ForĂȘt d'Ebo
La forĂȘt d'Ebo â parfois Ebo Forest Proposed National Park â est un vaste espace boisĂ© du Cameroun, principalement situĂ© dans la rĂ©gion du Littoral.
ForĂȘt d'Ebo | ||
Localisation | ||
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CoordonnĂ©es | 4° 42âČ 59âł nord, 10° 35âČ 56âł est | |
Pays | Cameroun | |
GĂ©ographie | ||
Superficie | 110 000 ha | |
Essences | BiodiversitĂ©, prĂ©sence de grands singes et d'Ă©lĂ©phants de forĂȘt exceptionnels | |
GĂ©olocalisation sur la carte : Cameroun
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Histoire
Situation
Une quarantaine de communautĂ©s, souvent pauvres ou trĂšs pauvres, vivent aujourd'hui autour de cette forĂȘt, dont l'ethnie des Banens qui â rappelle Victor Yetina (chef du village de Ndik Bassogog, et se prĂ©sentant comme porte-parole des Banens qui y habitent) â ont Ă©tĂ© « dĂ©possĂ©dĂ©s » de ces territoires « dans les annĂ©es soixante, lors des luttes pour lâindĂ©pendance du Cameroun sous le gouvernement du prĂ©sident Ahmadou Ahidjo qui de 1960 Ă 1965 aprĂšs les indĂ©pendances a dĂ©cidĂ© de vider cette forĂȘt de ses habitants pour sĂ©curiser ce territoire contre les maquisards qui pouvaient s'y cacher, « Depuis ce temps-lĂ , nous nâavons pas eu le droit de revenir dans la forĂȘt, la nature a recouvert nos villages en son centre, nos cimetiĂšres et nos plantations », explique-t-il. « Nous ne voulions pas que lâĂtat s'approprie le foncier »[1].
GĂ©ographie
Localisation
Située en partie dans la région du Littoral et en partie dans la région voisine du Centre (Départements du Nkam, de la Sanaga Maritime et du Mbam&Inoubou, Arrondissements de Yingui, de Ngambé et de Ndikiniméki).
Superficie
Cette forĂȘt couvre une superficie d'environ 1 500 km2[2].
Mi 2020, il ne fait pas l'objet d'une protection par l'Ătat, bien qu'Ă©cosystĂšme forestier considĂ©rĂ© comme le plus intact et le plus important du Golfe de GuinĂ©e, qui est lui mĂȘme un des points chauds mondiaux de biodiversitĂ© selon Morgan & al. en 2011.
Birdlife international ajoute quâavec ses environ 1400 km2 (141 706 hectares selon le gouvernement)[3] câest le plus grand massif naturel boisĂ© non-fragmentĂ© de lâune des 37 zone-clĂ© de biodiversitĂ© du Cameroun, celle de Yabassi (zone, en 2020 non officiellement protĂ©gĂ©e, qui associe la forĂȘt dâEbo Ă celles de Makombe (600 km2) et de Ndokbou (1000 km2).
Faune et flore
IntĂ©rĂȘt Ă©cologique
Remarquable par sa biodiversitĂ©, elle abrite notamment d'importantes populations de grands singes (chimpanzĂ©s (pour lesquelles les Ă©thologiques ont constatĂ©, que les individus utilisent des bĂątons pour « pĂȘcher » les termites, et des pierres en quartz en forme de marteau, ainsi que des « massues » de bois comme casse-noix. La forĂȘt d'Ebo serait la seule au monde oĂč « la mĂȘme population de grands singes prĂ©sente les deux comportements »),
On y trouve aussi des gorilles, également des colobes roux du Cameroun, des drills[2] et de nombreuses espÚces rares et/ou menacées d'extinction. Les grands singes sont aussi dans cette région parfois victimes de la zoonose qu'est la maladie d'Ebola[4].
La forĂȘt d'Ebo abrite l'une des plus grandes populations au monde de Drills, et sans doute celle qui a le plus de chances de survie Ă long terme (tant que la forĂȘt n'est pas exploitĂ©e, ou dĂ©senclavĂ©e et alors accessibles aux braconniers)[5]
L'ĂlĂ©phant de forĂȘt, le Perroquet gris, le Picatharte du Cameroun, des drills (l'une des plus grandes populations au monde, probablement dotĂ©e des meilleures chances de survie sur le long terme). Ces espĂšces et bien d'autres, dans la forĂȘt dâEbo dĂ©pendent totalement du caractĂšre naturel et forestier du massif, encore exceptionnellement peu fragmentĂ©. Un grand nombre de ces espĂšces figurent dans la liste rouge de l'UICN des espĂšces menacĂ©s et en danger dâextinction[5].
