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Efflux

En biologie, l'efflux est un mécanisme par lequel les cellules rejettent à l'extérieur des composés toxiques : antibiotiques, métaux lourds, drogues... L'efflux est un mécanisme de transport actif, énergie-dépendant, assuré par des protéines transmembranaires appelées pompes d'efflux.

TolC
Structure de TolC, protéine de la membrane externe d'Escherichia coli constituant d'une pompe d'efflux tripartite.

On trouve des nombreux systèmes d'efflux chez les bactéries, mais aussi chez les cellules eucaryotes. Les mécanismes d'efflux contribuent entre autres à l'émergence de résistances à différents traitements pharmacologiques comme la résistance aux antibiotiques[1] ou résistance aux chimiothérapies anticancéreuses. Le spectre large de certaines pompes d'efflux peut conduire à l'apparition de phénotypes de multirésistance.

Efflux chez les bactéries

On trouve des systèmes d'efflux chez la plupart des bactéries. Il existe différents types de pompes d'efflux qui se différencient par leur structure, leur organisation dans la membrane, la source d'énergie utilisée pour le pompage et les molécules qu'elles effluent[2]. On les classe en cinq familles[3] :

  • La famille RND (RĂ©sistance-Nodulation-Division), spĂ©cifique des bactĂ©ries Ă  Gram nĂ©gatif. Ces pompes traversent les deux membranes de ces bactĂ©ries au moyen d'un assemblage tripartites : un Ă©tage dans la membrane interne et un Ă©tage dans la membrane externe, reliĂ©s par un Ă©tage pĂ©riplasmique. Les protĂ©ines de cette famille sont largement impliquĂ©es dans l'efflux des antibiotiques. Leur source d'Ă©nergie est le gradient de proton Ă  travers la membrane[3].
  • Les transporteurs ABC (ATP-binding cassette). Il s'agit d'une très grande famille de pompes prĂ©sentes dans tout le Vivant qui utilisent l'hydrolyse de l'ATP comme source d'Ă©nergie pour assurer le transport.
  • La famille MFS (Major facilitator superfamily), reprĂ©sentĂ©e chez toutes les espèces vivantes, comporte des transporteurs variĂ©s dont certains sont spĂ©cialisĂ©s dans l'efflux de drogues[4]. Ces protĂ©ines comportent 12 ou 14 hĂ©lices transmembranaires et sont des cotransporteurs couplĂ©s au gradient de protons Ă  travers la membrane[3].
  • La famille SMR (Small multidrug resistance). Ses transporteurs sont gĂ©nĂ©ralement composĂ©s de 100 Ă  200 rĂ©sidus d'acides aminĂ©s et 4 hĂ©lices trans-membranaires. Ils fonctionnent gĂ©nĂ©ralement comme des homodimères[5]. Certains transporteurs SMR sont composĂ©s de deux sous-unitĂ©s diffĂ©rentes mais homologues. Cependant, la structure et la topologie exacte de ses protĂ©ines sont encore sujet Ă  controverse[6].
  • La famille MATE (Multidrug and toxic compound extrusion). Elles se retrouvent dans les 3 clades des ĂŞtres vivants (bactĂ©ries, archĂ©es et eucaryotes). Elles permettent d'exporter des cations endogènes, des substances lipophiles ou encore des xĂ©nobiotiques endogènes[6]. Il s'agit de la famille caractĂ©risĂ©e le plus rĂ©cemment parmi les 5 familles connues. Pour le moment, une vingtaine de transporteurs MATE ont Ă©tĂ© caractĂ©risĂ©s[6].

Importance dans la résistance bactérienne

Ce système d'efflux permet également aux bactéries de rejeter les antibiotiques dans leur environnement, ce qui en fait un facteur de résistance important. Il y a plusieurs facteurs qui expliquent l'importance de ces pompes dans le développement de résistances bactériennes :

  • Les bactĂ©ries sont capables d'exprimer plusieurs pompes diffĂ©rentes sur leur membrane. Le gĂ©nome d'Escherichia coli contient par exemple des gènes codant trois pompes RND, quatre pompes MFS, une pompe SMR et une pompe MATE. Chacune de ces pompes rejette un ou plusieurs types de molĂ©cules diffĂ©rentes.
  • Certaines pompes sont spĂ©cifiques Ă  un type de substrat, mais d'autres peuvent effluer plusieurs types de composĂ©s diffĂ©rents[7], comme la pompe AcrAB-TolC[8], ce qui permet un spectre de rĂ©sistance plus large tout en diminuant le nombre de gènes nĂ©cessaires et la quantitĂ© d'Ă©nergie dĂ©pensĂ©e.
  • Les gènes codants les pompes d'efflux se retrouvent sur les chromosomes et/ou les plasmides bactĂ©riens. Dans le cas oĂą le gène se retrouve sur un chromosome, un mĂ©canisme de sĂ©lection naturelle peut se mettre en place et provoquer l'apparition de mutations qui surexpriment ces gènes, permettant le dĂ©veloppement de rĂ©sistance[9]. Dans le cas oĂą le gène se retrouve sur des plasmides, il leur devient alors Ă©galement possible de propager ce gène de rĂ©sistance Ă  travers une population bactĂ©rienne[10].
  • Les pompes d'efflux sont Ă©galement impliquĂ©es dans la formation des biofilms[11], eux-mĂŞmes impliquĂ©s dans la rĂ©sistance aux antibiotiques[12].

De nouvelles molécules inhibitrices de pompes d'efflux sont actuellement en développement. Les administrer en combinaison avec un antibiotique normalement efflué par ces pompes permettrait de restaurer l'activité de cet antibiotique et ainsi de limiter la résistance bactérienne[13] - [14].

