciences AppliquĂ©es (INSA) de Rouen, en science politique Ă  l'UniversitĂ© Lyon 3 par Thomas Meszaros et son Ă©quipe dans le cadre de simulations de gestion de crises internationales[6] - [7] - [8], pour former les futurs cadres, par le biais de l'Institut National des Hautes Ă©tudes de sĂ©curitĂ© et de justice (INHESJ), Ă©tablissement public de formation placĂ© sous tutelle du Premier Ministre, qui forme les futurs prĂ©fets et les dĂ©cideurs publics et privĂ©s, ou encore par celui de sociĂ©tĂ©s de conseil et d’accompagnement aux entreprises. On soumet alors aux participants un ou plusieurs cas de crises, qu’il leur conviendra de gĂ©rer au mieux pour minimiser leurs retombĂ©es nĂ©gatives.

À noter que ces exercices peuvent Ă©galement s’exercer dans un cadre plus formel, sous l’impulsion d’un gouvernement ou d’une administration[9].

Gestion de crise et réseaux sociaux

La gestion de crise s'appuyant sur les rĂ©seaux sociaux, ou suscitĂ©e par ces derniers semble ĂȘtre une des dimensions Ă©mergentes du XXIe siĂšcle, de la « modernisation sociale des entreprises »[10] et peut-ĂȘtre du « mĂ©tier » de gestionnaire de crise[11]. En effet, avec l'avĂšnement du Web 2.0, et de rĂ©seaux sociaux de grande Ă©tendue et potentiellement trĂšs rĂ©actifs, tels que Facebook ou Twitter, de nouvelles façons de communiquer ont vu le jour.

Les rĂ©seaux sociaux et leurs solidaritĂ©s ont toujours contribuĂ© Ă  la rĂ©solution ou Ă  l'attĂ©nuation de crises graves (Ex : 700 communes privĂ©es d'Ă©lectricitĂ© par -25 °C lors de la tempĂȘte de glace de [12]), bien qu'ils puissent aussi susciter des crises (dans le cas des guerres notamment[13] et migrations liĂ©es Ă  des causes gĂ©opolitiques). Avec les NTIC, ils peuvent le faire plus rapidement, de maniĂšre down-up (Ă  l'initiative d'internaute et d'usagers de tĂ©lĂ©phones mobiles par exemple) ou top-down (Ă  l'initiative de l'entitĂ© qui est en crise). Ils peuvent aussi ĂȘtre utilisĂ©s par une organisation en crise pour communiquer sur la crise et son Ă©volution (de maniĂšre plus ou moins objective et transparente selon les cas, deux paramĂštres qui peuvent influer sur la confiance que les rĂ©cepteurs accorderont Ă  l'information qu'ils recevront par ces rĂ©seaux). Ils permettent une communication multimĂ©dia, latĂ©rale et en rĂ©seaux heuristiques, parfois trĂšs rapide, Ă©ventuellement rĂ©guliĂšre voire quotidienne ou quasi instantanĂ©e. Ils permettent aussi une communication avec des feed backs plus rapides.

Les NTIC sont ainsi trĂšs prisĂ©s par certains services de communication politique ou d'entreprise ou de collectivitĂ©s, qui n’hĂ©sitent pas Ă  les utiliser (ou Ă  ne pas les utiliser) pour Ă©viter, limiter ou remĂ©dier Ă  certaines crises.

AprĂšs le dĂ©veloppement des gestionnaires de communautĂ©[14], des community defensers peuvent jouer un rĂŽle en cas de crise, avec une efficacitĂ© plus ou moins grande selon leurs compĂ©tence dans le domaine concernĂ© par la crise, selon le contenu informatif dont ils disposent et selon leurs compĂ©tences en communication dans ces rĂ©seaux (des rĂšgles implicites organisent les communautĂ©s virtuelles et les rĂ©seaux sociaux, dont certains tolĂšrent ou imposent des textes courts, des photos, des citations de sources, avec ou sans possibilitĂ© d’employer un ton familier, etc.