De nouvelles espĂšces ou sous-espĂšce peuvent encore y ĂȘtre dĂ©couvertes, y compris pour de grands vertĂ©brĂ©s : ainsi une petite population relique de gorilles y a Ă©tĂ© dĂ©couverte en 2002 ; cette sous-population de Gorilles dont le statut taxonomique est encore Ă l'Ă©tude pourrait ĂȘtre une nouvelle (et 5Ăšme) sous-espĂšce de Gorille (3Ăšme sous-espĂšces pour le Cameroun).
On y trouve également plusieurs espÚces de plantes endémiques ou rares, dont certaines portent son nom, telles que Gilbertiodendron ebo ou Talbotiella ebo[2].
Gestion
Menaces
Cette biodiversitĂ© est menacĂ©e par la chasse (viande de brousse), le braconnage et la dĂ©forestation ou d'autres types de conversion des forĂȘts (phĂ©nomĂšne de plus en plus frĂ©quent en forĂȘt tropicale et Ă©quatoriale, africaine notamment[6] - [7]), et pour cette forĂȘt en particulier[8], notamment depuis l'implantation d'une sociĂ©tĂ© productrice dâhuile de palme, sur une superficie de 123 000 hectares, Ă proximitĂ© de la forĂȘt[2].
Projet de statut de protection
Des dĂ©marches Ă©taient en cours pour l'obtention du statut de parc national, soutenues par le Ebo Forest Research Project (EFRP, crĂ©Ă© en 2005)[2]. Le Gouvernement s'Ă©tait engagĂ© en 2006[9] Ă classer cette zone en parc national ; projet ensuite perpĂ©tuellement repoussĂ© puis abandonnĂ© en 2012, selon le MINFOF « Ă cause de la non adhĂ©sion dâune grande partie de la population au projet de crĂ©ation du Parc, en dĂ©pit des campagnes massives de sensibilisation menĂ©es sur le terrain avec lâappui des partenaires actifs dans la conservation »[3], mais ajoutait le ministre : « Le WWF et WCS y conduisent des activitĂ©s de recherche sur certaines espĂšces emblĂ©matiques comme les Ă©lĂ©phants, le Cross river gorilla et les chimpanzĂ©s »[3].
Puis, au contraire, le gouvernement a dĂ©cidĂ©, le 4 fĂ©vrier 2020, dâouvrir le massif aux exploitants forestiers (total de 64 835 hectares ouverts Ă la coupe, avec « une portion rĂ©siduelle de superficie de plus de 10 000 hectares localisĂ©e dans le DĂ©partement du Mbam et Inoubou, reliĂ©e aux diffĂ©rentes enclaves par des corridors de migrations des animaux sauvages ») ...alors qu'il existait dĂ©jĂ dĂ©but 2020 103 unitĂ©s ForestiĂšres d'amĂ©nagement au Cameroun, dont 68 opĂ©rationnelles depuis 2001 [3] ; et sachant que le Cameroun a encore perdu 4.3% de sa couverture vĂ©gĂ©tale (selon Global Forest Watch)[5]
Le dĂ©cret (avis No 0011/AP/MINFOF/DF/SDIAF/SC, du 4 fĂ©vrier 2020, signĂ© par Jules Doret Ndongo, ministre chargĂ© des forĂȘts et de la faune) nâa Ă©tĂ© rendu public que le 9 mars 2020 avec la publication de deux avis publics de crĂ©ation de nouvelles concessions dâexploitation forestiĂšre en forĂȘt dâEbo (UnitĂ©s fonciĂšres dâamĂ©nagement forestier ou UFA, Ă©tablies pour au moins 30 ans)[3], suivis, dĂšs le 10 mars de la mise en place de rĂ©unions visant Ă convaincre les populations proches ou concernĂ©es des bĂ©nĂ©fices espĂ©rĂ©s de ces mises en exploitation[10].