Efflux chez les eucaryotes

Le principal système d'efflux chez l'homme est la glycoprotéine P, découverte en 1976 par Juliano et Ling[15], qui appartient à la famille des transporteurs ABC. Ils permettent de moduler l'accumulation d'agents antimicrobiens dans les cellules phagocytaires et jouent un rôle important dans le transport transépithélial, l'élimination de la bile des hépatocytes, le fonctionnement des barrières sanguines et placentaires, ainsi que l’excrétion rénale de toxines[16]. Ses transporteurs sont l'une des causes majeures de la résistances des molécules anticancéreuses des cellules eucaryotes.

Notes et références

  1. Vincent Cattoir, « Pompes d’efflux et résistance aux antibiotiques chez les bactéries », Pathologie Biologie, vol. 52, no 10,‎ , p. 607–616 (DOI 10.1016/j.patbio.2004.09.001, lire en ligne, consulté le )
  2. Keith Poole, « Efflux pumps as antimicrobial resistance mechanisms », Annals of Medicine, vol. 39, no 3,‎ , p. 162–176 (ISSN 0785-3890, PMID 17457715, DOI 10.1080/07853890701195262, lire en ligne, consulté le )
  3. Monique Putman, Hendrik W. van Veen et Wil N. Konings, « Molecular Properties of Bacterial Multidrug Transporters », Microbiology and Molecular Biology Reviews, vol. 64, no 4,‎ , p. 672–693 (ISSN 1092-2172, PMID 11104814, PMCID 99009, lire en ligne, consulté le )
  4. M. D. Marger et M. H. Saier, « A major superfamily of transmembrane facilitators that catalyse uniport, symport and antiport », Trends in Biochemical Sciences, vol. 18, no 1,‎ , p. 13–20 (ISSN 0968-0004, PMID 8438231, lire en ligne, consulté le )
  5. Dijun Du, Hendrik W van Veen, Satoshi Murakami et Klaas M Pos, « Structure, mechanism and cooperation of bacterial multidrug transporters », Current Opinion in Structural Biology, vol. 33,‎ , p. 76–91 (ISSN 0959-440X, DOI 10.1016/j.sbi.2015.07.015, lire en ligne, consulté le )
  6. « Scopus preview - Scopus - Welcome to Scopus », sur www.scopus.com (consulté le )
  7. (en) L. J. V. Piddock et M. A. Webber, « The importance of efflux pumps in bacterial antibiotic resistance », Journal of Antimicrobial Chemotherapy, vol. 51, no 1,‎ , p. 9–11 (ISSN 0305-7453, DOI 10.1093/jac/dkg050, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Ben F. Luisi, Wah Chiu, Henrietta Venter et Thelma Ohene-Agyei, « Structure of the AcrAB–TolC multidrug efflux pump », Nature, vol. 509, no 7501,‎ , p. 512–515 (ISSN 1476-4687, DOI 10.1038/nature13205, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) Siham Berra, « The overexpression of the efflux pump Tpo1 leads to the bleomycin resistance in Saccharomyces cerevisiae », Université de Montréal (Thèse),‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. (en) N. Atac, O. Kurt-Azap, I. Dolapci et A. Yesilkaya, « The Role of AcrAB–TolC Efflux Pumps on Quinolone Resistance of E. coli ST131 », Current Microbiology, vol. 75, no 12,‎ , p. 1661–1666 (ISSN 1432-0991, DOI 10.1007/s00284-018-1577-y, lire en ligne, consulté le )
  11. Ilyas Alav, J Mark Sutton et Khondaker Miraz Rahman, « Role of bacterial efflux pumps in biofilm formation », Journal of Antimicrobial Chemotherapy, vol. 73, no 8,‎ , p. 2003–2020 (ISSN 0305-7453, DOI 10.1093/jac/dky042, lire en ligne, consulté le )
  12. Sara M. Soto, « Role of efflux pumps in the antibiotic resistance of bacteria embedded in a biofilm », Virulence, vol. 4, no 3,‎ , p. 223–229 (ISSN 2150-5594, PMID 23380871, PMCID PMCPMC3711980, DOI 10.4161/viru.23724, lire en ligne, consulté le )
  13. (en) Xian-Zhi Li, « The challenge of efflux-mediated antibiotic resistance in Gram-negative bacteria », Clinical Microbiology Reviews,‎ , p. 337-418 (lire en ligne)
  14. Momen Askoura, Walid Mottawea, Turki Abujamel et Ibrahim Taher, « Efflux pump inhibitors (EPIs) as new antimicrobial agents against Pseudomonas aeruginosa », The Libyan Journal of Medicine, vol. 6,‎ (ISSN 1993-2820, PMID 21594004, PMCID PMCPMC3096568, DOI 10.3402/ljm.v6i0.5870, lire en ligne, consulté le )
  15. R. L. Juliano et V. Ling, « A surface glycoprotein modulating drug permeability in Chinese hamster ovary cell mutants », Biochimica Et Biophysica Acta, vol. 455, no 1,‎ , p. 152–162 (ISSN 0006-3002, PMID 990323, lire en ligne, consulté le )
  16. PO Ughachukwu et PC Unekwe, « Efflux Pump-Mediated Resistance in Chemotherapy », Annals of Medical and Health Sciences Research, vol. 2, no 2,‎ , p. 191–198 (ISSN 2141-9248, PMID 23439914, PMCID PMCPMC3573517, DOI 10.4103/2141-9248.105671, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

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