Enjo kĆsai
Enjo kĆsai (æŽć©äș€é), parfois abrĂ©gĂ© en enkĆ, est un mot japonais signifiant « (faire) connaissance pour aider » ou « sortie pour soutenir ». C'est une pratique japonaise oĂč des adolescentes, surtout lycĂ©ennes, sont payĂ©es par des hommes plus ĂągĂ©s pour les accompagner (escort girl) et parfois pour se prostituer.
La pratique de l'enjo kosai est d'autant plus courante au Japon que l'Ăąge de la majoritĂ© sexuelle y est de 13 ans[1]. Cependant, la plupart des observateurs, notamment Ă©trangers, regardent cela comme une forme de prostitution impliquant des mineures, mĂȘme si, dans bien des cas, il n'y a pas d'Ă©changes de baisers ou plusieurs couples ne se tiennent pas par la main. La poursuite pour activitĂ© sexuelle (rĂ©munĂ©rĂ©e) serait trĂšs rare.
Histoire
Le rĂ©seau social entourant l'enjo kĆsai est complexe. Ă l'origine, la plupart des contacts initiaux Ă©taient faits par l'intermĂ©diaire des telekuras (telephone clubs), oĂč les clients paient le droit d'entrer dans une cabine tĂ©lĂ©phonique (environ 1 000 yens) d'oĂč ils peuvent appeler un centre qui rĂ©percute l'appel sur le tĂ©lĂ©phone cellulaire d'une lycĂ©enne. Celle-ci rappelle Ă son tour le client pour convenir d'un rendez-vous et de la nature des relations qu'auront les partenaires le temps d'une soirĂ©e. De nos jours, les telekuras se contentent de fournir une liste de numĂ©ros de tĂ©lĂ©phones portables que leurs clients peuvent appeler directement.
L'enjo kĆsai est liĂ© Ă la sous-culture de consommation Kogal. Il est apparu Ă la fin du boom Ă©conomique des annĂ©es 1980, date Ă partir de laquelle la prostitution des lycĂ©ennes sort de la marginalitĂ© sous l'impulsion d'hommes d'affaires qui voient lĂ un nouveau marchĂ© lucratif. Ils mettent en place le systĂšme des telekuras et empochent ainsi des millions de yens.
Bien entendu les hommes d'affaires font leur publicité à grand frais distribuant des mouchoirs avec des numéros de telekuras, apposant des affichettes et des publicités sur les parois des cabines téléphoniques publiques, principalement aux abords des lycées, avec des listes de numéros gratuits à appeler ou vantant les mérites d'un argent facilement gagné. Harcelées de publicité, éblouies par l'appùt du gain, 30 % des lycéennes se laissent tenter et appellent quitte à ne pas donner suite ultérieurement.
De nombreux observateurs pensent qu'il a Ă©tĂ© une façon pour les jeunes filles de prĂ©server le style de vie consumĂ©riste de cette Ă©poque, en dĂ©pit de la situation Ă©conomique plus difficile de leur famille. D'autres, en particulier dans lâ« establishment » acadĂ©mique japonais, voient l'enjo kĆsai comme un rite de passage qui s'est naturellement dĂ©veloppĂ© au sein de la sociĂ©tĂ© capitaliste contemporaine du Japon.
Chiffres
Selon des estimations variĂ©es, plus de 80 % des lycĂ©ennes pratiqueraient l'enjo kĆsai, avec ou sans acte sexuel[2].
LĂ©gislation
La prostitution a Ă©tĂ© rendue illĂ©gale au Japon par la loi du , mais cette loi n'interdit que la tarification du coĂŻt vaginal. L'enjo kĆsai ne tombe ainsi pas sous cette interdiction de la prostitution, sauf si le client paye expressĂ©ment la jeune fille pour un coĂŻt (ce qui est trĂšs rare, Ă©tant donnĂ© la nature indirecte des transactions et la recherche d'autres pratiques sexuelles ou Ă©rotiques). En outre, du fait que la majoritĂ© sexuelle au Japon est plus basse que dans d'autres pays, variant de 13 Ă 17 ans selon la juridiction[3], les clients ne se rendent pas coupables non plus d'abus sexuel de mineurs.
En dĂ©pit de l'ambivalence des lĂ©gislations et des gouvernements, l'enjo kĆsai a Ă©tĂ© dĂ©noncĂ© par les mĂ©dias japonais. Sous la pression des mĂ©dias et de l'opinion publique, une nouvelle loi a ainsi Ă©tĂ© adoptĂ©e en 1997. Elle interdit d'apposer les affichettes Ă moins de 100 mĂštres d'un lycĂ©e ainsi que les relations sexuelles payantes avec une personne mineure de 18 ans. Un prĂȘtre bouddhiste de 44 ans, Kenichi Itani, est le premier homme condamnĂ© au nom de cette loi[4]. La crainte des sanctions judiciaires a un effet dissuasif sur les adultes et entraĂźne la disparition progressive des telekuras.
Dans la fiction
Les films Bounce Ko Gals (Baunsu ko gaurusu) (1997) du cinĂ©aste Masato Harada (qui prend place dans le monde des burusera - magasins vendant des culottes usagĂ©es - et des kogals) et Love and Pop (1998) d'Hideaki Anno traitent tous les deux de lâenjo kĆsai. La cĂ©lĂšbre sĂ©rie animĂ©e Great Teacher Onizuka (1998) parle Ă©galement de cette pratique sur 2 Ă©pisodes. Mogi Natsuki, personnage de l'anime Initial D, pratique l'enjo kĆsai dans la premiĂšre phase. Aux Ătats-Unis et au Canada, ce fait a Ă©tĂ© censurĂ© en transformant son « patron » en « oncle ».
Notes et références
- Japan -- Age of Consent pour plus de détails.
- (en) Fukutomi Mamoru, « An Analytical Study on the Causes of and Attitudes Toward âEnjo KĆsaiâ among Female High School Students in Japan », Professor, Tokyo Gakugei University, Asian Womenâs Fund,â , p. 75â76
- La loi sur la majorité sexuelle et la prostitution est trÚs complexe. Elle tend à protéger les personnes de moins de 18 ans. Se référer à la page Japan -- Age of Consent pour plus de détails.
- Kenichi Itani avait proposé 24 000 yens à une adolescente de 17 ans pour avoir une relation sexuelle avec lui. La jeune fille l'a dénoncé
Article connexe
Bibliographie
- (fr) AgnĂšs Giard, L'imaginaire Ă©rotique au Japon (ISBN 978-2-226-16676-0);
Liens externes
- (en) Article sur About.com
- (en) Japan -- Age of Consent
- (fr) Majorité sexuelle sur le continent asiatique
- (en) Constantine, Peter. Japan's Sex Trade. Tokyo: Yen Books, 1994. (ISBN 4-900737-00-3). Une bonne référence concernant les lois japonaises contre la prostitution.
- (en) « Dictionnaire des termes sexuels japonais »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?) (consulté le ).