Des organisations de la sociĂ©tĂ© civile (EBO FOREST RESEARCH PROJECT, SEKAKOH et COMAID toutes appuyĂ©es par le PPI) ont demandĂ© (28 avril 2020)[10] au gouvernement camerounais, la suspension du projet dâexploitation forestiĂšre de la forĂȘt dâEbo, au profit dâune invitation des parties prenantes (communautĂ©s locales et vivant autour de la forĂȘt incluses) Ă crĂ©er un plan dâamĂ©nagement du territoire inclusif et multisectoriel. Cette demande a Ă©tĂ© cosignĂ©e par plus de 60 Ă©cologistes et Ă©cologues camerounais et Ă©trangers, et notamment par le prĂ©sident du GSP (Groupe de SpĂ©cialistes des Primates de lâUICN). Cette demande a Ă©tĂ© suivie dâune pĂ©tition internationale, par exemple signĂ©e par Leonardo DiCaprio demandant un classement du massif en zone protĂ©gĂ©e (Parc national)[11].
le 13 juin 2020, des reprĂ©sentants (Ă©lite) des Banens de 7 cantons ont exprimĂ© publiquement leurs dolĂ©ances, souhaitant ĂȘtre associĂ©es, en amont, Ă la dĂ©finition du cahier des charges de l'exploitation[12], et ils ont ensuite remerciĂ© le gouvernement pour le classement en UnitĂ© d'amĂ©nagement[13], espĂ©rant pouvoir rentrer sur leurs anciens territoires ; alors que d'autres parties prenantes s'opposaient Ă l'exploitation forestiĂšre de ce territoire et s'organisaient pour protĂ©ger le territoire des gorilles[14].
Le 14 juillet 2020 un dĂ©cret porte « classement au domaine privĂ© de lâEtat, en tant que forĂȘt de production »[15] dâune « portion de forĂȘt de 68 385 hectares, constituĂ©e en unitĂ© forestiĂšre dâamĂ©nagement dĂ©nommĂ©e UFA 07 006, situĂ©e dans les dĂ©partements du Nkam et de la Sanaga Maritime, rĂ©gion du Littoral »[16].
Ă la suite de nombreuses pĂ©titions et protestations, l'administration camerounaise retire le dĂ©cret de fĂ©vrier 2020 lĂ©galisant la mise en exploitation de plus de 68 000 hectares de cette forĂȘt[1] - [16].
« La prĂ©servation des espĂšces nâest pas possible avec des tronçonneuses, la forĂȘt Ebo sera protĂ©gĂ©e seulement si lâexploitation du bois est interdite » rappelait Sylvie Djacbou (de Green Peace Africa qui a dĂ©clarĂ© rester « vigilante », malgrĂ© lâannulation du dĂ©cret)[1].
Notes et références
- « Au Cameroun, la forĂȘt dâEbo prĂ©servĂ©e », sur La Croix, (ISSN 0242-6056, consultĂ© le ).
- « Les grands singes de la forĂȘt dâEbo menacĂ©s par le report dâun parc national au Cameroun », Mombagay, 21 juin 2017
- « EBO FOREST : Point de presse - ExposĂ© Liminaire du Ministre des ForĂȘts et de la Faune - Partenariat pour les fĂŽrets du bassin du Congo », sur pfbc-cbfp.org (consultĂ© le )
- CĂ©line Genton. CapacitĂ©s de rĂ©cupĂ©ration dâune population de gorilles de plaine de lâOuest (Gorilla gorilla gorilla) Ă la suite d'un effondrement dĂ©mographique engendrĂ© par une Ă©pidĂ©mie Ă virus Ebola. BiodiversitĂ© et Ecologie. UniversitĂ© Rennes 1, 2012. Français. tel-00788973 ; HAL Id: tel-00788973 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00788973
- « ProtĂ©ger la ForĂȘt dâEbo est une urgence â Foder - Partenariat pour les fĂŽrets du bassin du Congo », sur pfbc-cbfp.org (consultĂ© le )
- Nguiffo S & Bassalang M.M. Voir CHAPITRE 20: Lâencadrement juridique d'un phĂ©nomĂšne nouveau - Les conversions de forĂȘts en Afrique centrale
- (en) Mahmoud I. Mahmoud, Mason J. Campbell, Sean Sloan, Mohammed Alamgir et William F. Laurance, « Land-cover change threatens tropical forests and biodiversity in the Littoral Region, Cameroon », Oryx, vol. 54, no 6,â , p. 882-891 (ISSN 0030-6053, e-ISSN 1365-3008, DOI 10.1017/s0030605318000881).
