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Femme nue couchée au bord de l'eau

Femme nue couchée au bord de l'eau et Grande Baigneuse sont des titres donnés à un tableau daté de 1869 et dont l'attribution au peintre Gustave Courbet fait débat.

Grande Baigneuse
Artiste
Date
Matériau
Dimensions (H Ă— L)
83,3 Ă— 160 cm
Propriétaire

Description

Peint Ă  l'huile sur toile, le tableau mesure 83,3 Ă— 160 cm, hors encadrement. Il est signĂ© « Gustave Courbet » dans le coin infĂ©rieur gauche. Au revers, on voit un tampon du marchand de couleurs « Henry & CrĂ© », celui utilisĂ© pour la seule annĂ©e 1869[1].

Il représente une femme nue couchée sur son flanc gauche, sur un drap blanc posé au bord d'un cours d'eau traversant un sous-bois verdoyant. De sa main droite, elle tortille ses cheveux, et, du bout des doigts de sa main gauche, elle effleure l'eau de la rivière.

Historique et débat d'attribution

Absente des catalogues raisonnés de l’œuvre de Courbet, la Femme nue couchée au bord de l'eau n'est pas documentée avant 2013[1].

Le tableau appartient au galeriste parisien Johann Naldi, qui l'a acheté pour 650 € à l'Hôtel Drouot en octobre 2013[2]. Naldi est connu depuis 2017 pour avoir retrouvé des toiles inédites attribuée au mouvement des Arts incohérents, mais dont l’authenticité a été remise en cause par plusieurs experts et historiens de l'art[3].

Après avoir acheté l’œuvre aux termes d'« un exercice d’auto-conviction », Naldi l'a fait restaurer[4].

En 2019, le tableau est encore inconnu lorsqu'il est exposé pour la première fois, dans le cadre de l'exposition Courbet / Hodler : une rencontre au Musée Courbet à Ornans. Le commissaire de l’exposition, Niklaus Manuel Güdel, écrit alors : « Ne pas retrouver la trace d’une toile n’est, en soi, pas si rare. [...] Or, les recherches sur cette toile, aussi majeure soit-elle, n’ont rien donné quant à son pédigrée, malgré un important déploiement d’énergie. Ce nu sublime, présenté pour la première fois au public à l’occasion du bicentenaire [de la naissance de Courbet], s’inscrit à merveille dans le cycle de nus que Courbet peint dans les sous-bois et au bord de l’eau »[1].

En 2021, le ministère de la Culture accorde un certificat de libre circulation hors du territoire français, facilitant ainsi la vente du tableau aux enchères. Celle-ci devait avoir lieu au château d'Artigny le 4 juin 2023 sous l'Ă©gide de la maison Rouillac, qui a estimĂ© la toile entre 300 000 et 500 000 €[1].

Dans leur notice de vente, les Rouillac insistent sur le fait que l’œuvre a été exposée en 2019 à côté de La Source prêtée par le musée d'Orsay[1]. Leur formulation laissant sous-entendre que le grand musée parisien aurait ainsi validé l'authenticité de la Grande Baigneuse, le musée d'Orsay a rédigé un courrier le 26 mai afin de demander que son nom ne soit plus associé aux documents publicitaires relatifs à cette œuvre[5]. Quelques semaines plus tôt, en réponse à une question posée par Didier Rykner, le musée avait déjà déclaré : « le fait que ce tableau ait été accroché à côté d’un autre tableau prêté par le musée d’Orsay ne vaut en aucun cas validation de l’attribution par ce dernier, le musée d’Ornans ayant la pleine maîtrise de ses projets »[6].

Le 21 avril, le comité Courbet, un comité d'experts lié à l'Institut Gustave-Courbet, habituellement sollicité avant des ventes internationales[7], a publié dans La Gazette Drouot un communiqué exprimant son regret que cette toile « n’ait à ce jour pas été soumise au Comité Courbet qui n’a donc pu l’étudier physiquement », rappelant que toute attribution à « Gustave Courbet, si souvent copié et falsifié, parfois même avec son assentiment et l’aide de ses élèves, est une entreprise bien difficile » et que la méthode collégiale du comité a « pour unique objectif de servir l’artiste et de faire le tri entre ce qu’il a peint et ces innombrables faux, pourtant affublés d’une signature ou d’une dédicace au verso »[8]. Le comité a demandé à voir l’œuvre, mais son propriétaire, Johann Naldi, a refusé sèchement en répondant qu'il « n’a pas à se soumettre à un comité opaque, qui cherche à affirmer son périmètre »[9].

Faute d'acquéreur, le tableau est finalement retiré de la vente[10]. Le commissaire-priseur, Aymeric Rouillac, déclare alors : « Le propriétaire a rêvé, il a analysé, le public était partagé, le marché a tranché »[11].

Notes et références

  1. Thomas Morin-Williams et Aymeric Rouillac, « L'Ultime Grande Baigneuse de Courbet » (notice de la vente du 4 juin 2023), 2023.
  2. Charles de Saint Sauveur, « Il a déniché le dernier nu de Courbet », Le Parisien, 2 avril 2023, p. 10.
  3. « L'authenticité du premier monochrome, peint au XIXe siècle, est remise en question », France Info, 16 avril 2022 (consulté le 17 juin 2023).
  4. Isabelle Brunnarius, « "La Grande baigneuse", le dernier grand nu de Gustave Courbet, mis aux enchères en juin 2023 », France 3 Régions, 28 mars 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  5. Christine Rondot, « Vente aux enchères d'un Courbet controversé : le musée d'Orsay prend ses distances », L'Est républicain, (consulté le 17 juin 2023).
  6. Didier Rykner, « Orsay et Courbet », La Tribune de l'Art, 8 mai 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  7. « Art : polémique autour d'un nu de Courbet mis aux enchères », France Info, 3 juin 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  8. Sébastien Fernier, « Le Comité Courbet n’a pas vu La Grande Baigneuse ce tableau d’un nu présenté par Johann Naldi à la vente Rouillac », communiqué paru dans La Gazette Drouot du 21 avril 2023 et publié sur le site de l'Institut Gustave-Courbet le 31 mai 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  9. Vincent Noce, « Avis discordants sur le « plus grand nu de Courbet » », Le Quotidien de l'art, 22 mai 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  10. « Personne n’a levé la main : un tableau de Gustave Courbet retiré des enchères faute d’acheteur », Ouest-France, 4 juin 2023 (consulté le 17 juin 2023).
  11. Vincent Noce, « De Courbet aux arts incohérents, d’un mélodrame à l’autre », La Gazette Drouot, 15 juin 2023 (consulté le 17 juin 2023).

Bibliographie

  • Niklaus Manuel GĂĽdel, Gustave Courbet. Une enquĂŞte sur le paysage, Les Presses du rĂ©el, Dijon, 2019 (Ĺ“uvre illustrĂ©e, avec une notice de Niklaus-Manuel GĂĽdel), p. 149-151.
  • Diana Blome et Niklaus Manuel GĂĽdel, Courbet / Hodler : une rencontre, catalogue d’exposition, Notari, Genève, 2019 (Ĺ“uvre illustrĂ©e avec une notice de Thierry Savatier), no 124, p. 181.
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