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Fait divers

Le fait divers, orthographié aussi fait-divers (événements également surnommés « les chiens écrasés » en argot), est, en journalisme, un type d'événement qui n'est classable dans aucune des rubriques qui composent habituellement un média d'actualité (international, national, politique, économie, etc.)[1]. Par conséquent, les faits divers sont regroupés au sein d'une même rubrique, malgré l'absence de lien qui les unisse[2]. Il s'agit généralement d'événements tragiques, tels que les crimes, les accidents, les larcins énonçables en trois lignes.

Le fait-diversier est un journaliste qui tient la rubrique des faits divers.

En France

En 1887 l'affaire du triple assassinat de la rue Montaigne déclenche l'activité des rédactions d'une importante partie de la presse où une part importante y est consacré. Les journalistes sont en lutte avec les enquêteurs pour le contrôle de l’enquête judiciaire et les juristes sont mis sous pression par la population[3].

En France, la part des faits divers dans le traitement médiatique est en sensible hausse depuis les années 2000. Une enquête de l'Institut National de l'Audiovisuel fait état d'une augmentation de 73 % des faits divers dans les journaux télévisés en l'espace de 10 ans[4].

Si leur importance paraît souvent secondaire, les faits divers peuvent parfois avoir une portée plus large. C'est ainsi que l'affaire Paul Voise est régulièrement présentée comme ayant joué un rôle dans le résultat de l'élection présidentielle française de 2002.

Selon certains, les médias accorderaient une trop grande importance à la couverture des faits divers, en raison d'une attirance supposée du public pour ce type d'événements, et du bénéfice qui en découlerait en termes d'audience[5].

Certaines parutions sont spécialisées dans les faits divers : c'est par exemple le cas, en France, du magazine Le Nouveau Détective.

Critique

Critiques générales sur les faits divers

  • Sur le rapport qu'ils auraient avec d'autres thèmes d'information : « Le fait-divers fait diversion », phrase du sociologue Pierre Bourdieu[6] - [7].
  • Sur les faits divers de violence : « Depuis les annĂ©es 80, les faits divers ont fait un retour en force par le biais de la tĂ©lĂ©vision. » Ă  la question : « Quel type de prisme les faits divers offrent-ils pour saisir la sociĂ©tĂ©, en particulier la criminalitĂ© ? », il rĂ©pond « Un prisme totalement dĂ©formant, c'est bien le problème ! Il est normal que le dĂ©bat public s'interroge sur les faits qui sortent de l'ordinaire. L'avion s'est Ă©crasĂ©, pourquoi ce terrible accident alors mĂŞme que 99,9 % des avions dĂ©collent et atterrissent normalement ? Mais certains sujets comme le crime occasionnent beaucoup plus que cela. Loin de passer pour un accident de la vie quotidienne, l'Ă©rection du fait divers criminel en prioritĂ© de l'information le transforme en un fait de sociĂ©tĂ©. Il est promu au rang de symptĂ´me des dĂ©règlements de la vie sociale. Et lorsqu'il rencontre une ambiance gĂ©nĂ©rale de morositĂ© et d'inquiĂ©tude sur l'avenir, il devient le rĂ©vĂ©lateur d'une dĂ©cadence. Ainsi, le fait divers criminel n'occasionne pas simplement un discours sur la violence qui est insupportable, mais aussi sur la violence qui augmente, qui rajeunit… Ce qui pourtant est tout aussi faux que l'idĂ©e selon laquelle les avions risqueraient de plus en plus de s'Ă©craser. » Laurent Mucchielli, sociologue français spĂ©cialisĂ© en criminologie[8].

Pour Roland Barthes, il s'agit d'un art de masse, « servant à préserver au sein de la société contemporaine l'ambiguïté du rationnel et de l'irrationnel, de l'intelligible et de l'insondable », donnant des signes (ce qui rassure l'individu), de contenu incertain (ce qui l'irresponsabilise). Offrant une certaine culture qu'il emplit in extremis, dont le sens demeure muet[9].

Critiques des fait divers accidents de la route

Dans les années 1950, un accident de la route était considéré comme un fait divers dû au hasard par la presse régionale française, avant de devenir un acte se rappochant d'un acte criminel plus récemment[10].

Les fait divers présentent les accidents de la route comme un évènement sporadique sans lien avec la régularité de la mortalité routière: Dans les premières pages de la presse écrite ou dans les journaux télévisés, les faits divers rapportent des accidents extraordinaires, par leur gravité, le nombre ou le type de véhicule impliqué ou par leurs auteurs ou victimes. En réalité, les accidents de la route, même évitables, obéissent à une régularité statistique, pour la mortalité routière comme pour la distribution sociale[11].

Les faits divers ont pu présenter le risque routier comme lié à des mauvaises conditions météorologiques ou titrer « la route tue ». Toutefois, les faits divers présentent maintenant des causes concrètes des accidents de la route, notamment liés aux comportements individuels et à des déviance de conduite. L’individualisation des responsabilités induit une stigmatisation de populations à risque: « personnes âgés », « jeunes » et « nouveaux conducteurs », « routiers », « motards », « cyclistes » et une stigmatisation des comportements déviants: conduite sous l’emprise de l’alcool et du cannabis, conduite sans permis, participation à des rodéos[12].

