Ensemble partiellement ordonné
En mathématiques, un ensemble partiellement ordonné (parfois appelé poset d'aprÚs l'anglais partially ordered set) formalise et généralise la notion intuitive d'ordre ou d'arrangement entre les éléments d'un ensemble. Un ensemble partiellement ordonné est un ensemble muni d'une relation d'ordre qui indique que pour certains couples d'éléments, l'un est plus petit que l'autre. Tous les éléments ne sont pas forcément comparables, contrairement au cas d'un ensemble muni d'un ordre total.
Si l'ensemble est fini, on dispose d'une représentation graphique de l'ensemble partiellement ordonné, le diagramme de Hasse, ce qui peut permettre de travailler plus aisément dessus. Si l'ensemble est infini, on peut dessiner une partie de son diagramme de Hasse.
DĂ©finition et exemples
DĂ©finition
Un ordre (ou ordre partiel) est une relation binaire sur un ensemble P qui est rĂ©flexive, antisymĂ©trique et transitive. Elle se note â€.
Les trois axiomes précédents se récrivent:
- a †a (réflexivité).
- Si a †b et b †a, alors a = b (anti-symétrie).
- Si a †b et b †c, alors a †c (transitivité).
Ce n'est donc pas nécessairement un ordre total.
Exemples
- L'ensemble des nombres entiers naturels, muni de la divisibilité est un ensemble partiellement ordonné infini.
- Un ensemble de personnes muni de la relation de la descendance gĂ©nĂ©alogique est un ensemble partiellement ordonnĂ©. Par exemple, deux sĆurs sont infĂ©rieures Ă leur mĂšre mais ne sont pas comparables entre elles.
- L'ensemble des parties d'un ensemble donné, muni de l'inclusion forme un ensemble partiellement ordonné. Si l'ensemble donné est fini, son ensemble des parties est fini (plus précisément pour , on a ). La figure ci-dessous représente le diagramme de Hasse d'un ensemble à 3 éléments.
- Pour prendre un cas concret (en effet, isomorphe) de lâexemple prĂ©cĂ©dent, un ensemble de personnes muni de la relation peut donner du sang pour forme un ensemble partiellement ordonnĂ© selon les systĂšmes ABO et RhĂ©sus. Les Ă©lĂ©ments x, y, et z dans lâexemple prĂ©cĂ©dent plus gĂ©nĂ©ral Ă©tant instantiĂ©s par les antigĂšnes A, B, et D (Rh+) de lâindividu. Par exemple, un individu de groupe O+ peut donner Ă un receveur de groupe B+, mais aucun des deux peut ni donner Ă ni recevoir dâun individu de groupe A-.
- L'ensemble des nombres complexes muni de la relation d'ordre suivante est partiellement ordonné : .
Par exemple, on ne peut pas comparer 1 et i. Cet ordre n'est pas compatible avec la structure de corps de .
- L'ensemble des fonctions de dans , muni de la relation d'ordre si , est un ensemble partiellement ordonné infini. Intuitivement, une fonction est plus petite qu'une autre si sa courbe est toujours en dessous de l'autre courbe. On peut généraliser cet exemple aux fonctions d'un ensemble X dans un ensemble partiellement ordonné P.
- L'ensemble des partitions d'un ensemble donné est partiellement ordonné, avec l'ordre donné par le raffinement des partitions : par définition, une partition est plus fine qu'une autre si elle fractionne les parties de l'autre en de plus petites parties.
- On peut munir l'ensemble des polynĂŽmes Ă n variables d'une relation d'ordre partiel. On commence par comparer les monĂŽmes Ă n variables via l'ordre lexicographique induit par (cet ordre lexicographique est total). On compare deux polynĂŽmes et en disant que est strictement plus petit que si tout monĂŽme non nul de est strictement plus petit que tout monĂŽme non nul de . Cette relation d'ordre sur les polynĂŽmes est partielle.
Spécificités des ensembles partiellement ordonnés
Plus grand élément, élément maximal et borne supérieure
Soit P un ensemble partiellement ordonné :
- Un Ă©lĂ©ment a de P est un plus grand Ă©lĂ©ment si pour tout Ă©lĂ©ment b de P, b †a. Un ensemble partiellement ordonnĂ© ne peut avoir quâun plus grand Ă©lĂ©ment.