Certaines crises peuvent rapidement dégrader ou améliorer l'image d'entités, de marques ou de personnes concernées, ce pourquoi la communication de crise intÚgrent maintenant dans certains cas une dimension e-réputation et donc de veille (avec des outils complexes et payants (Mention ou Alerti) ou simples et gratuits tels que Google Alert ou Social Mention.

Notes et références

  1. Gestion de crise. La réponse de l'entreprise de Simone Eiken & Olivier Velin, EFE, 2006
  2. [PDF] Jean-François Girard et al.|http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/rapport_veille_sanitaire/rapport.pdf sante.gouv.fr Rapport de la mission d'évaluation et d'expertise de la veille sanitaire en France Paris, août 2006 (voir notamment pp. 16 et 113)
  3. Philippe Collet (2012) EDF lÚve le voile sur la future Force d'action rapide nucléaire ; Actu-Environnement (2012-03-23, consulté 2013-07-
  4. « Mines Nancy : École d'ingĂ©nieurs, recherche, formation », sur Mines Nancy (consultĂ© le ).
  5. "Lille1 organise une nuit de la crise pour ses Ă©tudiants"
  6. « Chaßnes », sur webtv.univ-lyon3.fr (consulté le )
  7. « Chaßnes », sur webtv.univ-lyon3.fr (consulté le )
  8. « Chaßnes », sur webtv.univ-lyon3.fr (consulté le )
  9. Voir le cas d'HaĂŻti
  10. PR BĂ©langer, M Grant, B LĂ©vesque (1994), La modernisation sociale des entreprises ; Cambridge Univ Press
  11. B Jézéquel, P Gérard (2008) La boßte à outils du responsable communication ; Paris : Dunod, DL 2012 (résumé)
  12. Michel-Kerjan Erwan (2003), http://opim.wharton.upenn.edu/risk/downloads/02-28-EMK.pdf Risques catastrophiques et réseaux vitaux: de nouvelles vulnérabilités] ; Revue: Flux, Novembre 2002, consulté 2013-07-12 via Cairn info (voir p 8/20 du PDF)
  13. Exemple : A Monsutti (2004) Guerres et migrations: rĂ©seaux sociaux et stratĂ©gies Ă©conomiques des Hazaras d'Afghanistan, Les Éditions de la MSH, 364 p.
  14. Un community manager efficace : Tanguy

Annexes

Bibliographie

  • Didier Heiderich, Plan de gestion de crise, Dunod, 2010
  • Christophe Roux-Dufort, GĂ©rer et dĂ©cider en situation de crise, Dunod, 2003
  • HervĂ© Renaudin, Alice Altemaire, Gestion de crise, mode d’emploi, Éditions Liaisons, 2007
  • Pr Louis Crocq, Sophie Huberson, BenoĂźt Vraie, GĂ©rer les grandes crises, Odile Jacob, 2009
  • Thierry Libaert, Crises, de 1 Ă  150, OIC Publications, 3e Ă©dition, 2003-2007
  • Thierry Fusalba, Planification et gestion de crise : Planifier et mettre en Ɠuvre une stratĂ©gie de sortie de crise, L’Harmattan, 2009
  • Patrick Lagadec, La gestion des crises, McGraw Hill, 1991
  • Thomas Meszaros, « L’autonomisation du concept de crise dans le champ de la conflictualitĂ© internationale », Revue de la dĂ©fense nationale, n° 800, , Le dĂ©bat stratĂ©gique en revue, pp.108-112.
  • Thomas Meszaros, « Crise », in BenoĂźt Durieux, Jean-Baptiste JeangĂšne Vilmer, FrĂ©dĂ©ric Ramel, Dictionnaire de la guerre et de la paix, Paris, Presses universitaires de France, 2017, pp. 321-329.

Articles connexes

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