Filmographie

Notes et références

  1. Définition de « fait divers » dans « Glossaire des termes de la presse écrite », sur le site du Clemi : « événement plus ou moins important qui ne relève ni de l'actualité mondiale, ni de la politique, ni de l'économie ».
  2. Définition de « fait divers », dans le Petit Robert : « événements du jour […] sans lien entre eux, faisant l'objet d'une rubrique dans les médias ».
  3. Chauvaud 2009.
  4. « En dix ans, le nombre de faits divers dans les JT a augmenté de 73 % », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  5. « Pourquoi les faits divers fascinent », rappel des faits du numéro du 7 mars 2003 de l'émission C dans l'air, sur le site de France 5, version archivée par Internet Archive.
  6. « Les Nouveaux Chiens de garde : Secrets de tournage », AlloCiné, 2012.
  7. Fiche sur Les Nouveaux Chiens de garde, L'Express Culture.
  8. Sylvain Bourmeau, « Les faits divers ont fait un retour en force par le biais de la télé », Libération,‎ (lire en ligne).
  9. Barthes 1964.
  10. Revue gabonaise d'histoire et archéologie N°2/2017 Les représentations du chauffard à travers les récits des accidents de la route dans la presse locale française : de la complaisance à la « criminalisation » (1955-2004)
  11. https://www.cairn.info/revue-actes-de-la-recherche-en-sciences-sociales-2010-4-page-38.htm#nn19
  12. Dominique Marchetti, Hugues Cunegatti (dir.) et Charles Suaud (dir.), L’État sur la route des médias. Le traitement du risque routier dans la presse française, La sécurité routière : enjeux publics et société civile. Une formation au radar, L’Harmattan, (ISBN 978-2-296-96260-6), p. 91-114 halshs-02379904
  13. Sébastien Homer, « Faits divers et fiction », L'Humanité,‎ (lire en ligne).

Annexes

Bibliographie

  • Roland Barthes, « Structures du fait divers », dans Essais, critiques, Paris, Seuil, coll. « Tel quel », (ISBN 2-02-001923-X, BNF 37362654, lire en ligne)
  • Anne-Claude Ambroise-Rendu, Petits rĂ©cits des dĂ©sordres ordinaires : Les Faits divers dans la presse française des dĂ©buts de la IIIe RĂ©publique Ă  la Grande Guerre, Paris, Seli Arslan, coll. « Histoire, cultures et sociĂ©tĂ©s », , 332 p. (ISBN 2-84276-102-2).
  • Anne-Claude Ambroise-Rendu Ambroise-Rendu, « Le suicide ou les silences de la chronique des faits divers », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 77-88 (lire en ligne).
  • Georges Auclair, Le Mana quotidien : Structures et fonctions de la chronique des faits divers, Paris, Anthropos, , 277 p.
  • Roland Barthes, Essais critiques, Paris, Seuil, coll. « Tel quel », , 273 p. (ISBN 2-02-001923-X), « Structure du fait divers », p. 188–196
  • NoĂ«lle Benhamou, « De l'influence du fait divers : les Chroniques et Contes de Maupassant », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 47-58 (lire en ligne).
  • Jean-Louis Cabanès, « Gustave Geffroy et l'apprentissage des faits divers », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 59-68 (lire en ligne).
  • Philippe DĂ©sormeaux, « Les assassins de Pierre Larousse : encyclopĂ©disme et fait divers », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 31-46 (lire en ligne).
  • Daniel Compère, « Faits divers et vulgarisation scientifique », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 69-76 (lire en ligne).
  • Laetitia Gonon, Le fait divers criminel dans la presse quotidienne française du XIXe siècle, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, coll. « Sciences du langage », , 328 p. (ISBN 978-2-87854-587-6, prĂ©sentation en ligne, lire en ligne).
  • Philippe Hamon, « Introduction. Fait divers et littĂ©rature », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 7-16 (lire en ligne).
  • Dominique Kalifa, L'encre et le sang : rĂ©cits de crimes et sociĂ©tĂ© Ă  la Belle Époque, Paris, Fayard, , 351 p. (ISBN 2-213-59513-5, prĂ©sentation en ligne), [prĂ©sentation en ligne], [prĂ©sentation en ligne].
  • Dominique Kalifa, « Faits divers en guerre (1870-1914) », Romantisme, no 97 « Le fait divers »,‎ , p. 89-102 (lire en ligne).
  • Marc Lits et Annick Dubied, Le Fait divers, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », , 127 p. (ISBN 2-13-049871-X).
  • Marine M'Sili, Le Fait divers en RĂ©publique : Histoire sociale de 1870 Ă  nos jours, Paris, CNRS Éditions, coll. « CNRS histoire », , 311 p. (ISBN 2-271-05747-7).
  • AndrĂ© Petitjean, « Les Faits divers : Polyphonie Ă©nonciative et hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© textuelle », La Langue française, no 74 « La typologie des discours »,‎ , p. 73-96 (lire en ligne).
  • FrĂ©dĂ©ric Chauvaud, « Le triple assassinat de la rue Montaigne : le sacre du fait divers », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, no 116,‎ (DOI https://doi.org/10.4000/abpo.141, lire en ligne)
  • Marc Bordigoni, Alain Miton, Faits divers : la manne des quotidiens, Marseille, BETEREM, 1994.
  • Roy Pinker, Faits divers et vies dĂ©viantes : XIXe et XXe siècles, Paris, CNRS Éditions, 2022, 312 p. (ISBN 978-2-271-14227-6)

Liens externes

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