- Un Ă©lĂ©ment a de P est un Ă©lĂ©ment maximal sâil nâexiste pas dâĂ©lĂ©ment b de P tel que b > a. Si P a un plus grand Ă©lĂ©ment, il est lâunique Ă©lĂ©ment maximal de P.
- Pour un sous-ensemble A de P, lâĂ©lĂ©ment x de P est une borne supĂ©rieure de A si a †x pour tout Ă©lĂ©ment a de A. x nâappartient pas nĂ©cessairement Ă A. Le plus grand Ă©lĂ©ment de P, sâil existe, est une borne supĂ©rieure de P.
Exemple : considĂ©rons lâensemble des entiers positifs, ordonnĂ© par la division. 1 est le plus petit Ă©lĂ©ment. En revanche cet ensemble ne possĂšde pas de plus grand Ă©lĂ©ment. Si on excluait maintenant lâĂ©lĂ©ment 1, l'ensemble partiellement ordonnĂ© nâaurait plus de plus petit Ă©lĂ©ment mais une infinitĂ© dâĂ©lĂ©ments minimaux : les nombres premiers.
Si E est un ensemble partiellement ordonné, il n'existe pas forcément de plus grand élément. Si E est un ensemble partiellement ordonné fini, il contiendra au moins un élément maximal. Si E est un ensemble inductif infini, on peut utiliser le lemme de Zorn pour avoir l'existence d'un élément maximal.
Certaines conditions sur les plus grands éléments et plus petits éléments d'un ensemble partiellement ordonné conduisent à la définition d'un treillis.
Par le mĂȘme raisonnement on obtient le plus petit Ă©lĂ©ment, les Ă©lĂ©ments minimaux et la borne infĂ©rieure.
Comparabilité
Si a †b ou a b, alors a et b sont comparables. Dans le diagramme de Hasse ci-dessus, {x} et {x,y,z} sont comparables, tandis que {x} et {y} ne le sont pas. Un ordre partiel dans lequel toute paire dâĂ©lĂ©ments est comparable est appelĂ©e un ordre total, et lâensemble est appelĂ© une chaĂźne.Un ensemble dans lequel on ne peut trouver de paire comparable sâappelle une antichaĂźne (par exemple lâensemble {{x}, {y}, {z}} sur la figure ci-dessus)
Recouvrement
On dit quâun Ă©lĂ©ment a est recouvert par un Ă©lĂ©ment b, ce qui sâĂ©crit a<:b, si a est strictement infĂ©rieur Ă b et quâil nâexiste pas dâĂ©lĂ©ment c sâintercalant entre les deux. Par exemple, {x} est recouvert par {x,z} dans la figure ci-dessus mais pas par {x,y,z}.
Liens avec les complexes simpliciaux
Une classe importante de complexes simpliciaux provient d'ensembles partiellement ordonnés finis. On définit le complexe d'ordre D(P) d'un ensemble partiellement ordonné fini P comme étant l'ensemble des chaßnes de P. Le complexe d'ordre est trivialement un complexe simplicial.
L'étude du ensemble partiellement ordonné donne des informations sur son complexe d'ordre, et donc il est intéressant d'étudier un complexe simplicial comme le complexe d'ordre d'un ensemble partiellement ordonné.
Opération sur les ensembles partiellement ordonnés
Produit cartésien ensemble partiellement ordonné
Dans le but de supprimer la multiplicité des relations d'ordre possibles lors ensemble partiellement ordonné, on peut définir trois rÚgles différentes:
- L'ordre lexicographique: (a,b) †(c,d) si a < c ou (a = c et b †d);
- L'ordre multiplicatif: (a,b) †(c,d) si a †c et b †d;
- La clÎture réflexive du produit direct: (a,b) †(c,d) si (a < c et b < d) ou (a = c et b = d).
Toutes ces rÚgles s'appliquent également pour des produits de plus de deux ensembles partiellement ordonnés.
Finitude locale
Un ensemble partiellement ordonné E est dit localement fini si pour tous , l'intervalle est fini. Cette hypothÚse permet de généraliser la formule d'inversion de Möbius.
Références
(en) Richard P. Stanley, Enumerative Combinatorics, vol. 1 [détail des éditions] (présentation en ligne)
Voir aussi
- Diagramme de Hasse
- Idéal de Frink (en)
- Multi-arbre
- Relation d'ordre
- Treillis (ensemble ordonné)