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Eusèbe gallican

L'Eusèbe gallican (ou Eusèbe de Gaule, en latin Eusebius Gallicanus) est l'auteur fictif d'une collection de soixante-seize sermons religieux en latin constituĂ©e en Gaule pendant l'AntiquitĂ© tardive ou le Haut Moyen Ă‚ge[1]. Certains manuscrits donnent pour nom d'auteur un mystĂ©rieux « Eusèbe Â» (qui fut identifiĂ© dès le Moyen Ă‚ge avec Eusèbe d'Émèse), mais il est clair que nombre de ces sermons sont dus Ă  un ou plusieurs prĂŞcheurs actifs en Gaule au Ve siècle (avec des remaniements postĂ©rieurs). Le seul nom qui soit unanimement avancĂ© est celui de Fauste de Riez.

Eusèbe gallican
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Biographie
Activité

Ces sermons sont de types variés : certains sont des homélies festales, d'autres des commémorations de saints personnages comme Genès d'Arles, Honorat d'Arles, Maxime de Riez, d'autres traitent de questions morales ou de points de doctrine chrétienne. Dix sont adressés à des moines (formant un bloc, n° XXXV à XLIV). Le recueil a dû être constitué comme anthologie de sermons-modèles pour la formation des prêcheurs. Ces textes sont d'ailleurs peu originaux dans leurs thèmes, voire leurs formulations, et des passages identiques ou proches qui se retrouvent de l'un à l'autre. Certains se retrouvent dans des recueils de sermons attribués à Césaire d'Arles.

Le plus ancien manuscrit connu qui donne le recueil définitif est conservé à la Bibliothèque royale de Belgique (Ms. 1651-1652) et date du début du IXe siècle, ce qui donne un terminus ante quem pour la constitution de la collection entière. Mais par exemple un manuscrit plus ancien de la même bibliothèque (Ms. 9850-9852, copié à l'abbaye Saint-Médard de Soissons à la fin du VIIe siècle), donne les homélies ad monachos n° IV, V, VI et IX, avec un autre sermon qui a été complètement remanié pour former le début de l'homélie n° VII dans le recueil du IXe siècle.

L'unanimitĂ© règne sur le fait que l'Eusèbe gallican a fortement partie liĂ©e avec l'Ĺ“uvre de CĂ©saire d'Arles (grand sermonnaire du dĂ©but du VIe siècle, auteur de 238 sermons), mais les rapports entre les deux paraissent extrĂŞmement difficiles Ă  dĂ©mĂŞler : parfois c'est « Eusèbe Â» qui semble avoir influencĂ© CĂ©saire, parfois c'est l'inverse[2]. En tout cas certains textes du recueil eusĂ©bien, sous la forme dĂ©finitive qu'ils revĂŞtent au dĂ©but du IXe siècle, sont postĂ©rieurs Ă  CĂ©saire.

Selon une analyse dĂ©veloppĂ©e d'abord par Germain Morin en 1935, l'auteur originel de la plupart des sermons serait Fauste de Riez, et CĂ©saire d'Arles en aurait eu un recueil dĂ©jĂ  constituĂ© en sa possession. C'Ă©tait Ă©galement la position de l'abbĂ© Jean Leroy, auteur d'une thèse sur le sujet en 1954. Selon François Glorie, Ă©diteur du recueil dans la collection CCSL, les textes auraient Ă©tĂ© empruntĂ©s Ă  l'origine Ă  des auteurs variĂ©s de l'Église latine ancienne : Novatien, Cyprien de Carthage, ZĂ©non de VĂ©rone, Ambroise de Milan, Augustin d'Hippone, Hilaire d'Arles, Fauste de Riez, « Eusèbe Â», CĂ©saire d'Arles lui-mĂŞme, et d'autres. La compilation dĂ©finitive du recueil aurait eu lieu au VIIe ou VIIIe siècle. Selon la monographie plus rĂ©cente de L. K. Bailey, il y aurait une pluralitĂ© d'auteurs, mais gaulois et essentiellement de la seconde moitiĂ© du Ve siècle.

Les homélies pseudo-eusébiennes apparaissent dans pas moins de 477 manuscrits médiévaux conservés. Selon L. K. Bailey, elles ont été extrêmement répandues comme modèles pour les prédicateurs jusqu'au XIIIe siècle, époque à laquelle les ordres mendiants imposèrent un nouveau style de prêche.

Dans les manuscrits, les dix homélies ad monachos étaient souvent reproduites séparément, parfois sans nom d'auteur, ou attribuées tantôt à Fauste de Riez, tantôt à Césaire d'Arles, tantôt à Eusèbe d'Émèse. La première édition imprimée de la Renaissance concernait ces dix homélies, et retenait le troisième nom d'auteur : Divi Eusebii episcopi Emiseni Homiliæ decem ad monachos, veteris monastices sanctimonia atque eruditione spectabiles (Cologne, 1531).

À l'époque moderne, le recueil a été quelque peu perdu de vue par les érudits, peut-être éclipsé par l'œuvre plus vaste de Césaire d'Arles : l'Eusèbe gallican est même l'une des plus remarquables lacunes de la Patrologie Latine de Jacques Paul Migne[3].

Édition

  • François Glorie (Ă©d.), Eusebius Gallicanus. Collectio homiliarum. Sermones extravagantes, Corpus Christianorum, Series Latina 101, 101A et 101B, Brepols, Turnhout, 1970-71.
  • LĂ©onard-Alphonse Van Buchem (Ă©d.), L'homĂ©lie pseudo-eusĂ©bienne de PentecĂ´te, Nimègue, Drukkerij Gebr. Janssen, 1967[4].

Bibliographie

  • Germain Morin, « La collection gallicane dite d'Eusèbe d'Émèse et les problèmes qui s'y rattachent Â», Zeitschrift fĂĽr die neutestamentliche Wissenschaft, vol. 34, n° 1, , p. 92-115.
  • Jean Leroy, L'Ĺ“uvre oratoire de saint Fauste de Riez. La collection gallicane dite d'Eusèbe d'Émèse, thèse de doctorat de thĂ©ologie, UniversitĂ© de Strasbourg, 1954.
  • Lisa Kaaren Bailey, Christianity's Quiet Success : The Eusebius Gallicanus Sermon Collection and the Power of the Church in Late Antique Gaul, University of Notre Dame Press, 2010.

Notes et références

  1. Il ne faut pas confondre ce recueil avec celui qui est dit du « Pseudo-Eusèbe d'Alexandrie Â», collection d'homĂ©lies attribuĂ©e Ă©galement Ă  un « Eusèbe Â» non identifiĂ©, mais ces dernières Ă©taient originellement en grec et furent traduites en latin et dans des langues orientales, tandis que l'Eusèbe gallican est purement latin.
  2. Ainsi l'homélie VI du recueil eusébien paraît avoir servi de modèle au sermon CCVI de Césaire, mais inversement celui-ci semble avoir influencé l'homélie XXXIX d'Eusèbe (c'est-à-dire l'homélie IV ad monachos).
  3. Germain Morin, art. cit. : « Parmi les lacunes que n'ont pas su Ă©viter ceux qui, au siècle dernier, dressèrent le plan de la Patrologie Latine de Migne, il en est peu d'aussi regrettables que l'omission de la collection homilĂ©tique dite d'Eusèbe d'Émèse Â».
  4. L'attribution de cette homélie à Fauste de Riez est présentée par l'éditeur comme hors de doute.
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