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Frères Muller

Les frères Muller, fondateurs de la verrerie Muller Frères à Lunéville, sont des verriers d'art français de l'époque Art nouveau et de l'époque Art Déco. La famille comprend neuf frères et une sœur. Ils seront tous formés aux métiers du travail du verre. Les plus connus sont Eugène Muller (1883-1914), Désiré Muller (1877-1952) et Henri Muller (1868-1936)[1].

Frères Muller
Lustres gravés. Catalogue de la verrerie d'Art Muller Frères de Lunéville de l'année 1927.

Biographie

Vase Les Baies, Paris, Petit Palais.

Si plusieurs ouvrages avancent que les frères Muller, originaires de Kalhausen (Moselle), s'installent à Lunéville en 1870[2], les recherches récentes ont permis d'établir que les frères ainés de cette famille quittent la Moselle pour Nancy dans un but bien précis : ils sont recrutés en 1894 par Emile Gallé[3]. En effet, le maître verrier nancéien modifie sa stratégie de fabrication et rompt ses liens commerciaux avec la verrerie de Meisenthal en 1894. Cette même année, Emile Gallé fait construire ses propres fours verriers à Nancy et recrute des ouvriers : les frères ainés de la famille Muller, Emile, Henri et Désiré sont alors embauchés par Émile Gallé en tant que commis ou graveurs-décorateurs sur verre [4].

Les frères ainés de la famille Muller ont été formés au travail du verre à la cristallerie de Saint Louis et à la verrerie de Meisenthal au côté de Désiré Christian[3].

Mais, en 1897, Henri Muller quitte Émile Gallé, emportant peut-être avec lui des secrets de fabrication[4]. Il entreprend une association avec la verrerie de Croismare. Sa production est en concurrence directe avec celles d'Emile Gallé et de la manufacture Daum. Henri Hirsch, collectionneur et ami d'Émile Gallé, adresse en 1899 un courrier au maître verrier dans lequel il relate avoir confondu des verreries signés "Muller à Croismare" avec les siennes. Emile Gallé, qui garde vraisemblablement contre les Muller une rancune tenace, répond à Henri Hirsch que « Le misérable qui mène la bande a dû prendre dans mes livres une masse de notes et de même mes recettes, pourtant sous clef »[5].

Mouvement Art Nouveau

À l'époque, les verres sont soufflés à Croismare, dans la verrerie dite gobeleterie Hinzelin. Une deuxième verrerie est établie à Lunéville même en 1910. Les deux manufactures se spécialisent dans la verrerie d'art. De nombreuses pièces en sortent, de belle qualité technique et très proches de celles produites dans l'usine de Gallé à Nancy : vases, lampes et bibelots typiquement Art nouveau.

La production est le plus souvent en verre multicouche[Note 1] - [6], taillée à la roue ou gravée à l'acide fluorhydrique[7] avec des représentations naturalistes. Les plus belles pièces sont terminées par polissage au feu afin de leur donner une belle brillance[8].

De 1905 à 1908, Désiré et Eugène Muller sont recrutés par Léon Ledru, directeur de l'atelier de décoration des cristalleries du Val-Saint-Lambert à Seraing en Belgique. Leur travail consiste à créer une série de verreries décoratives de style Art nouveau et École de Nancy[3].

Mouvement Art DĂ©co

Après la guerre de 14-18, la société Muller devient prospère et l'usine emploie jusqu'à trois cents personnes[9]. La production évolue par la suite vers le style Art déco, créant dans les années 1920 de nombreux plafonniers en verre marmoréen (verre de plusieurs couleurs, les pigments étant incorporés) ou des pièces en verre moulé, les montures étant en laiton, bronze ou fer forgé.

Garnitures de toilette, vaporisateurs et flacons à parfum sont également fabriqués en grand nombre à cette époque[10].

En parallèle de cette production industrielle, des verreries artistiques sont toujours réalisées[11].

À la suite de la grande crise, l'entreprise Muller fait faillite en 1933 et l'usine de Croismare, qui a été rachetée par Daum, ferme à la fin de 1934[2]. Dans les années 50, elle sera transformée en centre d'apprentissage de la verrerie.

Signatures

Les pièces sont signées de plusieurs façons :

  • « Muller Croismare Â», pour les pièces produites dans la verrerie Hinzelin (avant 1914) ;
  • « Muller Frères LunĂ©ville Â» (Ă  partir de 1919) ;
  • « Muller Fres Â», « Muller Fres LunĂ©ville Â» (des pièces authentiques portent bien cette signature, mais la raison de cette variante n'est pas connue).

Les lustres signĂ©s « GV de Croismare Â» (signifiant « grande verrerie de Croismare Â») correspondent Ă  des pièces Ă©galement produites par les frères Muller, vraisemblablement dans les annĂ©es 1910-1920.

Il convient d'être vigilant car depuis les années 1990, de nombreuses contrefaçons circulent sur le marché, reprenant plus ou moins les véritables signatures[12] - [13].

Postérité

Les verreries d'art des frères Muller demeurent rares dans les collections muséales.