- « Cameroun : Bloc populaire contre le braconnage et les sociĂ©tĂ©s dĂ©truisant lâenvironnement », sur Nouvelles de l'environnement, (consultĂ© le )
- procĂ©dure de classement lancĂ© via la signature de lâavis au public N°0219/AP/MINFOF/SG/DFAP du 03 mai 2006 portant dĂ©claration dâune partie de la forĂȘt dâEbo dâutilitĂ© publique
- courrier au gouvernement camerounais
- « Focus - Cameroun : mobilisation internationale autour de la forĂȘt d'Ebo », sur France 24, (consultĂ© le )
- https://www.cameroon-tribune.cm/article.html/33089/fr.html/classement-de-la-foret-debo-les-banen-presentent-leurs-doleances# Classement de la forĂȘt dâEbo, les Banen prĂ©sentent leurs dolĂ©ances, 17 juin 2020, par Emmanuel TsaĂŻd, Cameroon-Tribune
- « Massif forestier d'Ebo : les riverains disent merci - Cameroun Tribune - Partenariat pour les fÎrets du bassin du Congo », sur pfbc-cbfp.org (consulté le )
- Gorilla Journal ; Zeitschrift der Berggorilla & Regenwald Direkthilfe ; Berggorilla ; Nr. 50 â Juni 2015
- DĂ©cret autorisant le classement au domaine privĂ© de lâEtat.pdf (526.7 Ko)
- « Ebo Forest - Un nouveau dĂ©cret invalide celui du 14 juillet - Partenariat pour les forĂȘts du bassin du Congo », sur pfbc-cbfp.org (consultĂ© le )
Annexes
Bibliographie
- Julian Oliver Caldecott, Lera Miles, World Atlas of Great Apes and Their Conservation, University of California Press, 2005, p. 307 ; 313 (ISBN 9780520246331).
- Ekwoge Enang Abwe, « Le projet de recherche dans la forĂȘt dâEbo », in Gorilla Journal, 40, , p. 3-13 .
- (en) Bethan J. Morgan, Chris Wild et Atanga Ekobo, « Nouvelle population de gorilles dĂ©couverte dans la forĂȘt dâEbo, Province du Littoral, Cameroun », International Journal of Primatology, vol. 24, no 5, p. 1129-1137, rĂ©sumĂ© p. 11, [lire en ligne].
Articles connexes
Liens externes
- (en) Ekwoge Abwe - Community protection of the great apes of Ebo Forest, Cameroon, vidéo, mise en ligne le , 1 min 57 s
- (en) Rescuing Cameroonâs Ebo forest could provide testing ground for local land use solutions (FERN, 10 juin 2020)
- (en) Ebo Forest: A Stronghold for Cameroonâs Wildlife (Globalwildlife: , 30 avril 2020)
- (en) EBO FOREST: TAKE ACTION (Bornfree , 30 juin 2020)
- (en) Ebo forest is a blessing to more than 40 communities, numerous threatened species and the planet (Greenpeace , 30 avril 2020)
- (en) The great apes of Ebo Forest (Whitleyaward, 15 juin 2020)
- (en) CAMEROON: Populations contest Ebo Forest concession project (Afrik 21, 15 avril 2020)
- (en) Ebo forest great apes threatened by stalled Cameroon national park (Mongobay, le 3 avril 2020)
- (en) The Gorillas of the Ebo Forest, Cameroon (Berg Gorilla, le 30 avril 2020)
- (en) News from the field : Ebo forest in Cameroon (IUCN, le 31 mai 2020)
Bibliographie
- Abwe, E. E. & Morgan, B. J. (2008): The Ebo forest: Four years of preliminary research and conservation of the Nigeria-Cameroon chimpanzees (Pan troglodytes). PanAfrica News 15, 26
- APA Onotiang F.M, Foudjet A.E & Atanga E (2019) La protection de la faune dans la forĂȘt dâEbo au Cameroun: entre lĂ©gislation et conservation
- Cheek, M. et al. (2018) Notes on the endemic plant species of the Ebo Forest, Cameroon, and the new, Critically Endangered, Palisota ebo (Commelinaceae). Plant Ecology and Evolution 151 (3), 434-441
- Mfossa, D. M. et al. (2017): Conserving the Ebo gorillas through community collaboration. Gorilla Journal 55, 16-20
- Morgan, B. J. et al. (2011): Regional Action Plan for the Conservation of the Nigeria-Cameroon chimpanzee (Pan troglodytes ellioti). IUCN/SSC Primate Specialist Group and Zoological Society of San Diego
- Morgan, B. J. et al. (2013): The distribution, statut, and conservation outlook of the drill (Mandrillus leucophaeus) in Cameroon. International Journal of Primatology 34 (2), 281-302
- Oates, J. F. et al. (2004): Africaâs Gulf of Guinea forests: Biodiversity patterns and conservation priorities. Advances in Applied Biodiversity Science 6, 1-95
- Whytock R.C & Morgan B.J (2010) The Avifauna of the Ebo Forest, Cameroon. Malimbus, 32, 22-32.
- DOWSETT-LEMAIRE, F., & DOWSETT, R. J. Additions and corrections to the avifauna of Ebo Forest, Cameroon.