Vase géant aux branches de marronnier, Grand Curtius, Liège (Belgique)
  • Le MusĂ©e de l'Ecole de Nancy conserve une collection importante de verreries rĂ©alisĂ©es par les Frères Muller Ă  l'Ă©poque de l'Art Nouveau. Ces verreries ont Ă©tĂ© rĂ©unies par Eugène Corbin. Celui-ci avait constituĂ© dès les annĂ©es 1900 une très importante collection d'Ĺ“uvres rĂ©alisĂ©es par les artistes de la rĂ©gion de Nancy, et il a fait don de sa collection Ă  la ville de Nancy afin que soit crĂ©Ă© un musĂ©e de l'Ecole de Nancy.
  • Le Kunstmuseum de DĂĽsseldorf en Allemagne conserve Ă©galement des exemples de verreries art nouveau rĂ©alisĂ©es par les frères Muller, issues notamment de la collection du professeur Helmut Hentrich et de la collection Gerda Koepff.
  • Le MusĂ©e du Petit Palais Ă  Paris comprend dans ses collections des verreries d'art rĂ©alisĂ©es par les frères Muller, celles-ci proviennent de la collection de Louis Corbin.
  • Le Chrysler Museum of Art de Norfolk aux Etats-Unis rassemble des verreries des frères Muller d'Ă©poque art nouveau et art dĂ©co.
  • Le MusĂ©e des Beaux-Arts de Bruxelles en Belgique prĂ©sente au public un ensemble de verreries rĂ©alisĂ©es par DĂ©sirĂ© et Eugène Muller entre 1905 et 1908 Ă  la cristallerie du Val-Saint-Lambert. Ces verreries faisaient partie de la collection du baron et de la baronne Gillon-Crowet.
  • Le MusĂ©e de Liège en Belgique prĂ©sente en particulier un vase gĂ©ant aux branches de marronnier, rĂ©alisĂ© par DĂ©sirĂ© et Eugène Muller entre 1906 et 1908 Ă  la cristallerie du Val-Saint-Lambert[14].

Expositions

  • Exposition de la cristallerie et de la verrerie, 1910, musĂ©e Galliera (Petit Palais).
  • Verrerie Art Nouveau L'exemple des Frères Muller, 2007, MusĂ©e de l'Ecole de Nancy, Nancy[15].
  • Flacons du XIXe eu XXIe siècle, 6 avril - 27 novembre 2022, la Halle du Verre, Claret 34270[10].

Bibliographie

  • Collectif, Transparences Histoire du verre et du cristal en Lorraine, Catalogue d'exposition 6 octobre 2007 - 7 janvier 2008, MusĂ©e Lorrain, Ă©diteur Serge Domini, 2007.

Notes et références

Notes

  1. jusqu'Ă  sept couches de verre

Références

  1. Ouvrage collectif Musée Lorrain, Transparences Histoire du verre et du cristal en Lorraine, Serge Domini éditeur, , 199 p. (ISBN 978-2-912645-96-8), p. 96-97
  2. Larousse, dictionnaire des antiquités, Jean Bedel, 1999
  3. Thomas Valérie, Otter Blandine, Schmitt Eva, Pluymaekers Anne, Lemoine Thierry, VERRERIE ART NOUVEAU L'EXEMPLE DES FRERES MULLER, Paris, Somogy MUSEE DE L'ECOLE DE NANCY, (ISBN 978-2-7572-0114-5)
  4. François Le Tacon, L'œuvre de verre d'Émile Gallé, Éditions Messene, Jean de Cousance éditeur, 1998.
  5. lettre d'Émile Gallé, 3 juillet 1899, citée par Françoise Charpentier en 1994 (source : page 233, renvoi 4 Un vulgarisateur de l'art du livre L’œuvre de verre d'Emile Gallé de François le Tacon, sorti en 1998).
  6. Encyclopédie des techniques du verre, « Verre multicouche - overlay », sur idverre.net (consulté le ).
  7. Fr.411answers.com, « Quel acide est utilisé pour graver le verre ? », sur fr.411answers.com (consulté le ).
  8. Judith Miller, L'art Nouveau, GrĂĽnd, 2005.
  9. Ministère de la Culture, « Verrerie dite Verrerie Muller (usine de gravure et de décoration sur verre) », sur pop.culture.gouv.fr, (consulté le ).
  10. FADAT Manuel, Flacons du XIXe au XXIe siècle, Halle du Verre Musée du verre de Claret, Communauté de Communes du Grand Pic Saint-Loup, , 52 p., p. 16-17
  11. Janine Bloch-Dermant, Le verre en France d'Emile Gallé à nos jours, les éditions de l'amateur, (ISBN 2-85917-029-4), p. 71-73
  12. « La triste saga des Muller Â», Aladin, Hors sĂ©rie, Le faux, mars 2007.
  13. Muller Frères - signatures
  14. Grand Curtius, « Vase « géant » aux branches de marronnier », sur grandcurtius.be (consulté le ).
  15. Thomas, Valérie, « Verrerie Art Nouveau - L'exemple des frères Muller », sur archivesdunord.fr, (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Janine Bloch-Dermant, Le verre en France d'Emile GallĂ© Ă  nos jours, les Ă©ditions de l'amateur, 1990.
  • Thomas ValĂ©rie, Otter Blandine, Schmitt Eva, Pluymaekers Anne, Lemoine Thierry, Verrerie Art Nouveau L'exemple des Frères Muller, Ă©ditions Somogy Paris, Catalogue de l'exposition du MusĂ©e de l'Ecole de Nancy, 2007
  • Victor Arwas, Paul Greenhalgh, Dominique Morel et Marc Restellini [archive], L'Art Nouveau, la RĂ©volution dĂ©corative, Éd. Pinacothèque de Paris/Skira ; catalogue de l'exposition Ă  la Pinacothèque de Paris, 2013.
  • Denise Bloch, Etienne Martin, Zoom sur l'Art nouveau , Ă©ditions Association d'idĂ©es, Nancy, 2015.

Liens externes

Sites internet

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